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cet ouvrage, primé deux fois, ne peut que décourager ceux qui y cherchent des renseignements.

P. 135. Sur la question de l'h sonore, il y aurait lieu de signaler les analyses expérimentales que M. W. E. Scripture a faites de quelques h américaines (Researches, pp. 46-7).

P. 199. A propos des causes de l'assimilation, il eût été opportun de mentionner les termes très rationnels imaginés par M. Jespersen (Lehrbuch, p. 164) verweilende Assimilation et vorgreifende Assimilation. Ces deux appellations, malheureusement assez difficiles à traduire en français, ont sur les anciennes le grand avantage de renfermer l'explication des phénomènes.

P. 232 Je ne puis admettre, du moins pour les occlusives, l'opinion que « la durée d'une consonne entre deux voyelles se réduit à celle de sa tenue ». La caractéristique auditive de ces consonnes me paraît être uniquement le bruit de leur explosion. La tenue, ou pour mieux dire l'occlusion, se réduit pour les consonnes sourdes à un silence, dont on ne peut tenir compte pour la consonne elle même. Quant aux occlusives sonores, la résonnance vocalique de leur occlusion se confond avec celle de la voyelle, et l'oreille ne perçoit que l'impression de l'explosion. Nous avons exposé nos vues sur ce sujet dans nos Variations, pp. 22 sq. M. Rousselot a combattu notre hypothèse, mais M. A. Meillet l'a reprise et a invoqué à son appui le témoignage de la prosodie classique (Bull. de la Soc. de Ling. de Paris, no 57, p. LXXIV). A propos des consonnes, il eût été utile de faire valoir l'importance relative de la durée des occlusions, alors que l'opinion courante ne soupçonne pas même leur présence, Enfin, il faudrait établir une distinction entre les occlusions des sourdes, et celles des sonores; celles-ci sont plus brèves, du moins en français : nous publierons prochainement dans la revue de M. Rousselot une étude relative à ce sujet.

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P. 235. Les constatations faites par M. E. A. Meyer relativement aux différences de durée des voyelles avant les consonnes sourdes et avant les consonnes sonores en anglais ont été vérifiées pour l'alle. mand par le même phonéticien dans l'étude Zur Vokaldauer im Deutschen (Uppsala 1904, tirage à part des Nordiska Studier offertes à M. Ad. Noreen en 1904). De notre côté, nous avons trouvé des divergences de traitement analogues en français. Nous en parlons. dans le travail annoncé plus haut.

P. 237. L'influence de la longueur d'un groupe phonétique sur une syllabe qui en fait partie a été étudiée dans deux dialectes flamands par MM. Colinet et Goemans (Leuvensche Bijdragen, 5e et 8e années). Cette influence, analogue à celle que nous avons signalée

en français, offre ceci de particulier que les abrégements constatés par les deux savants belges affectent des voyelles accentuées et non plus des voyelles atones. (Cf. notre compte rendu dans la Revue de l'Instruction publique en Belgique, année 1908, pp. 317-8.)

P. 243. Aux quelques recherches expérimentales faites sur le ton, il faut ajouter l'étude de M. E. A. Meyer, Der musikalische Wortakzent im Japanischen, parue dans le Monde Oriental (vol. I, fasc. 1). Ensuite, les Intonation Curves de M. Daniel Jones, où sont analysés plusieurs enregistrements gramophoniques, constituent une tentative qui mérite d'être indiquée.

Aux chapitres de l'évolution phonétique, le livre de M. Ch. A. Sechehaye, Programme et méthodes de la linguistique théorique, avait droit à une mention. En terminant, M. Roudet exprime l'espoir de voir la phonétique ramener l'évolution des sons à quelques lois générales. Sur ce point, nous continuons à partager les doutes que M. Sechehaye a émis et que nous avions déjà for mulés dans notre étude Une question de méthode en linguistique. Dans ce travail ainsi que dans notre article Un tournant de l'histoire de la linguistique (Paris, Champion, 1911), nous avons essayé de montrer que, si l'on veut gagner quelque unité dans l'étude des langues, on y arrivera en suivant dans leur histoire la participation opérante des facultés humaines à leur conservation. Nous avons préconisé une sorte d'inversion de méthode à laquelle, croyonsnous, on finira par aboutir tôt ou tard.

Enfin, en fait d'expériences et de méthodes de recherche, M. Roudet s'en tient généralement aux enseignements de M. Rousselot. Il s'agit, -en effet, de procédés très sûrs et surtout très commodes. Mais les savants étrangers recherchent et inventent d'autres moyens d'investigation qui ne sont peut-être pas encore bien éprouvés, mais dont on ne doit pas se désintéresser, tels que les méthodes optiques et photographiques de M. Struycken, des frères Laudet, de M. Zwaardemaker, etc., ou encore les curieuses études de M. W. E. Scripture sur les disques gramophoniques. Il eût été utile de les signaler et d'en apprécier la valeur, dans la mesure du possible.

PHILOSOPHIE.

ANT. GRÉGOIRE.

196. Ch. Lalo, Les sentiments esthétiques. Paris, Alcan, 1910. 5 frs. Dans cet important travail, l'auteur se propose de réagir contre la superstition sentimentaliste dans l'esthétique. Ardent partisan de l'esthétique scientifique, il combat la double tendance qui pèse lourdement sur la science du beau: le mysticisme et le sentimentalisme.

Il a divisé son ouvrage en deux parties. La première, partie néga

tive, est une critique des tendances mystiques dans la philosophie de l'art; la deuxième, partie positive, est une étude du rôle exact qu'il faut réserver aux états affectifs dans la pensée, ou, mieux, dans la conscience esthétique.

Approfondissons cet exposé.

La première partie est intitulée : Le sentimentalisme et le mysticisme dans l'esthétique. Dans le premier chapitre M. Lalo analyse la psycho-physiologié du sentiment, examinant le côté physiologique et le côté psychologique. Sa théorie peut se résumer en cette phrase: « La nature psychologique des états affectifs supérieurs comporte des états partiels et des réactions d'ensemble, de même que leur nature physiologique se compose à la fois de phénomèmes périphériques dans certains organes et de processus centraux dans le cerveau. » Tout état affectif suppose comme condition préalable la présence d'une tendance, condition qui est à la fois physiologique et psychologique. Ainsi, le sentiment sous toutes ses formes et doué de toutes ses manifestations psychologiques ou physiologiques, n'est jamais que la face affective d'une tendance. L'auteur combat la théorie physiologique qui veut identifier les états affectifs complexes avec la conscience confuse que nous prenons de leurs manifestations organiques, et la théorie psychologique qui considère les manifestations organiques comme un effet et non une cause. D'après lui, l'opposition entre la physiologie et la psychologie ne peut être qu'artificielle ; il est impossible de nier sérieusement que tout fait de conscience ait une base organique : c'est là plus qu'un fait, c'est un postulat, à la fois de la science et de la métaphysique. Et cette opposition provient de ce que la question est mal posée. Pour concilier les deux théories, ou du moins pour préciser leurs rapports, il conclut en répétant que le sentiment est la face affective d'une tendance.

Le deuxième chapitre (Le nouveau sentimentalisme esthétique) qui a déjà paru dans la Revue philosophique (1908), est très spécial. Par exemple, M. Lalo s'étend longuement sur l'Einfühlung esthétique, théorie allemande d'une métaphysique nébuleuse à en juger par cette définition de l'esthéticien Lipps : « L'Einfühlung consiste à vivre l'action intérieure de la volonté, qui s'exprime à l'extérieur. » Le nouveau sentimentalisme esthétique réduit toutes les formes de l'activité esthétique (sensation, association, imitation, jeu...) à une objectivation des sentiments ou sympathie symbolique. M. Lalo examine plus particulièrement les conceptions de Lipps et de Volkelt. La critique qu'il formule contre le sentimentalisme esthétique, se résume en trois points. 1o L'objectivation des états affectifs ne caractérise pas spécialement la vie esthétique. 2o C'est une notion confuse et contra

dictoire qui n'explique rien, mais est elle-même à expliquer. Cette obscurité n'est pour le psychologue que le signe d'une insuffisance de l'analyse ; pour le logicien, qu'une insuffisance de l'explication. 3o Sa véritable signification philosophique, c'est le mysticisme, c'est-à-dire le rejet de toute possibilité d'explication rationnelle et scientifique. Dans le chapitre troisième, Mysticisme esthétique, est réfutée la théorie de Guyau et de G. Séailles sur le Vitalisme esthétique, qui veut expliquer tous les faits esthétiques en les ramenant à une manifestation de la vie et qui aboutit enfin à l'identification mystique du sujet pensant avec l'objet pensé et réciproquement. Et la conclusion est la même que pour l'Einfühlung: un refus d'analyser des impressions.

Arrivons à la deuxième partie de l'ouvrage, à celle qui est consacrée à l'étude des sentiments esthétiques.

Tout d'abord elle passe en revue les sentiments de plaisir esthétique l'admiration, la sympathie et la vitalité. Celle-ci consiste dans le sentiment d'un accroissement de notre énergie vitale, accroissement dû à une excitation extérieure favorable. Les théoriciens ont donné différents noms à cette irradiation indéfinie d'une source d'énergie intense dans tout notre être; ils l'ont appelée spontanéité de la vie, jeu harmonieux des facultés, expansion de notre personnalité, libre développement de l'imagination créatrice... L'exercice de l'activité esthétique a pour effet un accroissement parallèle de notre activité générale. « Notre respiration s'accélère, notre pouls bat plus vite, nos nerfs s'affinent, nos idées se succèdent plus riches et plus denses. »

Que sont les sentiments accessoires et anesthétiques? Ce sont des accompagnements de la pensée esthétique, qui peuvent être de la plus grande importance dans l'ensemble de notre existence, mais qui ne sont ni les causes ni les effets de notre contemplation du beau. Les sentiments accessoires peuvent se ramener à trois : l'attitude personnelle, la contagion affective et la conception générale de la vie. Le sentiment d'attitude personnelle est la « réaction que nous opposons accessoirement aux impressions esthétiques et qui, en fait, les accompagne toujours en vertu de la constitution complexe de notre caractère ou de notre personnalité. » Interviennent ici les éléments anesthétiques : tempérament, habitudes, associations d'idées, contenu actuel de la mémoire, idéal moral, convictions religieuses, connaissances scientifiques etc... dont le reflet colore naturellement à sa façon notre contemplation.

Quant à la contagion affective, appelée aussi suggestion, c'est cette sympathie au sens étymologique du mot, cette vibration psycholo

gique par influence, que nous éprouvons plus forte et plus sûre pour les êtres qui sont les plus semblables à nous.

Enfin la conception générale de la vie n'est qu'un retentissement des deux sentiments précédents. L'impression que nous ressentons devant une œuvre peut être toute contraire à celle de son auteur; d'autres fois, et même le plus souvent, elle est voulue par l'auteur de l'œuvre « Trop de réalisme, c'est-à-dire trop de contagion directe des états affectifs, tend naturellement à être non forcément laid, mais anesthétique cet excès n'est pas contraire à l'art; il est à côté de l'art. >>

L'intensité des sentiments accessoires n'est pas proportionnée à la valeur esthétique; ils n'accompagnent même pas toujours toutes les œuvres d'art. On peut comparer à cet égard une poésie classique ou parnassienne avec une œuvre romantique; l'une exclut systématiquement les accompagnements extérieurs à l'art pour l'art, l'autre les recherche. Les intenses passions anticléricales ou anticapitalistes, qui rendent parfois un regain d'actualité et de succès populaire à certains chefs-d'œuvre de Molière, de Beaumarchais ou d'Augier, n'ajoutent rien à l'émotion esthétique proprement dite des spectateurs, au contraire; il est même facile de calculer par la pensée tout ce qu'elles lui enlèvent.

Donc les sentiments accessoires peuvent être tantôt présents, tantôt absents, selon les sujets ou les circonstances; ils sont soulevés en nous par une pensée esthétique comme ils le seraient par toute autre impression forte. Mais ils n'ont un sens esthétique que s'ils accompagnent les facteurs véritables de la pensée esthétique.

Nous voici au cœur même de la question, aux états d'âme vraiment caractéristiques du beau dénommés par M. Lalo les sentiments techniques. Il résume les rapports affectifs qui s'établissent entre l'œuvre et nous, sous le nom de sentiments de jeu esthétique; appelle sentiments de supériorité technique ceux par lesquels l'œuvre unit l'auteur et son public; enfin sentiments d'harmonie. les états d'âme diffus qu'éveillent en nous les rapports internes et externes que nous percevons dans l'oeuvre et dans le milieu esthétique où elle nous apparaît.

Le sentiment d'absolu, d'achevé, de parfait, qui s'empare de nous quand nous sommes possédés par la contemplation d'un chef-d'œuvre, c'est le sentiment de supériorité technique. Celle-ci est naturellement toute comparative; notre jugement sur elle varie avec nos expériences personnelles. De la sorte, supériorité technique est simplement synonyme d'évolution, et tout changement, allât-il à certains égards veis. le pire, est donc par lui-même une supériorité. Le « modern style »,

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