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Nous lisons, page 275, « que la reine Julie-Marie préférait son second fils Frédéric à Christian. » Le roi Christian VII n'était pas le fils de la reine Julie. Frédéric V avait été marié deux fois, d'abord avec Louise, princesse d'Angleterre, dont il eut le fils qui lui succéda sur le trône; ensuite avec Julie-Marie de Brunswick Wolfenbuttel, qui était la mère de ce Frédéric dont il est ici question.

M. Lami (page 300) donne au royaume de Danemarck, tel qu'il est aujourd'hui, une population de près de trois millions d'âmes. C'est une grande exagération. Depuis plus d'un siècle, le nombre des habitans de tous les états soumis au sceptre des rois de Danemarck n'a jamais excédé deux millions et demi. C'est l'évaluation, non-seulement de Hassel, de Milbiller, et d'autres auteurs allemands, mais encore de M. Frédéric Thaarup, célèbre écrivain danois, dont les calculs, pour tout ce qui concerne la statistique du royaume, sont regardés comme très-exacts et authentiques. La perte de la Norvège a causé une diminution de neuf cent mille individus; la prétendue indemnité de la principauté de Lauenbourg n'a pu balancer cette perte que par une augmentation de quarante mille âmes au plus.

Ce serait un travail trop minutieux que de relever les autres erreurs qui peuvent se rencontrer dans ce volume; elles sont en petit nombre et de fort peu d'importance, puisqu'elles ne consistent que dans la mauvaise orthographe de quelques noms propres d'hommes, de villes et de provinces, qui se trouvent un peu défigurés. Ces corrections seront très-faciles à faire dans une seconde édition, qui sera sans doute bientôt demandée par le public, comme un témoignage de sa reconnaissance envers l'estimable auteur de cette histoire.

HEIBERG.

LITTÉRATURE.

CHANTS HÉROÏQUES DES MONTAGNARDS ET MATELOTS GRECS; traduits en vers français par M. NépomucèneLouis LEMERCIER, de l'Institut, etc. (1).

Ces chants, que M. Fauriel nous a fait connaître le premier par une élégante traduction en prose, (2), deviennent, grâce à M. Lemercier, un double présent dont tous les amis des lettres. doivent sentir le prix. Abusés par des traditions mensongères, par des préjugés trop accrédités, nous étions presque parvenus au point de croire qu'il n'y avait plus dans les Grecs qu'un peuple déchu et condamné à rester courbé sous le joug de ses oppresseurs. Les Grecs modernes ont détruit cette erreur par des vertus et des exploits qui surpassent les plus mémorables actions de leurs pères. Cependant, même depuis les triomphes dont le monde a retenti, leur génie était encore resté pour nous dans les ténèbres; enfin le voile est tombé, grâces aux révélations de la vérité, tardive sans doute, mais éclatante comme la justice des dieux.

La première observation qui frappe l'esprit, à la lecture deş chants dont je m'occupe en ce moment, c'est que la nature avait marqué les Grecs, dès l'origine, à des caractères que le tems n'a pu effacer. Après trois mille ans, nous retrouvons aujourd'hui dans les Klephtes ces héros d'Homère, légers à la

(1) Paris, 1894. 1 vol. in-8o de 184 pages. Urbain Canel, place S.-André-des-Arts; et Audin, quai des Augustins. Prix 4 fr.

(2) Chants populaires de la Grèce moderne, recueillis et publiés, avec une traduction française. Paris, 1824. Firmin Didot. T. Ier. In-8° de 300 p.; prix 7 fr. et 8 fr. 50 c. (Voy. Rev. Enc., t. xxII p. 699.)

eourse, doués d'une souplesse et d'une force de corps extraordinaires, pleins de ruses dans la guerre, et terribles dans l'action, à laquelle ils préludaient par des défis de paroles ou par une ironie amère et insultante. Les matelots qui ont vaincu à Salamine, étaient moins habiles et moins intrépides que ceux qui de nos jours ont écrasé les Turcs dans plus de cent combats; comme au tems de Thémistocle, la mer a sauvé la terre; mais le rival d'Aristide n'avait point dans sa flotte de héros pareils à Canaris et à ses sublimes imitateurs.

a

Tous les lieux célèbres de l'Hellénie viennent de recevoir une illustration nouvelle; elle a rempli le vœu de Fénélon, en mêlant le sang des Turcs à celui des Perses dans d'autres champs de Marathon. Grâces à ses nouveaux exploits, elle maintenant plusieurs Thermopyles; mais, au lieu de mourir, ses Léonidas ont vaincu pour elle. La valeur brillante de l'Athénien dans les combats, la constance du Spartiate dans les dangers, la patience de l'Arabe à supporter la faim, la soif et toutes les intempéries des saisons, caractérisent encore les montagnards et les matelots grecs : ils ajoutent à ces vertus de leurs pères une telle force morale à souffrir les tortures de la tyrannie, que les plus effroyables douleurs ne peuvent leur arracher une plainte. La Grèce moderne a cent Régulus. Enfin, la guerre actuelle est aussi une guerre sacrée; la religion entre autant que l'amour de l'indépendance dans les magnanimes efforts des Hellènes contre les Barbares qui veulent leur imposer de nouveaux fers, au nom du dieu de Mahomet. On leur apporte, avec l'Alcoran, un sanglant esclavage et la plus humiliante dégradation; ils veulent conquérir, avec la loi du Christ gravée sur leurs étendards, la liberté qui est l'attribut de l'homme et l'égalité sociale, sans laquelle la liberté ne serait bientôt qu'une cruelle déception.

On me demandera si les Grecs n'ont point de vices. Oui, sans doute, ils en ont; mais exposés sans cesse à être dépouillés,

insultés, mis à mort au moindre signal, comment ne seraientils pas devenus enclins à la dissimulation et à la fourberie qu'elle enfante? comment n'auraient-ils pas appris à renfermer dans leurs cœurs les sentimens les plus violens, lorsque tel de leurs ennemis, investi de la puissance et comblé des faveurs du grand Seigneur, leur apprenait à cacher, à couver, à préparer, pendant dix années, une affreuse vengeance qui éclatait tout à coup, et dans vingt lieux différens, sur toute une famille de héros, et à immoler même la vierge la plus timide, pour tarir dans ses veines un sang qu'elle pourrait transmettre un jour à des fils dignes de leurs pères? Les Grecs sont cruels, disent froidement des hommes qui discourent dans un salon sur l'humanité; mais que les accusateurs veuillent bien comparer les représailles des victimes aux barbaries de leurs tyrans ; qu'ils recherchent ce que les Grecs ont souffert d'une race de bourreaux, depuis Aly de Tebelen jusqu'à son horrible fils, le pacha de Jannina; alors, ils concevront sans peine l'exaspération d'un peuple qui a tant souffert avec une si étonnante longanimité. On impute encore aux Grecs l'avarice, la passion du gain et l'amour de l'or. Si le reproche est vrai, on en peut tirer un sujet d'éloges pour eux; en effet, il faut que leur amour de la patrie soit un sentiment bien profond et bien puissant, puisque des passions si ardentes, si tyranniques, n'enfantent point de traîtres. Les Grecs ne vendent point leur pays, crime que seraient toujours prêts à commettre quelques lâches Européens, énervés de mollesse et corrompus par les délices. Les Grecs savent vivre de peu; tous les trésors de la terre n'achèteraient pas le seul Canaris : ce héros ne demande rien, ne veut rien, et mourra pauvre comme il a vécu, après avoir plusieurs fois sauvé son pays.

Les femmes Spartiates semblent être ressuscitées dans les femmes de Souli, de Psara et de toute l'Hellénie; les premières envoyaient leurs fils aux combats et disaient, en

leur remettant un bouclier: Avec ou dessus; les autres vont elles-mêmes à la guerre; elles portent les munitions dans leurs tabliers rattachés à leur ceinture, tiennent un enfant d'une main, un sabre de l'autre, et rivalisent d'audace avec les hommes. Trahies par la fortune, elles ont recours à l'explosion de la poudre pour mourir libres avec leur famille. Athènes et Sparte ont-ils rien vu de pareil!

Si les Hellènes rappellent à tant d'égards les mœurs de leurs aïeux, ils leur ressemblent aussi par le génie poétique. La Grèce moderne chante, comme la Grèce antique; mais nous avons remarqué, dans les poëmes publiés jusqu'à ce jour, une différence qui est toute à l'honneur de la première. La muse des Hellènes de notre tems est encore plus chaste que celle d'Homère; jamais elle ne fait rougir la pudeur. Le père de l'Odyssée fait retirer à propos la belle Nausicaë de la table d'Alcinous; une vierge de Souli ou de Psara pouvait entendre sans danger les hymnes d'amour, d'hymen ou de guerre répétés dans les festins de son père. Les Grecs ont des Anacréons qui célèbrent des amours honnêtes et la douce union des âmes, au lieu du délire des sens; ils ont surtout des Simonides et des Tyrtées, les uns pour consacrer les diverses époques de la vie de l'homme, et l'honorer au moment de la mort; les autres pour exciter les måles vertus, et entretenir le feu sacré du courage qui peut seul arracher la Grèce au glaive des Musulmans.

Pindare, qui n'avait souvent à chanter que des sujets vulgaires, comme les combats de l'athlète qui demande dans La Fontaine un hymne à Simonide, se jette comme lui sur le propos de Castor et de Pollux; et de là, ces débuts si pompeux, ces magnifiques préludes que l'on nous fait admirer, tandis qu'ils ne sont qu'une faute de proportion, semblable à celle qui éclate aux premières strophes de l'ode au comte du Luc, par Jean-Baptiste Rousseau. Appliquée à un sujet vulgaire, cette sublime inspiration en fait sentir le vide et la faiblesse; au

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