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Il est impossible qu'il n'y ait pour tous les hommes qu'un seul intellect.

>> Cela est impossible, si, selon la théorie de Platon, l'homme est l'intellect lui-même.

>> En ce cas, en effet, s'il n'y a pour Socrate et pour Platon qu'un seul intellect, Socrate et Platon sont un seul homme, et ils ne se distinguent l'un de l'autre que par ce qui est hors de l'essence de chacun d'eux. La distinction, qui est entre Socrate et Platon, sera dès lors la même que celle existant entre un homme vêtu d'une tunique et un homme habillé d'une cape. Ce qui est de la dernière absurdité.

>> Même impossibilité si, d'après le système d'Aristote', on pose l'intellect comme une partie ou une puissance de l'âme, qui est elle-même la forme de l'homme.

» Impossible, en ce cas, que, pour plusieurs êtres divers de nombre, il y ait une forme unique, puisqu'il est impossible que leur être soit unique, et que la forme est le principe de leur être.

> Un seul intellect ne tire des diverses représentations (phantasmatibus) de la même espèce qu'une seule espèce intelligible.

novi intendo adducere, sed tantum lectorem remittere ad ea quæ latinorum decus Divus Thomas Aquinas... scribit; etenim tam luculenter, tam subtiliter adversus hanc opinionem invehitur, ut... nullam... responsionem quam quis pro Averroe adducere potest impugnatam relinquat; totum enim impugnat, dissipat et annihilat, nullumque Averroistis refugium relictum est, nisi convitia et maledicta in Divinum et Sanctissimum virum. -POMPONAT., De Immortalitate animæ, c. iv, p. 10-11. 1. De anima, lib. III, text. 52.

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› Par exemple, de toutes les représentations d'une pierre, qui peuvent se trouver en lui, l'homme ne tire qu'une seule espèce intelligible de pierre.

» Si donc il n'y avait pour tous les hommes qu'un seul intellect, la diversité des représentations (phantasmatum) qui sont dans tel homme et dans tel autre, ne pourrait causer de diversité dans l'opération intellectuelle de celui-ci et de celui-là, comme le commentateur l'imagine 1. >>

Le commentateur, c'est Averroès.

Averrois, che 'l gran comento feo 2.

« Donc, conclut saint Thomas, il n'y a pas pour tous les hommes un intellect unique. »

Pomponace se borne à développer cette argumen

tation.

Il tient pour absurde « qu'un être unique ait simultanément à l'égard du même objet des opérations en nombre infini. Conséquence qui, cependant, résulterait de l'opinion par laquelle l'âme intellective, en vertu de son intellection première ou éternelle, comprend Dieu, et, en vertu de son intelligence seconde (nova), a, au sujet de Dieu, autant d'intellections qu'il y a d'hommes comprenant Dieu... »

La pensée est donc inséparable de l'organisme, qu'elle

1. Voy. THOMAS D'AQUIN, Summa Theol., t. II, p. 18, édit. Louis Guérin et C; Bar-le-Duc, 1866.

2. DANTE, Div. Com., Infern., c. iv, terz. 18.

LES MÉDICIS.

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soit le sujet ou l'objet de celui-ci. «Selon Aristote, comprendre est comme sentir. L'intellect possible est une vertu passive. Son motif est la représentation (phantasma). Or ce qui a besoin de représentation est inséparable de la matière 1. »

Igitur illa ratio magis probat ipsum esse materialem quam immaterialem.

Mais, dira-t-on peut-être, l'intellect est immatériel simplement en ceci, qu'il n'a pas besoin de l'organisme comme sujet.

Cette objection, fût-elle fondée, laisserait subsister l'autre cause de matérialité, à savoir, que l'intellect est mu par l'organisme corporel.

En somme, de quelque façon que l'on comprenne la dépendance de l'intellect à l'égard de l'organisme matériel du corps, dès qu'on admet que, sans la représen tation sensible (phantasia), il n'y a pas d'intelligence, cette représentation étant requise en toute opération intellectuelle, l'intellect ne peut en être séparé. Et c'est, au fond, ce qui importe ici.

Quand quelque chose a deux causes de vérité, si l'on ôte l'une d'elles, et si on laisse l'autre, ce quelque chose n'en demeure pas moins, comme il paraît de soi, puisqu'il suffit pour la vérité qu'une partie de la disjonctive soit vraie. Ainsi l'on vérifie que l'intellect est inséparable de la matière parce qu'il est la représentation (phantasia) ou qu'il n'est pas sans la représentation.

1. De Immort. animæ, cap. IV, p. 17-18, et cap. Ix, p. 50-57.

Écartant donc qu'il est la représentation, on ne vérifiera pas moins qu'il est matériel pourvu qu'il ne soit pas sans la représentation... Quand deux modes sous disjonction sont assignés à quelque chose, cette chose peut indifféremment être séparée de l'un ou de l'autre, ou du moins de l'un d'eux, elle-même demeurant.

En résumé: Averroès se trompe en posant l'unité de l'âme intellective.

Il a beau mettre « la félicité humaine dans l'union de l'intellect actif avec l'intellect possible », cette unité, qu'il cherche dans la participation de chaque homme à une raison commune, n'existe pas. Autrement, la fin de l'homme serait vaine, puisqu'elle ne serait atteinte par personne, et, bien plus, ne pourrait l'être, les moyens ordonnés à cette fin étant irréalisables : il est impossible à un homme de savoir toutes choses.

Et sic finis hominis irritus est, cum a nullo attingatur, imo a nullo attingi potest, cum media ordinata ad illum finem haberi non possint: impossibile est enim aliquem hominem scire omnia, ut dicit Plato, lib. 10 (de Republica), neque etiam speculabilia, imo nulla scientia perfecte habita est usque ad præsentem diem, ut experimento patet. »

Philosophiquement, l'existence du principe intellectuel est liée à la représentation sensible; par suite, à l'existence du corps.

Ainsi, l'unité humaine individuelle est affirmée. Pour

1. De Immort. anima, cap. IV, p. 25-26.

bien éclaircir sa thèse, Pomponace revient sur les preuves qu'il a données; il insiste particulièrement sur la non-distinction de l'intellect et de l'âme sensitive.

Il n'y a pas deux âmes, mais seulement deux aspects d'une même âme. Forme de la matière humaine, cette âme n'est pas, à l'égard du corps, comme un moteur à l'égard de ce qu'il meut. « Autrement, l'âme et le corps n'auraient pas entre eux plus d'unité que n'en ont ensemble un char et les bœufs qui y sont attelés. › Quant à l'unité du principe sensible et du principe intellectuel, notre auteur se prend pour exemple...

« Je souffre, dit-il, de grandes douleurs, et cependant je m'étudie à combattre ces douleurs par des moyens médicaux. Si done autre était l'essence par laquelle je sens, autre celle par laquelle je comprends, comment, moi qui sens, pourrais-je être le même moi qui comprend? Sic etenim dicere possemus quod duo homines simul conjuncti sic mutuas habent cognitiones, quod ridiculum est 1. »

Après avoir réfuté, comme nous venons de le voir, l'interprétation d'Aristote par Averroès, notre philosophe expose comment il entend la pensée du Maître.

Pomponace, tout d'abord, se couvre :

«La vérité de l'immortalité de l'âme ne souffre de ma part aucun doute, puisque les Écritures canoniques, qui doivent être préférées à toute raison et à toute expérience humaines, étant données de Dieu, confirment cette thèse. Mais, ce qui est l'objet de mon doute, c'est de savoir si cette thèse n'excède pas

1. De Immort. animæ, cap. VI, p. 29.

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