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Les pièces suivantes forment un petit supplément aux Auteurs déguisés de Baillet. Il y est question d'un genre d'imposture qui n'a point été défini par ce savant bibliographe, parce qu'il était réservé à M. Maton de la Varenne d'en fournir l'exemple au commencement du dix-neuvième siècle. Nous voyons en effet dans la personne de cet écrivain un neveu qui attribue à son oncle des ouvrages auxquels celui-ci n'a eu aucune part. Cette espèce de supposition de personne ou de nom a dû être remarquée par l'auteur du Dictionnaire des Ouvrages anonymes et pseudonymes. Les pièces qui la dévoilent ne pouvaient être mieux placées qu'en tête de ce Dictionnaire.

Aux Rédacteurs du Journal de Paris.

Paris, 4 août 1806.

Nous avons l'honneur de vous annoncer, Messieurs, que nous allons mettre en vente un Dictionnaire des ouvrages anonymes et pseudonymes, composés, traduits ou publiés en français, avec les noms des auteurs, traducteurs ou éditeurs, accompagnés de notes historiques et critiques, par M. BARBIER, bibliothécaire du conseil d'état. Cet ouvrage est en 2 vol. in-8o.

Nous avions bien cru, en nous chargeant de l'impression de ce Dictionnaire, qu'il aurait au moins le mérite d'exciter la curiosité des gens du monde, et même celle des littérateurs; mais aujourd'hui, que l'impression en est presque achevée, il nous semble que sa publication ne sera pas sans utilité, ne fût-ce que celle de démasquer certains auteurs déguisés sous des noms empruntés, et de signaler aux lecteurs trop confians des hommes qui portent la hardiesse jusqu'à s'attribuer, ou attribuer à leurs amis des ouvrages que ni les uns, ni les autres n'ont faits. De ce nombre est un M. M...... de la Varenne, auteur d'une Histoire particulière des Evénemens qui ont eu lieu en

France pendant les mois de juin, juillet, août et septembre 1792. Paris, 1806, in-8°. Get historien place son oncle paternel, feu l'abbé Maton de la Varenne, ancien curé, qui n'avait rien sollicité, lors même qu'il pouvait prétendre à l'épiscopat, au nombre des personnes qui, le 20 juin 1792, accompagnèrent le Roi et la Reine à l'Assemblée nationale. Louis xvi, comme on le pense bien, a dû distinguer le modeste ecclésiastique au milieu de cette foule, et le neveu nous assure que le Monarque a complimenté très-affectueusement l'abbé Maton, sur ce que, méritant ses grâces et des bénéfices, il n'a jamais rien sollicité. A ces récits, le neveu a ajouté une note ou notice sur la vie littéraire de cet oncle, qu'il présente comme auteur de neuf ouvrages annoncés sous le voile de l'anonyme, dans les tomes 3 et 4 de la France littéraire. Mais par malheur, le petit monument que M. Maton de la Varenne voulait ériger, à peu de frais, à la mémoire de son oncle, est renversé de fond en comble par le Dictionnaire de M. Barbier.

On y voit que le premier de ces ouvrages, intitulé: Origine des premières sociétés, etc., 1769, in-8°, est de feu Poinsinet de Sivry ; le troisième, intitulé : l'Élève de la Raison et de la Foi, de M. Bernière, qui est peut-être encore vivant; le quatrième, intitulé: Recherches et Réflexions sur la Poésie, etc., 1772, in-12, de feu M. Milliet, attaché, en son vivant, à la bibliothéque du Roi; le neuvième enfin, intitulé : l'Art de toucher les cœurs dans le ministère de la chaire, 1783, 3 vol. in-12, de feu M. Alletz, connu par des compilations littéraires et historiques. Il est à désirer que l'Histoire particulière de M. Maton de la Varenne soit établie sur des faits un peu plus réels que les titres de gloire de son oncle.

Agréez nos salutations.

Signé LES PROpriétaires de l'
L'IMPRIMERIE bibliographique.

Aux Rédacteurs du méme Journal.

Paris, 22 août 1806.

J'étais absent, Messieurs, lorsque vous avez inséré dans votre feuille

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du 7, une lettre des Propriétaires de l'Imprimerie Bibliographique. A mon retour, je m'empresse de vous adresser une réponse à laquelle votre justice vous fera un devoir de donner la publicité que vous avez donnée à l'agression.

Que ces Messieurs annoncent le Dictionnaire de M. Barbier, ils donnent la curiosité d'acquérir un bon ouvrage; mais que, pouvant le faire connaître par les moyens ordinaires, ils le fassent aux dépens d'un homme de bien dont les vertus et les talens modestes font honorer sa mémoire, comme ils ont concilié l'estime publique à sa personne pendant sa vie, c'est, je le dis franchement, au moins une imprudence bien répréhensible.

Des neuf ouvrages dont j'ai annoncé comme auteur, feu l'abbé Maton de la Varenne, mon oncle paternel, les bibliographes lui en contestent quatre. Ne pouvant l'exhumer pour le faire comparaître au tribunal de ses adversaires et prouver sa paternité littéraire, je porte à ceux-ci le défi formel d'étayer leur assertion du plus léger adminicule. C'est à eux qui contestent un fait, qui attaquent la mémoire d'un mort, en semblant n'attaquer que l'héritier, à prouver ce qu'ils avancent si légèrement, et sur leur simple parole: Ei qui dicit, incumbit onus probandi.

Que, dans son Dictionnaire, M. Barbier attribue à d'autres quatre des ouvrages de mon oncle, il n'en résulte aucune preuve contre l'exactitude de ma notice, mais seulement que M. Barbier, comme les plus véridiques écrivains, est tombé dans l'erreur, et que toutes les productions de l'homme en contiennent plus ou moins. Cet auteur, à qui je me serais fait un plaisir d'être utile, si j'avais eu celui de le connaître, a travaillé d'après la France littéraire; mais au lieu de consulter l'édition de Paris, en 4 vol. in-12, 1784, il a compulsé celle donnée par J. S. Ersch, en 3 vol., Hambourg, 1798. A la vérité, dans cette dernière, Ersch attribue deux (et non pas quatre) des ouvrages de mon oncle à Poinsinet de Sivry et à M. de Bernière; mais elle est remplie d'inexactitudes dont je suis en état de démontrer plusieurs; et du reste il n'ôte pas à l'abbé de la Varenne ceux que les bibliographes disent être de Milliet et d'Allets. Sur celuici, il ne faut qu'ouvrir le Supplément au nouveau Dictionnaire historique, Lyon, an x-1805, on verra que l'Art de toucher les cœurs

dans le ministère de la chaire, dont le titre seul annonce pour auteur un ecclésiastique, n'est pas compris dans les écrits d'Alletz, homme du monde, mort à Paris en 1785, à quatre-vingt-deux ans.

M. Barbier n'est pas le premier qui, sans le vouloir, attribue à l'un l'ouvrage de l'autre : plusieurs Dictionnaires présentent des méprises semblables; et, dans les Poésies de M. de Boulogne, réimprimées à Paris, en 1758, petit in-12, on a placé, sous le nom de cet auteur, l'ode intitulée la Création, qui est du comte de Thiard, supplicié révolutionnairement le 26 juillet 1794.

J'ai eu, dès l'enfance jusqu'à 1783, connaissance de quelques ouvrages de mon oncle, quand il les mettait au jour. J'en aurais pu citer bien d'autres, dont ses papiers, que j'ai recueillis avec sa succession, doivent me le faire regarder comme l'auteur; mais je n'ai pas cru devoir le proclamer comme tel sans une certitude, qui, si elle n'est que morale pour moi, doit être physique pour tout autre, etc., etc.

Signé: MATON DE LA VARENNE, ancien avocat au parlement.

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La lettre de M. Maton de la Varenne me met dans la nécessité d'entrer dans quelques détails sur les ouvrages qu'il a eu la maladresse d'attribuer à son oncle paternel. C'est une occasion qu'il me fournit de prouver au public lettré que la plupart des articles de mon Dictionnaire eussent pu être appuyés de pièces justificatives.

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1o Un an après la publication de l'Origine des premières sociétés, etc., cet ouvrage a été annoncé sous le nom de POINSINET DE SIVRY dans la Bibliographie parisienne, année 1770, in-8°, tom. 1or, pag. 153. Cette annonce, qui est le résultat de l'opinion des gens de lettres d'alors, est suivie des jugemens portés par les auteurs du Journal des Savans, du Mercure de France, du Journal des BeauxArts, du Journal de Verdun, du Journal encyclopédique, de la Gazette universelle de littérature, de la Gazette d'agriculture, enfin du Journal de Musique. Le Journal encyclopédique, dit entre autres choses, que M. DE SIYRY a appuyé son système de recherches qui lui

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donnent une vraisemblance intéressante; les auteurs des autres journaux conviennent en général que cet ouvrage est plein de recherches profondes, de découvertes ingénieuses et d'une immense érudition.

En 1787, Poinsinet de Sivry a compris l'Origine des sociétés dans le catalogue de ses principaux ouvrages, à la suite de sa tragédie de Briséis; enfin M. Larcher cite cet ouvrage comme étant de Poinsinet de Sivry, dans le tom. 2o de la nouvelle édition de sa traduction d'Hérodote, pag. 290.

Que M. Maton de la Varenne me permette done de croire, avec tous les savans, que Poinsinet de Sivry est le véritable auteur du volume dont il est ici question; en l'attribuant à son oncle paternel, M. Maton nie un fait qui est, pour ainsi dire, de notoriété publique ; c'est à lui à étayer son assertion de quelque adminicule.

2° L'Élève de la Raison et de la Foi a été imprimé au Mans par Charles Monnoyer, en 1771: cet ouvrage est attribué à M. de Bernière, dans le catalogue du duc de la Vallière, par le libraire Nyon l'ainé, correspondant de l'imprimeur Monnoyer. A cette époque, l'abbé Maton de la Varenne était curé dans le diocèse de Sens, quelle raison eût-il pu avoir d'envoyer un manuscrit au Mans?

3o J'ai sous les yeux l'ouvrage intitulé: Recherches et Réflexions sur la Poésie en général, et en particulier sur la Poésie latine, pour servir d'introduction à la Vie des Poëtes latins. Paris, Fétil, 1772, petit in-12.

Voici les motifs qui me le font attribuer à M. Milliet. Cet estimable littérateur, que la mort a enlevé dans la fleur de son âge, entreprit, en 1771, sous le titre d'Étrennès du Parnasse, d'après l'invitation du libraire Fétil, deux ouvrages tout-à-fait distincts et très-intéressans. L'un était un choix des meilleures pièces de poésies qui paraissaient dans l'année; l'autre une notice des Poëtes de différentes nations; il fit paraître plusieurs années du Choix de Poésies depuis 1771, jusqu'à sa mort arrivée en 1774. Il publia aussi, en 1771, la notice des Poëtes grecs, composée de deux parties. Celle des Poëtes latins parut en 1773; elle forme quatre parties. Dans la préface de ce dernier ouvrage, M. Milliet dit que l'Essai sur les Poëtes grecs, malgré ses défauts, a été reçu du public avec indulgence. Il cite, quelques pages plus bas, les Réflexions sur la Poésie latine, publiées en 1772, et

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