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Et mon cœur qu'en vain, hélas! je réclame en moi,
Vola subitement dans ce doux or,

Et fit comme l'oiselet qui parmi le vert laurier

A son gré va de branche en branche;

Quand voici deux mains belles outre mesure,
Recueillant les tresses au col éparses,

Se serrèrent sur lui qui là était empêtré.

Et je criais bien, moi, mais la voix expira,
Par l'arrêt du sang gelé de peur :

En tant, mon cœur fut lié et ravi.

Cet esprit charmant fut un grand esprit. Formé par l'école platonicienne, Florentin d'adoption, ce patricien de Venise dépassa l'horizon de Ficin. Son nom se lie à l'avènement de l'aristotélisme renouvelé.

Il protégea les travaux de Pomponace ou Pomponat (Pomponatius), il défendit contre les persécutions ecclésiastiques ce philosophe dont l'œuvre est à étudier, si l'on veut connaître dans son expression la plus avancée la pensée de la seconde Renaissance.

Le point de vue où elle s'éleva laissait trop en arrière la conception moyenne du siècle pour que l'esprit politique et avisé de la cour de Rome eût à réprimer à son égard ses inclinations intellectuelles. D'accord avec les dispositions libérales de Léon X, cette confiance dans la solide assiette de la papauté explique la tolérance de celui-ci à l'endroit de la doctrine de Pomponace. « Cet » excellent Pape, dit très bien M. Ernest Renan, parlant » des discussions provoquées par cette doctrine, prenait

» trop d'intérêt au débat pour songer à brûler les com» battants, et ce fut bien moins pour le clore que pour » le plaisir de le voir durer qu'il commanda une réfu>tation de Pomponat à son théologien de confiance, » Augustin Niphus'. »

Léon X se montra tout à fait accommodant dans cette querelle. Tandis que le cinquième concile de Latran (VIII session, novembre 1513) anathématise les philosophes qui, à l'aide de la raison naturelle, essayent de démontrer la mortalité de l'âme humaine, le sage de Padoue répond à Niphus que ce dogme inattaquable aux yeux de la foi se prouve uniquement par la résurrection du Christ. « Si Jésus-Christ est ressuscité, nous ressus> citerons; si nous ressuscitons, l'âme est immortelle. » D'ailleurs, l'ami du pontife, Bembo, l'universel Bembo, a lu le traité de Pomponace, De immortalitate animæ, il n'y a rien trouvé de répréhensible!

Après les persécutions du Moyen-Age, avant le réveil prochain de l'inquisition théologique par le protestantisme, les dépositaires de la tradition sacrée semblaient offrir à l'élite intellectuelle du monde quelques années de trêve, prélude d'un temps meilleur. Par une indulgence tacite, voisine de la complicité, ils permettaient à la seconde Renaissance de préciser, à l'encontre des vieilles doctrines, les formules d'une raison déjà virile. De Cosme l'Ancien, le bisaïeul, à Léon X, l'arrière-petit

1. E. RENAN, Averroes et l'Averroïsme, 2° partie, ch. III, p. 366.

fils, ce fut l'honneur des Médicis d'associer jusqu'au bout leur patronage ou leur tolérance au développement d'une pensée philosophique dont les traités de Pomponace forment le couronnement.

CHAPITRE XXXI.

POMPONACE.

TRACTATUS DE IMMORTALITATE ANIME'.

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Le platonisme, tel que les sages essayaient de l'accommoder à l'orthodoxie catholique, sembla triompher par l'avènement de Léon X, fils du protecteur de Ficin. Mais, à ce moment même, une évolution philosophique s'accomplit, aux dépens de l'Idéalisme florentin représenté par les Médicis. Son vieux rival, le Sensualisme aristotélique, reprit le dessus, grâce à l'initiative de quelques philosophes.

L'antique « maître de ceux qui savent », pour parler comme Dante, reparut à la lumière, dégagé des gloses scolastiques qui altéraient sa raison indépendante, trop longtemps demeurée «la servante de la théologie ».

On a signalé, au début de cet ouvrage, cette longue influence d'Aristote sur le dogme chrétien, et aussi, à propos d'Averroès et des autres commentateurs arabes du Stagirite, la succession des libres esprits qui, durant le Moyen-Age, surent s'affranchir du joug théologique.

1. Edit. in-18, sans nom d'éditeur et de ville, datée de MDXXXIV. Très rare.

Leurs idées, en Italie, furent surtout propagées par l'Université de Padoue. Cette école, dans la nouvelle période de la Renaissance caractérisée par l'éclipse du néo-platonisme de Marsile, oppose à celui-ci un penseur d'un égal crédit.

Je veux parler de Pierre Pomponace. Il fut le plus illustre des métaphysiciens de cette pléiade, dont les négations audacieuses attirèrent, -on vient de le voir, - les anathèmes du cinquième concile de Latran.

Avec Pomponace, malgré les formes un peu rébarbatives qu'il tient d'une école restée fidèle au mode scolastique, nous avons affaire à un esprit bien plus rapproché que celui du théosophe florentin de la méthode et du savoir modernes. A ce point de vue, ses idées, qui laissent une trace au dix-septième et au dixhuitième siècle dans les théories des Hobbes, des Gassendi, des Hume et des Diderot, s'offrent comme la position la plus avancée occupée par le génie purement logique et déductif, avant la prise de possession de l'esprit humain par la philosophie positive fondée sur le calcul et l'observation.

On a peu de détails sur la vie de Pomponace: l'existence de tels hommes, abîmée dans le travail, est toute dans l'enchaînement de leurs œuvres.

Il naquit à Mantoue le 16 septembre 1462, professa à Padoue, et mourut à Bologne à l'âge de soixante-trois

ans.

Il était de très petite taille, presque un nain,

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