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dentale de l'Afrique; mais que, ne se propageant point parmi les négres, elle borne ses ravages aux équipages des navires européens. Il y a lieu de croire qu'elle s'était introduite ainsi parmi les bâtimens qui étaient, au printems de l'année dernière, dans le port de Sierra-Leone. On sait seulement avec certitude que ce fut dans les derniers jours de mars 1823 que le sloop de guerre le Bann quitta cette colonie, après une relâche pendant laquelle il communiqua librement, soit avec la terre, soit avec les bâtimens récemment arrivés des Indes occidentales, notamment avec le navire marchand la Caroline, qui, ayant perdu tout son équipage par la fièvre jaune, excepté seulement le maître et deux matelots, ne put venir au mouillage que par l'assistance des hommes que le capitaine du Bann lui envoya.

Les effets de cette confiance funeste ne tardèrent pas à se développer; la fièvre jaune éclata à bord de ce dernier bâtiment; et, pendant sa traversée de SierraLeone à l'île de l'Ascension, elle fit périr treize hommes en vingt-huit jours; elle continua ses ravages avec la même violence, quand le Bann eut jeté l'ancre devant cette île, le 25 avril; et, de cette époque au 2 juin, elle fit succomber, en sept jours, vingt autres individus. On apprend, par le journal du chirurgien, que l'équipage du Bann était, au départ de Sierra-Leone, de cent sept Européens et de vingt-sept nègres. Aucun de ceuxci ne fut atteint de la maladie, tandis que quatre-vingtdix-neuf des premiers, ou, à huit hommes près, la totalité, furent frappés de la contagion; il en mourut trente-trois, ou précisément le tiers des malades.

Personne n'ignore que l'Ascension est un rocher volcanique de deux à trois lieues de diamètre, élancé au milieu de l'Océan équatorial, à quatre ou cinq cents lieues du littoral de l'ancien et du nouveau Monde, presque entièrement dépouillé de végétation, privé d'eau, battu par les vents, situé hors de la sphère des émanations des continens, et n'ayant ni marais, ni population condensée, ni aucune des causes locales auxquelles la fièvre jaune est communément attribuée. Les attestations les plus respectables établissent, de plus, qu'il n'y avait eu aucun cas de maladie quelconque, depuis le mois de septembre 1822 jusqu'en mai 1823, et qu'il n'était arrivé aucune mutation dans la garnison anglaise, qui était composée de vingt-huit hommes, officiers compris.

Mais, peu de jours après que le vaisseau infecté fut venu au mouillage, la fièvre jaune se déclara tout à coup dans cette garnison; elle y parut avec tous les caractères qui forment son type spécial, et notamment avec le vomissement noir et les hémorragies. Il est extrêmement remarquable qu'elle ne se communiqua point à un poste de six hommes, placé dans une autre partie de l'île, et n'ayant point de communication avec le débarcadaire, tandis qu'elle se répandit par les relations immédiates avec le navire qui en était infecté, non-seulement dans la garnison, mais encore à bord du bâtiment le Driver, qui vint relâcher à l'Ascension sur ces entrefaites. Tels furent les ravages de la contagion, qu'un rapport du 5 août, nous apprend qu'il ne restait plus que six hommes des vingt-deux du poste

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principal de l'île; elle avait fait périr les seize autres, et de plus cinq femmes et quatre enfans.

Les officiers de santé, qui d'abord n'avaient pas cru la maladie contagieuse, et qui conséquemment n'avaient point fait interdire la communication entre le sloop le Bann et la garnison de l'Ascension, ont reconnu quelle avait été leur erreur; et ils ont déclaré, dans leurs rapports, qu'ils avaient acquis par ces circonstances, la conviction que la maladie avait été transmise, par contagion, d'un individu à un autre.

La preuve de ces faits est établie par des documens officiels; elle est appuyée par l'autorité du savant et respectable docteur Gilbert Blane, premier médecin 'du roi d'Angleterre. C'est par ses soins que ces docuinens ont été recueillis, et il les a soumis à l'examen le plus attentif.

Il en résulte :

1o Que la fièvre jaune a été portée, en 1823, par les communications maritimes, au delà de l'équateur, dans l'hémisphère austral, et dans la route du cap de BonneEspérance et des contrées orientales;

2o Qu'elle a été communiquée par un navire à un autre navire, et à la garnison de l'île de l'Ascension, où elle a paru pour la première fois;

3o Qu'elle ne s'est point transmise dans cette île au delà de la sphère des communications, et que les hommes qui se sont trouvés séquestrés naturellement n'en ont pas été atteints;

4° Enfin, qu'en éclatant avec violence, au mois de mai, par une température modérée, sur un rocher nu,

isolé, battu par les vents, où il n'existe ni bois, ni marais, ni d'autre population qu'un faible poste militaire, elle a montré qu'elle peut quelquefois être indépendante des conditions considérées comme nécessaires à sa propagation; et qu'il suffit, dans certains cas, que son germe soit importé dans un lieu quelconque, pour qu'il produise, en se développant, les effets les plus meurtriers, et fasse périr le tiers, la moitié, ou même les trois quarts de ceux qu'il peut atteindre.

Alex. MOREAU DE JONNES.

POLITIQUE GÉNÉRALE.

DE LA PREMIÈRE COLONIE FORMÉE PAR LES AMÉRICAINS EN AFRIQUE (1).

X (2) Dans l'opinion des personnes les plus éclairées des ÉtatsUnis, la partie de leur population qui se compose de noirs et de gens de couleur, est un chancre politique funeste au bienêtre de cette grande république, et jusqu'à un certain point contraire à l'essor de prospérité que favorisent toutes ses

(1) Une partie des renseignemens donnés dans cet article sont tirés d'une brochure américaine, intitulée: The seventh annual Report, etc. Septième Rapport annuel de la Société américaine pour la colonisation des gens de couleur libres. Washington, 1824.

(2) Nos lecteurs peuvent se rappeler que ce signe est celui par lequel nous sommes convenus de désigner les articles que la Censure avait rejetés; nous distinguerons les passages qu'elle avait supprimés dans cet article par le même signe, placé au commencement et à la fin de chaque suppression.

autres institutions. L'esclavage est un contre-sens au sein d'une nation qui regarde tous les hommes comme égaux; d'une na-tion qui honore le travail, d'une nation où tous les pouvoirs politiques émanent du peuple, et n'ont d'autre objet que son plus grand bien. Mais, sans entrer à ce sujet dans aucune question politique, nous nous bornerons à l'observation d'un ouvrage américain (The Christian Spectator), où l'on compare la population, la force, l'industrie et l'importance des états du Nord qui n'admettent point l'esclavage, avec la faiblesse relative des états du Sud, qui l'admettent. « Que deviendraient, dit l'auteur, ces champs bien cultivés, ces riches villages, ces manufactures animées de nos états septentrionaux, s'ils tombaient entre les mains des serfs de la Pologne ou de la Russie, et s'ils étaient cultivés d'après le système de l'esclavage? et que ne deviendrait pas, au contraire, la Virginie, si ses 425,000 nègres pouvaient être remplacés par de robustes et libres cultivateurs, semblables à ceux de l'état de New-York ou du Massachusset? » X

L'état relatif de souffrance d'une partie des habitans du pays, au milieu de tous les autres, n'est propre qu'à amener des crises fâcheuses. Et qu'on ne se figure pas que le malaise atteigne seulement les nègres esclaves; les noirs et les hommes de couleur libres eux-mêmes s'y trouvent frappés d'une espèce de réprobation inévitable, ineffaçable comme la nuance de leur peau. C'est en vain que les institutions les plus libérales leur ouvrent aux États-Unis toutes les carrières; on n'en voit presque point dans les stations les plus honorables de la société. Dès son enfance, l'homme de couleur est l'objet du sarcasme de ses camarades d'école; il se sent dédaigné, avanɛ de pouvoir en comprendre la cause; il est puni avant d'avoir été coupable. Le nègre libre sent qu'il est de la même espèce dont on fait les esclaves, et que l'homme blanc n'en est ja~

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