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« l'abondance du don de justice1, » qui rend nos ames toutes éclatantes; d'où il résulte clairement que Dieu lave, et ensuite qu'il justifie par l'infusion de la grace?

Mais expliquons plus amplement par les Ecritures les trois points que nous avons proposés, qui renversent toute la doctrine de nos adversaires; et pour nous acquitter de notre promesse, montrons dans la suite du même discours, et la gloire du Fils de Dieu très-bien établie dans la créance que nous professons, et la témérité de nos adversaires qui l'accusent de nouveauté.

Premièrement nous disons ainsi. L'action par laquelle Dieu nous justifie ne peut pas être simplement un acte de juge. Car le juge agissant seulement en juge n'ôte pas le péché du coupable. Ausşi est-ce un des principes de nos adversaires, que les péchés demeurent en nous lors même que nous sommes justifiés . Toutefois nous apprenons par les Ecritures que Dieu ôte les péchés en justifiant. Donc la justification du pécheur n'est pas seulement un acte de juge. Toute la force de ce raisonnement consiste en ce point, que Dieu en justifiant ôte les péchés, qui est le premier que nous devons éclaircir.

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Pour entendre solidement cette vérité, observons que la rémis- Que la sion des péchés est l'un des premiers articles de l'alliance que justitianDieu a contractée avec nous par Notre-Seigneur Jésus-Christ. te e C'est pourquoi l'Ecriture divine nous exprime cette grace en plusieurs façons, afin qu'elle entre en nos cœurs plus profondément. Elle dit que Dieu oublie les péchés, qu'il ne les impute point, qu'il les couvre; elle dit aussi qu'il les lave et qu'il les efface, qu'il les éloigne de nous et qu'il les détruit. Et encore que toutes ces façons de parler nous expriment la rémission des péchés, les unes signifient ce bienfait plus parfaitement que les autres; tellement que pour en comprendre toute l'étendue, il faut nécessairement le considérer dans tous les passages conférés ensemble, et non pas en chacun d'eux pris séparément.

Ce principe si certain, si indubitable, découvre le mauvais pro

1 Rom., V, 17. - 2 « L'Apôtre dit que nous sommes lavés des péchés, en tant qu'ils ne nous sont point imputés : et nous savons que ce qui ne nous est point imputé ne laisse point d'être en nous. » Ferry, Désesp. de la Trad., ch. IX.

les ôte.

Senti

ment de

cédé de nos adversaires. Car d'autant qu'ils voient en quelques endroits que la rémission nous est proposée en ce que nos péchés sont couverts, et ne nous sont pas imputés, ils s'arrêtent à cette seule façon de parler, à laquelle il falloit joindre les autres pour avoir la définition tout entière. Que s'ils les avoient bien examinées, au lieu de quelques passages de l'Ecriture qui disent que nos péchés sont couverts, ils auroient trouvé les Livres sacrés pleins de textes qui témoignent qu'ils ne sont plus. Ils auroient entendu David qui publie, « qu'autant que le levant est loin du couchant, autant Dieu éloigne de nous nos iniquités 1; » le prophète Michée leur auroit appris que « Dieu jette nos péchés au fond de la mer ; » ils auroient ouï la voix de Dieu même parlant en son prophète Isaïe : « C'est moi, c'est moi, dit-il, qui efface tes péchés à cause de moi3; » le Psalmiste les auroit encore assurés que « si Dieu le lave, il sera blanchi comme neige *: » enfin tout le Nouveau Testament leur auroit prêché que « nos péchés sont lavés au sang de l'Agneau 5. » Certes nous ne pouvons pas faire cette injure à Dieu, que de croire que ce qu'il éloigne, demeure; que ce qu'il efface, soit encore en nous; que les ordures qu'il lave, ne soient point ôtées. Et en effet laver une ordure ce n'est point la couvrir, mais la nettoyer: d'autant plus que Dieu y emploie, non le sang des taureaux et des boucs, mais le sang innocent de son propre Fils, lequel étant infiniment pur, « nettoie notre conscience des œuvres de mort, » comme l'apôtre saint Paul l'enseigne aux Hébreux. Ainsi qui pèsera bien ces passages, il dira que selon la sainte Ecriture, Dieu pardonne les péchés en les détruisant; qu'il ne les impute point, parce qu'il les lave; qu'il les couvre, à cause qu'en les effaçant, il fait qu'ils ne paroissent plus à sa vue, c'està-dire qu'ils ne sont plus.

De là vient que saint Augustin répondant aux pélagiens, qui saint Au- lui objectoient que le baptême selon sa doctrine« ne donnoit pas gustin la rémission de tous les péchés et qu'il ne les ôtoit pas, mais qu'il matière, les rasoit, comme on rase les cheveux, disoient-ils, dont la racine convoi demeure en la tête; » soutient « qu'il n'y a que les infidèles qui

sur cette

et que la

1 Psal. CII, 12. -Mich., VII, 19. — 3 Isa., XLIII, 25. —Psal. L, 5. — Apoc., • Hebr., IX, 14.

I, 5.

point pé

sés.

osent assurer une telle chose, et nier que le baptême OTE LES PÉ- tise n'est CHÉS '. » Et encore qu'il soit celui de tous les docteurs qui a sans ché dans doute. le mieux entendu les langueurs et les maladies de notre les bapti nature, ensuite du principe qu'il a posé, que la grace du baptême ôte les péchés, il parle ainsi de la convoitise, combattant d'une même force les hérétiques pélagiens et les calvinistes « Bien qu'elle soit nommée péché, ce n'est pas, dit-il, QU'ELLE SOIT PÉCHÉ : mais elle est ainsi appelée, parce qu'elle est faite par le péché; comme en voyant l'écriture d'un homme, on l'appelle souvent sa main, parce que c'est la main qui l'a faite 2. » Et ce grand homme passe si avant, qu'il ne veut pas même que la convoitise soit au nombre de ces péchés pour lesquels nous disons tous les jours: « Remettez-nous nos dettes 3. » Ce qui montre combien il est convaincu que la grace justifiante ôte les péchés. Car c'est en conséquence de cette doctrine qu'il enseigne positivement que la convoitise n'est pas un péché dans les baptisés, parce que si elle étoit un péché en eux, il s'ensuivroit que les péchés ne sont point ôtés, puisque la convoitise demeure. Il me seroit aisé de produire beaucoup d'autres passages de saint Augustin non moins formels ni moins décisifs : mais celui-ci doit suffire aux pieux lecteurs ; d'autant plus que le sieur Ferry au chapitre I de son Désespoir, bien qu'il combatte notre créance par l'autorité de saint Augustin, ne laisse pas néanmoins de dire que selon la doctrine de ce grand homme, « la convoitise n'est plus après le baptême, quant à la coulpe, quant à la condamnation, à l'imputation, mais qu'elle est en effet. » D'où il s'ensuit manifestement que la convoitise n'ayant plus de coulpe, elle n'a plus aussi de péché, parce que le péché, comme chacun sait, consiste essentiellement en la coulpe.

2

1 « Quis hoc adversùs Pelagianos nisi infidelis affirmet? Dicimus ergo baptisma dare omnium indulgentiam peccatorum, et auferre crimina, non radere. » Cont. duas Epist. Pelag., lib. I, cap. XII, n. 20. «Etiamsi vocatur peccatum, non utiquè quia peccatum est, sed quia peccato facta est, sic vocatur; sicut scriptura cujusque manus dicitur, quia manus eam fecerit. » Ibid., n. 27. — 3 « Nec propter ipsam dicunt in oratione baptizati: Dimitte nobis, » etc. Idem.

CHAPITRE V.

Que les péchés sont détruits dans les justes, bien qu'il n'y ait point de justes qui ne soient pécheurs.

Je sais que nos adversaires seront étonnés de ce que l'Eglise catholique enseigne que Dieu ôte nos péchés, quand il justifie, puisqu'elle confesse d'ailleurs qu'il n'y a aucun homme vivant qui ne soit pécheur; ils trouvent de la contrariété dans cette doctrine; mais c'est ici qu'il faut leur faire paroître l'admirable économie de la grace par laquelle nous sommes justifiés.

Il y a dans les saintes Lettres une distinction de péchés trèsconsidérable, qu'il est nécessaire que nous remarquions.

Le disciple bien-aimé prêche : « Si quelqu'un dit qu'il ne pèche pas, il se trompe, et la vérité n'est pas en lui 1. » Par conséquent il y a des péchés dans lesquels peuvent tomber les plus justes, et qui ne nous séparent pas d'avec Dieu.

Mais d'autre part l'apôtre saint Paul parle de certains péchés capitaux dont il prononce la condamnation en ces termes : « Ceux qui les feront, nous dit-il, ne posséderont pas le royaume de Dieu 2. » Il y a donc de certains péchés qui rompent notre union avec Dieu, et nous ferment l'entrée du ciel.

Que les péchés de ce dernier genre soient entièrement effacés dans l'ame des justes, l'Apôtre le décide sans aucun doute. Car après avoir fait le dénombrement de ceux qui n'ont point de part avec Dieu, des voleurs, des injustes, des impudiques, des ivrognes, des médisans et des autres, il ajoute incontinent ces paroles qu'il adresse aux fidèles Corinthiens : « Quelques-uns de vous, dit-il, ont été ces choses: mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur JésusChrist, et par l'Esprit de notre Dieu . » Certes lorsque saint Paul parle de la sorte, c'est de même que s'il disoit : Vous avez été ces choses, mais maintenant vous n'êtes plus tels. Où je demande à nos adversaires: Est-ce que Dieu ne les répute pas tels, ou bien qu'effectivement ils ne sont pas tels? Mais l'Apôtre en disant : 1 I Joan., I, 8. - 21 Cor., VI, 9.- 3 Ibid., 11.

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Vous l'avez été, fait entendre assez clairement qu'ils ne le sont plus. Et d'où vient qu'ils ne le sont plus? « Vous avez été lavés, poursuit-il, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés. » Donc laver, sanctifier et justifier, ce n'est pas déclarer seulement que Dieu ne nous impute plus ce que nous étions; c'est faire que nous ne sommes plus ce que nous étions. Ce n'est pas prononcer seulement que nous ne serons pas condamnés pour les crimes dont notre conscience est souillée; c'est faire que notre conscience n'en soit plus souillée; ce n'est pas seulement nous réputer nets, nous réputer saints, nous réputer justes; c'est nous faire nets, nous faire saints et nous faire justes.

Il est donc vrai ce que dit l'Apôtre, que les injustes, les homicides et les adultères n'entrent pas au royaume de Dieu. Ce n'est pas que nous ne sachions que plusieurs y entrent qui avoient été homicides; mais ils n'y entrent pas homicides. Ils ont été lavés, dit l'Apôtre, ils ont été sanctifiés et justifiés. Leur injustice ne se trouve plus, parce qu'elle a été effacée par un Esprit infiniment saint, et par un sang infiniment pur.

chés vé

Voilà ce que nous croyons de ces grands péchés qui ne peuvent Des péêtre commis par les justes, sans leur faire perdre cette qualité. niels Pour les autres péchés dont il est écrit : « Si quelqu'un dit qu'il ne pèche pas il se trompe, » qui sont ceux que nous appelons véniels, il est vrai que l'homme juste en fait tous les jours: mais il n'est pas moins véritable qu'il peut en être purgé tous les jours. Il a de ces péchés, je ne le nie pas; mais il a aussi le sang du Sauveur, il a les sacremens de l'Eglise et le Saint-Esprit qui les lave. Il a les gémissemens de la pénitence, et le sacrifice de cœur contrit, et le remède des aumônes, et la foi vivante, par laquelle « Dieu purifie les cœurs, » comme dit l'apôtre saint Paul'. C'est ce qu'enseigne admirablement le grand saint Augustin dans cette savante Epitre à Hilaire : « Celui, dit-il, qui étant aidé par la divine miséricorde, s'abstiendra de ces péchés qu'on appelle crimes et qui ne négligera pas de purger les autres sans lesquels on ne vit pas en ce monde, par des œuvres de miséricorde et par des saintes prières : encore qu'il ne vive pas ici sans péché 1 Act., XV, 9.

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