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pour lui offrir en esprit et en vérité le service raisonnable qu'il attend de ses créatures.

On peut voir par cette doctrine avec combien de vérité j'ai dit qu'une grande partie de nos controverses s'évanouiroit par la seule intelligence des termes, si on traitoit ces matières avec charité; et si nos adversaires considéroient paisiblement les explications précédentes, qui comprennent la doctrine expresse du concile de Trente, ils cesseroient de nous objecter que nous blessons la médiation de Jésus-Christ, et que nous invoquons les Saints, ou que nous adorons les images d'une manière qui n'est propre qu'à Dieu. Il est vrai que comme, en un certain sens, l'adoration, l'invocation et le nom de médiateur ne convient qu'à Dieu et à Jésus-Christ, il est aisé d'abuser de ces termes pour rendre notre doctrine odieuse. Mais si on les réduit de bonne foi au sens que nous leur avons donné, ces objections perdront toute leur force; et s'il reste à Messieurs de la religion prétendue réformée quelques autres difficultés moins importantes, la sincérité les obligera d'avouer qu'ils sont satisfaits sur le principal sujet de leurs plaintes.

Au reste il n'y a rien de plus injuste que d'objecter à l'Eglise qu'elle fait consister toute la piété dans cette dévotion aux Saints, puisque, comme nous l'avons déjà remarqué, le concile de Trente se contente d'enseigner aux fidèles que cette pratique leur est bonne et utile, sans rien dire davantage. Ainsi l'esprit de l'Eglise est de condamner ceux qui rejettent cette pratique par mépris ou par erreur. Elle doit les condamner, parce qu'elle ne doit pas souffrir que les pratiques salutaires soient méprisées, ni qu'une doctrine que l'antiquité a autorisée, soit condamnée par les nouveaux docteurs.

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La matière de la justification fera paroître encore dans un plus grand jour, combien de difficultés peuvent être terminées par une simple exposition de nos sentimens.

Ceux qui savent tant soit peu l'histoire de la Réformation pré1 Sess. XXV, Decr. de invoc., etc.

tendue, n'ignorent pas que ceux qui en ont été les premiers auteurs, ont proposé cet article à tout le monde comme le principal de tous, et comme le fondement le plus essentiel de leur rupture; si bien que c'est celui qu'il est le plus nécessaire de bien entendre.

Nous croyons premièrement que « nos péchés nous sont remis gratuitement par la miséricorde divine, à cause de Jésus-Christ'. » Ce sont les propres termes du concile de Trente, qui ajoute que « nous sommes dits justifiés gratuitement, parce qu'aucune de ces choses qui précèdent la justification, soit la foi, soit les œuvres, ne peut mériter cette grace. »

Comme l'Ecriture nous explique la rémission des péchés, tantôt en disant que Dieu les couvre, et tantôt en disant qu'il les ôte, et qu'il les efface par la grace du Saint-Esprit qui nous fait de nouvelles créatures: nous croyons qu'il faut joindre ensemble ces expressions, pour former l'idée parfaite de la justification du pécheur. C'est pourquoi nous croyons que nos péchés, non-seulement sont couverts, mais qu'ils sont entièrement effacés par le sang de Jésus-Christ, et par la grace qui nous régénère; ce qui, loin d'obscurcir ou de diminuer l'idée qu'on doit avoir du mérite de ce sang, l'augmente au contraire et la relève.

Ainsi la justice de Jésus-Christ est non-seulement imputée, mais actuellement communiquée à ses fidèles par l'opération du Saint-Esprit, en sorte que non-seulement ils sont réputés, mais faits justes par sa grace.

Si la justice qui est en nous n'étoit justice qu'aux yeux des hommes, ce ne seroit pas l'ouvrage du Saint-Esprit : elle est donc justice même devant Dieu, puisque c'est Dieu même qui la fait en nous, en répandant la charité dans nos cœurs.

Toutefois il n'est que trop certain que « la chair convoite contre l'esprit, et l'esprit contre la chair *, » et que « nous manquons tous en beaucoup de choses. » Ainsi quoique notre justice soit véritable par l'infusion de la charité, elle n'est point justice parfaite à cause du combat de la convoitise: si bien que le continuel gé-1 missement d'une ame repentante de ses fautes fait le devoir le plus 3 Tit., III, 5-7.

1 Conc. Trid., sess. vi, cap. IX. Galat., v, 17. Jacob., 111, 2.

2 Ibid., cap. VIII. —

nécessaire de la justice chrétienne. Ce qui nous oblige de confesser humblement avec saint Augustin, que notre justice en cette vie « consiste plutôt dans la rémission des péchés que dans la perfection des vertus. >>

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Sur le mérite des œuvres, l'Eglise catholique enseigne que « la vie éternelle doit être proposée aux enfans de Dieu, et comme une grace qui leur est miséricordieusement promise par le moyen de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et comme une récompense qui est fidèlement rendue à leurs bonnes œuvres et à leurs mérites, en vertu de cette promesse 1. » Ce sont les propres termes du concile de Trente. Mais de peur que l'orgueil humain ne soit flatté par l'opinion d'un mérite présomptueux, ce même concile enseigne que tout le prix et la valeur des œuvres chrétiennes provient de la grace sanctifiante, qui nous est donnée gratuitement au nom de Jésus-Christ, et que c'est un effet de l'influence continuelle de ce divin Chef sur ses membres.

Véritablement les préceptes, les exhortations, les promesses, les menaces et les reproches de l'Evangile font assez voir qu'il faut que nous opérions notre salut par le mouvement de nos volontés avec la grace de Dieu qui nous aide: mais c'est un premier principe, que le libre arbitre ne peut rien faire qui conduise à la félicité éternelle, qu'autant qu'il est mû et élevé par le Saint-Esprit.

Ainsi l'Eglise sachant que c'est ce divin Esprit qui fait en nous par sa grace tout ce que nous faisons de bien, elle doit croire que les bonnes œuvres des fidèles sont très-agréables à Dieu, et de grande considération devant lui: et c'est justement qu'elle se sert du mot de mérite avec toute l'antiquité chrétienne, principalement pour signifier la valeur, le prix et la dignité de ces œuvres que nous faisons par la grace. Mais comme toute leur sainteté vient de Dieu qui les fait en nous, la même Eglise a reçu dans le concile de Trente comme doctrine de foi catholique, cette parole de saint Augustin, que « Dieu couronne ses dons en couronnant le mérite de ses serviteurs. >>

1 Sess. VI, cap. XVI.

Nous prions ceux qui aiment la vérité et la paix, de vouloir bien lire ici un peu au long les paroles de ce concile, afin qu'ils se désabusent une fois des mauvaises impressions qu'on leur donne de notre doctrine. « Encore que nous voyions, disent les Pères de ce concile, que les saintes Lettres estiment tant les bonnes œuvres, que Jésus-Christ nous promet lui-même qu'un verre d'eau froide donné à un pauvre ne sera pas privé de sa récompense; et que l'Apôtre témoigne qu'un moment de peine légère, soufferte en ce monde, produira un poids éternel de gloire : toutefois à Dieu ne plaise que le chrétien se fie et se glorifie en lui-même, et non en Notre-Seigneur, dont la bonté est si grande envers tous les hommes, qu'il veut que les dons qu'il leur fait soient leurs mérites 1. »

Cette doctrine est répandue dans tout ce concile, qui enseigne dans une autre session que « nous, qui ne pouvons rien de nousmêmes, pouvons tout avec celui qui nous fortifie, en telle sorte que l'homme n'a rien dont il se puisse glorifier, » ou pour quoi il se puisse confier en lui-même; « mais que toute sa confiance et toute sa gloire est en Jésus-Christ, en qui nous vivons, en qui nous méritons, en qui nous satisfaisons, faisant de dignes fruits de pénitence, qui tirent leur force de lui, par lui sont offerts au Père, et en lui sont acceptés par le Pèrc 2. » C'est pourquoi nous demandons tout, nous espérons tout, nous rendons graces de tout, par Notre-Seigneur Jésus-Christ. Nous confessons hautement que nous ne sommes agréables à Dieu qu'en lui et par lui, et nous ne comprenons pas qu'on puisse nous attribuer une autre pensée. Nous mettons tellement en lui seul toute l'espérance de notre salut, que nous disons tous les jours à Dieu ces paroles dans le sacrifice : « Daignez, ô Dieu, accorder à nous pécheurs, vos serviteurs, qui espérons en la multitude de vos miséricordes, quelque part et société avec vos bienheureux apôtres et martyrs,..... au nombre desquels nous vous prions de vouloir nous recevoir, ne regardant pas au mérite, mais nous pardonnant par grace au nom de Jésus-Christ Notre-Seigneur. »

L'Eglise ne persuadera-t-elle jamais à ses enfans qui sont de1 Sess. VI, cap. XVI. — 2 Sess. Xiv, cap. vIII.

TOM. XIII.

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venus ses adversaires, ni par l'explication de sa foi, ni par les décisions de ses conciles, ni par les prières de son sacrifice, qu'elle croit n'avoir de vie, et qu'elle n'a d'espérance qu'en Jésus-Christ seul? Cette espérance est si forte, qu'elle fait sentir aux enfans de Dieu qui marchent fidèlement dans ses voies, une paix qui surpasse toute intelligence, selon ce que dit l'Apôtre. Mais encore que cette espérance soit plus forte que les promesses et les menaces du monde, et qu'elle suffise pour calmer le trouble de nos consciences, elle n'y éteint pas tout à fait la crainte, parce que si nous sommes assurés que Dieu ne nous abandonne jamais de lui-même, nous ne sommes jamais certains que nous ne le perdrons pas par notre faute, en rejetant ses inspirations. Il lui a plu de tempérer par cette crainte salutaire la confiance qu'il inspire à ses enfans, parce que, comme dit saint Augustin, « telle est notre infirmité dans ce lieu de tentations et de périls, qu'une pleine sécurité produiroit en nous le relâchement et l'orgueil; » au lieu que cette crainte, qui selon le précepte de l'Apôtre, nous « fait opérer notre salut avec tremblement, » nous rend vigilans, et fait que nous nous attachons avec une humble dépendance à celui « qui opère en nous par sa grace le vouloir et le faire suivant son bon plaisir, » comme dit le même saint Paul 3.

Voilà ce qu'il y a de plus nécessaire dans la doctrine de la justification; et nos adversaires seroient fort déraisonnables, s'ils ne confessoient que cette doctrine suffit pour apprendre aux chrétiens qu'ils doivent rapporter à Dieu par Jésus-Christ toute la gloire de leur salut.

Si les ministres après cela se jettent sur des questions de subtilité, il est bon de les avertir qu'il n'est plus temps désormais qu'ils se rendent si difficiles envers nous, après les choses qu'ils ont accordées aux Luthériens et à leurs propres frères sur le sujet de la prédestination et de la grace. Cela doit leur avoir appris à se réduire dans cette matière, à ce qui est absolument nécessaire pour établir les fondemens de la piété chrétienne.

Que s'ils peuvent une fois se résoudre à se renfermer dans ces limites, ils seront bientôt satisfaits; et ils cesseront de nous obs Philip., IV, 7. — Philipp., 11, 12. — 3 Ibid., 13.

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