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faire oublier cet ordre de considérations. «<- Quand tu >> en auras bonne occasion, tu demanderas en notre nom » à Son Excellence sûreté et sauf-conduit dans ses

» États pour nos négociants qui iraient au Levant ou qui en viendraient. Cette chose nous importe beau> coup elle est, pour ainsi dire, l'estomac (lo estomaco) de cette ville. Il faut t'ingénier et employer > tout ton zèle pour que cela tourne au gré de nos » désirs '. >>

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Muni de ces instructions, le secrétaire des Dix chevauche vers Imola.

Il fallait présenter au spectateur le témoin plus ou moins désintéressé, mais innocent en somme, du dénouement qui se prépare.

Le drame a deux actes:

La conjuration de la Magione;

Le guet-apens de Sinigaglia.

Le bourg de la Magione, ou la Mascione del Gian di Carpene2, voisin de Pérouse, était plein de cavaliers armés. On était aux premiers jours de l'automne de cette année 1502.

Capitans, serviteurs, soudards, estafiers, habitués des Orsini, y affluaient autour de leurs maîtres.

Ce n'était pas une armée, c'était plus qu'une bande. Un déploiement inusité de forces eût attiré l'attention

1. Machiavel, son génie, etc., par ARTAUD; Paris, Didot, 1833, t. 1o, p. 92. 2. Voy. Cronaca del Matarazzo, nel tomo XVI, part. II, dell' Archiv. della Storia italiana.

sur leurs desseins; cependant, ils devaient se protéger contre une surprise de l'ennemi soupçonneux et en éveil, qui finalement les prit au traquenard. Aussi, durant la semaine qui précéda la conférence, les aventuriers affidés de ces seigneurs se glissaient isolément ou par petits groupes à la Magione, ou s'établissaient aux environs. Les capitaines disséminaient leurs détachements... C'était l'aristocratie du métier, alors très lucratif, de la guerre.

A un étage inférieur de la Condotta (c'est le nom de ces entreprises, de conducere, louer), les gens d'armes appelés lances-brisées (lanze rotte ou spezzate) s'afferment avec leur brigade de cinq à six hommes. Ajoutez toute cette famille (famiglia) mi-partie domestique et militaire, rappelant et les ministériaux d'Allemagne et les clients de Rome, laquais-soldats, familiers de tout ordre et de tout emploi, dévoués per fas et nefas. La fidélité au maître et à la maison suppléait chez les meilleurs le sens moral, absent trop souvent du condottiere, même sous cette forme infime, mais désintéressée. Ces négociants en tuerie, tuaient, on l'a vu, le moins possible, ménageant leur peau et celle de leurs adversaires qui pouvaient être demain leurs compagnons. Ce qu'ils n'épargnaient pas, c'était le coffre-fort, l'argenterie de l'habitant, le poulailler, le grenier, le cellier du contadino1.

1. NARDI, Ist. della città di Firenze, lib. IV, cap. XVI.

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Les bravi trafiquent d'un coup de dague: plutôt duellistes que soldats, plutôt meurtriers que duellistes, ils travaillent d'ordinaire isolés. Ils ont leur clientèle, qui les paye, pour une expédition hasardeuse: rapt, estocade bien placée, pour une querelle à chercher, suivie d'une rencontre à coup sûr. Ils possèdent leur botte secrète. L'illustrateur des types de ce temps, le peintre Veccellio, dans la naïve légende de leur costume, les définit: gens très exercés » dans l'escrime et la lutte; aussi les estime-t-on » pour des hommes très braves. Questi erano molto » essercitati nell' arte dello schermire e della lotta » e però erano stimati per huomini molto bravi. » Chausses à bandes multicolores, multicolores, rapière battante au flanc gauche, toque rouge, d'ordinaire, sont les insignes de la fonction dont les titulaires étalent fièrement, près des livrées fastueuses et des brillantes armures,

Leur cape en dents de scie, et leurs bas en spirale1.

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Quelques abbés, de cour ou d'antichambre, signalent la présence d'un prince de l'Église, Orsini le cardi

nal, venu là avec Pagolo, son cousin, et Vitellozzo, JeanPaul Baglioni, Oliverotto da Fermo. Jean Bentivoglio est représenté par son fils Hermès; le seigneur de

1. V. HUGO. Ruy Blas, acte If, sc. II.

Sienne, Pandolfo Petrucci, par son confident, Antonio da Venafro.

De quelque prétexte que les Orsini couvrissent ce rassemblement, le Valentin avait l'œil sur eux; il les laissait faire, les surveillant par ses espions, sachant l'art de les diviser au moment voulu, ayant surtout, par son alliance avec Louis XII, le moyen de les arrêter. Cette alliance était l'ultima ratio qui devait paralyser la ligue et finalement la dissoudre. Car, n'osant pas s'attaquer à la France déterminée à soutenir César, et ne l'en pouvant détacher, ils seraient amenés à traiter avec lui.

Ce fut un chef-d'œuvre de diplomatie, d'autant plus remarquable en résultat que les confédérés eurent d'abord la victoire. Débarqué à Sinigaglia, Guid' Ubaldo, duc d'Urbin, leur allié, avait prestement recouvré ses États, pendant que Jean Bentivoglio, contre qui César avait espéré tourner les Orsini, échappait par leur défection aux serres du Borgia.

Deux traités, habilement machinés, sauvèrent la situation compromise: le premier avec les Orsini, le second avec Bentivoglio.

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Ces deux instruments, à la conclusion desquels le secrétaire florentin assista, préparaient le dénouement du drame. Il est curieux d'en relater le texte, d'après lui. Le système d'équilibre a débuté dans ce coin de l'Italie. Les savantes stratégies de la politique moderne s'essayèrent par ces combinaisons étendues peu à

peu à l'ensemble des États européens. La négociation commençait à être un art, avec ses agents spéciaux, ses formules et ses théoriciens.

«

Le traité avec les Orsini est du 28 octobre 1502.

Qu'il soit connu et manifeste aux parties signataires et à quiconque prendra connaissance de la teneur des présentes, qu'étant nés entre l'illustrissime duc de Romagne, de Valentinois, etc... et les Orsini avec leurs alliés, quelques différends. inimitiés, défiances et soupçons, et les susdites parties voulant apaiser et terminer ces soupçons et différends:

» Elles font premièrement une vraie et perpétuelle paix, concorde et union, avec pleine rémission de tous les dommages et injures encourus jusqu'à ce jour, et elles se promettent l'une à l'autre de n'en garder aucun souvenir. Et, pour l'observation de la dite paix et union, le susdit illustrissime duc de Romagne reçoit en sa confédération, ligue et union à perpétuité, tous les seigneurs prénommés, et chacun d'eux. Il promet de défendre les États des prénommés et chacun d'eux contre tout potentat quelconque qui les voudrait molester ou offenser, pour quelque raison que ce soit; et ce, toujours en réservant la Sainteté de Notre Seigneur le Pape Alexandre VI, et Sa Majesté Très Chrétienne le roi de France Louis. D'autre part, les prénommés promettent de concourir dans le mode susdit à la défense des personnes et des États de Son Excellence, et des illustrissimes seigneurs don Zofre Borgia, prince de Squillaci, don Rodrigue Borgia, duc de Sermoneta et de Biselli, et don Jean Borgia, duc de Camerino et de Neppe, frères et neveux du même illustrissime duc de Romagne, et à cet effet chacun des susnommés promet de concourir et de contribuer.

» Item; parce que, au temps des susdits différends, controverses et dissensions, est advenue la rébellion et occupation des États d'Urbin et de Camerino, les dits confédérés tous ensemble, et chacun d'eux, s'obligent à interposer leurs forces

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