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TOULOUSE,

IMPRIMERIE A. CHAUVIN ET FILS,

RUE DES SALENQUES,

28.

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PARIS
ERNEST THORIN, ÉDITEUR

LIBRAIRE DES ÉCOLES FRANÇAISES D'ATHÈNES ET DE ROME
DU COLLÈGE DE FRANCE ET DE L'ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE
7, RUE DE MÉDICIS, 7

1879

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L'étude de la grammaire grecque ou de la grammaire latine. n'est considérée en général que comme un moyen d'arriver à l'intelligence des auteurs; c'est là, en effet, le principal avantage pratique que l'on puisse retirer de cette étude; mais on peut aussi voir dans la grammaire une science valant la peine d'être recherchée pour elle-même et méritant d'occuper une place indépendante parmi les différentes sciences qui ont l'antiquité pour objet, au même titre que la science des monuments figurés ou la science des institutions. Étudier l'antiquité classique, c'est étudier la vie intellectuelle et morale du peuple grec ou du peuple romain sous toutes ses formes, dans leur littérature et dans leur art, dans leur histoire et leurs institutions publiques, dans leurs coutumes privées et leurs croyances religieuses. Or la langue d'un peuple est aussi un des produits de sa vie intellectuelle; elle peut donc être l'objet d'une science distincte, qui est la grammaire. Et, comme toute langue est une chose essentiellement changeante et variable, qui se transforme sans cesse et ne s'immobilise que lorsqu'elle meurt, la grammaire vraiment scientifique ne peut guère s'appliquer qu'à une langue déjà morte, pour en tracer l'histoire et la faire revivre, dans la mesure où cela est possible, telle qu'on la parlait ou qu'on l'écrivait à telle ou telle époque. L'histoire de la langue est un complément nécessaire de l'histoire de la littérature; l'une ne peut être sans l'autre; on ne saurait se faire une idée complète du génie d'un écrivain ni le mettre au rang qui lui convient, si l'on ne connaît pas exactement son style et si l'on ne sait pas la place qu'il occupe dans l'histoire de la langue. Et ici les formules

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générales et vagues ne suffisent pas; ce n'est pas assez de dire que Tacite est concis et que son style a une couleur poétique : il faut faire voir par le détail en quoi se montre cette concision et en quoi consiste cette couleur poétique. Dire que ce sont là des études arides et minutieuses, où l'on risque de perdre le sentiment de ce qui est beau, serait injuste et puéril; autant vaudrait dire à un musicien que, pour avoir appris le contre-point et l'instrumentation, il est devenu moins propre qu'un autre à comprendre et à apprécier une belle symphonie. Dans tout art, et par conséquent aussi dans l'art du langage, il y a une partie technique, dont la connaissance n'a jamais empêché les personnes de goût de juger avec goût : elle leur permet seulement de mieux se rendre compte de leurs impressions et de donner à leurs appréciations plus de sûreté.

Il ne faut donc point dédaigner les études qui ont pour objet d'éclaircir même tel ou tel petit point particulier de la langue d'un auteur. Les plus humbles travaux de ce genre peuvent profiter à la science, pourvu qu'ils soient faits avec intelligence et avec méthode. Ce sont les recherches de détail précises et minutieuses qui rendent possibles les vues d'ensemble nettes et justes; ce n'est qu'à force d'accumuler beaucoup de petits faits isolés qu'on arrive à construire l'histoire d'une langue. D'ailleurs cette sorte de travaux demande plus de qualités d'esprit qu'on ne serait tenté de le croire d'abord. Il peut sembler, à première vue, que faire des catalogues d'exemples n'est qu'une œuvre de patience, un métier où l'oeil et la main ont plus à faire que l'intelligence; mais ce n'est pas tout de réunir des exemples: il faut savoir les comparer entre eux, marquer les ressemblances et les différences, reconnaître dans un fait grammatical les circonstances essentielles et celles qui ne sont que des accidents, tenir compte des raisons particulières qui dans chaque cas ont pu modifier l'expression et faire choisir telle construction de préférence à telle autre, enfin se défier avant tout des distinctions subtiles et e pas se hâter d'imaginer des règles que les faits viennent démentir ensuite. Tout cela demande une grande rigueur de méthode, beaucoup de critique, de netteté d'esprit et de bon sens, un sentiment très-fin de la langue qu'on étudie, je dirais même beaucoup de goût, si ce terme n'était pas peut-être trop ambitieux en pareille matière. C'est grâce à ces qualités, par exemple, que la grammaire latine de M. Madvig, qui n'est qu'un livre élémentaire, est un guide presque toujours sûr et un modèle à imiter; c'est l'absence des mêmes qualités qui fait que tant d'autres travaux,

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