Immagini della pagina
PDF
ePub

ÉCONOMIE POLITIQUE.

AN INQUIRY INTO THE PRINCIPLES, etc.

RECHERCHES

SUR LES PRINCIPES DE DISTRIBUTION DE LA RICHESSE

qui contribuent le plus au bonheur des hommes; par William THOMPSON (1).

Aucune question, dans la science sociale, ne nous paraît présenter un intérêt égal à celle que M. Thompson a entrepris de traiter. Ce n'est point en raison de la richesse, prise abstraitement, mais en raison de la distribution de cette richesse, qu'un peuple participe à toutes les douceurs, à toutes les jouissances, que le travail accumulé de l'homme peut procurer à l'homme, ou, au contraire, qu'il sent les privations de la misère redoublées par la vue de l'opulence d'autrui. La question de la distribution de la richesse implique celle de la liberté ou de l'esclavage des classes travaillantes de la nation; elle implique celle de la moralité publique, qu'une heureuse médiocrité favorise, qu'une disproportion effrayante entre l'opulence et la misère rendent impossible: elle implique celle du progrès des lumières, qui est accéléré ou retardé par l'état d'aisance plus ou moins grande de ceux qui se livrent aux études : elle implique enfin celle de l'ordre politique tout entier ; car les diverses classes de la nation ne maintiennent guère leur participation aux pouvoirs publics, qu'autant qu'elles ont pu défendre leur part dans la distribution de la richesse publique.

Le titre du livre de M. Thompson paraissait indiquer qu'il avait ramené la science de l'économie politique à son vrai principe, à celui dont elle ne devrait jamais s'écarter, le bonheur de l'espèce humaine. Nous avions, comme lui, été frappés de

(1) Londres, 1824; Longman. I vol. gr. in-8° de 600 pages; prix 14 shell.

ce que, parmi les économistes, plusieurs, prenant les moyens pour la fin, oubliaient l'homme, en s'occupant des produits de l'industrie de l'homme, et calculaient seulement comment la richesse pouvait s'accroître indéfiniment, sans songer à ce qui importait bien davantage, aux moyens de faire participer un plus grand nombre de créatures humaines au bonheur qu'elle peut procurer. Souvent, nous avions été tentés de dire, comme M. Thompson, dans ses observations préliminaires (p. v): « Que ces spéculateurs mécaniques ne comptaient pour rien, dans l'homme, l'intelligence et la sympathie; qu'ils ne voyaient en lui qu'un instrument, tel que la charrue et le métier à tisser, ou tout au plus tel que le cheval, employé comme lui à produire... Que, du reste, recherchant seulement le plus grand produit, et la plus grande consommation possible, sans demander jamais par qui, ils ne s'informaient point si le produit était dû à un travail facile qui entretînt parmi la population la santé et la joie; si, au contraire, il était dû à un travail excessif, qui détruisît le bonheur et la vie, autrement que pour calculer si la destruction plus ou moins rapide de leurs machines animées ou inanimées, augmenterait le prix de fabrique des produits. Quant à sa consommation, ils ne s'informaient pas davantage si les produits du travail de l'homme répandaient la joie et l'abondance parmi toute la population, ou s'ils étaient commandés pour satisfaire les caprices d'un petit nombre de riches vivant dans des palais, qui, toujours rassasiés de jouissances, demandent en vain à la variété de réveiller leurs sens endormis et leurs goûts émoussés. »

L'auteur du livre placé sous nos yeux, qui, d'après son titre même, se proposait de résoudre ce grand problème social, vit dans un pays où les spéculations les plus hardies sur les élémens de l'ordre social sont permises, et où elles sont en même tems sans danger, parce qu'une grande et glorieuse expérience les éclaire toujours : il a pu y voir l'industrie plus libre et de

puis plus long-tems libre que dans tout le reste de l'Europe; la classe moyenne plus honorée, ses jouissances désignées par un mot propre à l'Angleterre, ses comforts mieux soignés; et cependant, les extrêmes de l'opulence et de la misère plus rapprochés, plus souvent en présence que nulle part ailleurs. Sa vue aurait pu embrasser à la fois, dans un espace peu étendu, tous les avantages et tous les abus de l'organisation européenne la plus perfectionnée : toutes les applications des théories de notre tems, à côté de tous les débris de la législation des siècles les plus barbares. Aussi, le titre seul du livre de M. Thompson a-t-il excité très-vivement notre curiosité.

Nous devons l'avouer, la première vue de cet ouvrage a fait succéder une sorte d'effroi à toutes nos espérances : le volume n'a que 600 pages; mais ces pages sont si longues, le caractère est si fin, l'impression si serrée, que 1,500 pages d'un in-8° ordinaire ne suffiraient pas à les reproduire. Patience encore, si, en feuilletant le livre, nous avions vu qu'il contenait des faits, des connaissances locales, des observations positives, des citations au bas des pages qui annonçassent des études antérieures; non, il était aisé de se convaincre que le livre était purement spéculatif; c'était une longue chaîne de raisonnemens, qui, si par malheur ils n'étaient pas justes, s'ils venaient à reposer sur une fausse base, ne nous laissaient espérer aucun fruit d'un immense travail,

Quand ensuite nous avons commencé la lecture, notre découragement a augmenté; jamais nous ne nous étions trouvés accablés par un plus grand nombre de mots pour transmettre un moindre nombre d'idées : jamais nous n'avions vu redoubler plus d'efforts, et des efforts plus vains, pour retourner de cent manières un argument, avant de trouver celle qui pouvait le rendre convaincant. Jamais nous n'avions vu un auteur s'y prendre de plus loin, se mettre à l'œuvre avec plus d'appareil pour établir une idée commune, ou déployer un plus grand luxe

d'argumentation pour prouver ce qui n'a pas besoin de preuves. Et cependant, chaque période d'un style difficile et peu correct est entravée par un si grand nombre d'idées accessoires, qu'on est obligé de réfléchir sur chaque ligne, pour ne pas perdre le fil du raisonnement, ou ne pas donner, sans s'en être aperçu, son assentiment à des principes que plus tard on voudra combattre. D'autre part, plus nous avancions, plus nous trouvions les preuves des qualités honorables de l'écrivain, de celles qui peuvent le mieux compenser l'absence des talens littéraires, et qui rendent plus pénible le rôle du critique.

Au premier abord, en voyant M. Thompson toujours animé d'une tendre sympathie pour toutes les souffrances de ses semblables, en le voyant toujours dirigé par un désir ardent de contribuer au bonheur de tous, sans acception de couleur, de race, de nation, en le voyant prêter une oreille aussi attentive aux plaintes du nègre dans les colonies, ou de l'esclave russe qu'à celles du paysan irlandais, ou du manufacturier de Birmingham, nous avons soupçonné qu'il appartenait à cette Société des amis, à cette admirable secte des quakers, qui, étrangère à toutes les rivalités nationales, embrasse tous les hommes dans son amour, et donne à tous le glorieux exemple du dévouement et des sacrifices pour la cause de l'humanité. Notre erreur, il est vrai, n'a pas pu durer long-tems; l'auteur joint, à son amour pour l'humanité et pour la liberté, un sentiment d'hostilité pour toutes les sectes religieuses, que l'on rencontre rarement en Angleterre, et dont l'expression est quelquefois blessante chez lui; elle forme un contraste sensible avec les sentimens de cette bienveillance universelle sur laquelle tout son système repose: et si son livre était de nature à avoir un plus grand nombre de lecteurs, il aurait probablement causé beaucoup de scandale.

Plus nous avons été trompés dans les espérances que le titre de ce livre nous avait fait concevoir, plus aussi nous avons

éprouvé de fatigue à nous faire une juste idée des principes qu'il annonce, et plus nous nous croyons obligés de présenter à nos lecteurs le résumé de ces principes. Nous le trouvons dans la section quinzième du chapitre premier, p. 173.

« Si nous sommes entrés avec un grand zèle et des détails minutieux dans l'exposition des preuves des propositions que nous avons mises en tête de chaque section de ce chapitre, c'est que nous avions l'intention d'établir un petit nombre de règles simples, intelligibles, et de la plus haute importance, pour servir comme de premiers principes dans la distribution de la richesse. De même que nous avons jusqu'à présent prouvé directement leur vérité, c'est-à-dire, leur accord avec l'organisation et les circonstances de l'homme, et leur tendance à préparer le plus grand bonheur qu'on puisse attendre de la richesse; de même, nous continuerons franchement et sans hésitation, dans les chapitres subséquens, à suivre plus loin la vérité, partout où elle pourra nous conduire, dans le développement de toutes les autres conséquences qui peuvent intéresser l'humanité, et qui paraissent découler d'un attachement sans déviation à ces simples règles. L'observation de ces règles ou lois conduira sans effort à la jouissance de la plus grande portion des bienfaits de l'égalité qu'on peut obtenir sans un dommage prépondérant, c'est-à-dire, sans violer la sécurité, et avec la sécurité, sans diminuer et finalement sans anéantir la production elle-même. Chaque personne exerçant des droits est naturellement tenue de respecter les mêmes droits dans tout autre membre de la communauté. Le grand secret démontré est donc que c'est l'intérêt de toutes les communautés de substituer la raison et le choix à la force, dans la distribution de la richesse, aussi bien que dans tous les autres intérêts; et que, dans la distribution de la richesse, comme dans tous les autres départemens de la morale, le devoir et l'intérêt des individus coïncident, se mêlent, et forment par leur aggrégation le

« IndietroContinua »