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Pel. était disposé à tirer de palafrer le franç. palefroi, parce que «< c'étoit une monture douce et lente pour les Dames ». Naturellement, on ne peut plus penser qu'à un rapport inverse. Mais je crois que Pel. a bien vu la nature de la finale -er, et du mot palafra, infinitif qu'il aura entendu employer substantivement, comme ar c'herzet la marche, etc. Palafra a tout l'air d'une variante de palafa palper, pafala têter, aller à tâtons, etc., voir Epenth., 22.

48. GLUAH-LAGAD, GOULAHEIN.

Le van. gluah-lagad m. coup d'oeil, regard, est rapporté, Gloss. moy. bret., 261, à la même racine que gloèau rare, v. gall. gloiu limpide, v. irl. glé brillant, etc. Mais on ne peut le séparer de goulahein en deulagat « ciller, sourciller »; «< cligner des yeux » Châl. ms, qui doit être identique à goulahein un dranch rafraîchir une tranche (une bêche) Châl., goulahein«eguiser la faux à la forge, en la chauffant pour y mettre de l'acier » l'A., hors de Vannes goulaza aiguiser, affiler (une faucille, une faux) Gr., goulaza an ostillou rabattre des outils, les frapper avec le marteau pour les aiguiser en les étendant et les rendant plus minces; les passer au feu et y mettre de l'acier Rel ms; goulasa binvigeou rebattre des outils, << dans le Nouv. Dictionnaire mss. » Pel.; de *vo-slatt-, Gloss. 518. Cf. lat. acies oculorum, grec işi Bhiruv, etc.

49. BID.

Bid m. pl. ou as Gon., bid Trd est rapporté avec doute, dans le Lexique, à biden, piden, « par métaphore obscène ». M. du Rusquec l'avait tiré du franç. bidet, ce qui est bien préférable. car le mot se trouve avec ce sens dans divers patois. Le Dict. rouchi-français (2° éd., 1826) donne : « bidé, bidet, as au jeu de dez. Rafe d'bidets, trois as ». Mistral a aussi : bidet m. as,

au jeu de dés, le n° 1. Cf. Ch. Roussey, Gloss. du parler de Bournois: bidet « le numéro 1 au tirage au sort. >>

Bid paraît être une abréviation de bidet, pris pour un diminutif; cf. Gloss. moy. br. v. flaig.

50. GWIGNED.

Guigned f. sarcloir Gon., m. « sarcloir d'agriculture » Trd est rattaché avec un signe de doute, dans le Lexique, à gwinien vigne. C'est bien plutôt le mot poitevin guignette f. serpette, d'où guignetai v. a. se servir de la serpette, Lalanne, Gloss. du patois poitevin; franç. guignette outil de calfat, Littré, diminutif du v. franç. guigne, gl. depilatorium (Dict. général Hatzfeld-Darmesteter-Thomas); en 1200 guengniette petite cognée ou hache, God., cf. hignette couteau pointu pour greffer ou tailler les arbres », en Ille-et-Vilaine, Ann. de Bret., XV, 378; voir no 57, § 2.

51. CHIPOT, CHIPOTAL.

Le Gon. donne comme trécorois chipôd m. pl. ou petit coffre, petite cassette servant à renfermer la farine ou le sel pour l'usage journalier; Trd chipod petite boîte à sel, à farine, que l'on accroche près de la cheminée. H. de la Villemarqué écrit chipôdc'hoalen saloir, vaisseau de bois dans lequel on met le sel; M. du Rusquec chipod olen saloir, vase à sel. On prononce plutôt chipot-ôlen, l'h de holen maintenant la consonne forte comme dans map-énan fils ainé. Chipot-ôlen ma ine! boîte au sel de mon âme! est un des jurons bizarres familiers aux Rochois.

M. Henry sépare avec raison ce mot du grec x6wτós, et se demande si ce ne serait pas proprement un « récipient où l'on chipote, où l'on prend par menues portions. >>

Je crois qu'en effet c'est le même que chipod, chipot m. pl.

chipotou vétille, lenteur, chicane sur rien Mil. ms, cf. chipotal barguigner, marchander sou à sou quelque chose Gr., chipota, chipotal v. n. barguigner, avoir de la peine à se déterminer, marchander sou à sou, chipoter H. de la Vill., chipotal v. a. et n. vétiller, ergoter, marchander à l'excès, contrarier Trd, chipota faire peu à peu, agir avec lenteur Mil. ms; chipoter pl. -téryen barguigneur. f. -téres pl. ed; chipotérez action de barguigner Gr., m. barguignage, hésitation, difficulté à se déterminer, surtout quand il s'agit d'un achat, d'une affaire, d'un traité H. de la Vill.; van. chipotat vétiller, chipoter Châl., chipotal ar bihan dra chicotter Ch. ms, chippotal barguigner, chippotour m. pl. -terion barguigneur, f. -teréss pl. -terẻzėtt l'A.

Voici un passage français où les deux idées sont associées : « Le duc... Quelle cravate? (Gaspard lui tend la boîte aux cravates. Le duc chipote dans le tas.) Celle-ci, hein? » H. Lavedan, La haute, 6o éd. Paris, 1895, p. 8. Cf. méridional chipouta toucher indiscrètement, Boucoiran; centre de la Fr. chipot, chipoton, adj. qui touche à tout, à chachipotons par petites parties, chiquet à chiquet, à petites reprises, Jaub.

52. SIGODIEZ, CHIGOTA.

1. R1 ms donne à son ordre alphabétique : « sigota, chigota, chigoda, escamoter, prendre en cachette, par adresse et par jeu. idem sgota, sgoda »; et immédiatement après : « sgotach, jeu de gibeciere, escamotage; toutes sortes despiégleries et de ruses puériles ». On lit chez Pel. : « Sigota, et Chigota, Escamoter, prendre en cachette, par adresse et par jeu. C'est en ce sens que ceux de Léon employent ce verbe. En Cornwaille, on dit Schigodiez, de toutes sortes d'espiégleries et de ruses puériles. C'est aussi ce que nous appellons Jeu de gibeciere: car ce verbe Sigota est, si je ne me trompe, pour Esgota, fait d'Es, et de Cot, Cod ou God, petite poche d'habit... Sgota est le

meilleur, et on le dit au sens d'Empocher, même dans le discours sérieux, ainsi que je l'ai appris de M. Roussel ».

Le Gon. déclare ne connaître que par Pel. sigodiez, chigodiez, f. espièglerie..., tour d'adresse; sigota, chigota faire des espiègleries..., escamoter et sigoter, chigoter, m. pl. ien espiègle..., faiseur de tours d'adresse, escamoteur, bien que Pel. ne parle point de ce dernier. H. de la Vill. ajoute sigotérez m. escamotage.

Trd a sigodiez f. mauvais tour, espièglerie; sigota, chigota, v. n. escamoter, faire des tours d'adresse; sigotach, solach m. escamotage, tour d'adresse; sigoter m. pl. ien escamoteur. Mil. ms remarque sur sigota, chigota : « Ce verbe a le sens de heja, secouer, dans bien des cas »; et sur sigoter: « sigoter ar merc'hed qui joue avec les femmes et les secoue en leur faisant la cour. Syn. hilliger ».

M. du Rusquec donne escamotage, sigoterez m.; escamoter, sigota; escamoteur, sigoter; espiègle, chigoter m. pl. ien; espièglerie, chigoterez f., mots qu'il rattache au franç. gigoter.

Aucune de ces étymologies n'a de vraisemblance. Il en est de même de la conjecture du Lexique d'après laquelle sigodiez serait parent de godisa se moquer de, du franç. gaudir, cf. Rev. Celt., XX, 240.

2. Je crois qu'il faut joindre à sigota, chigota, le van. chicottein «< chicotter » Ch. ms, qui n'est autre que ce mot français. Celui-ci, qu'on écrit aujourd'hui chicoter et qui signifie << discuter sur des bagatelles », présente des variantes de forme et de sens qui se rapprochent des mots bretons en question. Cf. le texte du XVIe siècle cité par Scheler: «< Sa cour estoit pleine de bons esprits et de gens de sçavoir au lieu de fols, de chicots, de flatteurs, d'harlequins »; poitevin sicot petit morceau de bois; faire sauter le sicot, faire sauter l'anse du panier, Lal.; marseillais cigot, cigouet m. chicot; toupie, bordelais cigot, cibot m. toupie à laquelle on imprime le mouvement

rotatoire avec les doigts, cf. gipo f. toton Mistr.; nous avons vu (no 51) qu'il y a au moins association entre les formes comme chipoter et chicoter.

Le sens de « secouer », signalé en breton par Milin, fait penser surtout au poitevin sicot m. hoquet, sicotai cahoter Lal., et au lyonnais sicoti, sicouti cahotement, heurt, bruit. Le dict. de N. du Puitspelu explique celui-ci par succutere; est-il bien nécessaire de le séparer de chicot, etc? L'expression sigoter ar merc'hed est certainement plus près de chipouta que de

succutere.

53. FIC'HA, FIC'HELLA; FICHAT, FICHILLAT;

FUC'H.

Trd a fichal v. a. et n. bouger, fourgonner, détiser, frétiller, se trémousser; rire en s'efforçant de ne pas rire. Sur le premier sens, voir no 56. C'est du dernier seulement qu'il faut entendre la correction fic'hal pour fichal à cet article, dans Mil. ms. Les mêmes documents citent fic'ha, fic'hella comme des mots du H' Léon, signifiant : « s'efforcer de ne pas rire et rire néanmoins en soufflant et en étouffant le bruit autant que possible ». Ils portent encore : «< fic'ha, c'est rire en dessous en s'efforçant de ne pas éclater, ce qui arrive en peu de temps; fic'heres, le rire en cachette. Petra eo ar fic'herez a zo ama, qu'est-ce que c'est que ces rires étouffés? Perak e fic'hit-u pourquoi riez-vous ainsi? fichat, fichillat, rire en faisant un bruit sourd ». Ces deux dernières formes doivent sans doute se lire par ch français et / mouillé.

Ce sont des onomatopées; Milin renvoie avec raison à fuc'ha « souffler mais en cherchant à comprimer sa colère », voir Mém. Soc. ling. XI, 100-102. Cf. ha pa ve fuc'h er c'hos keillen quand les méchantes mouches en crèveraient de fureur, Marvaillou grac'h-koz 115.

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