Immagini della pagina
PDF
ePub

rédemption qui est en Jésus-Christ que Dieu a ordonné propitiateur par la foi 1. »

2e rai- La seconde raison dont se sert l'Apôtre pour prouver la fausseté

son.

de cette justice ne sera pas malaisée à entendre, si nous remarquons que les hommes étant impuissans par eux-mêmes, ceux qui veulent être justifiés doivent premièrement regarder la grace.

Il ne suffit pas de considérer le précepte qui nous éclaire; il faut encore lever les yeux au Saint-Esprit de Dieu qui nous meut. C'est peu de chose de s'arrêter simplement à l'action qui nous est commandée; il faut aller au principe qui l'opère en nous. Nous ne voyons pas ce principe; mais nous le croyons, parce que ce principe c'est Jésus-Christ même : de sorte que c'est la foi qui nous y conduit, puisque le propre de la foi c'est de croire, comme le propre de la loi c'est de commander.

Cette vérité étant supposée, il s'ensuit très-évidemment que celui qui se proposera la loi sans la foi établira une fausse justice. Car il n'aura aucun égard à la grace, et il croira pouvoir être juste par ses propres forces. C'est pourquoi l'apôtre saint Paul parle ainsi des Israélites charnels qui considéroient la loi de Moïse sans la foi du Sauveur Jésus: « Ignorant la justice, de Dieu, et voulant établir leur propre justice, ils n'ont pas été soumis à la justice de Dieu. « Cette justice de Dieu dont il parle n'est point celle par laquelle Dieu est juste, mais celle par laquelle Dieu nous fait justes. L'Apôtre veut donc dire que les Juifs charnels ignorant cette véritable justice par laquelle Dieu nous fait justes, ont voulu établir leur propre justice, c'est-à-dire la justice par leurs propres forces.

De là vient que saint Augustin expliquant par les principes'du saint Apôtre quelle est cette justice qui est par la foi : « Il faut entendre une foi, dit-il, par laquelle nous croyons fermement que la justice nous est donnée par la grace, et non point faite en nous nous-mêmes 3. >>

par

C'est à quoi regarde saint Paul, lorsqu'ayant proposé cette ques

1 Rom., III, 23, 24, 25. 2 Rom., X, 3. -3 « Quæ ex Deo justitia in fide, in fide utique est, quâ credimus nobis justitiam divinitùs dari, non à nobis in nobis nostris viribus fieri. » Epist. CVI, nunc CLXXXVI, n. 8.

tion; « Pourquoi les Israélites suivant la loi de justice, ne sont point parvenus à la loi de justice 1?» il en rend cette excellente raison « Parce que ce n'a pas été par la foi, mais comme par les œuvres » c'est-à-dire comme opérant par eux-mêmes et ne croyant pas que c'est Dieu qui opère en eux. C'est l'interprétation de saint Augustin".

C'est encore ce qui fait dire au même saint Paul que « notre orgueil est anéanti, non point par la loi des œuvres, mais par la loi de la foi ; » parce que la seule foi nous fait voir que rien ne peut subvenir à l'infirmité humaine, si ce n'est la miséricorde divine.

De cette belle doctrine du grand Apôtre, il résulte que le défaut essentiel de cette orgueilleuse justice, qui ne se proposoit que les œuvres, consiste en ces deux choses que nous avons dites. C'est qu'il falloit que les hommes qui veulent bien faire, considérassent premièrement qu'ils étoient pécheurs et qu'ils cherchassent celui qui réconcilie; secondement, qu'ils étoient impuissans, et qu'ils recourussent à celui qui aide. C'est ce que la fausse justice ne pratiquoit pas; et c'est pourquoi c'étoit un orgueil damnable qui se couvroit du nom de justice. Mais la justice chrétienne le fait par De quella foi. Car la foi nous propose Jésus-Christ Sauveur, Libérateur et Réparateur. S'il nous répare, nous étions tombés; s'il nous dé- justifie. livre, nous étions captifs; s'il nous sauve, nous étions perdus.

C'est donc là cette foi qui nous justifie, si nous croyons, si nous confessons que nous sommes morts en nous-mêmes et que JésusChrist seul nous fait vivre. C'est, dis-je, cette foi qui nous justifie, parce qu'elle fait naître l'humilité, et par l'humilité la prière, et dans la prière la confiance; et ainsi elle nous impètre le don de la grace par laquelle notre langueur est guérie, et notre conscience purifiée.

C'est la doctrine constante de saint Augustin; c'est tout le but de ce docte livre qu'il a composé de l'Esprit et de la Lettre: « La

"

1 « Israel sectando legem justitiæ, in legem justitiæ non pervenit. Quare? Quia non ex fide, sed quasi ex operibus. » Rom., IX, 31, 32. - 2 « Tanquam ex semetipsis operantes, non in se credentes operari Deum. » De spir. et litt., cap. XXIX, n. 50.-3« Ubi est gloriatio tua? Exclusa est. Per quam legem? Factorum? Non: sed per legem fidei. » Rom., III, 27; August., De spir. et litt., cap. x, n. 17.

le sorte

la foi

Preuve

par l'A

justification', dit-il, est impétrée par la foi 1; » et : « La foi nous rend propice celui qui justifie ; » et encore : « Par la foi nous impétrons le salut, tant celui qui se commence en nous effectivement que celui que nous attendons par une fidèle espérance 3; » et enfin : « Par la loi la connoissance du péché, par la foi l'impétration de la grace contre le péché, par la grace l'ame est guérie du vice du péché *.» Ce grand homme parle toujours de la même sorte.

Ainsi dans la pensée de saint Augustin, la vertu de la foi conpôtre. siste en la force qu'elle a d'impétrer la grace; et ce docte personnage l'a pris de saint Paul. Car l'Apôtre expliquant la vertu de la foi: «Si tu confesses, dit-il, de ta bouche le Seigneur Jésus, et que tu croies en ton cœur que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé. » Il entend par ce mot général : Tu seras sauvé, tant le salut qui s'accomplira en la vie future que celui qui se commence en la vie présente. De sorte que la justification du pécheur y doit être nécessairement comprise. C'est pourquoi il ajoute aussitôt après : « Car on croit de cœur A JUSTICE, et on confesse de bouche à salut. » L'Apôtre se propose donc de nous expliquer quelle est la vertu de la foi, même dans la justification du pécheur: « Si tu crois, dit-il, tu seras sauvé; » et il en rend cette solide raison « Car celui qui croit en lui ne sera point confondu. » Ce que voulant prouver au verset suivant, il continue ainsi son discours : « Quiconque croit n'est point confondu : car il n'y a point de différence du Juif et du Grec, parce que c'est le même Seigneur de tous, qui est riche sur tous ceux qui l'invoquent. Car quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. » Après

1 « Justificatio ex fide impetratur. » De spir. et litt., cap. XXIX, n. 51.- « Per fidem concilians justificatorem, » etc. Ibid.· 3 «Fide Jesu Christi impetramus salutem, et quantùm nobis inchoatur in re, et quantùm perficienda expectatur in spe.» Ibid. — «Per legem cognitio peccati, per fidem impetratio gratiæ contra peccatum, per gratiam sanatio animæ à vitio peccati. » Ibid., cap. XXX, n. 52. — 5 « Si confitearis in ore tuo Dominum Jesum, et in corde tuo credideris quòd Deus suscitavit illum à mortuis, salvus eris. Corde enim creditur ad justitiam, ore autem confessio fit ad salutem. Dicit enim Scriptura: Omnis qui credit in illum, non confundetur. Non enim est distinctio Judæi et Græci; nam idem Dominus omnium, dives in omnes qui invocant illum. Omnis enim quicumque invocaverit nomen Domini, salvus erit. Quomodò ergo invocabunt in quem non crediderunt? » Rom., X, 9 et seq.

quoi il vient à la foi, disant : « Comment donc invoqueront-ils celui auquel ils n'ont point cru? » Où il est clair que la raison pour laquelle il dit que celui qui croit n'est point confondu, c'est parce qu'en croyant il invoque, et que celui qui invoque, il obtient. Donc selon l'apôtre saint Paul la force de la foi en NotreSeigneur, c'est qu'elle a la vertu d'impétrer et saint Augustin raisonne très-bien selon ces maximes apostoliques, quand il dit que la foi justifie, parce qu'elle attire les graces par lesquelles nous sommes justifiés.

Nos adversaires eux-mêmes ne le nieront pas, s'ils considèrent bien quelques vérités desquelles il est impossible qu'ils disconviennent. Car je leur demande si un pécheur, comme par exemple le roi David après son homicide et son adultère, ne doit pas prier continuellement que Dieu lui pardonne son crime. Or s'il prie, il est en la foi, selon ce que dit l'apôtre saint Paul : « Comment invoqueront-ils s'ils ne croient 1? » Que s'il est vrai que la seule foi sans tous les autres dons de la grace, opère la rémission des péchés, comment demande-t-elle avec tant de larmes ce qu'elle a déjà obtenu sitôt qu'elle a été formée en nos cœurs?

Il faut donc dire nécessairement que la foi en Jésus-Christ justifie, non qu'elle fasse elle seule toute la justice, mais parce qu'elle en est le principe et que nous fondant sur l'humilité, elle nous impètre les autres dons par lesquels la justice s'accomplit en nous.

De là il s'ensuit clairement que nous sommes justifiés par la foi sans exclusion de la charité. Car il paroît que saint Paul se sert de la foi pour mettre une différence solide, telle que nous l'avons exposée, entre la fausse justice des Juifs et la vraie justice du christianisme, c'est-à-dire entre la justice qui glorifie l'homme et la justice qui glorifie Dieu et ainsi la justification est attribuée singulièrement à la foi, pour éloigner de nous l'arrogance humaine qui veut se glorifier en elle-même, non pour exclure la charité ni les autres vertus divines qui ne se glorifient qu'en la grace.

C'est la doctrine de la sainte Eglise de laquelle je tire ces deux conséquences. Premièrement, que nous ne nions pas la justifica1 Rom., X, 14.

tion par la foi; au contraire que nous l'établissons par les vrais principes que l'antiquité chrétienne nous a enseignés par la bouche de saint Augustin. Secondement je conclus que c'est une extrême injustice de nous opposer que nous renversons la justification gratuite. Car il n'est rien de plus gratuit que ce que la foi en Jésus-Christ nous impètre, parce que quand la foi invoque, c'est le nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ et le mérite de sa passion qui obtient. Est-ce pas une calomnie manifeste d'assurer qu'une telle croyance renverse la confiance au Libérateur ?

Ici nos adversaires objectent que l'Eglise catholique prêche la justification par les œuvres. Pour résoudre cette difficulté, il est nécessaire que nous entrions en la seconde des trois questions proposées touchant l'économie de la grace; et qu'après avoir vu son commencement, nous considérions son progrès.

CHAPITRE IX.

De la justification par les œuvres.

Ceux qui ont écrit de nos controverses ont judicieusement remarqué, qu'il n'y a entre nous et nos adversaires aucune dispute particulière touchant la justification par les œuvres; et la simple intelligence des termes fera connoître cette vérité.

Par la justification nous pouvons entendre la seule rémission. des péchés, et c'est ainsi que nos adversaires l'expliquent. Sur cela nous leur avons accordé que nos péchés sont remis gratuitement', non point à cause de nos mérites, mais par les mérites de Jésus-Christ. Nous avons produit les décrets par lesquels le sacré concile de Trente a défini cette salutaire doctrine; et par conséquent en ce point nous n'avons rien à contester avec les ministres.

Mais nous prenons la justification en un autre sens pour notre régénération à la vie nouvelle, et notre sanctification par le SaintEsprit. On demande si la justification ainsi entendue, se fait par les œuvres ou non : et nous disons que nous et nos adversaires n'avons rien à démêler sur cette matière ; et en voici la preuve évidente.

1 Ci-dessus, chap. II.

« IndietroContinua »