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chiens et à la fureur des Français, et de nous faire sentir quel est le sort funeste d'une province qui a tant de charmes pour séduire et qui manque de forces pour se défendre. Il montre partout combien il est dur de vivre sous le joug de l'étranger. Il regrette qu'aucun des princes d'Italie n'ait su tirer parti des dispositions de leur peuples, pour leur faire sentir tout le prix de l'indépendance, et pour rendre à ce beau pays, dont on blâme les vices sans en attaquer les causes, cette ancienne dignité qu'il a entièrement perdue. Il pense même que, s'il se fût rencontré en Italie un chef, non tel qu'en produisit l'ancienne Rome, mais tel seulement qu'il en parut au tems de Laurent de Médicis, de Castruccio, de Jules de la Rovère, appuyé sur l'opinion publique, précédé d'une bannière italienne, il eût été l'auteur de grands événemens en Italie et en Europe. (Livre vIII, page 114.) C'est peut-être par suite de cette idée, dont notre historien se montre vivement pénétré, et dont il sent toute l'importance, qu'il ajoute foi à ce bruit, que Pje VI, encouragé par le cardinal Orsini, avait conçu le projet de former une espèce de fédéralisme ou plutôt d'alliance de tous les princes d'Italie, dont il aurait été le chef. Il est vrai qu'un danger commun et imminent pouvait faire disparaître dans de telles circonstances ces élémens d'ambition et de discorde qui les tenaient séparés; mais il n'est pas moins vrai qu'une fédération semblable pouvait seule opposer une force nationale, capable d'empêcher l'invasion et les progrès de l'ennemi.

Telles sont les considérations générales, mais caractéristiques, que nous a suggérées la lecture de l'histoire de M. Botta; elles nous paraissent les plus propres à faire apprécier l'esprit de cet ouvrage. Le plan de ce recueil ne nous permet guère d'entrer dans des discussions spéciales. Nous savons que notre auteur a subi, dans quelques détails de son histoire, la critique d'un écrivain trop sévère, et peut-être, sous quelques rapports, moins impartial qu'il ne le prétend; mais le petit nombre de

ses observations n'est-il pas le plus grand éloge que l'on puisse faire d'un ouvrage de cinq volumes? Nous pourrions même examiner quelques-unes de ces observations qui nous semblent annoncer plutôt des préventions nationales ou personnelles qu'une entière impartialité, à l'égard de certains personnages, de certaines classes, nous oserons dire encore, de certaines maximes. Il ne serait pas difficile de faire voir qu'en trouvant quelquefois notre historien un peu trop exagéré à quelques égards, le critique ne s'est pas aperçu qu'il mérite aussi le même reproche sous d'autres rapports. C'est ainsi que, croyant être l'historien de son tems, on n'est que l'avocat de ses propres opinions, ou, ce qui est pire, des opinions des autres. Et peutêtre, nous attirerions-nous le même blâme, si nous entrions dans ces dangereuses discussions.

Concluons donc que l'histoire de M. Botta a tout le mérite nécessaire pour intéresser ses lecteurs; que ce mérite ne résulte pas moins de l'importance du sujet que du talent de l'écrivain; que son impartialié est plus grande encore qu'on ne pouvait l'attendre d'un historien contemporain ; et que la diction et l'élégance de sa composition originale ajoutent beaucoup à son intérêt. Nous devons prévenir aussi nos lecteurs que nous avons apprécié l'ouvrage de M. Botta dans sa composition italienne, dont M. J. Didot a fait une édition magnifique, et où les qualités de l'écrivain se font encore mieux remarquer que dans l'ouvrage français, où nous avons jugé néanmoins plus convenable de puiser nos citations.

F. SALFI.

RÉSUMÉ DE L'HISTOIRE DU DANEMARCK,

par M. P. LAMI (1).

Les RÉSUMÉS de l'histoire des différens peuples de l'Europe,

(1) Paris, 1824. 1 vol. in-18 de 300 pages. Lecointe et Durey, libraires, quai des Augustins, no 49. Prix 2 fr.

que publient aujourd'hui plusieurs hommes de lettres, sont des ouvrages sans prétention, mais éminemment utiles. L'objet des auteurs n'est point d'apprendre quelque chose de neuf à ceux qui ont fait de l'histoire d'un pays leur étude particulière; mais de réunir dans un cadre aussi étroit que possible les faits les plus remarquables et les événemens les plus importans qui ont exercé sur la destinée des peuples une influence désastreuse ou salutaire. Le second but qu'ils se sont proposé, a été d'offrir à la jeunesse une lecture à la fois amusante et instructive, pour l'encourager à l'étude de l'histoire, presque toujours sèche et aride. Si les auteurs ont su réunir l'exactitude dans les récits, l'impartialité dans les jugemens, la correction dans le style; si à chaque fait un peu important ils ajoutent des réflexions courtes, mais justes et piquantes, ils pourront être persuadés que, dans très-peu de tems, leurs ouvrages seront entre les mains de cette classe nombreuse d'hommes dont les occupations habituelles ne leur permettent point d'étudier à fond l'histoire, et qui cependant ne veulent point ignorer les grands événemens qui ont causé la prospérité ou la décadence des peuples, et qui ont influé sur le sort de l'humanité en général.

Nous osons prédire un pareil succès à l'ouvrage de M. Lami, que nous annonçons aujourd'hui avec de justes éloges. Si nous y faisons quelques légères corrections, si nous hasardons. quelques critiques, nous remarquerons d'abord, en faveur de M. Lami, qu'il est extrêmement difficile d'écrire l'histoire d'un pays qu'on n'a pu observer que de loin, et dont on ne sait pas la langue; ensuite, nous avouerons que, toutes les fois qu'il lui est arrivé de se tromper, il a eu pour garans des autorités qui ont toujours joui d'un grand crédit dans sa patrie. Nous allons nous borner à un petit nombre de réflexions qui feront apprécier le mérite de cet ouvrage.

Félicitons d'abord M. Lami d'avoir osé rejeter les récits men

songers qui, depuis plus d'un siècle et demi, ont trompé l'Europe au sujet de la révolution de 1660, à laquelle les rois de Danemarck durent ce pouvoir sans limites, destructif de toute prospérité publique, dont ils jouissent encore aujourd'hui. Les estimables éditeurs de la Collection des constitutions de tous les peuples, publiée l'année dernière en six volumes (1). Quoiqu'ils aient eu sous les yeux les sources où M. Lami a puisé, ont néanmoins cru devoir maintenir la tradition arcienne, ils y ont été déterminés sans doute par des raisons qui leur ont paru bonnes, et que nous ne nous permettrons pas de critiquer, parce qu'elles nous sont inconnues.

On a souvent répété qu'en 1660 le peuple danois avait, de bon gré et de son propre mouvement, donné au roi Frédé ric III la souveraineté illimitée et absolue. On a désigné cet acte comme un suicide national; et ce mot expressif, mais injuste dans l'application qu'on en faisait, nous l'avons vu reproduit dans une brochure politique récemment publiée.

Si l'on demande quelle est l'autorité sur laquelle se fonde une assertion qui accuserait tout un peuple de stupidité, tout le monde cite Molesworth, envoyé de la Grande-Bretagne à la cour de Copenhague. Cependant, il est assez remarquable qu'en aucun endroit de ses Mémoires, il n'attribue cet acte au peuple danois, et qu'il n'en accuse qu'un certain nombre d'intrigans et d'ambitieux. Il y a plus: Molesworth n'a pas pu dire ce qu'à toute force on a voulu lui fairé dire, sans se mettre en contradiction avec lui-même. En effet, nous lisons dans l'introduction de ses Mémoires (page 36, édition de Nancy, 1694) ces propres mots : « Si l'on objecte que les princes ont acquis le droit d'être absolus et arbitraires, lorsque les sujets ont cédé

(1) Nous donnerons incessamment une analyse étendue de ce grand ouvrage, qu'il a été nécessaire d'ajourner sous le régime de la Censure.

leurs libertés, il y a des gens dans le monde, qui se hasarderont de répondre, que l'on ne peut supposer qu'aucun peuple, à moins qu'il ne fût hors de sens, ou poussé par les factions ou par la peur, ait jamais donné à personne un pouvoir absolu; non plus que ses propres franchises et libertés, et celles de sa postérité. »

Il est encore à remarquer que Molesworth n'est venu en Danemarck que trente ans après la révolution de 1660, dont, par conséquent, il n'a pas été témoin oculaire. Il est vrai qu'il assure (page 122 ) « qu'il ne dira rien qu'il n'ait appris de gens qui ont été témoins oculaires, et qu'il ne tienne de personnes qui y ont eu la principale part et qui y ont joué un rôle considérable. » Mais il dit plus loin (page 368) « On n'a jamais entendu que personne ait été trouvé coupable du crime de lèsemajesté ; le gouvernement a pris des racines profondes et il est désormais établi sur des fondemens tellement solides, que personne n'oserait seulement ouvrir la bouche, pour élever une plainte contre lui.» Ajoutons à cela, qu'en sa qualité d'ambassadeur du roi d'Angleterre à la cour de Danemarck, Molesworth ne voyait habituellement que les ministres, les courtisans et les hauts fonctionnaires publics, qui tous jouissaient de la faveur du roi, et qui, comme tels, étaient trop bien façonnés au nouvel ordre de choses, pour oser faire à un ambassadeur étranger des révélations qui, divulguées plus tard, leur auraient infailliblement attiré une cruelle disgrâce.

M. Lami exprime (page 235) le désir de connaître les argumens sur lesquels s'appuient ceux qui prétendent que l'idée d'usurper le pouvoir absolu en Danemarck ne fut pas indigène, mais qu'elle fut suggérée par la cour de France. C'est le même Molesworth qui nous fournit les preuves de cette assertion. « Le roi de Danemarck, dit-il ( chap. 14), aime l'alliance de la France, et entretient une plus étroite correspondance avec cette couronne, qu'avec aucune autre, quoiqu'il soit très-certain, T. XXIV.-Décembre 1824.

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