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Et il est si vrai que ce n'a été que l'embarras où il s'est trouvé, qui l'a obligé d'y avoir recours, qu'en un autre endroit de sa réponse, il reconnaît qu'il a pris pour principe ce qu'il dit ici n'avoir pas pris pour principe. On ne peut le reconnaître plus clairement qu'il le fait en la page 202. N'ai-je pas, dit-il, toujours marqué, que l'esprit ne pouvait connaître les corps en eux-mêmes: et n'est-ce pas pour cela que j'ai voulu qu'on les vit par l'étendue intelligible, qui est leur idée. Rien peut-il être plus exprès? Et c'est ce qui nous fera encore voir combien la seconde défaite est misérable. DEUXIÈME DÉFAITE. « L'opinion des philosophes, que j'avais principalement dessein de réfuter, c'est que l'âme voit les objets par des espèces expresses ou exprimées des impresses qu'impriment les objets, etc. Ne pouvais-je pas leur parlant, commencer par cette proposition : qu'on tombait d'accord, que nous n'apercevons point les objets qui sont hors de nous par eux-mêmes, puisque ces philosophes la reçoivent? >>

RÉPONSE. Il n'a osé rapporter ses propres paroles qui sont: Tout le monde demeure d'accord, etc., de peur qu'on ne vit trop clairement, que c'est se moquer du monde, de vouloir que des paroles si générales ne signifiassent autre chose, sinon, que les philosophes, qu'il avait en vue de réfuter, et dont il ne parle point dans ce chapitre, demeuraient d'accord, etc. Mais cette défaite est entièrement ruinée par les deux passages que je viens de rapporter; l'un de la Recherche de la Vérité, page 205; et l'autre, de sa réponse, page 202 : où il témoigne expressément, qu'il a toujours marqué que l'esprit ne peut voir les corps en eux-mêmes, et que c'est pour cela qu'il les voit dans un étre représentatif qui est l'étendue intelligible.

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TROISIÈME Défaite. « Quand j'aurais été assez ridicule pour supposer ce qui est en question... M. Arnauld n'aurait encore nul droit de prétendre avoir prouvé sa proposition à démontrer, qui est ; que notre esprit n'a point besoin, pour

connaître les choses matérielles, de certains êtres représentatifs distingués des perceptions: car il se pourrait faire fort facilement qu'un autre, plus habile que moi, convaincrait M. Arnauld, ou du moins toute la terre, que les modalités de l'âme ne sont point essentiellement représentatives. » RÉPONSE. Je n'ai point dit qu'il fût ridicule, pour avoir supposé ce qui est en question; mais j'ai si bien montré qu'il l'a supposé, qu'il ne s'en est pu tirer que par les deux premières défaites, qui n'ont pas la moindre vraisemblance.

Celle-ci ne vaut pas mieux. Car j'ai fait ce que j'avais entrepris, si j'ai bien prouvé, qu'il avait employé, pour établir sa doctrine, le sophisme appellé pétition de principe, comme il parait par la majeure qu'il a accordée, et par la conclusion qui le regarde en particulier. A quoi néan moins on peut ajouter que ce que j'ai mis comme de surcroît, à la fin de ma démonstration, doit convaincre toutes les personnes raisonnables que comme presque tous les philosophes habiles croient aujourd'hui, que la supposition d'une forme substantielle, dans tous les corps, en la manière qu'on la conçoit dans l'école, est une invention de gens oisifs, on a la même raison de rejeter, comme une pure imagination, encore plus mal fondée, la supposition fantastique de ces étres représentatifs des corps, qui ont été inventés par la même voie que les formes substantielles, et dont la notion est encore plus obscure et plus confuse que 'celle de ces formes.

Mais il se pourra faire facilement, nous dit-on, qu'un autre homme plus habile que le P. Malebranche convaincra M. Arnauld, ou au moins toute la terre, que les perceptions qu'a notre âme des objets, ne sont pas représentatives de ces objets. On l'attend donc cet habile homme, et nous sommes aussi disposés à nous rendre, quand il nous aura convaincus, qu'à ne point contester contre celui qui nous aura fait voir qu'il n'est pas vrai que le tout est plus grand que sa partie.

QUATRIÈME DÉFAITE.

<< Enfin, quand personne ne pour

rait donner des preuves qu'il ne réfutât, c'est une nouvelle manière de démontrer les propositions qu'on ne recevra jamais, que de conclure qu'une chose n'est pas, à cause que la preuve qu'on en donne ne vaut rien. »

RÉPONSE. C'est ne savoir pas la différence que les règles du bon sens ont toujours mise entre prouver qu'une chose est, et soutenir qu'elle n'est pas entre prouver qu'on a besoin d'un être représentatif, et soutenir qu'on n'en a pas besoin. Car tout le monde convient que celui qui entreprend de prouver qu'une chose est nécessaire pour voir les corps, doit apporter des raisons convaincantes qui le prouvent positivement; et on se moquerait de lui, s'il disait, pour toute raison, qu'on ne lui en saurait apporter de convaincantes qui montrent que cela n'est pas. Mais, pour celui qui soutient qu'une chose n'est pas, que ces êtres représentatifs ne sont pas nécessaires, tout le monde convient, au contraire, qu'il a satisfait pleinement à ce qu'on pouvait attendre de lui, quand il a fort bien réfuté toutes les preuves que l'on pourrait apporter, pour appuyer ce qu'il soutient n'être pas. Et cela est vrai, principalement quand il s'agit d'entités, que l'on prétend être chimériques, et dont personne ne saurait avoir de notion distincte, que l'on voudrait introduire dans la philosophie. Car voudrait-on obliger un homme d'apporter des preuves positives, pour montrer qu'une chimère n'est point? et n'est-ce pas avoir suffisamment montré que ces entités ne sont que des chimères, quand on a détruit toutes les raisons qui ont porté quelques philosophes à les inventer? Je suis donc bien obligé à l'auteur de la Réponse, de ce que son dernier retranchement contre ma démonstration, pour rendre encore quelque combat en faveur de ses êtres représentatifs, est de dire qu'elle ne serait pas recevable, quand personne ne pourrait donner de preuves pour les établir, que je ne réfutasse fort bien.

SECOND EXEMPLE. Autre faux principe que notre âme ne peut voir les objets éloignés : que ma deuxième démonstration le lui a fait désavouer. Des trois autres démonstrations.

La seconde preuve des êtres représentatifs, distingués des perceptions, est que notre âme ne saurait voir que cê qui lui est présent et intimement uni; d'où il s'ensuit qu'elle a besoin d'êtres représentatifs pour voir les corps qui en sont éloignés.

C'est ce que j'ai combattu par ma deuxième démonstration, qui a mis encore l'auteur de la Réponse en plus mauvaise humeur que la première. Cela paraît par son préambule que voici :

<< Ne trouvez pas mauvais, Monsieur, si je vous arrête à la lecture de choses qui n'ont nulle utilité, ni nul agrément. La réputation de M. Arnauld m'oblige, à cause de la vérité, à faire remarquer ses méprises, et qu'il a bien désappris à faire des démonstrations. >>

RÉPONSE.

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Il est à craindre que le monde ne dise que l'auteur de la Réponse n'a pas désappris à en faire. Quoi qu'il en soit, on lui est obligé de ce que son dégoût ne l'a pas empêché de rapporter cette deuxième démonstration dont il parle avec tant de mépris. Voyons-la donc.

DEUXIÈME DÉMONSTRATION. <«<Ce n'est pas philosopher avec justesse, en traitant d'une matière importante, que de prendre d'abord pour un principe général dont on fait dépendre tout ce que l'on dit dans la suite, ce qui, non-seulement n'est pas clair, mais ce qui est tout contraire à ce qui nous est si clair et si évident qu'il nous est impossible d'en douter.

«Or, c'est ce qu'a fait l'auteur de la Recherche de la Vérité dans son Traité de la Naturé des Idées.

« On ne peut donc philosopher avec moins de justesse qu'il a fait dans cette matière, ni d'une manière plus opposée à celle qu'il a suivie dans presque toutes les autres.

« Il n'y a que la mineure à prouver.

<< Ce qu'il a supposé d'abord comme un principe clair et indubitable, est, que notre esprit ne pouvait connaître que les objets qui sont présents à notre âme, et c'est ce qui lui fait dire « Nous voyons le soleil, les étoiles et une infinité d'objets hors de nous, et il n'est pas vraisemblable que l'âme sorte du corps et qu'elle aille pour ainsi dire se promener dans les cieux pour y contempler tous ces objets. Elle ne les voit donc point par eux-mêmes, et l'objet immédiat de notre esprit lorsqu'il voit le soleil, par exemple, n'est pas le soleil, mais quelque chose qui est intimement uni à notre âme, et c'est ce que j'appelle idée. » Un homme qui parle de la sorte, suppose manifestement, comme un principe clair et incontestable, que notre âme ne saurait apercevoir les objets qui sont éloignés du lieu où elle est, tant qu'ils en demeurent éloignés. Or, non-seulement je doute de ce prétendu principe, mais je soutiens qu'il est faux, de la dernière fausseté, parce qu'il est évident, de la dernière évidence que notre âme peut connaître une infinité de choses éloignées du lieu où elle est, et qu'elle le peut, parce que Dieu lui en a donné le pouvoir; la preuve en est facile. >>

Je supplie le lecteur de la voir. Elle est depuis la moitié de la page 245, et le commencement de la suivante. Je crois qu'il en sera satisfait, et qu'il jugera que l'auteur de la Ré*ponse a bien fait de la dissimuler, parce qu'il a trouvé plus d'avantage à employer les mêmes défaites pour éluder cette démonstration, qu'il avait employées pour éluder la première; en niant qu'il eût pris cela pour principe, et en prétendant qu'il n'avait parlé que selon le sentiment des autres.

PREMIÈRE DÉFAITE. « C'est sans doute un principe faux, de la dernière fausseté, que notre âme ne puisse voir ni connaître, ni apercevoir les objets éloignés du lieu où elle est, tant qu'ils en demeurent éloignés; je l'ai toujours cru tel. Il faudrait être bien stupide pour en douter; M. Arnauld a grand tort de me l'attribuer, et de dire qu'il est certain

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