Immagini della pagina
PDF
ePub

loit dans le filence des nuits, & prévenoit la voix de mes befoins. Chaque inftant de ma fragile existence a fatigué fa fenfibilité; chacun de mes dangers ajoutoit à fon amour. Trompée par lui, en me prodiguant les carreffes, que je ne fentois pas, elle jouiffoit déja des miennes, qui n'étoient que les fignes de mon bonheur. Elle a reçu mon premier fourire, qu'elle reçoive auffi ma derniere penfée ! Aujourd'hui encore, à tout moment, je retrouve fa vigilance & la tendreffe dans ces befoins du cœur, que l'ame maternelle feule fait deviner. Au milieu des fouffrances particulieres à fon fexe, ces foins la charment & la confolent. Exclue des nobles travaux & des fréquens plaifirs accordés à la force & à l'indépendance de l'hon:me, elle s'occupe à aimer, elle jouit dans ce qu'elle aime, & n'aime rien comme fon enfant. Oh! comment pourrai je donc la payer de cet excès d'amour qu'elle feule pouvoit m'accorder ? Que mnon pere me demande ma foumiffion, ma confiance, le facrifice de ma fortune, de ma vie, je fuis à lui comme il fut à moi, & mon bon-' heur ne se féparera pas de mon devoir, il me fera doux de lui tout rendre, de lui tout donner. Mais je réserve pour ma mere ce qui peut davantage la toucher, ce qui lui eft plus nécef. faire, tout ce qu'il y a de plus sensible, de plus délicat dans les égards, dans les prévenan ces, dans les épanchemens, dans les confolations; & pour les bien connoître, j'irai les chercher, les étudier dans fon cœur. Quand même, en portant plus de refpect à mon pere, je don,

nerois à ma mere plus d'amour, pourroit-il s'en offenfer? Ne fut-il pas un fils auffi? Pourroit-il blâmer en moi des fentimens dont il s'eft félicité dans fon cœur? Ma mire n'eft ele pas la compagne de fa vie? Quel cœur noble fut jamais jaloux de voir beaucoup aimer ce qu'il ne peut trop chérir? Heureux donc ceux qui ont encore ces devoirs touchans à remplir, qui, en entrevoyant le repos & le bonheur pour eux mêmes, les augmentent dans leur pensée par l'efpoir de les répandre fur un objet fi cher & fi facré ! & malheureux ceux qui l'ont perdu avant le tems, qui l'ont perdu fans avoir accompli le vœu de leur pieuse tendreffe, & qui, en concevant des penfées dignes de lui plaire, ne peuvent plus les adreffer qu'à fon ombre (*)! (Mercure de France.)

PRETENDUS forciers arrivés à Lyon dans un char volant, au neuvieme fiecle.

DANS ces tems d'ignorance & de barbarie,

où l'on brûloit les Juifs, où l'on tranfportoit les Saxons incrédules d'une contrée en l'autre pour leur faire changer d'opinion, tous les événemens qui fembloient extraordinaires, paru

['] L'ouvrage d'où font tirés ces morceaux eft deftiné à entrer dans le dictionnaire de morale de la nouvelle Encyclopédie.

rent aux peuples de la France méridionale les effets d'une force furnaturelle, & du pouvoir des forciers.

Les inondations, & fur-tout les orages qui détruifoient les récoltes & l'efpoir des hameaux, leur furent attribués, & l'on diftinguoit parmi eux les fouffleurs de tempêtes, tempeftarii, Ces forciers ne faifoient pas le mal fans intérêt : toutes les productions des champs, tous les grains abattus par la grêle ou les vents, fruits de le haine ou de leurs plaifirs, paffoient à l'aide des chars volants qu'ils dirigeoient à volonté dans les airs, dans une contrée nommée Magonnie; c'eft là que les forciers trouvoient un débit avantageux de leurs rapines, que leurs greniers, toujours remplis, étoient fans ceffe vuidés, & qu'ils faifoient bientôt des fortunes confidérables.

:

Nos peres vouloient bien les chaffer & fe délivrer de leurs fléaux; mais comment faire ? Les pourfuivre dans les airs n'étoit pas chofe aifée il eût fallu avoir le fecrets de leurs voi tures aér ennes. La voix de l'homme n'étoit pas affez perçante pour les intimider & fe faire entendre auu-deffus des nues. Alors on éleva les cloches; on en fit les interpretes de la frayeur publique. Mais avant de les inftaller dans leur emploi, on voulut leur donner un caractere plus impofant, & de-là vient l'ufage de leur conférer le baptême. Tous les rituels du tems contenoient des exorcifmes contre les auteurs des maléfices, des prieres pour conjurer les forciers d'interrompre leurs jeux & leur commer

ce; & dès que les cloches eurent été établies pour porter ces paroles de paix, on se mit à fonner pour conjurer le tems.

Sous l'épifcopat d'Agobart (*), on vit à Lyon dans la place du Change, vis à-vis la maison des comtes de Forez, une femme & trois étran⚫ gers, qu'on crut defcendus d'un char aérien. Le peuple, furieux d'une grêle qui avoit, quelques jours auparavant, détruit fon espérance, s'imagina voir en eux des habitans de Magonnie; il les faifit & les conduifit aux prifons de l'archevêché. Déja on fe préparoît à les brûler, lorfqu'Agobard, l'homme le plus éclairé de fon fiecle, chercha à les fauver, & publia à cette occafion un traité favant & curieux contre P'existence des chars aériens & de la contrée de Magonnie. Mais en vain le généreux prélat employoit les citations des SS. PP. & les raifonnemens tirés de la phyfique du tems; le bûcher alloit s'allumer, fi, plus fage encore qu'éloquent, il n'eût fait fecrétement évader les étrangers, objets de la haine du peuple, & qui feroient devenus les victimes de fa fureur.

Dans un moment confacré à la gloire de MM. Montgolfier, où tout parle de leur découverte, où de hardis pilotes traverfent les airs, fans même l'efpoir de trouver Magonnie, il est doux de penfer qu'on a le bonheur de vivre dans un fiecle éclairé, & fous un gouvernement qui fait offrir des récompenfes à ceux

() Vayez ce journal, page 97,

qui, huit fiecles auparavant, auroient rifqué d'être la proie des flammes & de la vengeance du peuple.

Voyez COLONIA, Histoire Littéraire de Lyon, tome II, page 3; l'Hiftoire de l'église de Lyon, par Poullin de Lumina, page 125.

(Journal de Normandie.)

De l'origine des Américains. Extrait d'un voyage Anglois.

La maniere, dont l'Amérique a reçu ses pre

miers habitans, a été, depuis fa découverte, la matiere de beaucoup de recherches. On ne raffemblera point ici les fentimens différens & les conjectures de tous ceux qui ont traité ce fujet; quand on fait attention à l'obscurité dont cette queftion eft enveloppée (ce qui eft une fuite néceffaire du manque d'écriture de tout tems inconnue aux Américains, & de l'incertitude d'une tradition purement orale parmi eux pendant tant de fiecles) on a lieu de craindre de ne pouvoir, même après les recherches les plus exactes, parvenir à quelque degré de certitude. Cette crainte eft d'autant mieux fondée, que les langues des différentes nations indiennes font tellement variées, qu'elles indiquent que cette population n'est pas l'ouvrage d'une feule nation ou d'une feule famille, mais de plufieurs qui ont pu aborder dans cette partie du monde, à différentes épo

ques.

Rien n'eft fi oppofé que les conjectures de la plupart des écrivains fur la population de l'A

« IndietroContinua »