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Mais il sévit en même temps contre ceux qui mendient et qui peuvent travailler. « Tout fainéant, disent les Établissements, qui n'ayant rien et ne gagnant rien fréquente les tavernes, doit être arrêté, interrogé sur ses facultés; banni de la ville, s'il est surpris en mensonge, convaincu de mauvaise vie. »

Quelques années plus tard, l'affranchissement des serfs par Philippe-le-Bel rendit une multitude de bras au travail libre; « mais tous ne pouvaient, ne savaient ou ne voulaient pas être employés. Les calamités qui accablèrent la France, les guerres, les maladies, les disettes, l'anarchie, multiplièrent les pauvres, diminuèrent les ressources, encouragèrent les désordres. La charité s'affaiblissait, les revenus du clergé étaient diminués ; transformés en bénéfices, ils étaient réservés aux titulaires, et quelquefois étaient envahis par les seigneurs laïques; les pauvres qu'ils avaient servi à entretenir allaient au hasard solliciter d'autres ressources. La

guerre entre les pauvres et les riches éclata plus d'une fois par le soulèvement des premiers; elle se produisit dans l'explosion de la Jacquerie1. »

Dans les villes, on voyait des troupes de mendiants que leur nombre et l'enchevêtrement des rues étroites et tortueuses protégeaient contre la police; refusant obstinément de travailler, ils importunaient pendant le jour, par des plaintes hardies et des plaies simulées, la pitié des passants qu'ils dévalisaient pendant la nuit.

La peinture et le roman ont immortalisé cette Cour des Miracles où se réfugiaient tous les bandits de Paris,

1. De Gérando, De la Bienfaisance publique, tome IV, IV partie, liv. I, ch. 2, art. 1er, 2 fer.

«cité de voleurs, hideuse verrue à la face de Paris, égout d'où s'échappait chaque matin et où revenait croupir chaque nuit ce ruisseau de vices, de mendicité et de vagabondage, toujours débordé dans les rues des capitales; ruche monstrueuse où rentraient le soir avec leur butin tous les frêlons de l'ordre social; hôpital menteur où le bohémien, le moine défroqué, l'écolier perdu, les vauriens de toutes les nations, Espagnols, Italiens, Allemands; de toutes les religions, juifs, chrétiens, mahométans, idolâtres; couverts de plaies fardées, mendiant le jour, se transfiguraient la nuit en brigands immense vestiaire, en un mot, où s'habillaient et se déshabillaient à cette époque tous les acteurs de cette comédie éternelle que le vol, la prostitution et le meurtre jouent sur le pavé de Paris1. »

C'est contre cette plaie des mendiants valides, toujours combattue et toujours renaissante, que nous allons voir les rois de France épuiser toutes les sévérités de leur pouvoir.

La plus ancienne ordonnance de ce genre est celle du roi Jean, de février 1350. Dans les trois jours, tous ceux qui étaient trouvés « oiseux ou joüans aux dez ou mandians » devaient être emprisonnés pendant quatre jours; en cas de récidive, « mis au pillory, » et la troisième fois signez au front d'un fer chaud et bannis desdits lieux.

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De plus, le roi engageait les curés et les moines à dire dans leurs sermons que «< ceux qui voudront donner aumosnes n'en donnent à nuls gens sains de corps et de membres, n'à gens qui puissent besongne faire dont ils

4. Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, liv. II, ch. 6.

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puissent gaigner leur vie; mais les donnent à gens aveugles, méhaignez et autres miserables personnes1. » C'est l'application de la doctrine constamment professée par l'Église.

IV

L'ordre chronologique, qui nous est imposé par le plan que nous avons suivi, nous amène à deux dispositions d'un genre tout différent, où l'on peut voir l'origine de l'assistance judiciaire et de la médecine gratuite. Ce sont deux ordonnances de Charles V, datées de 1364 et 1370.

La première oblige les avocats et procureurs à donner gratuitement leurs conseils aux plaideurs pauvres :

Que à telles et pour telles povres miserables personnes, nosdites gens, quand les cas y écherront, facent pour Dieu leurs requestes et pieces, et les oyent diligemment et les delivrent briefment. » (Art. 6.)

La seconde enjoint aux chirurgiens de Paris de panser gratuitement les pauvres non admis dans les hôpi

taux.

Le xve siècle n'offre à signaler aucune disposition importante relative à la bienfaisance publique; le Pouvoir s'occupait plus alors de réprimer les excès de la mendicité que de diminuer par des mesures directes et préventives le nombre des malheureux. A vrai dire, tous les efforts tentés pour le soulagement des pauvres étaient concentrés dans la charité privée, qui avait multiplié les fondations et créé dans ce but des asiles de toutes sortes. Les papes et les conciles encouragèrent toujours

1. Anciennes lois françaises, coll. Isambert, Ordonnance de 4350.

les distributions d'aliments et de vêtements aux malheureux. Aussi un grand nombre de ces donations étaientelles faites au clergé séculier et régulier, qui était chargé avec ces ressources de secourir les pauvres.

Mais la plupart de ces asiles étaient desservis par une foule de petits Ordres religieux, de règles et de noms différents, qui subirent la décadence des xve et xvIe siècles; et ce fut là justement l'une des causes qui amenèrent l'introduction de l'élément laïque dans l'administration de la charité, comme nous allons le voir dans le chapitre suivant.

CHAPITRE IX.

DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE EN FRANCE DU XVIe SIÈCLE JUSQU'A LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.

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SOMMAIRE

Mesures de François I et Henri II contre les men

Taxe des pauvres.

II. De l'administration des hôpitaux.

Réforme des abus.

Mis

sion donnée aux juges royaux. Édit de Michel de l'Hospital.

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IV. Henri IV et Louis XIII. Nouvelles mesures contre les men

diants; à Paris, dans les provinces.

Monts-de-Piété.

But qu'il

V. Louis XIV. Établissement de l'Hôpital-Général.

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VI. Fondations particulières. Les Enfants-Trouvés.

VII. Mesures contre les mendiants.

VIII. XVIIIe Siècle. Ordonnances destinées à réprimer la mendicité. Les Enfants-Trouvés. De l'administration des hôpitaux. Incendie de l'Hôtel-Dieu de Paris.

I

Le nombre des pauvres semble avoir pris aux xvio et XVIIe siècles un accroissement considérable qui était loin de répondre malheureusement à une augmentation pro

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