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d'accusations telles que le crimen repetundarum. Il est évident que dans de pareils procès l'accusateur et le défenseur avaient souvent besoin de se rendre dans des provinces éloignées pour recueillir des pièces, entendre des témoins, en un mot, réunir tous les éléments nécessaires pour une affaire aussi compliquée que devait l'être un procès de concussion fait à des magistrats dont l'administration embrassait des provinces qui sont aujourd'hui de grands royaumes.

L'Etat n'étant point partie dans l'accusation comme il l'est aujourd'hui chez les nations modernes, c'était à l'accusateur à réunir tous les éléments du procès (1); mais comme souvent il eût été impossible à un individu sans caractère public de recueillir les preuves nécessaires, l'accusateur emportait une commission du préteur (lex) qui l'autorisait à réunir les témoignages et les pièces dont il avait besoin. En vertu de ce pouvoir il contraignait les témoins à déposer devant lui (2), et à lui remettre les documents qu'il jugeait utiles. On ne pouvait se refuser à ses ordres sans encourir une peine indiquée dans la lex donnée par le magistrat (3). Également s'il y avait quelque mesure préventive à prendre, quelque objet à mettre sous les scellés, quelques esclaves dont on devait s'assurer, quelques pièces à conserver, c'était

(1) Cic. In Verr. 1, 6; 11, 74; 111, 66; iv, 6, v, 49. Pro Scauro, 23-28.

(2) Quintil. Instit. Orat. v, 7, 9.

(3) Cic. In l'err. 1, 23; 1v, 66. Retinere incipit tabulas Theomnastus quidam..... Hic ego postulare cœpi, ut mihi tabulas obsignare ac deportare liceret. Ille contradicere;... negare id mihi tradere oportere. Ego legem recitare, omnium mihi tabularum et litterarum fieri potestatem. Ille furiosus urgere, nihil ad se uostras leges pertinere. Prætor intelligens negare sibi placere,.... id me Romam deportare. Quid multa? nisi vehementius homini minitatus essem, nisi legis sanctionem pœnamque recitassem, tabularum mihi potestas facta non esset. - In Verr. 11, 26.

l'accusateur qui mettait en mouvement le préteur pour arriver au résultat désiré (4). Il semble du reste que ce droit, qui nous paraît exorbitant, était corrigé dans ce qu'il pouvait avoir de dangereux, par le droit reconnu à l'accusé de suivre et de contrôler les recherches de son adversaire. C'est du moins ce que Plutarque nous apprend dans la vie de Caton d'Utique, et je ne vois pas de raison pour rejeter son récit (2).

CHAPITRE V.

Procédure devant les jurés.

Avec la nominis receptio finissait la procédure devant le préteur, et alors s'engageait la procédure principale devant les jurés (judices). En ce point, comme on le voit, les formes suivies en matière criminelle ressemblaient singulièrement aux formes suivies en matière civile ; et comme dans ce dernier cas on distinguait les actes préparatoires qui se faisaient in jure devant le magistrat, de la procédure principale qui avait lieu in judicio et devant les juges, ainsi dans les procès criminels on distinguait les actes faits devant le préteur, qui avaient pour objet d'instruire l'affaire et de préparer la sentence, de la procédure principale faite devant les jurés, qui avait pour but le jugement. Au criminel comme au civil, le préteur avait la jurisdictio et les juges la cognitio.

(1) Cic. In Verr. v, 76.

(2) Plut. Cuton d'Utique, c. 33.

legislaz. 111, 2.

Filangieri, Scienza della

Je ne dirai rien des mesures préventives; les anciens usages se conservèrent, mais avec une plus grande faveur pour la liberté, conséquence naturelle du haut degré où l'opinion et la puissance plaçaient le citoyen romain. C'est ainsi, par exemple, qu'on ne voit plus d'exemples de cautions exigées de l'accusé, pour assurer sa comparution (1). La faculté de ne pas comparaitre et de s'exiler, est devenu un droit qu'aucun obstacle ne gène. Celui qui abdique la patrie romaine est trop cruellement puni dans sa personne, pour qu'on songe à l'atteindre dans sa fortune ou dans les biens de ses amis. Ainsi les Romains, par la haute idée qu'ils se faisaient du nom de citoyen, étaient arrivés dans leurs lois criminelles (au moins pour celles qui s'appliquaient aux crimes politiques), à une douceur plus grande que la nôtre, nous qui sommes éclairés par les divines lumières de la religion!

Quant aux moyens qui paralysaient l'accusation, tels que l'exil de l'accusé ou le désistement de l'accusateur, on se décida également par les règles suivies dans la période précédente (2). Les quæstiones n'étant que des délégations, il était juste d'appliquer aux procédures les principes suivis devant la juridiction principale. Seulement, quand l'accusation se trouva permise à tous les citoyens, comme on n'avait plus la garantie du caractère public de l'accusateur, et qu'on avait à craindre soit des calomnies, soit la connivence des deux parties, il fut nécessaire de prendre des mesures énergiques contre de nouveaux délits qui venaient de se révéler, tels que la prévarication (3)

(1) La restitution du mot vades, faite par Klenze, dans la loi Servilia (c. x1) est donc fort hasardée. Voyez cependant Salluste, Jug. c. 35.

(2) Cic. Pro Cluent. 29.

(3) Festus, v° Prævaricatores. — Pline, H. N. xvi, 19. — L. 4,

ou l'accord coupable de l'accusateur et de l'accusé, malheureusement trop fréquent dans les procès de concussion (1); la tergiversation ou le désistement frauduleux de l'accusateur (2), crime qui fut plus exactement déterminé sous l'empire; la calomnie ou l'accusation dont la fausseté était connue de ceux mêmes qui traînaient l'accusé devant le tribunal (3) Ce crime infàme était puni par une loi Remmia ou Memmia, dont malheureusement nous ignorons jusqu'à la date (4), mais qui dut s'affaiblir singulièrement sous l'empire, époque où calomnier fut une

§ 4. D. De his qui notant, infamia. L. 1. D. De Prævar. L. 1, § 6, D Ad S. C. Turp. L. 212. De V. S. Cujas, Obss. ix, 40).

(1) Cicéron, dans le procès de Verrès, n'échappa même pas à ce soupçon. Drumann, v. 324. Ascon. (Ed. Orell. p. 10).

(2) L. 1, § 1. L. 6, pr. § 1, 2. L 13, pr. D. Ad S. C. Turpill. (3) L. 1, § 1, 3. D. Ad S. C. Turpill. L. 9, 10. C. De Calum. (4) Brencmann, Lex Remmia (dans le Thesaurus d'Otton, t. III). L. 1, § 2. D. Ad S. C. Turpili. On a conclu d'un passage de Cicéron que la punition du coupable était d'être marqué au front d'un K, première lettre du mot (kalumniator). Cic. Pro Roscio Amer. c. 19, 20 Sed si ego hos bene novi, litteram illam, cui vos, usque eo inimici estis, ut etiam kalendas omnes oderitis, ita vehementer ad caput affigent, etc. - Et Papinien, l. 13. D. De Testibus, oppose l'homo integræ frontis à celui qui a été calumniæ damnatus.

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Mais il est vrai de dire qu'aucun autre écrivain que Cicéron ne nous parle de cette peine singulière; et il est difficile de savoir si les paroles du grand orateur doivent se prendre au propre ou au figuré. C'est pour le premier sens que la plupart des interprètes se sont prononcés Ernest. Clavis Cic. v° Remmia); mais Manuce et Hotomann (Ad Cic. Pro Roscio Amer. ) se sont prononcés pour le second, et cette opinion nous semble plus probable.

Je remarque, du reste, que le scoliaste Gronovianus (Orell. p. 432) donne au passage de Cicéron une tout autre interprétation: Quotiescumque aliquem damnabant judices, K litteram faciebant; A absolvebant. Hoc ergo dicit Cicero : « Si aliquem sine suspicione accusaveritis, vobis crura frangantur! Litteram K sic odistis, ut etiam propter ipsam fugiatis kalendas. » Propterea quod kalendæ per K scribuntur.

Sur cette loi Remmia il faut lire les conjectures de Geib, p. 290-295.

profession encouragée par les mauvais princes, et la voie la plus rapide pour amasser criminellement une grande fortune (1). Quant à la prévarication et à la tergiversation, dont les lois et les monuments font trop souvent mention (2) pour qu'on ne reconnaisse pas combien ce mal avait de profondes racines, la peine du coupable était l'infamie (3), qui entraînait l'incapacité de témoigner et de se porter accusateur (4). Il fallait du reste que cette infamie fût prononcée par jugement (5).

Au jour indiqué pour l'accusation, le héraut du préteur citait les juges, l'accusé, l'accusateur et les défenseurs (6). Si l'un des juges était absent, il est probable qu'on prononçait une amende contre lui (7), comme on fait chez nous contre un juré qui ne se

(1) Voyez Brencmann, Fata calum. sub imp. dans le Thesaurus d'Otto, t. III. Quand les empereurs punirent les accusateurs, la peine fut toujours arbitraire, et je ne vois point qu'il soit fait mention de la loi Remmia.

(2) Lex Servil. c. 1, 14, 16, 22.- Tabul. Heracl. 1. 120. — Cic. De Part. Orat. c. 36. Divin. c. 18. Pro Cluentio, 97. Pro Flacco, 20, etc.

(3) Ascon. In Tog, cand. (Orell. p. 87); In Divin. (p. 99). Cic. Pro Cluent. c. 31. - L. 1. D. De his qui not. infam. (4) Cic. Pro Rosc. Amer. c. 20.

(5) Ascon. In Cic. pro Scauro (Orell. p. 30). Cato præterea cum vellet de accusatoribus in consilium mittere, multique e populo manus in accusatores intenderent: cessit imperitæ multitudini, ac postero die in consilium de calumnia accusatorum misit.. - Cic. Ad Q. Frat. 11, 16. Drusus erat de prævaricatione a tribunis ærariis absolutus, in summa quatuor sententiis, cum senatores et equites damnassent. Pour l'empire, Plin. Ep. 111, 9.-L. 1, § 3, 4,5, 12. D. Ad S. C. Turp. L. 3. C. De his qui acc. non poss. L. 1, 3. C. de Calum.

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(6) Ps. Ascon. In Cic. in Verr. 1, 1. Apud veteres et judices, et rei, et accusatores, et defensores ciebantur a præcone prætorio. Cic. In Verr. 11, 17, 40. Pro Cluent. 17, 18, 21. — Appien, Guerre civ. 1, 74. - Florus, iv, 11, Martial. Epigr. iv, 5, 24.

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4. — Quintil. Inst. Or. v1, 4, § 7.

(7) Tabul. Bantin. lin. 5-7 ( Klenze Philol. Abhand. p. 12-15 ).

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