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vouloit, fuivant l'ufage d'alors, lui faire quantité de préfens; il lui offrit des cruches d'argent fur des foucoupes de vermeil, des facs d'étoffe riche pleins d'or des fourrures précieuses, de beaux tapis de Perfe de foie en broderie. Sur ces entrefaites, entra la fille du mar. chand, grande & belle veuve, vêtue de noir & ayant l'air affligé; elle mit ces préfens aux pieds du czarewitz. Le pere le fupplia de les recevoir; il ajouta, en parlant de fa fille, que les parens & les créanciers de fon mari la perfecutoient & l'opprimoient. Fewei répondit: J'accepte ces préfens, mais je les donne » tout de fuite à votre fille, défirant qu'elle » trouve bientôt un nouvel époux qui faffe plus » de cas de fa vertu que de fa beauté & de » fon bien. «

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De retour chez lui, le czarewitz apprit que fon palfrenier étoit tombé de cheval, & avoit une jambe dangereusement endommagée. Il alla le voir & fit appeller le chirurgien ; tandis qu'on panfoit la plaie, il remplit la botte d'argent, & dit » Donnez cela au palfrenier : il » y aura fuffisamment de quoi payer fa cure a.

Peu de tems après, les nations de la horde d'Or firent une irruption fur le territoire du czar, & prirent plufieurs de fes fujets qu'ils vouloient emmener. Le monarque raffembla des troupes, qu'il envoya pour repouffer l'ennemi. Ces troupes, chafferent en effet les nations de la horde d'Or au delà des frontieres, & envoyerent au czar ceux de fes fujets qui avoient été pris, avec quelques captifs des

ennemis. Il y en avoit qui difoient : » Il faut » traiter ces gens-là auffi mal que leur nation » a traité les nôtres «. Ce propos ayant été rapporté à Fewei, il dit: » Il ne nous con

vient point de rendre le mal pour le mal : » traitons plutôt ces prifonniers avec humanité, » & donnons leur le modele des vertus qu'ils » n'ont pas pratiquées «.

L'année fuivante, le czarewitz prit une épouse & en eut des enfans, qui lui reffembloient; enfuite il voyagea, vifita divers états & revint dans le fien. Le prince & toute fa famille parvinrent à l'âge le plus avancé; on exalte encore aujourd'hui fon nom & fa gloire dans le pays où il a vécu.

Quel que puiffe être le mérite de cet ouvrage, le nom augufte de l'auteur eft bien fait pour engager à le lire.

(Journal encyclopédique; Journal général de France.)

SERMENT d'un médecin : in-8vo. A Philadelphie, & fe trouve à Paris, chez les marchands de nouveautés. 1785.

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N ne croit plus aux fermens; la morale & les mœurs les ont également décriés parmi nous le caractere d'un honnête-homme jure pour lui; fa parole fuffit, & les fermens d'un homme fufpe&t font auffi fufpects que fa parole.

Ta parole fuffit, & je la crois plus pure,
Que les autels des dieux entourés du parjure.

C'eft à peu près le langage qu'un honnête-hom me, parmi nous, tient toujours à un honnêtehomme.

Chez les anciens, c'étoit autre chose : là, le plus malhonnête homme l'étoit rarement affez pour violer un ferment: le ferment étoit une parole donnée aux dieux, & les engagemens qu'on prenoit avec eux étoient bien plus refpectés que ceux qu'on prenoit avec les hom mes. Machiavel & Montefquieu ont pensé que les Romains durent en partie les vertus avec lefquelles ils foumirent le monde, à leur refpect fuperftitieux pour le ferment. Chofe étrange & extraordinaire, fi quelque chofe pouvoit paroître extraordinaire & étrange à qui connoît le cœur humain! Les légions romaines, engagées par ferment à fuivre un conful, & voulant l'abandonner enfuite, déliberent de le tuer, pour être libres de l'engagement qu'elles ont pris avec lui, fous la garantie des dieux. Ainfi, elles croyoient fe relever d'un ferment, en maffacrant celui qui l'avoit reçu; de braves foldats penfoient qu'ils cefferoient d'être parjures en deve nant affaffins! Mais les faits de ce genre font rares dans l'antiquité, & les faits fublimes produits par le respect du ferment, font en grand nombre.

On prononçoit un ferment lorfqu'on entroit dans des fonctions très importantes, lorsqu'on embraffoit des profeffions qui exigent une grande

confiance de la fociété. Ainfi, parmi nous encore, le magiftrat qui va exercer le pouvoir des loix, l'avocat qui doit en être l'interprete, appellent le ciel, & dieu même, pour les rendre témoins des engagemens qu'ils prennent avec les hommes.

S'il y a un état dont les fonctions exigent une forte de religion dans les vertus, c'eft, fans contredit, celui de médecin : nous remettons à chaque inftant dans fes mains, notre vie & celles de nos pere & mere, la pudeur de nos filles. La nature, qui a caché à leurs regards tous les mouvemens de nos organes, les expofe à des erreurs inévitables, & la moindre de leur négligence, la plus légere de leurs distractions, peut réduire des familles entieres au désespoir. Quelques médecins de l'antiquité nous ont tranfmis les fermens qu'ils prononce◄ rent, en fe confacrant à ces fonctions auffi ef frayantes pour eux, que pour ceux qui s'abandonnoient à leur art. On en voit un dans Hip. pocrate, & celui-là, fans doute, fut écouté favorablement du ciel, quoique prononcé entre les mains des faux dieux.

Nos médecins les plus célebres ont prononcé leur ferment dans les formules prefcrites par les facultés de médecine; il eft impoffible qu'on en ait parlé; car les fermens réduits en formule, deviennent des formes vaines, auxquelles ceux mêmes qui les prononcent n'attachent guere d'importance.

Celui que nous annonçons, mérite à tous égards d'être diftingué. Il a été fait en vers,

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& prononcé à Reims, en face d'une églife & près d'un hôpital, en préfence à la fois, pour ainfi dire, du dieu qu'on invoquoit, & des malades auxquels on fe dévouoit. Le jeune médecin qui en eft l'auteur, n'a pas fuivi négli gemment un ufage établi; la vue des devoirs facrés & redoutables auxquels il alloit s'engager, a ému fon ame, & il en a exprimé les mouvemens & les vœux dans une langue qu'il a parlée long-tems avec fuccès, & dans laquelle il s'étoit rendu l'interprete d'Homere.

Le début a quelque chofe de bien noble & de bien touchant.

Grand dieu, dont la bonté furpaffe la puiffance,
Toi qui cherches l'amour & la reconnoiffance,
Qui répandant par-tout la vie & les bienfaits,
Composes ta grandeur des heureux que tu fais;
C'est devant ce lieu faint, rempli de ta préfence,
Afyle où les remords retrouvent l'espérance,
C'eft près de cet hofpice, offert à la douleur,
Temple plus faint encore, & plus cher à ton cœur,
C'eft devant ce fénat de favans, dont la vie
S'ennoblit des travaux où leur choix m'affocie,
Que je jure (dieu bon tourne vers moi les yeux,
Ecoute mes fermens, écris-les dans les cieux)
Je jure qu'à mon art, obftinément livrée,
Ma vie aux paffions n'offrira nulle entrée !

Je jure que jamais l'intérêt ni l'envie,

Par leurs lâches confeils ne fouilleront ma vie ;.
Que par-tout mes refpects chercheront les talens,
Que ma tendre pitié, que mes foins confolans
Appartiendront fur-tout au malheur folitaire,

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