Prætereà duo, nec tutâ mihi valle reperti, Huc ades, ô formose puer : tibi lilia plenis (8) Ipse ego cana legam tenerâ lanugine mala, (9) Rusticus es, Corydon ; nec munera curat Alexis; quoque silvas, Torva leæna lupum sequitur; lupus ipse capellam; (10) >> J'ai deux chevreuils encor, tous deux sont mouchetés; >> Chez moi, sous deux brebis, ils croissent allaités. » Je les garde pour vous; Thestylis les souhaite : » Aura-t-elle un présent que votre orgueil rejette? Approchez, belle enfant; voyez combien de lis » En corbeille, en faisceau, les nymphes ont cueillis ! >>> La brillante Naïs, pour vous, unit en gerbes La pâle violette à des pavots superbes ; L'hyacinthe au narcisse ; et le feu du souci, » Près du vaciet en deuil, brille plus adouci. » C'est trop peu que des fleurs ; je veux y joindre encore >> Des coins au blond duvet, que le safran colore; >> Des prunes dont l'azur enchante les regards, » Et des marrons choisis, dépouillés de leurs dards. » Chéris d'Amaryllis, ces trésors de l'automne >> Seront, par votre choix, la gloire de Pomone. >> Et vous, myrtes, lauriers, je vous offrirai tous; » Ensemble confondus, vos parfums sont plus doux... >> Mais que sont tes présents! quelle erreur te possède? >> Penses-tu qu'à ce prix Iolas te la cède? Que ce nom m'est fatal! ce nom, source de pleurs, >> Est pour moi l'ouragan déchaîné sur les fleurs, » Ou l'affreux sanglier dans une onde limpide. Non, les bois ne sont point ce que tu fuis, perfide! » Et Pâris et les dieux les ont tous habités. >> Pallas qui les fonda, peut aimer les cités ; >> Mais les bois ont leur charme et ne sont pas sans grâce. >> La lionne en fureur du loup cherche la trace; >> Le loup cherche l'agneau, l'agneau des prés fleuris ; >> Chaque être a son penchant : le mien, c'est Lycoris. Florentem cytisum sequitur lasciva capella; Me tamen urit amor : quis enim modus adsit amori? Quin tu aliquid saltem potiùs, quorum indiget usus » Tu le vois : l'ombre au loin descend de la colline; » Le bœuf, libre du joug, vers l'étable chemine; ע » Moi seul, d'un long tourment dévoré nuit et jour, » Je brûle, et ne vois point de remède à l'amour ! Corydon ! Corydon! abjure un vain délire; » Au pied de cet ormeau ta jeune vigne expire; >> Tresse l'osier flexible en paniers arrondis : » Une autre de ton cœur sentira mieux le prix. 91 REMARQUES SUR L'ÉGLOGUE DEUXIÈME. QUELQUES commentateurs ont pensé que Virgile s'était représenté dans cette églogue, sous le nom de Corydon, et qu'Alexis était un esclave de Mécène, que le poëte voulait instruire dans l'art d'Apollon et des Muses. Nous croyons que l'auteur des Églogues n'a eu d'autre intention que celle d'imiter une des plus belles idylles de Théocrite, intitulée le Cyclope. Dans l'idylle grecque, Polyphème exprime sa passion pour la nymphe Galatée. (1) PAGE 84, VERS 3. Tantùm inter densas, umbrosa cacumina, fagos Montibus et silvis studio jactabat inani. Ce tableau est d'une grande vérité; le berger cherche les lieux solitaires, car les sentiments tendres se plaisent et se fortifient dans la solitude. Segrais, en imitant ce passage de Virgile, en a caractérisé l'esprit et la beauté : Ce berger, accablé de son mortel ennui, Il faisait retentir les rochers et les bois. Boileau trouvait dans ces vers de Segrais le ton qui convient au genre pastoral: il nous semble que le poëte français n'est |