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le colloque, et ensuite le synode provincial composé d'un plus grand nombre de personnes, peut-être plus respectées, et en tout cas moins suspectes au contredisant, le disposeroient à entendre la vérité. Que le colloque et le synode provincial usoient de pareille modération par la même raison de charité mais qu'après que le synode national avoit parlé, comme c'étoit le dernier remède humain, il n'y avoit plus rien à espérer, et qu'on procédoit aussi à la dernière sentence, en usant de l'excommunication, comme du dernier effort de la puissance ecclésiastique. Que de là il ne falloit pas conclure que le synode national se tînt infaillible, non plus que les précédentes assemblées; mais seulement qu'après avoir tout tenté, on venoit au dernier remède.

Pour la promesse qu'on faisoit avant le synode national, qu'elle n'étoit fondée que sur l'espérance qu'on avoit que l'assemblée suivroit la parole de Dieu, et que le Saint-Esprit y présideroit, ce qui ne marquoit pas qu'on en eût une entière certitude; et au reste que le terme : Persuadés que, étoit une manière honnête d'exprimer une condition sans blesser la révérence d'une si grande assemblée, ni la présomption favorable qu'on devoit avoir pour son procédé.

Quant à la condamnation des indépendans, il me pria d'observer que sur l'autorité de l'Eglise et de ses assemblées, il y avoit quelque chose dont ceux de sa religion convenoient avec nous et quelque chose dont ils convenoient avec les indépendans : avec nous, que les assemblées ecclésiastiques étoient nécessaires et utiles, et qu'il falloit établir quelque subordination"; avec les indépendans, que ces assemblées pour nombreuses qu'elles fussent, n'étoient pas pour cela infaillibles. Cela étant, qu'ils avoient dù condamner les indépendans, qui non-seulement nioient l'infaillibilité, mais encore l'utilité et la nécessité de ces assemblées et de cette subordination. C'est en cela, disoit-il, que consiste l'indépendantisme, si on peut user de ce mot.

Il ajouta que le soutenir, c'étoit en effet renverser l'ordre, et donner lieu à autant de religions qu'il y avoit de paroisses, parce qu'on ôtoit par là tous les moyens de convenir. D'où il concluoit qu'encore qu'on fùt d'accord que les assemblées ecclésiastiques

n'étoient pas moyens infaillibles, c'étoit assez pour les maintenir et condamner les indépendans, que ce fussent moyens utiles.

Pour le synode de Sainte-Foi, qu'il s'agissoit ou de rendre les luthériens plus dociles en les faisant, disoit-il, rapprocher de nous, ou en tout cas d'établir une tolérance mutuelle ; ce qui n'obligeoit pas de rien supprimer ou ajouter dans la confession de foi, qui fut toujours tenue pour inébranlable. Et qu'au reste, quoiqu'on eùt donné plein pouvoir à quatre ministres, je savois bien que tels actes étoient toujours sujets à ratification, en cas que les procureurs eussent outrepassé leurs instructions: témoin les ratifications nécessaires dans les traités accordés par les plénipotentiaires des princes, et autres exemples semblables, où il y a toujours une condition d'obtenir du prince la ratification; condition qui sans être exprimée, est attachée naturellement à de telles procurations.

Après avoir dit ces choses par un discours assez long, fort net et fort composé, il ajouta qu'il croyoit, équitable comme j'étois, que je voudrois bien lui avouer que de même que dans les choses où j'aurois à lui expliquer nos sentimens et nos conciles, par exemple celui de Trente, il étoit juste qu'il s'en rapportât à ce que je lui en dirois; aussi étoit-il juste que je m'en rapportasse à lui dans l'application qu'il nous donnoit des articles de leur discipline et des sentimens de leur religion, étant certain qu'il n'y en avoit point d'autres parmi eux que ceux qu'il me venoit d'exposer.

Je repris sur ce dernier mot que ce qu'il disoit seroit véritable, s'il s'agissoit simplement d'expliquer leurs rites, si on pouvoit user de ce mot, et la manière d'administrer la parole ou les sacremens, ou de tenir les synodes; qu'en cela je le croirois, comme mieux instruit : mais qu'ici je prétendois qu'il leur étoit arrivé comme à tous ceux qui sont dans l'erreur; c'est de tomber en contradiction, et d'être forcés à établir ce qu'ils avoient nié. Que je savois qu'ils nioient qu'il fallût se soumettre, sans examiner, au jugement de l'Eglise; mais qu'en même temps je prétendois cette infaillibilité de l'Eglise si nécessaire, que ceux mêmes qui la nioient en spéculation ne pouvoient s'empêcher de l'établir 34

TOM. XIII.

dans la pratique, s'ils vouloient conserver quelque ordre parmi eux. Au reste, que s'il s'agissoit ici de montrer quelque contradiction dans les sentimens de l'Eglise catholique, je ne prétendrois pas l'obliger à recevoir l'explication que je lui donnerois de ses sentimens et de ses conciles, et qu'alors il lui seroit libre de tirer de leurs paroles telle induction qu'il lui plairoit; qu'aussi ne pensois-je pas qu'il m'en refusât autant: de quoi il convint sans difficulté.

Je n'avois pas dessein de m'arrêter beaucoup sur le synode de Sainte-Foi, qui m'eùt, ce me sembloit, jeté trop loin des deux propositions dont je voulois tirer l'aveu. Je répondis donc seulement que je me rendois à la raison qu'il alléguoit sur la nécessité d'une ratification, quoiqu'en matière de foi tels pouvoirs et tels compromis fussent un peu extraordinaires; et qu'au reste je voulois bien croire que le dessein du synode n'avoit pas été que les députés renversassent tout. Mais que ce qui me touchoit, et à quoi il ne sembloit pas qu'il eût répondu, c'est que le synode avoit douté de sa confession de foi, puisqu'il permettoit d'en faire une autre; et que je ne voyois pas comment cela s'accordoit avec ce qu'on nous dit encore, que cette confession de foi ne contenoit autre chose que la pure parole de Dieu, à laquelle tout le monde sait qu'il n'y a rien à changer. Quant à ce qu'il avoit dit, qu'il s'agissoit ou de ramener les luthériens à des sentimens plus équitables, ou en tout cas d'établir une tolérance mutuelle, deux choses y résistoient: 1°, qu'il étoit parlé d'un pouvoir de décider tout point de doctrine ce qui regardoit manifestement la réalité, dont les luthériens n'avoient jamais voulu se relâcher. 2°, que pour établir une tolérance mutuelle, il ne falloit pas dresser une confession de foi commune, mais seulement établir cette tolérance par un décret synodal, comme on avoit fait à Charenton.

M. Claude répondit que le point de doctrine à décider étoit, si on pouvoit établir une tolérance mutuelle, et que la confession de foi commune n'eût fait autre chose qu'énoncer cette tolérance : ce qu'il ne nioit pas pouvoir être fait dans un synode, comme il falloit que je convinsse qu'il pouvoit se faire aussi par une confession de foi, où il y en auroit un article exprès.

Je lui répondis que cela ne s'appelleroit jamais une confession de foi commune, et lui demandai s'il croyoit que les luthériens, ou eux, dussent retrancher quelque chose de ce que disoient les uns pour la réalité, et les autres contre. Il dit que non. Et de là, disois-je, chacun demeureroit dans les termes de sa confession de foi, sans qu'il y eût rien de commun que l'article de la tolérance. Il y avoit, dit-il, beaucoup d'autres points dont nous convenions. D'accord, répondis-je; mais ce n'étoit plus sur ces points qu'il y avoit à s'accorder : il s'agissoit du point de la réalité et de quelques autres, sur quoi on ne pouvoit faire de confession de foi commune, sans que l'un des partis changeât, ou que tous les deux convinssent d'expressions ambiguës, que chacun tireroit à ses sentimens : chose tentée plusieurs fois, comme M. Claude luimême en conviendroit de bonne foi. Il en demeura d'accord, et rapporta même l'assemblée de Marbourg, et quelques autres tenues pour ce sujet. Je conclus donc que j'avois raison de croire que le synode de Sainte-Foi avoit un pareil dessein, et que c'eût été se moquer du monde, que d'appeler confession de foi commune celle qui eût fait paroître de si manifestes oppositions sur des points si importans de la doctrine chrétienne. A quoi j'ajoutai encore qu'il étoit d'autant plus certain, qu'il s'agissoit en effet d'une confession de foi, comme je disois, que les luthériens s'étant déjà expliqués plusieurs fois contre la tolérance, il n'y avoit rien à espérer d'eux que par le moyen dont je parlois. La chose en demeura là; et je dis seulement qu'après cela chacun n'avoit qu'à penser ce qu'il devoit croire en sa conscience d'une confession de foi que tout un synode national avoit consenti de changer.

Lorsque M. Claude avoit dit que le serment de se soumettre au synode national enfermoit une condition, j'avois interrompu par un petit mot. Oui, disois-je, ils espéroient bien du synode, sans certitude toutefois; et en attendant l'événement, ils ne laissoient pas de jurer de se soumettre. M. Claude m'ayant ici averti que je l'avois interrompu, et me priant de lui permettre de dire tout, me tus. Mais après avoir discuté l'affaire de Sainte-Foi, je lui dis qu'il me sembloit nécessaire avant que de passer outre, que je lui

je

disse en peu de mots ce que j'avois conçu de sa doctrine, afin que nous ne parlassions point en l'air. Je lui dis donc : Vous dites, Monsieur,que ces mots : « Persuadés que nous sommes, que Dieu y présidera, et vous conduira par son Saint-Esprit en toute vérité et équité par la règle de sa parole,» sont une manière honnête de proposer une condition. Il en convint. Réduisons donc, repris-je, la proposition en conditionnelle, et nous verrons quel en sera le sens. Je jure de me soumettre à tout ce que vous déciderez, supposé ou à condition que ce que vous déciderez sera conforme à la parole de Dieu. Un tel serment n'est autre chose qu'une illusion manifeste, puisqu'en soi il ne dit rien, et que je le pourrois faire à M. Claude comme lui à moi. Mais en cela il n'y auroit rien de sérieux; et marque qu'on veut quelque chose de plus particulier, c'est qu'on ne fait ce serment qu'au synode où l'on prononce en dernier ressort, quoiqu'au sens de M. Claude il y eût autant de raison de le faire dès le consistoire, à qui on doit se soumettre aussi bien qu'au synode, supposé qu'il ait la parole de Dieu pour guide.

En cet endroit je me tus un peu de temps; et voyant qu'on ne disoit mot, je repris ainsi : Mais enfin donc, Monsieur, si j'ai bien compris votre doctrine, vous croyez qu'un particulier peut douter du jugement de l'Eglise, lors même qu'elle prononce en dernier ressort? Non, Monsieur, repartit M. Claude : il ne faut pas dire qu'on puisse douter; il y a toutes les apparences du monde que l'Eglise jugera bien. Qui dit apparence, Monsieur, repris-je aussitôt, dit un doute manifeste. Mais, dit M. Claude, il y a plus; car Jésus-Christ ayant promis que tous ceux qui chercheroient, trouveroient, comme on doit présumer qu'on cherchera bien, on doit croire qu'on jugera bien, et il y a dans cette assurance quelque chose d'indubitable. Mais quand on verra dans les conciles des cabales, des factions, des intérêts différens, on peut douter avec raison si dans une telle assemblée il ne se mêlera point quelque chose d'humain et de douteux. Je vous prie, Monsieur, repartis-je, laissons à part tout ce qui n'est bon qu'à jeter de la poudre aux yeux. Tout ce que vous venez de dire de cabales, de factions, d'intérêts, est absolument inutile, et ne sert par consé

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