Immagini della pagina
PDF
ePub

que ce veto fut toujours dicté par l'esprit politique, et qu'on se décida par la raison d'État, bien plus que par des motifs d'équité; c'est ce qu'on peut voir par les procès de Fulvius (1) et de Scipion (2).

Il semble, du reste, qu'après l'institution des quæstiones perpetuæ, les tribuns ne se soient pas reconnu le droit de paralyser les procédures des commissions par leur veto; c'est du moins ce qu'on pourrait conclure des reproches que Cicéron adresse à Vatinius (3), et d'un passage rapporté par Plutarque dans la Vie de Cicéron (4); mais ils conservèrent ce droit dans les comices-tribus tant que la juridiction criminelle fut exercée dans ces assemblées, comme on le voit par l'exemple de Gabinius (5).

L'accusation pouvait encore tomber par le désistement de l'accusateur, c'était une conséquence du principe que j'ai exposé dans le chapitre précédent. L'accusateur ne représentait point l'État; c'était un simple particulier qui agissait à ses risques et périls. Quand l'accusation était portée devant les comices, il fallait sans doute que l'accusateur fut un magistrat, puisqu'un magistrat seul pouvait convoquer l'assemblée populaire; mais ce n'était point une condition substantielle de l'accusation; et dès qu'il y eut des commissions permanentes, chaque citoyen put se porter accusateur. Le droit avait été empêché, tant qu'on jugea dans les comices, mais sans être contesté, et jusque sous l'empire une accusation criminelle fut un procès dans lequel l'État ne fut partie qu'indirecte

(1) Liv. XXVI, 3.

[ocr errors]

A. Gell. vi, 19,

(2) Liv. XXXVIII, 52. Val. Max. iv, 18. nous a conservé la formule du veto du tribun Tiberius Gracchus,

dans le procès de Scipion.

(3) Cic. In Vatin. c. 14,
(4) Plut. In Cic. c. 9,
(5) Val, Max. vi, 1, 3.

[ocr errors][merged small]

ment. Il suffisait donc

que l'accusateur abandonnât l'accusation, quel que fût le motif de son désistement, déférence pour l'opinion publique (1), crainte (2), ou connivence (3), pour que la procédure fût anéantie, comme cela se voit dans les procès de L. Manlius Imperiosus, des censeurs C. Claudius et Tiberius Gracchus, et plus tard, sous le régime des quæstiones perpetua, dans les procès de Curion (4), de L. Scipion (5), de Cornelius (6), de Rabirius, et jusque sous l'empire, dans le procès fait par Helvidius aux délateurs qui avaient perdu Thraséas (7).

Passons maintenant aux procédures qui avaient lieu lorsque nul empêchement ne venait arrêter le cours de l'instance.

Aussitôt l'accusation portée, l'accusé et ses amis prenaient des vêtements de deuil et cherchaient à émouvoir la pitié publique par la vue de leurs chagrins et de leurs misères (8). Dans les comices (et ce que je dis des comices est également vrai, des quæstiones, délégations du peuple, souveraines comme lui), le juge étant le souverain lui-même, et

(1) Liv. iv, 42; xxxvII, 57, 58; XLIII, 16. Val. Max. vr, 5, 2. (2) Liv. vi, 5. Val. Max. v, 43.

[ocr errors]

(3) Ascon. In Cornel. (Orell. p. 63.)

(4) Ibid.

(5) Appien, Guerre civ. 11, 24. — Plut. Pompée, c. 53.

(6) Ascon. In Cornel, (Orell. p. 59). Postero die, quum P. Cassius assedisset, et citati accusatores non adessent, exemptum est nomen de reis Cornelii.

(7) Tacit. Hist. iv, 6.

- Liv. 1,

61;

(8) Cic. In Verr. 1, 58; Pro Planc. c. 12; Pro Sext. 11, 12; Post red. in Senat. c. 3. - Cic. Pro Domo, c. 17. 11, 58; vi, 20. Adprobantibus cunctis diem Manlio dicunt. Quod ubi est factum, primo commota plebs est, utique postquam sordidatum reum viderant; nec cum eo non modo patrum quemquam, sed ne cognatos quidem aut affines, postremo ne fratres quidem; quod ad eum diem nunquam usu venisset, ut in tanto discrimine non et proximi vestem mutarent. Ferratius, Epist. 1, 18.

non point un simple magistrat, organe d'une loi qu'il n'a point faite, et qu'il doit respecter, quelque dures qu'en soient les conséquences, c'était le droit des 2 accusés de fléchir et d'intéresser ce juge suprême, non moins que de le convaincre; personne n'avait à se plaindre s'il plaisait au peuple d'absoudre même un coupable. De là, également dans les plaidoiries, un tout autre esprit que chez les modernes, esprit bien plus favorable au développement de la grande éloquence. Chez nous, l'orateur est emprisonné dans un cercle étroit; il lui faut convaincre les juges encore plus que les émouvoir. Il ne suffit point de les attendrir pour emporter l'absolution, il faut encore leur prouver l'innocence de l'accusé, sinon le juge, organe inflexible, appliquera la loi tout en pleurant comme homme sur des rigueurs qu'il ne peut empêcher. A Rome, au contraire, comme à Lacédémone, comme à Athènes, l'accusateur et l'accusé essayaient bien plus de toucher le peuple que de le convaincre. Souvent le crime reconnu constant, et même avoué par l'accusé, on obtenait la grâce du coupable en rappelant des services passés, en montrant au peuple les blessures qui sillonnaient une noble poitrine, comme dans le procès de Manlius (1), ou dans celui de M. Aquilius, concussionnaire avéré (2). On apitoyait les juges sur une famille éplorée, sur des enfants menacés d'être orphelins, sur tant de misères succédant à tant de grandeurs, comme dans le procès de Sergius Galba (3); en peu de mots, on agissait sur le cœur bien plus que sur l'esprit, et l'on

(1) Liv. vi, 20.

(2) Cic. Verr. v, 1, 3; De Orat. 1, 47; Pro Flacco, 98. (3) Liv., Epit. XLIX et LX. Val. Max. viii, 1, 2, 6, 8, 10. Misericordia ergo illam quæstionem, non æquitas rexit; quoniam quæ innocentiæ tribui nequierat absolutio, respectui puerorum data est.

demandait au peuple l'absolution du coupable, comme aujourd'hui nous demandons sa grâce à l'indulgence du prince (1).

CHAPITRE III.

Des Procédures au jour du jugement.

Le jour du jugement arrivé, l'accusé était cité à comparaître. Quand il s'agissait d'une accusation portée devant les comices-centuries, c'est-à-dire d'une accusation capitale, cette citation (citatio) était précédée d'un appel à son de trompe, fait le long des murs et devant la porte de l'accusé. L'appel à son de trompe était la forme ordinaire pour convoquer les centuries (2); et cette forme était suivie aussi bien lorsqu'il s'agissait d'un procès à juger que d'un magistrat à élire, comme nous l'apprenons d'une formule que Varron nous a conservée, et que déjà il regardait comme une antiquité (3). Quant aux procès portés devant les comices-tribus, on ne suivait point ces formes guerrières. L'accusé

Cic. De Orat. 1, 53; 11, 28, 47. Brutus, c. 23. - Ascon. In Scaur. (Orell. p. 20, 29); In Milon., p. 54 — Dio Cass. xLv, 16. (1) Cic. De Partit. Orat. c. 4. Quid faciendum est reo?... Sumenda principia ad benevolentiam conciliandam. Narrationes aut amputandæ quæ lædunt, aut relinquendæ si totæ sunt molestæ.... Perorationes autem ad misericordiam conferendæ. — Orat. c. 24. Erit eloquens is qui in foro ita dicit, ut probet, ut delectet, ut flectat. Probare necessitatis est : delectare suavitatis, flectere victoriæ; nam id unum ex omnibus ad obtinendas causas potest plurimum. In flectendo uno vis omnis oratoris est. Escher, De Test. ration. p. 140.

(2) Denys, 11, 8. -Gell. xv, 27. Curiata (comitia) per lictorem curiatum calari, id est, convocari; centuriata per cornicinem.

(3) Varro, De L. Lat. (ed. Müller). Circum moros mitti solitus quomodo inliceret populum in eum locum unde vocare posset ad

était simplement cité par les viatores des tribuns (1); c'était la forme ordinaire de la convocation des tribus.

Si l'accusé ne se présentait pas sur la citation, parce qu'il avait préféré l'exil aux chances d'un pro cès, l'assemblée confirmait le bannissement, et y ajoutait l'interdiction de l'eau et du feu; ce qui était une espèce de mort civile. Le proscrit était retranché de la société romaine; les cautions qu'il avait fournies étaient perdues, et même on poursuivait d'ordinaire les répondants avec une extrême rigueur (2).

Si l'accusé ne comparaissait pas, et que cependant

concionem, non solum ad consules et censores, sed etiam quæstores, commentarium indicat vetus anquisitionis M. Sergii Mani filii quæstoris, qui capitis accusavit Trogum; in qua sic est:

Auspicio orando sede in templo auspicii, dum aut ad prætorem aut ad consulem mittas auspicium petitum.

Commeet tum præco, reum vocet ad te, et eum de moris vocet præco id imperare oportet.

[ocr errors]

Cornicinem ad privati januam et in arcem mittas ubi canat. Collegam roges, ut comitia edicat de rostris, et argentarii tabernas occludant.

Patres censeant, exquiras, et adesse jubeas. Magistratus censeant exquiras Consules, Prætores, Tribunosque plebis collegasque tuos, et in templo adesse jubeas omnes, ac cum mittas, concionem advoces. In eodem commentario anquisitionis, ad extremum, scriptum caput edicti hoc est :

Item quod attingat qui de censoribus classicum ad comitia centu riata redemptum habent, uti curent, co die quo comitia erunt, in arce classicus canat, tum circumque moros, et ante privati hujusce T. Quinti Trogi scelerosi ostium canat, et ut in campo eum primo luci adsit. - Tac. Ann. 11, 32.

Plut. C. Gracchus, c. 3. Καὶ τὸ πάτριόν ἐστιν ἡμῖν, εἴ τις ἔχων δίκην θανατικὴν μὴ ὑπακούῃ, τούτου πρὸς τὰς θύρας ἔωθεν ἐλθόντα σαλπιγκτήν, ἀνακαλεῖσθαι τῇ σάλπιγγε, καὶ μὴ πρότερον ἐπιφέρειν ψῆφον αὐτῷ τοὺς δικαστάς. Plutarque semble supposer que cette citation n'avait lieu qu'au cas de non comparution de l'accusé, et Sigonius (De Judic. in, 8, 14) a adopté l'opinion de Plutarque, mais Varron ne dit rien de pareil.

(1) Ascon. In Scaur. (Orell. p. 22). (2) Denys, x, 8. Liv. 11, 13.

« IndietroContinua »