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que notre confiance n'est pas assez forte. Répondons en peu de paroles à cette objection que vous faites dans le dessein de mettre quelque différence entre nos ancêtres et nous.

Nous avons l'assurance de notre salut, telle que l'ont toujours eue les enfans de Dieu; « lesquels certes, dit saint Augustin, quoiqu'ils soient infailliblement assurés du prix de leur persévérance, toutefois ils ne sont pas assurés de leur persévérance 1. »

Nous avons l'assurance de notre salut, telle que la prêchoit saint Bernard: « Qui est celui qui peut dire : Je suis des élus, je suis des prédestinés à la vie, je suis du nombre des enfans? » Et après « Nous n'en avons pas la certitude; mais la confiance nous console, de peur que nous ne soyons tourmentés par l'anxiété de ce doute 2. >>>>

Je produis ces deux grands hommes à notre adversaire, parce qu'il les appelle saints dans son Catéchisme, afin qu'il connoisse par leur témoignage que nous avons l'assurance d'être sauvés, telle que l'ont eue les hommes de Dieu et les saints docteurs de l'Eglise. Après quoi je ne vois rien de plus ridicule que d'apporter comme un empêchement de notre salut, cette incertitude modeste en laquelle la bonté de Dieu laisse les élus pour les rendre plus humbles et plus diligens. Au contraire saint Augustin nous apprend qu'il importe pour notre salut que nous ne sachions pas ce secret, « parce qu'en ce lieu de tentation, l'infirmité est si grande, que la certitude infaillible peut facilement engendrer l'orgueil 3. » Mais finissons enfin ce discours par ce raisonnement invincible, qui découvrira manifestement deux insignes faussetés du ministre. Il accuse le concile de Trente d'avoir établi une nouvelle doctrine touchant la justification et les bonnes œuvres. Cependant il paroît sans difficulté qu'elle a été de point en point

1 « Qui licet de perseverantiæ suæ præmio securi sint, de ipsâ tamen perseverantiâ reperiuntur incerti. » Lib. XI, De Civit. Dei, cap. XII. - 2 « Quis dicere potest: Ego de electis sum, ego de prædestinatis ad vitam? Certitudinem utique non habemus, sed spei fiducia consolatur nos, ne dubitationis hujus anxietate penitùs cruciemur. » Serm. 1, De Septuag., n. 1. · 3 « Quis enim ex multitudine fidelium, quamdiù in hâc mortalitate vivitur, in numero prædestinatorum se esse præsumat? Quia id occultari opus est in hoc loco, etc.... Quæ præsumptio in isto tentationum loco non expedit, ubi tanta est infirmitas, ut superbiam possit generare securitas. » De correct. et grat., cap. XIII, n. 40.

enseignée il y a plus de douze cents ans par le plus célèbre de tous les docteurs, avec l'applaudissement de toute l'Eglise. Il ajoute que cette doctrine détruit le fondement de la foi, c'est-àdire la confiance en Jésus-Christ seul. Toutefois il n'est pas assez téméraire pour accuser saint Augustin d'un crime si énorme; au contraire il déclare en termes formels qu'il ne trouve rien en sa foi qui puisse donner une juste cause de séparation. Ainsi l'autorité de saint Augustin nous est un rempart assuré. Car si notre foi est la sienne, il est clair qu'on ne se doit pas séparer de nous, puisqu'on n'ose se séparer de saint Augustin. Que s'il y a de l'injustice à se séparer, il y en a bien plus à nous condamner: tellement que les maximes de notre adversaire sont la justification de l'Eglise. C'est ainsi que la nouveauté est forcée par une secrète vertu à venir rendre témoignage à l'antiquité; c'est ainsi que l'unité sainte est honorée même par le schisme.

SECONDE VÉRITÉ.

QU'IL EST IMPOSSIBLE DE SE SAUVER EN LA RÉFORMATION PRÉTENDUE.

CHAPITRE PREMIER.

Que selon les principes du ministre, les premiers auteurs de la réformation prétendue sont des schismatiques.

Jusqu'ici notre innocence s'est défendue contre les accusations du ministre ; nous devions cette juste défense à la sainteté de l'Eglise, qui étoit attaquée par ses calomnies: maintenant la charité nous oblige de faire connoître à nos adversaires le péril évident de leurs ames; et combien leur perte est inévitable, s'ils ne retournent en la communion de l'Eglise en laquelle leurs pères ont été sauvés, et qui est toujours prête à les recevoir avec des entrailles de mère.

Pour expliquer mon raisonnement avec ordre, je pose ces trois

maximes fondamentales. Premièrement, je dis qu'il est impossible de faire son salut dans le schisme. Car nous entendons par le mot de schisme une injuste séparation. Or cette injuste séparation est incompatible avec la charité fraternelle; par conséquent tous ceux qui sont dans le schisme tombent en cette juste malédiction que l'apôtre saint Jean prononce : a Celui qui n'aime pas son frère demeure en la mort. Tout homme qui hait son frère est homicide 1. >>>>

Secondement il est assuré que jamais il ne peut être permis de se séparer de la vraie Eglise, et bien moins quand elle sera reconnue pour telle, parce que l'Eglise étant le lieu d'unité, tous ceux qui se retirent de la vraie Eglise, violent visiblement le sacré lien de la fraternité chrétienne.

Je pose pour troisième maxime, qu'une Eglise demeure toujours véritable Eglise, tant qu'elle peut engendrer des enfans au ciel. Car il n'appartient qu'à la vraie Eglise de donner des frères à Jésus-Christ, et des héritiers au Père céleste. L'Eglise ne conçoit que de son Epoux, qui la rend féconde par son Esprit-Saint; et ainsi tant qu'elle engendre des enfans à Dieu, elle est pleine du Saint-Esprit, Jésus-Christ la traite toujours en épouse; elle est donc par conséquent véritable Eglise.

Ces vérités étant supposées, je soutiens que nos adversaires ne peuvent excuser leur séparation, et que les principes qu'ils nous accordent montrent que les premiers auteurs de leur secte n'ont pas été des réformateurs, mais de très-dangereux schismatiques, qui se sont séparés de la vraie Eglise. C'est ce qu'il m'est aisé de prouver par ce raisonnement invincible.

Le ministre est convenu avec nous que jusqu'à l'an 1543 on pouvoit obtenir la vie éternelle en la communion de l'Eglise romaine 2; elle étoit donc encore véritable Eglise selon les maximes que j'ai posées. Et toutefois il est assuré que longtemps avant cette année nos adversaires s'étoient séparés, et avoient abandonné sa communion. Par conséquent ces réformateurs prétendus étoient des rebelles et des schismatiques, qui fuyoient la communion d'une Eglise, laquelle conduisant ses enfans au ciel, 1 I Joan., III, 14, 16. - 2 Ci-dessus, sect. I, chap. I.

montroit bien par sa sainte fécondité qu'elle étoit encore l'Eglise de Dieu. En effet le catéchiste remarque lui-même que les fondemens de la foi y étoient entiers1, et que les fidèles y pouvoient faire leur salut à cause de la sincère confiance que l'Eglise, cette bonne mère, les obligeoit d'avoir en Jésus-Christ seul.

Ce raisonnement jette l'hérésie avec ses ministres dans une confusion nécessaire : et je pense qu'elle n'a jamais paru plus visible que dans le Catéchisme que nous réfutons. Le sieur Ferry ne peut se résoudre sur cette importante difficulté, savoir si les premiers qui ont embrassé la réformation prétendue, en sortant de la communion de l'Eglise romaine, l'ont quittée volontairement, ou s'ils en ont été chassés par la force. Mais qu'il résolve d'eux ce qu'il lui plaira, nous avons toujours de quoi les convaincre. S'ils se sont retirés volontairement de la communion d'une vraie Eglise en laquelle on pouvoit se sauver, il paroît manifestement qu'ils sont schismatiques selon les maximes que j'ai posées; et quand même nous accorderons qu'on les a chassés, ils n'éviteront pas leur condamnation. Car la communion de l'Eglise est si nécessaire, qu'ils devoient toujours demeurer unis encore qu'on tâchât de les éloigner. Et je ne dis pas ici à nos adversaires une chose qui doive leur être inconnue. L'église luthérienne les excommunie; toutefois parce qu'ils la croient une vraie Eglise, ils pensent être obligés de s'unir à elle; ils lui tendent les bras quoiqu'elle les chasse, et ils entrent en son unité autant qu'ils le peuvent. Si donc l'Eglise romaine étoit vraie Eglise, puisque selon la confession du ministre elle portoit en son sein les enfans de Dieu, quelque violence qu'on fit aux réformateurs prétendus, jamais ils ne devoient rompre de leur part le lien de la communion ecclésiastique.

Mais au contraire ils ont ému toute la querelle, ils se sont séparés les premiers, ils ont fait de nouvelles églises, ils ont établi un nouveau service; et pour montrer que, non-seulement ils fuyoient, mais encore qu'ils avoient en horreur la communion de l'Eglise romaine, ils ont publié par toute l'Europe que sa doctrine étoit sacrilége, et que son service étoit une idolâtrie; qu'elle 1 Ci-dessus, section I, chap. IV, v et VI.

étoit le royaume de l'Antechrist et la Babylone de l'Apocalypse, en laquelle on ne pouvoit demeurer sans résister à ce commandement de Dieu : « Sortez de Babylone, mon peuple 1. » Certes on ne les contraignoit pas de parler ainsi : donc ils n'ont pas été chassés par la force, mais ils se sont retirés volontairement. Cependant l'Eglise romaine étoit encore la vraie Eglise, puisque selon les principes du catéchiste les fidèles de Jésus-Christ y pouvoient mourir sans préjudice de leur salut.

C'est ce qui jette le sieur Ferry dans une étrange contradiction. Car d'un côté il dit nettement «qu'il faut extirper le membre pourri, comme l'Eglise a toujours pratiqué, excommuniant les hérétiques ou se soustrayant de leur communion ; » et que l'on ne pouvoit abandonner l'ouvrage de la réformation « sans désobéir au commandement : « Sortez de Babylone, mon peuple ; » ce qui prouve la nécessité de se séparer. Mais reconnoissant en sa conscience que jamais il ne peut être permis de se retirer de la vraie Eglise, telle qu'étoit l'Eglise romaine, puisqu'il avoue que les fidèles s'y pouvoient sauver, il est obligé de répondre que ses pères vouloient demeurer en son unité, si on ne les en eût retranchés : « Chassés et poursuivis, dit-il, nous avons été contraints de nous séparer ; » et encore plus clairement: « Ils ont plutôt été chassés qu'ils ne sont sortis. Car ils entendoient avec saint Augustin ce commandement : « Retirez-vous, sortez de là, ne touchez point à choses souillées, D'UN DÉPART SPIRITUEL ET D'UN DÉTACHEMENT DE COEUR. C'est aussi l'exposition qu'on donnoit d'ancienneté à Metz à cet autre commandement de sortir de Babylone, à savoir non en corps, mais en esprit 5. »>

Il est digne d'observation que le catéchiste confesse que ses prédécesseurs entendoient ces paroles : « Retirez-vous, sortez de là, » dans le même sens qu'on donnoit avant la réformation prétendue, à ce commandement de l'Apocalypse : « Sortez de Babylone, mon peuple. » Or il remarque en un autre lieu que nos pères qui vivoient alors en la communion de l'Eglise romaine croyoient satisfaire à ce précepte, «s'ils ne participoient pas aux péchés de ceux parmi lesquels ils vivoient, sans qu'il leur fùt besoin de s'en 1 Apoc., XVIII, 4.

2 P. 127.3 P. 46 et 47. - P. 138. — 5 P. 131.

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