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racles que nul autre n'a faits, ils n'auroient point de péché; et maintenant ils les ont vus, et ils haïssent et moi et mon Père1. » C'est-à-dire que les miracles sont clairs, que l'autorité est incontestable, et que la résistance ne peut plus avoir de fondement qu'une haine aveugle.

J'attends qu'on réponde encore que Jésus-Christ ajoute après tout cela: «Sondez les Ecritures, elles-mêmes rendent aussi témoignage de moi 2; » et qu'on ose conclure de là qu'on pouvoit et qu'on devoit examiner après Jésus-Christ: en sorte que cette parole qu'il a prononcée nous démontre, non pas dans les Ecritures une surabondance de conviction, mais dans la personne de Jésus-Christ une insuffisance d'autorité. Si on fait encore cette objection, il n'y aura plus qu'à se taire, et à laisser Jésus-Christ défendre sa cause.

En attendant, nous conclurons que c'est l'autorité même de Jésus-Christ que nous révérons dans son Eglise. Si nous disons qu'il faut croire l'Eglise sans examiner, c'est à cause que JésusChrist, qui l'enseigne et qui la conduit, est au-dessus de tout examen. Nous ne laisserons pas, en imitant Jésus-Christ, de dire encore pour comble de conviction à tous les ennemis de l'Eglise: << Sondez les Ecritures: » nous les confondrons par cette Ecriture à laquelle ils disent qu'ils croient, et nous les verrons succomber encore dans cet examen; mais ce sera après les avoir forcés à reconnoître qu'il se faut soumettre, sans examiner, à l'autorité de l'Eglise, dans laquelle cet Esprit que Jésus-Christ a envoyé pour tenir sa place, parle toujours.

Il n'y a donc rien de moins à propos que l'exemple de la Synagogue et nos prétendus réformés destitués de cet exemple qui faisoit leur fort, demeurent seuls à se croire, chacun en particulier, capables de mieux entendre l'Ecriture sainte que tout ce qui a dans l'univers l'autorité de l'interpréter et de juger de la doctrine, et que tout ce qui leur paroît de fidèles dans le monde : ce qui est l'erreur précise des indépendans, ou quelque chose de pis.

On dira que ce particulier qui examine après l'Eglise, sera toujours bien assuré de n'être pas seul de son sentiment, puisque 1 Joan., XV, 22, 24. — a Joan., v, 39.

toujours il restera quelque élu caché qui pensera comme lui : comme si sans réfuter cette vision, ce n'étoit pas un orgueil assez détestable de se mettre seul au-dessus de tout ce qu'on voit et de tout ce qu'on entend parler dans tout le reste de l'Eglise. On dira encore: Ce n'est point orgueil de se croire éclairé par le SaintEsprit. Mais au contraire, c'est le comble de l'orgueil que des particuliers osent croire que le Saint-Esprit les instruise, et abandonne à l'erreur tout ce qui paroît de fidèles dans le reste de l'Eglise. Et il ne sert de rien de répondre, comme fait M. Claude dans sa Relation, « que l'Esprit souffle où il veut 1:» car il faudroit montrer que cet Esprit, qui se repose sur les humbles, ne laisse pas de souffler sur ceux qui se croient eux seuls plus capables d'entendre l'Ecriture sainte que tout le reste de l'Eglise, puisqu'ils examinent après elle; et non-seulement de souffler sur eux, mais encore de leur inspirer lui-même cette superbe pensée. Mais enfin, quoi qu'il en soit, et sans disputer davantage, puisque ce n'en est pas ici le lieu, nous avons montré que c'est un dogme avoué dans la nouvelle Réforme, que tout particulier doit examiner après l'Eglise, et par conséquent doit croire qu'il se peut faire qu'il entende mieux l'Ecriture qu'elle et toutes ses assemblées. Ceux à qui cette présomption fait horreur, ou qui en s'examinant ne trouvent point en eux-mêmes cette fausse capacité, n'ont qu'à chercher leur salut dans une autre église que dans celle où l'on professe un dogme si prodigieux.

III Réflexion, sur une autre proposition avouée par M. Claude dans la Conférence explication de la manière d'instruire les chrétiens, et que l'autorité infaillible de l'Eglise est nécessaire pour reconnoître et entendre l'Ecriture.

La seconde absurdité que j'ai promis de faire avouer à M. Claude et à tout bon protestant, c'est qu'à moins de reconnoître dans l'Eglise une autorité après laquelle il ne faille plus examiner ni douter, on est forcé à mettre un point où le fidèle en âge de raison ne puisse pas faire un acte de foi sur l'Ecriture, et où par conséquent il faille douter si elle est véritable ou fausse. J'ai assi1 Joan., III, 8.

gné pour ce point de doute tout le temps où un chrétien, par quelque cause que ce soit, n'a pas lu l'Ecriture sainte. M. Claude se récrie ici contre une si détestable proposition; et moi je persiste à dire, non-seulement qu'il l'a avouée dans la Conférence, mais même qu'en quelque manière qu'il ait ici tâché de tourner les choses, il n'a pu si bien faire qu'il ne l'avouât encore dans sa Relation.

A la vérité, c'est ici un des endroits où je reconnois le moins nos véritables discours. Mais il y en a encore assez pour le convaincre, puisque si cette Relation devient publique, tout le monde verra qu'il y reconnoît en termes formels, « que celui qui n'a pas lu encore l'Ecriture sainte la croit parole de Dieu de foi humaine, parce que son père le lui a dit, ce qui est un état de catéchumène; et que lorsqu'il a lu lui-même ce Livre, et qu'il en a senti l'efficace, il la croit parole de Dieu, non plus de foi humaine, parce que son père le lui a dit, mais de foi divine, parce qu'il en a senti lui-même immédiatement la divinité, et c'est là l'état de fidèle. »

Il est donc vrai qu'il a reconnu ce temps que j'entreprends de faire voir, où un chrétien baptisé n'est pas en état de faire un acte de foi surnaturelle et divine sur l'Ecriture sainte, puisqu'il ne la croit parole de Dieu que de foi humaine, et que la foi divine ne peut venir qu'après la lecture.

De quelque manière qu'il tourne cette foi humaine, c'est une proposition qui fait horreur, qu'un chrétien baptisé et en âge de raison ne puisse pas faire sur l'Ecriture un acte de cette foi par laquelle nous sommes chrétiens. Car de là il s'ensuit que le chrétien qui va lire la première fois l'Ecriture sainte ne doit, ni se porter de lui-même, ni être induit par personne à dire en l'ouvrant « Je crois, comme je crois que Dieu est, que l'Ecriture que je m'en vas lire est sa parole. » Il faut au contraire lui faire dire : « Je m'en vas examiner si dorénavant et dans le reste de ma vie je dois lire cette Ecriture avec une telle foi. » C'est renverser tout l'ordre de l'instruction; c'est perdre le fruit du baptême; c'est réduire les chrétiens à instruire leurs enfans baptisés comme s'ils ne l'étoient pas, et qu'ils eussent encore à délibérer de quelle religion ils doivent être.

Et ce que dit M. Claude sur l'Ecriture, il faut qu'il le dise sur la foi de la Trinité, sur celle de l'incarnation, sur celle de la mission de Jésus-Christ et de la rédemption du genre humain. Car ce qui force M. Claude et tout protestant à dire que le fidèle qui n'a pas lu l'Ecriture sainte ne peut croire que de foi humaine qu'elle soit inspirée de Dieu, c'est qu'autrement il faudroit reconnoître un acte de foi divine sur la seule autorité de l'Eglise : ce qui seroit reconnoître cette autorité comme infaillible, et renverser par les fondemens toute la nouvelle Réforme. Mais le même argument revient sur tous les articles de notre foi; et si le fidèle peut croire d'une foi divine et la Trinité et l'incarnation et la mission de JésusChrist, sur la seule autorité de l'Eglise et avant que d'avoir lu l'Ecriture sainte, je conclurai toujours avec une pareille certitude que l'autorité de l'Eglise sera infaillible. Il faut donc par la conséquence du principe de M. Claude et de tous les protestans, il faut, dis-je, en réduisant les chrétiens qui vont lire l'Ecriture sainte à une simple foi humaine sur cette Ecriture, les y réduire tout d'un coup sur les points les plus essentiels de notre croyance.

Ce n'est pas là la méthode de nos pères; ce n'est pas ainsi qu'ils ont appris aux chrétiens à instruire leurs enfans. Quand ils les ont baptisés dans leur bas âge, on a dit en leur nom : Credo, « Je crois. >> N'importe que nos réformés aient changé cette formule; elle est de la première antiquité, et sera toujours sainte et vénérable malgré eux. Mais cette formule dont on use envers les enfans, nous fait voir que lorsqu'ils auront l'usage de la raison, il faudra d'abord leur apprendre à faire un acte de foi, et ne point perdre de temps à les y exciter. Ils en seront donc capables: ils pourront dire le même Credo qu'ils auroient dit si on les avoit baptisés en âge de connoissance; et les réduire à une foi simplement humaine, c'est leur ôter la grace de leur baptême, et justifier la pratique aussi bien que la doctrine des anabaptistes.

Et je conjure Messieurs de la religion prétendue réformée de ne croire pas que je leur allègue ici les anabaptistes par une manière d'exagération, ou pour les rendre odieux : ces manières ne sont pas dignes de chrétiens. Je soutiens au pied de la lettre que la doctrine qu'enseigne ici M. Claude, et que tous les protestans doivent

enseigner avec lui, introduit l'anabaptisme. Car s'il faut tenir en suspens les actes de foi divine jusqu'à ce qu'on ait lu l'Ecriture sainte et qu'on soit instruit par soi-même; si tous les actes qui précèdent cette instruction ne sont pas des actes de chrétien, puisqu'ils n'ont pour fondement qu'une foi humaine : il faut par la même raison différer le baptême jusqu'à ce temps, et ne pas faire des chrétiens qui dans l'âge de raison soient incapables de produire des actes de leur religion.

IVe Réflexion sur ce que M. Claude nous fait sur l'Eglise la même difficulté que nous lui faisons sur l'Ecriture.

C'est en vain que M. Claude nous répond qu'il nous fera pour l'Eglise le même argument que nous lui faisons pour l'Ecriture; car il faudroit pour cela, que comme nous lui montrons un certain point, qui même dans l'usage de la raison précède nécessairement la lecture de l'Ecriture, il pùt aussi nous en montrer un qui précédât les enseignemens de l'Eglise mais c'est ce qu'il ne trouvera jamais. Quoi qu'il fasse, nous lui marquerons toujours avant la lecture de l'Ecriture un certain point, qui est celui où l'Eglise nous la met en main : mais avant l'Eglise il n'y a rien; elle prévient tous nos doutes par ses instructions.

C'est une erreur de s'imaginer qu'il faille toujours examiner avant que de croire. Le bonheur de ceux qui naissent pour ainsi dire dans le sein de la vraie Eglise, c'est que Dieu lui ait donné une telle autorité, qu'on croit d'abord ce qu'elle propose, et que la foi précède ou plutôt exclut l'examen.

De demander maintenant par quel motif Dieu nous fait sentir l'autorité de son Eglise, c'est sortir visiblement de la question. Il ne manque pas de motifs pour attacher ses enfans à son Eglise, à laquelle il a donné des caractères si particuliers et si éclatans. Cela même, qu'elle est la seule de toutes les sociétés qui sont au monde, à laquelle nul ne peut montrer son commencement ni aucune interruption de son état visible et extérieur par aucun fait avéré, pendant qu'elle le montre à toutes les autres sociétés qui l'environnent par des faits qu'elles-mêmes ne peuvent nier: cela même est un caractère sensible, qui donne une inviolable autorité

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