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Au Dieu de l'univers consacraient ces prémices.
Les prêtres ne pouvaient suffire aux sacrifices.
L'audace d'une femme, arrêtant ce concours
En des jours ténébreux a changé ces beaux jours.
D'adorateurs zélés à peine un petit nombre

Ose des premiers temps nous retracer quelque ombre:
Le reste pour son Dieu montre un oubli fatal,
Ou même, s'empressant aux autels de Baal,
Se fait initier à ses honteux mystères,

Et blasphême le nom qu'ont invoqué leurs pères.
Je tremble qu'Athalie, à ne vous rien cacher,
Vous-même de l'autel vous faisant arracher,
N'achève enfin sur vous ses vengeances funestes,
Et d'un respect forcé ne dépouille les restes.

JOAD.

D'où vous vient aujourd'hui ce noir pressentiment ?

ABNER.

Pensez-vous être saint et juste impunément ?
Dès long-temps elle hait cette fermeté rare
Qui rehausse en Joad l'éclat de la tiare ;

Dès long-temps votre amour pour la religion
Est traité de révolte et de sédition.

Du mérite éclatant cette Reine jalouse,
Hait sur-tout Josabeth, votre fidèle épouse:
Si du grand-prêtre Aaron Joad est successeur,
De notre dernier roi Josabeth est la sœur.

Mathan d'ailleurs, Mathan, ce prêtre sacrilege,

Plus méchant qu'Athalie, à toute heure l'assiége;
Mathan, de nos autels infâme déserteur,

Et de toute vertu zélé persécuteur.

C'est peu que, le front ceint d'une mitre étrangère,

Ce lévite à Baal prête son ministère ;
Ce temple l'importune, et son impiété
Voudrait anéantir le Dieu qu'il a quitté.

Pour vous perdre, il n'est point de ressorts qu'il n'invente;
Quelquefois il vous plaint, souvent même il vous vante;
Il affecte pour vous une fausse douceur;

Et par-là, de son fiel colorant la noirceur,
Tantôt à cette Reine il vous peint redoutable,
Tantôt, voyant pour l'or sa soif insatiable,

Il lui feint qu'en un lien que vous seul connaissez,
Vous cachez des trésors par David amassés.
Enfin, depuis deux jours, la superbe Athalie
Dans un sombre chagrin paraît ensevelie.
Je l'observais hier, et je voyais ses yeux
Lancer sur le lieu saint des regards furieux ;
Comme si, dans le fond de ce vaste édifice,
Dieu cachait un vengeur armé pour son
Croyez-moi, plus j'y pense, et moins je puis douter
Que sur vous son courroux ne soit près d'éclater,

Et

que de Jézabel la fille sanguinaire

supplice.

Ne vienne attaquer Dieu jusqu'en son sanctuaire.

JOAD.

Celui qui met un frein à la fureur des flots,

Sait aussi des méchans arrêter les complots.

Soumis avec respect à sa volonté sainte,

Je crains Dieu, cher Abner, et n'ai point d'autre crainte. Cependant je rends grâce au zèle officieux

Qui sur tous mes périls vous fait ouvrir les yeux.

Je vois que l'injustice en secret vous irrite,

Que vous avez encor le cœur israélite ;

Le ciel en soit béni! Mais ce secret courroux,
Cette oisive vertu, vous en contentez-vous ?
La foi qui n'agit point est-ce une foi sincère ?
Huit ans déjà passés, une impie étrangère
Du sceptre de David usurpe tous les droits,
Se baigne impunément dans le sang de nos rois,
Des enfans de son fils détestable homicide,
Et même contre Dieu lève son bras perfide.
Et vous,
l'un des soutiens de ce tremblant État,
Vous, nourri dans les camps du saint rpi Josaphat,
Qui, sous son fils Joram, commandiez nos armées,
Qui rassurâtes seul nos villes alarmées
Lorsque d'Okosias le trépas imprévu

Dispersa tout son camp à l'aspect de Jéhu;

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Je crains Dieu, dites-vous, sa vérité me touche.
Voici comme ce Dieu vous répond par ma bouche:
<< Du zèle de ma loi, que sert de vous parer?
<< Par de stériles vœux pensez-vous m'honorer ?
«Quel fruit me revient-il de tous vos sacrifices?

Ai-je besoin du sang des boucs et des génisses?

« Le sang de vos rois crie, et n'est point écouté.
Rompez, rompez tout pacte avec l'impiété ;
* Du milieu de mon peuple exterminez les crimes,
Et vous viendrez alors m'immoler vos victimes ».

ABNER.

Hé ! que puis-je au milieu de ce peuple abattu ?
Benjamin est sans force, et Juda sans vertu.
Le jour qui de leurs rois vit éteindre la race,
Éteignit tout le feu de leur antique audace.
Dieu même, disent-ils, s'est retiré de nous :
De l'honneur des Hébreux autrefois si jaloux,
Il voit sans intérêt leur grandeur terrassée,
Et sa miséricorde à la fin s'est lassée.

On ne voit plus pour nous ses redoutables mains
De merveilles sans nombre effrayer les humains.
L'arche sainte est muette, et ne rend plus d'oracles.

JOAD.

Et quel temps fut jamais si fertile en miracles?
Quand Dieu, par plus d'effets, montra-t-il son pouvoir?
Auras-tu donc toujours des yeux pour ne point voir,
Peuple ingrat? Quoi ! toujours les plus grandes merveilles,
Sans ébranler ton cœur, frapperont tes oreilles !
Faut-il, Abner, faut-il vous rappeler le cours
Des prodiges fameux accomplis en nos jours ?
Des tyrans d'Israël les célèbres disgrâces,
Et Dieu trouvé fidèle en toutes ses menaces;
L'impie Achab détruit, et de son sang trempé

Le champ que par le meurtre il avait usurpé ;
Près de ce champ fatal Jézabel immolée,
Sous les pieds des chevaux cette reine foulée ;
Dans son sang inhumain les chiens désaltérés,
Et de son corps hideux les membres déchirés ;
Des prophètes menteurs la troupe confondue,
Et la flamme du ciel sur l'autel descendue ;

Élie

aux élémens parlant en souverain,
Les cieux par lui fermés et devenus d'airain,
Et la terre trois ans sans pluie et sans rosée ;
Les morts se ranimant à la voix d'Élisée ?
Reconnaissez, Abner, à ces traits éclatans,

Un Dieu, tel aujourd'hui 'il fut dans tous les tenips.

qu

Il sait, quand il lui plaît, faire éclater sa gloire,
Et son peuple est toujours présent à sa mémoire.

ABNER.

Mais où sont ces honneurs à David tant promis,
Et prédits même encore à Salomon son fils?
Hélas! nous espérions que, de leur race heureuse,
Devait sortir de rois une suite nombreuse;

Que sur toute tribu, sur toute nation,
L'un deux établirait sa domination,

Ferait cesser partout la discorde et la guerre,
Et verrait à ses pieds tous les rois de la terre.
JO A D!

Aux promesses du ciel pourquoi renoncez-vous?

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