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Ils se jouaient tous deux de ma crédulité !

amour.

Quel penchant, quel plaisir je sentais à les croire !
Tu ne remportais pas une grande victoire,
Perfide, en abusant ce cœur préoccupé,
Qui lui-même craignait de se voir détrompé.
Tu n'as pas eu besoin de tout ton artifice,
Et je veux bien te faire encor cette justice;
Toi-même, je m'assure, as rougi plus d'un jour
Du peu qu'il t'en coûtait pour tromper tant d'a
Moi qui, de ce haut rang qui me rendait si fière,
Dans le sein du malheur t'ai cherché la première,
Pour attacher des jours tranquilles, fortunés,
Aux périls dont tes jours étaient environnés :
Après tant de bontés, de soins, d'ardeurs extrêmes,
Tu ne saurais jamais prononcer que tu m'aimes!
Mais dans quel souvenir me laissé-je égarer ?.....
Tu pleures, malheureuse! Ah! tu devais pleurer
Lorsque, d'un vain désir à ta perte poussée,
Tu conçus de le voir la première pensée !
Tu pleures! Et l'ingrat, tout prêt à te trahir,
Prépare les discours dont il veut t'éblouir.
Pour plaire à ta rivale, il prend soin de sa vie.
Ah! traître, tu mourras... Quoi! tu n'es point partie ?
Va. Mais nous-même allons, précipitons nos pas.
Qu'il me voie, attentive au soin de son trépas,
Lui montrer à-la-fois, et l'ordre de son frère,
Et de sa trahison ce gage trop sincère.

Toi, Zatime, retiens ma rivale en ces lieux.
Qu'il n'ait, en expirant, que ses cris pour adieux.
Qu'elle soit cependant fidèlement servie.

Prends soin d'elle: ma haine a besoin de sa vie.
Ah! si, pour son amant facile à s'attendrir,
La peur de son trépas la fit presque nourir,
Quel surcroît de vengeance et de douceur nouvelle,
De le montrer bientôt pâle et mort devant elle !
De voir sur cet objet ses regards arrêtés
Me payer les plaisirs que je leur ai prêtés!
Va, retiens-la. Sur-tout garde bien le silence.
Moi... Mais qui vient ici différer ma vengeance ?

SCÈNE VI.

ACOMAT, ROXANE, OSMIN.

ACOMA T.

Que faites-vous, Madame? En quels retardemens
D'un jour si précieux perdez-vous les momens ?
Bysance, par mes soins presqu'entière assemblée,
Interroge ses chefs, de leur crainte troublée ;
Et tous, pour s'expliquer, ainsi que mes amis,
Attendent le signal que vous m'aviez promis.
D'où vient que, sans répondre à leur impatience,
Le sérail cependant garde un triste silence?
Déclarez-vous, Madame, et, sans plus différer.....

ROXAN E.

Oui, vous serez content ; je vais me déclarer.

ACOMA T.

Madame, quel regard et quelle voix sévère,
Malgré votre discours, m'assurent du contraire ?
Quoi! déjà votre amour des obstacles vaincu...

ROXAN E.

Bajazet est un traître, et n'a que trop vécu.

Lui?

A COMAT.

ROXAN E.

Pour moi, pour vous-même, également perfide,

Il nous trompait tous deux.

A COMAT.

Comment ?

ROXAN E.

Cette Atalide,

Qui même n'était pas un assez digne prix
De tout ce que pour lui vous avez entrepris...

A COMAT..

Hé bien !

ROXAN E.

Lisez. Jugez, après cette insolence,

Si nous devons d'un traître embrasser la défense.

Obéissons plutôt à la juste rigueur

D'Amurat qui s'approche et retourne vainqueur;
Et livrant sans regret un indigne complice,

Apaisons le sultan par un prompt sacrifice.

ACOMAT, lui rendant le billet.
Oui, puisque jusque-là l'ingrat m'ose outrager,
Moi-même, s'il le faut, je m'offre à vous venger,
Madame. Laissez-moi nous laver l'un et l'autre
Du crime que sa vie a jeté sur la nôtre.
Montrez-moi le chemin, j'y cours.

ROXAN E.

Non, Acomat:

Laissez-moi le plaisir de confondre l'ingrat.

Je veux voir son désordre, et jouir de sa honte.
Je perdrais ma vengeance en la rendant si prompte.
Je vais tout préparer. Vous, cependant, allez
Disperser promptement vos amis assemblés.

SCÈNE VII.

A COMAT, OSMIN.

A COMA T.

Demeure. Il n'est pas temps, cher Osmin, que je sorte.

OSMIN.

Quoi! jusque-là, Seigneur, votre amour vous transporte ?
N'avez-vous pas poussé la vengeance assez loin?
Voulez-vous de sa mort être encor le témoin?

ACOMA T.

Que veux-tu dire? Es- tu toi-même si crédule,

Que de me soupçonner d'un courroux ridicule?
Moi jaloux ! Plût au ciel qu'en me manquant de foi,
L'imprudent Bajazet n'eût offensé que moi !

OSMIN.

Et pourquoi donc, Seigneur, au lieu de le défendre...

ACOMA T.

Et la sultane est-elle en état de m'entendre ?
Ne voyais-tu pas bien, quand je l'allais trouver,
Que j'allais avec lui me perdre ou me sauver ?
Ah! de tant de conseils événement sinistre !
Prince aveugle, ou plutôt trop aveugle ministre,
Il te sied bien d'avoir, en de si jeunes mains,
Chargé d'ans et d'honneurs, confié tes desseins,
Et laissé d'un visir la fortune flottante,
Suivre de ces amans la conduite imprudente !

OSMIN.

Hé! laissez-les entr'eux exercer leur courroux.
Bajazet veut périr, Seigneur, songez à vous.
Qui peut de vos desseins révéler le mystère,
Sinon quelques amis engagés à se taire ?
Vous verrez, par sa mort, le sultan adouci.

ACOMAT.

Roxane, en sa fureur, peut raisonner ainsi.
Mais moi qui vois plus loin, qui, par un long usage,
Des maximes du trône ai fait l'apprentissage;
Qui, d'emplois en emplois, vieilli sous trois sultans,
Ai vu de mes pareils les malheurs éclatans ;

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