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SCÈNE V.

MITHRIDATE seul.

Elle me quitte! et moi, dans un lâche silence,
Je semble de sa fuite approuver l'insolence!
Peu s'en faut que mon cœur, penchant de son côté,
Ne me condamne encor de trop de cruauté !
Qui suis-je ? Est-ce Monime? Et suis-je Mithridate?
Non, non, plus de pardon, plus d'amour pour l'ingrate.
Ma colère revient, et je me reconnais.
Immolons, en partant, trois ingrats à-la-fois.
Je vais à Rome, et c'est par de tels sacrifices
Qu'il faut à ma fureur rendre les dieux propices.
Je le dois, je le puis ; ils n'ont plus de support;
Les plus séditieux sont déjà loin du bord.
Sans distinguer entr'eux qui je hais ou qui j'aime,
Allons, et commençons par Xipharès lui-même.
Mais quelle est ma fureur? Et qu'est-ce que je dis?
Tu vas sacrifier: qui, malheureux ? ton fils!

Un fils

que Rome craint! qui peut venger son père ! Pourquoi répandre un sang qui m'est si nécessaire ? Ah! dans l'état funeste où ma chute m'a mis, Est-ce que mon malheur m'a laissé trop d'amis? Songeons plutôt, songeons à gagner sa tendresse. J'ai besoin d'un vengeur, et non d'une maîtresse.

Quoi! ne vaut-il pas mieux, puisqu'il faut m'en priver,
La céder à ce fils que je veux conserver?
Cédons-la. Vains efforts, qui ne font

que m'instruire Des faiblesses d'un cœur qui cherche à se séduire ! Je brûle, je l'adore, et, loin de la bannir...

Ah! c'est un crime encor dont je la veux punir:
Mon amour trop long-temps tient ma gloire captive.
Qu'elle périsse seule, et que mon fils me suive.
de fermeté, punissant ses refus,

Un
peu
Me va mettre en état de ne la craindre plus.
Quelle pitié retient mes sentimens timides?
N'en ai-je pas déjà puni de moins perfides?
O Monime! O mon fils! Inutile courroux!
Et vous, heureux Romains, quel triomphe pour vous
Si vous saviez ma honte, et qu'un avis fidèle

De mes lâches combats vous portât la nouvelle !
Quoi ! des plus chères mains craignant les trahisons,
J'ai pris soin de m'armer contre tous les poisons;
J'ai su par une longue et pénible industrie,

Des plus mortels venins prévenir la furie :

Ah! qu'il eût mieux valu, plus sage et plus heureux, Et repoussant les traits d'un amour dangereux,

Ne

pas laisser remplir d'ardeurs empoisonnées Un cœur déjà glacé par le froid des années! De ce trouble fatal par où dois-je sortir?

SCÈNE VI.

MITHRIDATE, ARBATE.

ARBATE.

Seigneur, tous vos soldats ne veulent plus partir.
Pharnace les retient; Pharnace leur révèle
Que vous cherchez à Rome une guerre nouvelle.

Pharnace!

MITHRIDATE.

ARBATE.

Il a séduit ses gardes les premiers, Et le seul nom de Rome étonne les plus fiers. De mille affreux périls ils se forment l'image. Les uns avec transport embrassent le rivage; Les autres, qui partaient, s'élancent dans les flots, Ou présentent leurs dards aux yeux des matelots. Le désordre est partout; et, loin de nous entendre, Ils demandent la paix, et parlent de se rendre. Pharnace est à leur tête; et, flattant leurs souhaits, De la part des Romains il leur promet la paix.

MITHRIDATE.

Ah! le traître !... Courez : qu'on appelle son frère; Qu'il me suive, qu'il vienne au secours de son père.

ARBATE.

J'ignore son dessein, Mais un soudain transport

L'a déjà fait descendre et courir vers le port; suivi d'un gros d'amis fidèles,

Et l'on dit que,

On l'a vu se mêler au milieu des rebelles,

C'est tout ce que j'en sais.

MITHRIDATE.

Ah! qu'est-ce que j'entends

Perfides! ma vengeance a tardé trop long-temps.
Mais je ne vous crains point. Malgré leur insolence,
Les mutins n'oseraient soutenir ma présence.
Je ne veux que les voir ; je ne veux qu'à leurs yeux
Immoler de ma main deux fils audacieux.

SCÈNE VII.

MITHRIDATE, ARBATE, ARCAS.

ARCAS.

Seigneur, tout est perdu. Les rebelles, Pharnace, Les Romains sont en foule autour de cette place.

MITHRIDATE.

Les Romains?

ARCAS.

De Romains le rivage est chargé,

Et bientôt dans ces murs vous êtes assiégé.

MITHRIDATE.

(à Arcas.)

Ciel! courons. Écoutez. Du malheur qui me presse, Tu ne jouiras pas, infidèle Princesse.

FIN DU QUATRIÈME ACTE.

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