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la mer contre le maintien de cette coutume, peut être en quelque sorte retourné en faveur de ce même maintien.

En effet, c'est précisément parce que la mer est libre et n'appartient en propriété à personne, qu'il ne s'y présente aucun moyen de nuire à l'ennemi analogue à celui d'une occupation de territoire, et qu'on ne peut s'en prendre, par conséquent, qu'aux navires qui s'y trouvent. De même que là où l'enneni a un droit de propriété territoriale, on met obstacle, par l'occupation, à l'exercice de ce droit de propriété : de même, sur la mer où il n'a, comme tous les autres états, qu'un droit d'usage, on cherche à mettre obstacle, par l'emploi des forces navales, à l'exercice de cet usage.

Joignez à cela que la propriété de la mer n'étant à personne et l'usage étant à tous, chacun des belligérants, lorsqu'il est au large, est porté à supprimer l'usage de son adversaire, à s'en emparer à son exclusion, et à en agir rigoureusement sur la mer contre cet adversaire comme il en agirait sur son propre territoire; or, dans les guerres continentales, le principe qui sauvegarde les propriétés mobilières des sujets de l'état ennemi, n'est pas obligatoire jusqu'au point de permettre à ces sujets de se livrer à des opérations commerciales sur le territoire de l'état opposé, sans licence expresse de ce dernier. Un des effets immédiats de la guerre est, au contraire, l'interdiction de tout commerce avec les su

jets des états belligérants, à moins d'une autorisation spéciale. Si sur terre la coutume internationale, renforcée par les stipulations d'un grand nombre de traités publics, défend à un état de porter atteinte, même sur son propre territoire, aux marchandises des sujets de l'ennemi renfermées dans des magasins, ou transportées par le roulage ou sur des rivières, canaux et lacs (1), cette coutume n'est obligatoire que dans les commencements des hostilités; après un certain délai, qui doit être toutefois pleinement suffisant pour mettre en sûreté ces marchandises, c'est-à-dire pour les vendre ou les faire sortir du territoire, elles sont sujettes à confiscation. Si quelquefois on continue de les respecter, même passé ce délai et au plus fort de la guerre, ce n'est que par pure tolérance,et le maintien de cette tolérance ne peut être exigé comme un droit.

Quant aux biens immeubles, si on ne les confisque jamais, si on se borne à en mettre tout au plus les revenus en séquestre, afin qu'ils ne soient pas transportés chez l'ennemi, cette conduite équitable ne peut être alléguée en faveur des navires de commerce qui sont réellement meubles et réputés tels par les lois de tous les pays.

En résumant les considérations qui précèdent, on peut dire, avec M. Wheaton, « que l'inégalité <«<existant dans les lois de la guerre sur terre et les

(1) KLUEBER, Droit des Gens moderne, § 252.

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« lois de la guerre sur mer, est justifiée, par l'u« sage de considérer comme butin la propriété pri« vée, lorsqu'elle est capturée dans des villes prises «< d'assaut; par le fait reconnu de lever des contri«butions sur un territoire ennemi, au lieu d'une «< confiscation générale des propriétés appartenant « à ses habitants; parce que dans la guerre sur terre, laquelle a pour but les conquêtes, l'acquisition << d'un territoire pouvant devenir l'équivalent de la « perte d'un autre territoire, les ménagements que << doit avoir le vainqueur pour ceux qui deviennent « ou qui ont été ses sujets, restreignent naturelle«<ment l'exercice de ses droits rigoureux; en outre « et surtout, parce que le but de la guerre sur mer « est la destruction du commerce et de la naviga«<tion de l'ennemi, source et nerf de sa puissance navale, but qui ne peut être atteint autrement « que par la capture et la confiscation de la

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Mais pour nous, les seuls motifs déterminants, ceux auxquels nous voudrions réduire la démonstration parce qu'ils sont concluants, parce qu'ils simplifient singulièrement la difficulté et nous paraissent peu susceptibles de controverse, ces motifs

sont:

(1) WHEATON, Elem. of internat. law, vol. 2, p.

81.

1° Que la marine marchande, soit dans son personnel, soit dans son matériel est un moyen de puissance navale toujours prêt à venir en aide à l'état belligérant dont elle relève, à recruter sa marine militaire, en un mot à se transformer, à la première réquisition, en instrument de guerre. A ce titre, elle tombe directement sous le coup des forces navales ennemies qui pourront l'atteindre.

2° Que si la marine marchande et les marchandises qu'elle porte étaient reconnues libres et inviolables quoi qu'appartenant à l'ennemi, il serait libre à une puissance belligérante, en ne mettant en mer aucun bâtiment de guerre, de rendre illusoire à son égard les effets de la guerre maritime, de continuer à exploiter par ses navires de commerce les mers et les continents, et de puiser ainsi des moyens même de soutenir la lutte, dans les opérations de cette marine marchande, soit par les impôts, soit par l'accroissement de la fortune privée, dont l'ensemble en définitive constitue la fortune de l'état.

Toutefois, la coutume admet une exception en faveur des bateaux qui se livrent à la pêche côtière; ces bateaux ainsi que leurs équipages sont à l'abri de la capture et exempts de toute hostilité.

L'industrie de la pêche côtière est en effet entièrement pacifique, et d'une importance, quant à la richesse nationale qu'elle peut produire, bien

moins grande que celle du commerce maritime ou des grandes pêches. Paisibles et tout à fait inoffensifs, ceux qui l'exercent, parmi lesquels on voit souvent des femmes, peuvent être appelés les moissonneurs des mers territoriales, puisqu'ils se bornent à en récolter les produits; ce sont, pour la plupart, des familles pauvres, qui ne cherchent guère dans ce métier que le moyen de gagner leur vie.

Depuis des temps reculés la France a donné l'exemple de la mise en pratique de l'adoucissement fait en leur faveur aux maux de la guerre. L'article 80 de la Judidiction de la marine, par Cleirac, qui n'est que la reproduction des articles 49 et 79 des Édits sur le fait de l'amirauté, des années 1543 et 1584, s'exprime en ces termes :

« L'admiral peut en temps de guerre accorder trefues pescheresses aux ennemis et à leurs sujets : si tant est que les ennemis la veuillent en semblable accorder aux François.

>>

Et Cleirac ajoute, par commentaire, le passage suivant de Froissart:

<«< Pescheurs sur mer, quelque guerre qui soit en France et en Angleterre, jamaisne se firent mal l'un à l'autre ; ainçois sont amis, et s'aident l'un à l'autre au besoin. »

L'ordonnance de 1681 n'a pas reproduit l'article ci-dessus des anciens édits royaux. Sous Louis XIV, les pêcheurs de l'ennemi n'étaient

II. P.

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