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Dans ton perfide sang je puis tout expier,

Et ta mort suffira pour me justifier.

N'en doute point, j'y cours; et dès ce moment même...
Bajazet, écoutez ; je sens que je vous aime.
Vous vous perdez. Gardez de me laisser sortir.
Le chemin est encore ouvert au repentir.
Ne désespérez point une amante en furie.
S'il m'échappait un mot, c'est fait de votre vie.

BAJAZET.

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Vous pouvez me l'ôter; elle est entre vos mains
Peut-être que ma mort, utile à vos desseins,
De l'heureux Amurat obtenant votre grâce,
Vous rendra dans son cœur votre première place.

ROXANE.

Dans son cœur! Ah! crois-tu, quand il le voudrait bien,
Que si je perds l'espoir de régner dans le tien,
D'une si douce erreur si long-temps possédée,
Je puisse désormais souffrir une autre idée,
Ni que je vive cufin si je ne vis pour toi ?
Je te donne, cruel, des armes contre moi
Sans doute, et je devrais retenir ma faiblesse.
Tu vas en triompher. Oui, je te le confesse,
J'affectais à tes yeux une fausse fierté ;

De toi dépend ma joie et ma félicité.
De ma sanglante mort ta mort sera suivie.

Quel fruit de tant de soins que j'ai pris pour ta vie?
Tu soupires enfin, et sembles te troubler.

Achève, parle.

Quoi donc !

que

BAJAZET.

O ciel ! que ne puis-je parler!

ROXAN E.

dites-vous? et que viens-je d'entendre?

Vous avez des secrets que je ne puis apprendre?
Quoi! de vos sentimens je ne puis m'éclaircir?

BAJAZE T.

Madame, encore un coup, c'est à vous de choisir.
Daignez m'ouvrir au trône un chemin légitime,
Ou bien me voilà prêt, prenez votre victime,

ROXAN E.

Ah! c'en est trop enfin, tu seras satisfait.
Hola! gardes, qu'on vienne.

SCÈNE II.

ACOMAT, ROXANE, BAJAZET, GARDES.

ROXAN E.

Acomat, c'en est fait.

Vous pouvez retourner, je n'ai rien à vous dire :

Du sultan Amurat je reconnais l'empire;
Sortez. Que le sérail soit désormais fermé,
Et que tout rentre ici dans l'ordre accoutumé.

SCÈNE III.

BAJAZET, ACOMAT.

A COMA T.

Seigneur, qu'ai-je entendu? Quelle surprise extrême!
Qu'allez-vous devenir? Que deviens-je moi-même ?
D'où naît ce changement? Qui dois-je en accuser?
O ciel !

BAJAZET.

Il ne faut point ici vous abuser.
Roxane est offensée, et court à la vengeance;
Un obstacle éternel rompt notre intelligence.
Visir, songez à vous, je vous en averti ;
Et, sans compter sur moi, prenez votre parti.

Quoi !

АСОМАТ.

BAJAZET.

Vous et vos amis, cherchez quelque retraite. Je sais dans quels périls mon amitié vous jette,

Et j'espérais un jour vous mieux récompenser.
Mais c'en est fait, vous dis-je, il n'y faut plus penser.

А СУМАТ.

Et quel est donc, Seigneur, cet obstacle invincible? Tantôt dans le sérail j'ai laissé tout paisible.

Quelle fureur saisit votre esprit et le sien ?

BAJAZET.

Elle veut, Acomat, que je l'épouse.

A COMA T.

Hé bien !

L'usage des sultans à ses vœux est contraire;
Mais cet usage enfin, est-ce une loi sévère
Qu'aux dépens de vos jours vous deviez observer?
La plus sainte des lois, ah! c'est de vous sauver,
Et d'arracher, Seigneur, d'une mort manifeste,
des Ottomans dont vous faites le reste..

Le

sang

BAJAZET.

Ce reste malheureux serait trop acheté,
S'il faut le conserver par une làcheté.

A COMA T.

Et pourquoi vous en faire une image si noire ?
L'hymen de Soliman ternit-il sa mémoire ?
Cependant Soliman n'était point menacé
Des périls évidens dont vous êtes pressé.

BAJAZET.

Et ce sont ces périls et ce soin de ma vie,
Qui d'un servile hymen feraient l'ignominie.
Soliman n'avait point ce prétexte odieux ;
Son esclave trouva grâce devant ses yeux;
Et, sans subir le joug d'un hymen nécessaire,
Il lui fit de son cœur un présent volontaire,

A COMAT.

Mais vous aimez Roxane?

BAJAZET.

Acomat, c'est assez ;

Je me plains de mon sort moins que vous ne pensez.
La mort n'est point pour moi le comble des disgrâces;
J'osai, tout jeune encor, la chercher sur vos traces;
Et l'indigne prison où je suis renfermé,

A la voir de plus près m'a même accoutumé.
Amurat à mes yeux l'a vingt fois présentée ;
Elle finit le cours d'une vie agitée.

Hélas! si je la quitte avec quelque regret...
Pardonnez, Acomat; je plains avec sujet

Des cœurs dont les bontés, trop mal récompensées,
M'avaient pris pour objet de toutes leurs pensées.

A COMA T.

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Ah! si nous périssons, n'en accusez que vous
Seigneur. Dites un mot, et vous nous sauvez tous.
Tout ce qui reste ici de braves janissaires;
De la religion les saints dépositaires,
Du peuple bysantin ceux qui plus respectés
Par leur exemple seul règlent ses volontés,
Sont prêts de vous conduire à la porte sacrée,
D'où les nouveaux sultans font leur première entrée.

BAJAZET.

Hé bien! brave Acomat, si je leur suis si cher,
Que des mains de Roxane ils viennent m'arracher;
Du sérail, s'il le faut, venez forcer la porte.
Entrez, accompagné de leur vaillante escorte,

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