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appuyèrent leur opinion de plusieurs observations consignées au procès-verbal, à la suite duquel il fut déposé à la bibliothèque publique entre les mains des bibliothécaires Marquet et Fachot.

Ce chef-d'œuvre d'orfévrerie, d'environ 18 pouces de hauteur totale, se compose d'un pied rond et ciselé, sur lequel s'élève un Atlas nu et debout, à belles proportions, soutenant, à l'aide d'une corne d'abondance, un globe terrestre, que couronne une petite sphère armillaire. La dorure intérieure et extérieure, le dessin des arabesques, la beauté des émaux, ne laissent rien à désirer. Le globe, partagé horizontalement en deux hémisphères, peut sans peine être converti en ciboire par la suppression de la sphère de Ptolémée et par la substitution d'une croix. Si cet usage sacré a ménagé le globe et altéré la sphère, il n'est pas étonnant que la séparation de ces parties, qui existait encore au moment de la translation, ait causé la perte de la terre, grosse comme une noix et suspendue au centre de cercles mobiles. Cette perte est d'autant plus fàcheuse, qu'après avoir démonté toutes les parties de l'ouvrage et cherché exactement dans tous les coins, je n'ai trouvé les dénominations pi de la ville, ni de l'époque, ni de l'artiste, qui étaient probablement empreintes en tout ou en partie sur la terre indiquée, de peur qu'elles ne défigurassent le travail.

Il fallut donc recourir à un autre moyen pour arriver à son origine. Les points cardinaux, gravés en petites capitales romaines sur l'horizon de la sphère de Ptolémée, me donnèrent d'abord à penser que la fabri

cation venait de Bruxelles, où Charles IV avait longtemps séjourné. Mais un dictionnaire flamand, consulté sur ces quatre mots, me tira bientôt d'erreur. Les expéditions de ce prince l'ayant plusieurs fois amené dans la Bavière, je conjecturai que ce vase pouvait venir de Nuremberg, par exemple, ville dont les compositions géographiques sont renommées. En effet, le glossaire allemand du moyen âge, publié par Scherz et augmenté par Oberlin (édition in-fol. de Strasbourg, 1781) m'apprit que les noms des quatre points cardinaux étaient de cet ancien langage et s'écrivaient en caractères romains. D'où il faut conclure que Charles IV acquit en Bavière un ouvrage destiné sans nul doute à quelque prince ou grand seigneur. On s'apercevra bien que notre globe a été fait sur un globe de même grandeur et d'une matière commune. Car l'artiste était trop ignorant pour réduire un globe d'une dimension différente, comme l'attestent les fautes grossières qu'il a commises, et qui n'ont pu exister dans l'original d'après lequel il a travaillé.

On cessera d'être surpris de la curiosité du duc de Lorraine, quand on saura que Jean Lhoste, son ingénieur, lui avait dédié, en 1624, son Sommaire de la sphère artificielle, imprimé à Nancy, in-4.o, où il rapporte qu'il a tracé et buriné pour Son Altesse, après un travail d'environ huit ans, deux grands globes de bronze, l'un terrestre, l'autre céleste. Ils ne sont plus à Nancy. Lorsque nos ducs ont quitté la Lorraine, ils les auront probablement transportés en Toscane, et de là en Autriche.

La dorure des terres de notre globe permet de les

distinguer facilement des eaux, qui étaient jadis émaillées d'un bleu foncé, et qui laissent aujourd'hui à découvert une superbe ciselure brune imitant les ondulations d'une mer doucement agitée. Les cercles polaires et les tropiques y figurent sans graduation; l'écliptique, l'équateur et les colures, s'y divisent en 360 degrés, sans indication de nombre. Mais des chiffres arabes désignent, de 10 en 10 degrés, les douze signes du zodiaque, placés sous le globe à l'extrémité d'une rose des vents. La même espèce de chiffres, gravés sur le méridien, l'équateur et le zodiaque de la sphère armillaire, offre la division de ces cercles en 360 degrés. Les anciennes parties du monde sont représentées sur le globe avec leur nom, et se rapprochent de leur forme actuelle, excepté l'Amérique, qui tient fortement à l'Asie par le nord, et se prolonge beaucoup vers l'est sous la dénomination de Grande-Asie et d'Asie-Orientale, tandis que sa presqu'île méridionale porte seule le titre d'Amérique et de Nouvelle Partie du Monde. Une telle configuration prouve qu'elle était alors admise par les géographes. Mais à quelle époque remonte cette opinion? Elle est nécessairement postérieure à la découverte de Magellan, c'est-à-dire à 1520, les noms d'Océan Magellanique, de mer Pacifique se trouvant sur notre globe. A en juger par une mappemonde sur cuivre de 1531, dont Sébastien Munster donne l'explication (1), et par une autre de 1566, que grava

(1) Novus orbis regionum ac insularum veteribus incognitarum, una cum tabula cosmographica, et aliquot aliis consimilis argumenti libellis, Parisiis, Joannes Paryus, 1532, in-fol.

Jean-Paul Cimmerlin de Vérone, d'après Oronce Finé, également auteur de la première (1), il paraît que cette opinion régnait encore à une époque assez éloignée de la découverte d'un nouveau continent. Il est impossible de décider cette question avant de faire une revue exacte des pays tracés sur notre globe et d'entrer dans les détails qu'exige cette comparaison, mais que ne comporte point une séance publique (2).

Quoi qu'il en soit, nous devons nous féliciter de posséder deux monuments géographiques, qui nous sont parvenus à travers tant de chances capables de les anéantir, grâces à la précaution que l'on prit de les soustraire à toutes les recherches depuis l'invasion des Alliés jusqu'après leur départ. Sans cette sage mesure, ils auraient bien pu nous être enlevés par le général russe qui dépouilla notre bibliothèque de son bel atlas de Cassini; et nous ne pourrions pas nous consoler de cette perte irréparable, comme nous avons été heureusement dédommagés de l'enlèvement de la carte de France par la libéralité du général DROUOT, notre compatriote, qui a donné à notre ville son exemplaire choisi dans le dépôt du ministère de la guerre.

(1) Tavole moderne di geografia della maggior parte del mondo di diversi autori, raccolte e messe secondo l'ordine di Tolomeo, etc., in Roma, in-fol. sans date.

(2) Voyez dans la deuxième partie du volume le supplément de co mémoire.

DES DEUX AMANTS;

LÉGENDE,

PAR M. GUERRIER DE DUMAST.

L'anecdote que vous allez entendre, Messieurs, étant tirée des écrits de Grégoire de Tours, c'est aussi dans sa bouche, ou dans celle de l'un de ses contemporains, que nous en plaçons par supposition le récit.

Les personnages dont il y est parlé vivaient sous Théodose, vers l'an 390 de notre ère; et quant à l'annaliste qui nous en a transmis le souvenir, il publia son histoire des Francs en 592, c'est-à-dire sous le règne simultané de Gontran en Bourgogne, de Childebert en Austrasie, et du fils de Frédégonde à Soissons. De ces deux dates, Messieurs, la première appartient à un siècle de décadence, et la seconde à un siècle de barbarie: on pourrait donc être surpris de voir exister, soit à l'époque des acteurs, soit à celle du narrateur, un charme d'imagination, une fraîcheur, une délicatesse de sentiments, qui semble former ana chronisme; mais l'étonnement, en pareil cas, partirait d'une philosophie historique bien superficielle. Pour se rendre compte du phénomène, et concevoir com➡ ment, en l'absence de la littérature et des arts, au

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