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deux Sallustes, probablement ses parens, qui furent amis de Cicéron et de Pompée1. Le père de notre historien le fit élever à Rome, où dominaient alors le luxe et la corruption. Les funestes exemples dont sa jeunesse fut entourée l'entraînèrent sans l'aveugler, et il n'en fut que plus coupable de se livrer sans pudeur à tous les vices de son siècle. « Il eut toujours, dit le président « De Brosses, des lumières très-justes sur le bien et sur «<le mal; mais, réservant toute sa sévérité pour ses dis<«< cours, il mit une entière licence dans ses actions; et, << par un malheur commun à grand nombre de gens à « talens, il ne fut guère moins méprisable par son cœur qu'estimable par son esprit. » Doué des avantages extérieurs, il offrit ses hommages aux dames les plus distinguées de Rome, entre autres à Fausta, épouse de Milon et fille du dictateur Sylla. Surpris par le mari, il fut rudement fustigé et mis à contribution pour une forte somme. Cette aventure le dégoûta du rôle d'homme à bonnes

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L'un, Sallustius Caninius, fut questeur de Bibulus et proquesteur de Cicéron (Lettres familières de Cicéron, liv. 11, 17). Il est probablement le même que Cu. Sallustius, à qui César fit grâce après la bataille de Pharsale (Lettres à Atticus, liv. XI, 2). Cicéron nous apprend que Cn. Sallustius lui prêta 30,000 sesterces, pendant qu'il était en Grèce à la suite de Pompée (Ibid., lettre 11). Il est question, dans la même lettre, d'un autre Salluste qui avait pour prénom Publius, et à qui, par la même lettre, Cicéron charge Atticus de rendre ces 30,000 sesterces, ce qui semble prouver que Cn. et P. Sallustius étaient parens, peut-être même frères. Enfin Cicéron avait un affranchi du nom de Salluste dont il vante la fidélité (Lettres familières, liv. XIV, 4, 11; à Atticus, 1, 3 et 11; et de la Divination, liv. 1, ch. 28).

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M. Varro in litteris atque vita fide homo multa et gravis, in

fortunes, et il ne se livra plus qu'à d'obscures débauches avec des filles et des femmes d'affranchis1. Aussi prodigue de son bien que peu scrupuleux pour se procurer de l'argent, il fut, dit-on, contraint de vendre sa maison paternelle du vivant même de son père, qui en mourut de chagrin 3. Le contraste qui existait entre la gravité de ses écrits et la licence de ses mœurs révolta ses contemporains, et lui suscita une foule d'ennemis, de qui nous tenons la plupart des mémoires qui nous restent sur son compte; satires passionnées sans

libro quem scripsit Pius aut de Pace, C. Sallustinm scriptorem serio illius et severæ orationis, in cujus historia notiones censorias fueri atque exerceri videmus, in adulterio deprensum ab Annio Milone loris bene cœsum dicit, et quum dedisset pecuniam, dimissum. (AULUGELLE, liv. XVII, ch. 18). Voyez BAYLE (Dict.), art. Metella.

Tutior at quanto merx est in classe secunda :
Libertinarum dico Sallustius in quas

Non minus insanit, quam qui mœchatur.....

HORAT., Serm., lib, 1, Sat. 2, v. 47.

C'est à tort que la plupart des commentateurs d'Horace ont appliqué ce trait de satire au petit-neveu de Salluste.

2 « Posteaquam immensæ gulæ impudicissimi corporis quæstus sufficere non potuit, et ætas tua jam ad ea patienda, quæ alteri facere collibuisset, exoleverat; cupiditatibus infinitis efferebaris, ut, quæ ipse corpori tuo turpia non duxisses, in aliis experieris. Ita non est facile exputare, P. C., utrum inhonestioribus corporis partibus rem quæsierit an amiserit. » (Porcii Latronis in Sallust. Declamatio falso M. Tullio Ciceroni adscripta.)

3 Domum paternam vivo patre turpissime vénalem habuit, vendidit et cui dubium potest esse, quin mori coegerit eum, quo hic nondum mortuo pro herede gesserit omnia? (Ibid.) Ce fait ne paraîtra guère vraisemblable à ceux qui savent ce qu'était la puissance paternelle chez les Romains.

doute, mais qui contiennent des faits dont la plupart n'ont malheureusement jamais été démentis.

Quelque dépravé qu'ait pu être Salluste, au moins eut-il à vingt-deux ans le bon esprit de ne pas se jeter dans la conspiration de Catilina, comme tant de jeunes gens dont il partageait les dérèglemens. Il paraît même qu'il sut toujours allier à l'usage effréné des plaisirs le goût des plus sérieuses occupations. C'est ce qui a fait dire au biographe déjà cité, que son esprit retint toute l'austérité du climat dur et sauvage sous lequel il était né, tandis que son cœur prit toute la mollesse de la cité corrompue où il avait passé ses premières années. A Rome, le barreau était la route la plus sûre pour arriver aux honneurs : il ne paraît pas que Salluste se soit distingué particulièrement dans cette carrière, ou du moins qu'il l'ait embrassée avec beaucoup d'ardeur; car si les harangues qu'il a semées dans ses histoires prouvent qu'il n'était point étranger à l'éloquence, l'on a observé avec raison que le style rapide et coupé qui domine dans ces compositions oratoires, eût produit peu d'effet au barreau ou à la tribune1. Aussi Quintilien, en même temps qu'il admire la façon d'écrire de Salluste, fait un précepte aux orateurs de ne pas la suivre 2.

I

Neque illa Sallustiana brevitas, qua nihil apud aures vacuas, apud eruditas potest esse perfectius, apud occupatum variis cogitationibus judicem, et sæpius ineruditum captanda nobis est, etc. (QUINTIL., lib. x, c. 1.)

2 Vitanda illa Sallustiana quanquam in ipso virtutis loco obtinet brevitas, et abruptum genus; quod otiosum fortasse lectorem fallit, audientem transcolat, necdum repetatur exspectat. (Lib. iv, c. 5.)

L'étude de l'histoire, de la politique, de la littérature grecque, telles sont les graves études auxquelles se livra Salluste. Dédaignant la chasse, l'agriculture et les autres exercices du corps, comme il nous l'apprend lui-même dans le préambule de la Guerre de Catilina1, il ne s'occupa qu'à fortifier, par la lecture et la méditation, la vigueur d'esprit que la nature lui avait accordée. Il avait eu pour guide dans ses premières études, et conserva toujours pour conseil et pour ami 2, Ateius Pretextatus, rhéteur athénien, qui lui-même avait pris le surnom de Philologue 3, et qui tenait à Rome une école très-fréquentée 4.

Lorsqu'il fut en âge de briguer les charges publiques, Salluste parvint à la questure; mais on ne sait pas précisément à quelle époque. Si ce fut dès sa vingt-septième année, âge fixé par les lois, ce dut être l'an 696, sous le consulat de Lucius Calpurnius Pison et de Césonius Gabinius, l'année même de l'exil de Cicéron et du tribunat de Clodius. Sept ans après, l'an 702, Salluste fut nommé tribun du peuple.

Depuis le glorieux consulat de Cicéron, qui avait en quelque sorte marqué les derniers jours de la république, la liberté, la constitution romaine, n'existaient plus

1 Bell. Catil., c. IV. Voyez aussi la note sur ce passage texte de Salluste.

du

2 Coluit postea familiarissime (scil. Ateius) Caium Sallustium. (SUETON., de Illustr. Gram., c. x).

3 Ad summam Philologus ab semet nominatus. (Ibid.)

4 Præcepisse autem multis et claris juvenibus, in quibus Appio et Pulchro Claudiis fratribus, etc. (Ibid.)

que de nom. Le triumvirat de Pompée, César et Crassus avait paralysé la marche régulière du gouvernement. Rome était journellement troublée par les plus sanglantes séditions. Aux scènes tumultueuses qui avaient amené l'exil de Cicéron, succédèrent les rixes non moins cruelles qui provoquèrent son rappel. Clodius et Milon, démagogues également scélérats, bien qu'ils eussent embrassé les deux partis contraires, présidaient à ces sanglans désordres. Salluste épousa successivement les haines et les affections de Clodius, son intime ami; il trempa dans toutes ses intrigues, dans tous ses désordres publics. Ce fut dans des circonstances aussi favorables à l'esprit de vengeance et de parti, qu'il arriva au tribunat, l'an 701 de Rome; en ceci plus heureux que Caton, qui, dans le même temps, sollicita plusieurs dignités sans les obtenir; car ce vertueux Romain n'avait employé, pour capter les suffrages, que les moyens autorisés par la loi 1, tandis que tous ses concurrens n'avaient dû leurs succès qu'à la brigue. Salluste tira pourtant vanité de cette préférence, qui n'était pas moins honteuse pour lui que pour la république. « Que l'on considère, dit-il << dans le préambule de la Guerre de Jugurtha, en quel << temps j'ai été élevé aux premières places, et quels <<< hommes n'ont pu y parvenir.

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Après la mort de Crassus, Pompée, dont l'ambition, aussi profonde que celle de César, avait une allure moins franche, cherchait, timide élève de Sylla, à s'avancer,

1 PLUT., in Catone Utic.

2 Bell. Jug., c. IV.

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