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Vivez: le sceptre d'or que vous tend cette main,
Pour vous de ma clémence est un gage certain.

ESTHER.

Quelle voix salutaire ordonne que je vive,
Et rappelle en mon sein mon âme fugitive?

ASSUÉRUS.

Ne connaissez-vous pas la voix de votre époux?
Encore un coup vivez, et revenez à vous.

ESTHER.

Seigneur, je n'ai jamais contemplé qu'avec crainte
L'auguste majesté sur votre front empreinte.
Jugez combien ce front, irrité contre moi,
Dans mon âme troublée a dû jeter d'effroi.
Sur ce trône sacré qu'environne la foudre,
J'ai cru vous voir tout prêt à me réduire en poudre.
Hélas! sans frissonner, quel cœur audacieux
Soutiendrait les éclairs qui sortaient de vos yeux ?
Ainsi du Dieu vivant la colère étincelle.

ASSUÉRUS.

O soleil! ô flambeau de lumière immortelle !
Je me trouble moi-même, et sans frémissement
Je ne puis voir sa peine et son saisissement,
Calmez, Reine, calmez la frayeur qui vous presse.
Du cœur d'Assuérus souveraine maîtresse,
Éprouvez seulement son ardente amitié:
Faut-il de mes États vous donner la moitié ?

ESTHER.

Hé! se peut-il qu'un Roi, craint de la terre entière,
Devant qui tout fléchit et baise la poussière,
Jette sur son esclave un regard si serein,

Et m'offre sur son cœur un pouvoir souverain?
ASSUÉRUS.

Croyez-moi, chère Esther; ce sceptre, cet Empire,
Et ces profonds respects que la terreur inspire,
A leur pompeux éclat mêlent peu de douceur,
Et fatiguent souvent leur triste possesseur.
Je ne trouve qu'en vous je ne sais quelle grâce
Qui me charme toujours, et jamais ne me lasse.
De l'aimable vertu doux et puissans attraits!
Tout respire en Esther l'innocence et la paix.
Du chagrin le plus noir elle écarte les ombres,
Et fait des jours sereins de mes jours les plus sombres,
Que dis-je ? sur ce trône assis auprès de vous,
Des astres ennemis j'en crains moins le courroux,
Et crois que votre front prête à mon diadême
Un éclat qui le rend respectable aux dieux même.
Osez donc me répondre, et ne me cachez
pas

Quel sujet important conduit ici vos pas;

Quel intérêt, quels soins vous agitent, vous pressent. Je vois qu'en m'écoutant, vos yeux au ciel s'adressent; Parlez: de vos désirs le succès est certain,

Si le succès dépend d'une mortelle main.

ESTHER.

O bonté qui m'assure autant qu'elle m'honore!
Un intérêt pressant veut que je vous implore.
J'attends ou mon malheur ou ma félicité;
Et tout dépend, Seigneur, de votre volonté.
Un mot de votre bouche, en terminant mes peines,
Peut rendre Esther heureuse entre toutes les reines.
ASSUÉRUS.

Ah! que vous enflammez mon désir curieux!

ESTHER.

Seigneur, si j'ai trouvé grâce devant vos yeux,
Si jamais à mes vœux vous fûtes favorable,
Permettez, avant tout, qu'Esther puisse à sa table
Recevoir aujourd'hui son souverain seigneur,
Et qu'Aman soit admis à cet excès d'honneur.
J'oserai devant lui rompre ce grand silence,
Et j'ai, pour m'expliquer, besoin de sa présence.
ASSUÉRUS.

Dans quelle inquiétude, Esther, vous me jetez!
Toutefois qu'il soit fait comme vous souhaitez.
(à ceux de sa suite.)

Vous, que l'on cherche Aman, et qu'on lui fasse entendre Qu'invité chez la Reine, il ait soin de s'y rendre.

SCÈNE VIII.

ESTHER, ASSUÉRUS, HYDASPE, ÉLISE, THAMAR, UNE PARTIE DU Choeur.

HYDASPE.

Les savans Chaldéens, par votre ordre appelés,
Dans cet appartement, Seigneur, sont assemblés.
ASSUÉRUS.

Princesse, un songe étrange occupe ma pensée.
Vous-même en leur réponse êtes intéressée.
Venez, derrière un voile écoutant leurs discours,
De vos propres clartés me prêter le secours.

Je crains pour vous, pour moi, quelque ennemi perfide.

ESTHER.

Suis-moi, Thamar. Et vous, troupe jeune et timide, Sans craindre ici les yeux d'une profane cour,

A l'abri de ce trône attendez mon retour.

SCÈNE IX.

Cette scène est partie déclamée et partie chantée.

ÉLISE, UNE PARTIE DU CHOEUR.

ÉLISE.

Que vous semble, mes sœurs, de l'état où nous sommes?
D'Esther, d'Aman, qui le doit emporter ?
Est-ce Dieu ? sont-ce les hommes,

Dont les œuvres vont éclater?

Vous avez vu quelle ardente colère

Allumait de ce Roi le visage sévère.

UNE DES ISRAELITES.

Des éclairs de ses yeux l'œil était ébloui.

UNE AUTRE.

Et sa voix m'a paru comme un tonnerre horrible.

ÉLISE.

Comment ce courroux si terrible

En un moment s'est-il évanoui?

UNE DES ISRAELITES chante.

Un moment a changé ce courage inflexible.
Le lion rugissant est un agneau paisible.

Dieu, notre Dieu, sans doute, a versé dans son cœur
Cet esprit de douceur.

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