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que M. Claude en ait horreur: aussi est-elle autant éloignée de mon esprit et de l'esprit de tous les catholiques, que le ciel l'est des enfers, et je ne sais comment M. Claude a pu lire mes Instructions sans y voir tout le contraire de ce qu'il m'impose.

Puisque le lecteur a maintenant ces Instructions devant les yeux, je le prie de les repasser dans cet imprimé. Il y trouvera, à la vérité, qu'il est de l'essence de l'Eglise d'être visible par la prédication et par les sacremens: mais il y trouvera aussi « que les élus et les saints en sont la plus noble partie; qu'ils y sont sanctifiés, qu'ils y sont régénérés, souvent même par le ministère des réprouvés; qu'il ne les faut pas considérer comme faisant dans l'Eglise un corps à part, mais comme en faisant la plus belle et la plus noble partie 1. >>

On y trouvera qu'il est de l'essence de l'Eglise, «parce qu'elle est sainte, d'enseigner toujours constamment et sans varier une sainte doctrine; mais on trouvera aussi « que cette sainte doctrine, qu'elle ne cesse d'enseigner, enfante continuellement des saints dans son unité, et que c'est par cette doctrine qu'elle instruit et entretient dans son sein les élus de Dieu 2.» Est-ce là ce qu'on appelle une simple profession de la doctrine de Jésus-Christ sans réalité, et un pur amas d'hypocrites?

On y trouvera que l'enfer ne peut prévaloir contre la société visible et extérieure de l'Eglise mais on y trouvera aussi que c'est à cause « qu'il ne peut pas prévaloir contre les élus, qui sont la partie la plus pure et la plus spirituelle de cette Eglise 3. » C'est, dis-je, pour cela «que ne pouvant prévaloir contre les élus, il ne peut non plus prévaloir contre l'Eglise qui les enseigne, où ils confessent l'Evangile et où ils reçoivent les sacremens. » Ainsi loin qu'on puisse croire que cette Eglise, qui subsiste éternellement, puisse selon nos principes subsister sans les élus : on voit au contraire que nous regardons les élus comme faisant la partie la plus essentielle et la force de cette Eglise.

On y trouvera qu'il est de l'essence de l'Eglise jusqu'à la résurrection générale, d'avoir le ministère ecclésiastique qui la rend visible: mais on y trouvera aussi que l'effet de ce ministère est

1 Vid. sup., p. 511. — 2 Vid. sup., ibid. et seq.-3 Sup., p. 513.- Sup., p. 515.

d'amener les enfans de Dieu à la parfaite stature de Jésus-Christ, c'est-à-dire à la perfection, qui après les avoir rendus saints, les rendra glorieux en corps et en ame.

Enfin on y trouvera « la communion extérieure et intérieure des fidèles avec Jésus-Christ, et des fidèles entre eux : communion intérieure par la charité et dans le Saint-Esprit qui nous anime; mais en même temps extérieure dans les sacremens, dans la confession de la foi et dans tout le ministère extérieur de l'Eglise 1. »

De là je conclus que « ce n'est pas seulement la société des prédestinés qui subsistera à jamais; mais que c'est le corps visible où sont renfermés les prédestinés, qui les prêche, qui les enseigne, qui les régénère par le baptême, qui les nourrit par l'Eucharistie, qui leur administre les clefs, qui les gouverne et les tient unis par la discipline, qui forme en eux Jésus-Christ: c'est ce corps visible qui subsistera éternellement. »

On voit par là que, loin de faire une Eglise dont la communion soit purement extérieure de sa nature, et « intérieure seulement par accident, » le fond de l'Eglise est au contraire la communion intérieure, dont la communion extérieure est la marque, et que l'effet de cette marque est de désigner que les enfans de Dieu sont gardés et renfermés sous ce sceau. On voit aussi que les élus sont la fin dernière pour laquelle tout se fait dans l'Eglise, et ceux à qui doit servir principalement tout son ministère de sorte qu'ils font la partie la plus essentielle, et pour ainsi dire le fond même de l'Eglise.

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Si donc j'ai plus parlé de la communion extérieure que de la communion intérieure de l'Eglise, on voit bien que ce ne peut être que pour la raison que j'ai dite; c'est-à-dire que les prétendus réformés demeurant d'accord avec nous que le fond, pour ainsi parler, de l'Eglise étoit son union intérieure, je n'avois à établir que l'extérieure, dont ces Messieurs nous contestent la nécessité. Ainsi lorsque j'ai dit d'abord dans mon Instruction que l'Eglise étoit la société qui confessoit la vraie foi, M. Claude devoit entendre que cette confession de la bouche n'excluoit pas la créance du cœur, mais la supposoit plutôt dans la partie vivante et essen1 Sup., p. 516 et 517.

tielle de l'Eglise, dont je ne parlois pas alors, parce que ce n'étoit pas la question que j'avois à proposer et à résoudre. Conclure de ce silence que je n'admets point d'autre union essentielle au corps de l'Eglise, que cette union extérieure, c'est de même que si quelqu'un, ayant entrepris d'expliquer seulement ces ligatures extérieures qui tiennent le corps humain uni au dehors, et renferment pour ainsi parler dans une même continence avec les membres vivans les ongles, les cheveux, les humeurs peccantes et même les membres morts qui ne seroient pas encore retranchés du corps, on lui faisoit accroire qu'il ne connoît dans le corps humain aucun autre principe d'union; et dire sous ce prétexte, que selon les principes de cet homme il pourroit y avoir un corps humain qui ne seroit que cheveux, et ongles, et membres pourris, et humeurs peccantes, sans qu'il y eût en effet rien de vivant : c'est ce que fait M. Claude lorsqu'il conclut de mon discours, que l'Eglise de Jésus-Christ pourroit n'être qu'un amas de méchans et d'hypocrites.

Mais ceci s'éclaircira davantage dans la suite par les propres principes de M. Claude : il me suffit en cet endroit de lui faire voir que cette Eglise purement extérieure, qu'il appelle l'Eglise des cardinaux Bellarmin et du Perron et de M. de Condom est une Eglise qui ne subsiste que dans sa pensée; et on peut croire par la manière dont il a jugé de mes sentimens, qu'il n'a pas mieux entendu ceux de ces illustres cardinaux.

Xe Réflexion sur ce que la Confession de foi des prétendus réformés ne reconnoît point d'église qui ne soit visible, et sur ce que M. Claude répond à cette difficulté.

Pour montrer que le mot d'Eglise signifie dans le Symbole des apôtres une Eglise visible, j'ai posé pour fondement que dans une confession de foi telle qu'étoit ce Symbole, les mots étoient employés en leur signification la plus naturelle et la plus simple; et j'ai ajouté que le mot d'Eglise signifioit si naturellement l'Eglise visible, que les prétendus réformés, auteurs de la chimère d'Eglise invisible, dans toute leur Confession de foi n'employoient jamais en ce sens le mot d'Eglise, mais seulement pour exprimer

l'Eglise visible revêtue des sacremens et de la parole et de tout le ministère public. On peut voir les passages de cette Confession de foi que j'ai rapportés 1, avec les conséquences que j'en ai tirées. Ce n'est pas moi qui ai fait le premier cette remarque: elle est d'un synode national des prétendus réformés. Ces Messieurs, qui avoient tant prêché l'Eglise invisible, et qui pressés sur la succession, avoient appuyé sur ce fondement l'invisible succession dont ils se servoient, furent étonnés de n'en avoir pas dit un seul mot dans leur Confession de foi, où au contraire le mot d'Eglise se prend toujours pour l'Eglise visible. Surpris de ce langage si naturel aux chrétiens, mais si peu conforme aux principes de leur Réforme, ils firent ce décret en 1603, dans le synode de Gap, au chapitre qui a pour titre : Sur la Confession de foi. C'est par où commencent tous les synodes; et la première chose qu'on y fait, est de revoir cette Confession de foi; ce qui donnoit lieu aux imprimeurs de la réimprimer avec ce titre défendu dans les synodes: Confession de foi des Eglises réformées, revue et corrigée par le synode national. Mais venons au décret de Gap; en voici les termes : « Les provinces seront exhortées de peser aux synodes provinciaux en quels termes l'article xxv de la Confession de foi doit être couché, d'autant qu'ayant à exprimer ce que nous croyons touchant l'Eglise catholique, dont il est fait mention au Symbole, il n'y a rien en ladite Confession qui se puisse prendre que pour l'Eglise militante et visible; comme aussi au XXIX article, elles verront s'il est bon d'ajouter le mot pure à celui de vraie Eglise, qui est audit article : et en général tous viendront préparés sur les matières de l'Eglise. »

Nous avons rapporté la substance de cet article xxv. On peut voir dans le même endroit les articles xxvi, xxvii et xxvi. Et pour l'article XXIX, il porte que « la vraie Eglise doit être gouvernée selon la police que Notre-Seigneur Jésus-Christ a établie; c'est qu'il y ait des pasteurs, des surveillans et des diacres, afin que la pure doctrine ait son cours, et que les assemblées se fassent au nom de Dieu. >>

1 Vide sup., p. 508 et 3 Syn. de Privas, 1612.

2

suiv. Syn. de Gap, sur la Conf. de foi, art. 3. Sup., p. 508 et suiv.

L'addition du mot de pure Eglise, qu'on délibéroit d'ajouter à celui de vraie, est fondée sur une doctrine des prétendus réformés, qui dit qu'une vraie Eglise peut n'être pas pure, parce qu'avec les vérités essentielles elle peut avoir des erreurs mêlées, je dis même des erreurs grossières et considérables contre la foi. Et c'est un des mystères de la nouvelle Réforme, que M. Claude nous expliquera bientôt : mais ce n'est pas ici de quoi il s'agit. Ce qu'il y a d'important, c'est que ces gens, qui se disent envoyés de Dieu pour ressusciter la pure doctrine de l'Evangile ayant à expliquer, comme ils le déclarent eux-mêmes dans leur Confession de foi, « l'Eglise dont il est fait mention dans le Symbole, » n'avoient néanmoins parlé que de « l'Eglise militante et visible. » J'en dirois bien la raison : c'est que « cette Eglise, dont il est fait mention dans le Symbole, » est en effet l'Eglise visible; c'est que le mot d'Eglise naturellement emporte cette visibilité, et que le mot de catholique, bien loin d'y déroger, la suppose; c'est que dans une confession de foi il arrive souvent de parler suivant les idées naturelles que les mots portent avec eux, plutôt que selon les raffinemens et les détours qu'on invente pour se tirer de quelque difficulté. Ainsi l'Eglise invisible ne se présenta point du tout à nos réformés lorsqu'ils dressèrent leur Confession de foi; le sens d'Eglise visible y parut seul on ne vit rien en cela que de naturel jusqu'en 1603. En 1603 on se réveilla; on commença à trouver étrange qu'une église qui fondoit sa succession sur l'idée d'église invisible et d'église des prédestinés, n'en eût pas dit un seul mot dans sa Confession de foi, et eùt laissé pour constant que la signification naturelle du mot d'Eglise emportoit toujours une société visible; de sorte qu'à bien parler on ne pouvoit plus montrer la suite de l'Eglise sans montrer la suite de sa visibilité : chose entièrement impossible à la nouvelle Réforme. C'est ce qui portoit tout le synode à vouloir retoucher à cet article, et à exhorter les provinces à venir « prêtes sur les matières de l'Eglise, » qu'on n'avoit jamais bien entendues parmi les nouveaux réformés, qu'on n'y entend pas encore, et qui feront catholiques tous ceux qui sauront les bien entendre.

Mais c'étoit une affaire bien délicate de retoucher à cet article.

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