Immagini della pagina
PDF
ePub

pourjustifier guerre, parut aux Romains plus convenable à la dignité le siége de de leur caractère, que si l'on se fût amusé à subtiliser

Sagonte.

Polyb. 1. 3,

p.

cap. 19.

P. 175, 176. sur l'interprétation des traités, surtout depuis que la Liv. lib. 21, prise et la ruine de Sagonte avaient rompu toute espérance de paix : car, s'il se fût agi d'entrer en dispute, il aurait été aisé de répliquer au sénateur carthaginois qu'il avait tort de comparer le premier traité de Lutatius, qui fut changé, avec celui d'Asdrubal, puisqu'il était expressément marqué dans celui de Lutatius qu'il n'aurait de force qu'autant qu'il aurait été approuvé par le peuple romain; au lieu qu'il n'y avait aucune exception semblable dans celui d'Asdrubal, et que ce dernier avait été confirmé par un silence de tant d'années, du vivant d'Asdrubal même et depuis sa mort. Après tout, quand on s'en serait tenu au traité de Lutatius, les Sagontins étaient suffisamment compris dans les termes généraux d'alliés des deux peuples, cette clause n'énonçant pas ceux qui l'étaient alors, et n'exceptant point ceux qui pourraient le devenir dans la suite. Or les deux peuples s'étant réservé là - dessus une entière liberté pour l'avenir, était-il juste ou qu'ils n'admissent aucune nation dans leur alliance, quelque service qu'ils en eussent reçu, ou qu'ils ne protégeassent pas celle qu'ils y auraient admise? Tout ce que les Romains et les Carthaginois pouvaient exiger réciproquement les uns des autres, c'est qu'ils ne chercheraient point à se débaucher leurs alliés, et que, s'il se trouvait quelque peuple qui voulût passer du parti des uns à celui des autres, il ne serait point reçu.

Véritables causes de la seconde

guerre punique.

Polybe, dont Tite-Live a tiré tout ce raisonnement, ajoute une réflexion que celui-ci n'aurait pas dû omettre. Ce serait, dit-il, se tromper grossièrement que de

regarder la prise de Sagonte par Annibal comme la première et la véritable cause de la seconde guerre punique. Elle en fut le commencement, mais non la cause. Le regret qu'eurent les Carthaginois d'avoir cédé trop facilement la Sicile par le traité de Lutatius, qui termina la première guerre punique; l'injustice et la violence des Romains, qui profitèrent des troubles excités dans l'Afrique, pour enlever encore la Sardaigne aux Carthaginois, et pour leur imposer un nouveau tribut ; enfin les heureux succès et les conquêtes de ces derniers dans l'Espagne, qui donnèrent de l'inquiétude aux uns, et inspirèrent du courage et de la fierté aux autres, voilà quelles furent les véritables causes de la rupture du traité. Si l'on s'en tenait simplement à la prise de Sagonte, tout le tort serait du côté des Carthaginois, qui ne pouvaient, sous aucun prétexte raisonnable, assiéger une ville comprise certainement, comme alliée de Rome, dans le traité de Lutatius. Les Sagontins, il est vrai, n'avaient pas encore fait alliance avec les Romains lors de ce traité; mais il est évident que ce même traité n'ôtait point aux deux peuples la liberté de faire de nouveaux alliés. A n'envisager les choses que de ce côté, les Carthaginois auraient été absolument inexcusables; mais, si l'on remonte plus haut, et qu'on aille jusqu'aux temps où la Sardaigne fut enlevée par force aux Carthaginois, et où, sans aucune raison, on leur imposa un nouveau tribut, il faut avouer (c'est toujours Polybe qui parle) que sur ces deux points la conduite des Romains ne peut être excusée en aucune sorte, étant fondée uniquement sur l'injustice et sur la violence. Certainement c'est une tache à leur gloire, que nulle de leurs plus belles actions ne peut effacer. Je

Les ambas

mains pas

gne et dans la Gaule.

Liv. lib. 21, c. 19, 20.

demande seulement si l'injustice notoire des Romains, qui était précédente, dispensait les Carthaginois d'observer un traité conclu dans toutes les formes, et si c'était une raison légitime d'entrer en guerre avec eux. Il est bien rare que dans ces sortes de discussions de traités on agisse de bonne foi, et qu'on se fasse un devoir de n'y suivre pour guide et pour interprète que la justice.

Les ambassadeurs de Rome, selon l'ordre qu'ils en sadeurs ro- avaient reçu en partant, passèrent de Carthage en Essent en Espa- pagne, pour tâcher d'attirer les peuples de cette province dans l'amitié des Romains, ou au moins pour les détourner de celle des Carthaginois. Les Bargusiens', qu'ils visitèrent les premiers, n'étant pas contents des Carthaginois, dont le joug leur était devenu insupportable, les reçurent avec beaucoup de bienveillance; et leur exemple fit naître à la plupart des nations qui sont au-delà de l'Èbre le désir de passer dans un nouveau parti. Les ambassadeurs romains s'adressèrent ensuite aux Volsciens : mais la réponse qu'ils en reçurent, s'étant répandue dans toute l'Espagne, fit perdre aux autres peuples l'inclination qu'ils pouvaient avoir de s'allier avec les Romains. « N'êtes-vous pas honteux, << leur dit le plus ancien de l'assemblée où ils eurent au<«<dience, de demander que nous préférions votre ami<< tié à celle des Carthaginois, après ce qu'il en vient de <«< coûter aux Sagontins, que vous, leurs alliés, avez << traités avec plus de cruauté en les abandonnant, qu'Annibal, leur ennemi, en ruinant leur ville? Je vous «< conseille d'aller chercher des amis dans les pays où le

[ocr errors]
[blocks in formation]

« désastre des Sagontins n'est point encore connu. Les << ruines de cette malheureuse ville sont pour tous les peuples de l'Espagne une leçon triste à la vérité, mais « salutaire, qui doit leur apprendre à ne se point fier « aux Romains. » Après ce discours on leur ordonna de sortir sur-le-champ des terres des Volsciens. Ils ne furent pas mieux traités par les autres nations espagnoles à qui ils s'adressèrent. Ainsi, ayant inutilement parcouru toute l'Espagne, ils passèrent dans la Gaule, et s'arrêtèrent d'abord à Ruscinon 1.

Les Gaulois étaient dans l'usage de venir aux assemblées tout armés; ce qui offrit d'abord aux yeux des Romains un objet assez effrayant. Ce fut bien pis encore lorsque, après avoir vanté la gloire et la valeur des Romains et la grandeur de leur empire, ils eurent demandé aux Gaulois de ce canton de refuser le passage sur leurs terres et par leurs villes aux Carthaginois qui portaient la guerre en Italie: car il s'éleva dans l'assemblée un si grand murmure, accompagné d'éclats de rire, que les magistrats et les anciens eurent bien de la peine à calmer l'impétuosité de la jeunesse ; tant parut que c'était manquer de raison, et même de pudeur, de demander aux Gaulois que, pour épargner l'Italie, ils se chargeassent eux-mêmes d'une guerre dangereuse, et exposassent leurs terres au pillage pour conserver celles d'autrui. Le tumulte étant enfin apaisé, le plus ancien répondit aux ambassadeurs, « que les << Gaulois n'avaient jamais reçu ni des Romains aucun <«< service, ni des Carthaginois aucune injure qui dût les << engager à prendre les armes pour les uns contre les

il

que

1 Ville qui a donné son nom au Roussillon.

Tome XVI. Hist. Rom.

3

1

Annibal se prépare à passer en

Dénombre

[ocr errors]

<< autres; qu'ils apprenaient au contraire que leurs compatriotes établis en Italie étaient fort maltraités par <<< les Romains, chassés des terres qu'ils avaient conqui«ses, chargés de tributs, et outragés en toute façon ».

Ils ne furent pas traités plus favorablement dans tout le reste de la Gaule. Les Marseillais furent les seuls qui les reçurent comme hôtes et comme amis. Ces alliés, aussi attentifs que fidèles, apprirent aux Romains tout ce qu'ils avaient intérêt de savoir, après s'en être informés eux-mêmes avec beaucoup de soin. Ils leur firent entendre qu'Annibal avait déja pris les devants, pour s'assurer de l'amitié des Gaulois, mais que cette nation féroce et avide d'argent ne lui demeurerait attachée qu'autant qu'il aurait soin de gagner les chefs à force de présents.

Ayant ainsi parcouru les différentes contrées de l'Espagne et de la Gaule, ils arrivèrent à Rome immédiatement après que les consuls furent partis pour leurs provinces, et trouvèrent tous les citoyens occupés de la guerre qu'ils allaient avoir sur les bras, personne ne doutant plus qu'Annibal n'eût déja passé l'Èbre.

Ce général, après la prise de Sagonte, était allé prendre ses quartiers d'hiver à Carthagène. Ce fut là Italie. qu'il apprit tout ce qui s'était passé à son sujet, tant à ment des ar- Carthage qu'à Rome. Ainsi, se regardant non- seuleginoises. ment comme le chef, mais encore comme l'auteur et la p. 187, 188. cause de la guerre, il distribua ou vendit ce qui lui Liv. lib. 21, restait de butin; et, persuadé qu'il n'avait point de

mées cartha

Polyb. 1. 3,

C. 21, 22.

temps à perdre, après avoir assemblé les soldats espagnols, « Je crois, leur dit-il, mes amis, que vous voyez «< bien vous-mêmes qu'après avoir pacifié toute l'Espagne <«<le seul parti qui nous reste à prendre, si nous ne

« IndietroContinua »