Immagini della pagina
PDF
ePub

« esclaves,

[ocr errors]

les scènes touchantes, héroïques, horribles, hi<«< deuses se multiplieront: le drame atteindra ses dernières li

« mites. »

Nous emprunterons encore le passage suivant à M. G. de la Landelle, parcequ'une partie de ce qu'il dit, en ce qui concerne la témérité que doit savoir montrer, en certaines circonstances, tout commandant de navire, est applicable à la marine commerciale :

« En marine, on attache avec raison une idée de bravoure à un « système de navigation qui n'allonge pas la proximité des terres. »

« Le capitaine qui veut rentrer au port doit forcément se rap« procher des côtes. Si, chaque soir, après avoir reconnu les feux << du rivage, il reprend la pleine mer, de crainte de naufrager, et « que, chaque matin, il s'en revienne vers la terre, au risque de << recommencer dix fois la même manœuvre, son excès de pru<«<dence lui vaut cent épithètes énergiques, mal rendue par les mots timide et même poltron. »

<< S'il agit de doubler un promontoire, et qu'au lieu de le con« tourner de près, on fasse un long circuit; si dans une baie, au « lieu de se diriger sans hésitations et sans craintes parmi les na<< vires à l'ancre, on évite d'en passer à une petite distance, on « est exposé aux mêmes termes de dédain. »>

« On n'est estimé bon navigateur et bon manœuvrier que si, << réunissant l'audace au coup d'œil, on sait ranger à l'honneur les « terres, les écueils, les bancs de glace, les navires. Et en réalité, «la hardiesse est une des conditions essentielles de l'habileté ; la « témérité seule est condamnable; mais où finit la hardiesse, où « commence la témérité ? »

«La tâche des conseils de guerre appelés à juger le capitaine, après le naufrage, est toujours fort ardue. Condamner l'accusé << serait souvent donner un encouragement aux plus déplorables « excès de timidité, aux navigations lentes, maladroites, molles et « lâches, pour tout dire. La marine militaire où prévaudrait ce « mode de service, serait la dernière des marines. Que feraient « donc devant l'ennemi les capitaines de ses vaisseaux? Quant « à la marine marchande qui en userait ainsi, sans cesse devancée << sur les marchés lointains, ayant augmenté par la longueur des « traversées, tous les frais de transport, elle ne pourrait soutenir «< la concurrence étrangère et ruinerait ses armateurs. »

Quelle que soit la cause du naufrage ou de l'échouement, raz de marée soudains, explosion de chaudière, incendie, voie d'eau, coup de vent que bat en côte, ou témérité du capitaine, celui-ci

(nous l'avons dit plus haut), doit, avant tout, s'occuper des moyens les plus propres à sauver la vie des marins et des passagers, et ne quitter son bord que le dernier. Il serait difficile de citer, nous le pensons, un seul commandant de marine militaire qui n'ait pas strictement, résolument, consciencieusement rempli cette double condition inhérente à sa qualité de chef, de représentant de son souverain à bord du bâtiment confié à son expérience, à son habileté, à son courage; nous croyons d'ailleurs qu'on rencontre généralement un dévouement égal, une abnégation réelle chez les capitaines de la marine commerciale de la pluspart des nations maritimes; aux prises avec la tempête, on a vu toutefois de faibles équipages de petits navires de mer, tartanes, cutters, chassemarée, etc., épuisés par la durée de la lutte, abandonner les manœuvres, renoncer à faire de nouveaux efforts, et se livrer entièrement, passifs, inertes et terrifiés, à la furie de la tempête, laissant à Dieu le soin de les sauver !

L'ordre, le zèle, l'obéissance, la discipline sont impérieusement nécessaires de la part de l'équipage, en cas de naufrage, d'échouement et de sauvetage; le capitaine est en droit de les réclamer des hommes placés sous son commandement, et il obtiendra en pareille circonstance tout concours de son équipage s'il a sú se faire respecter et aimer tout à la fois, en se montrant dans sa conduite antérieure, habile, de sangfroid, sévère en ce qui touche la discipline, humain et juste. 1)

Si le bâtiment doit être abandonné, le capitaine doit être le dernier à le quitter, et fort souvent il ne le quitte qu'après avoir longtemps hésité à le faire, tant il devient pénible, pour un vieux

1) Le sangfroid peut rendre quelquefois plus de services que l'expérience combattue par la peur, et tenir lieu de l'habileté. En 1820, une tartane de la Méditerranée, faisant voile de Gènes pour les côtes de France, fut assaillie par une violente tempête; l'équipage épuisé par de longs et infructueux efforts, perdit tout courage en reconnaissant qu'une voie d'eau s'était déclarée; les cinq ou six hommes qui le composaient se considérant comme voués a une mort prochaine, avaient abandonné la manœuvre, renoncé à tout espoir de salut, et ne faisaient plus entendre que des gémissements, accompagnés de vœux à la Madone. A bord de la tartane se trouvaient le lieutenant général comte Dulong de Rosnay et Monseigneur de Forbin-Jansson, évèque de Nancy. Certes, ni l'un ni l'autre de ces éminents personnages ne connaissaient les manœuvres de mer; mais tous les deux avaient conservé leur sangfroid. La haute intelligence des deux passagers, l'habitude de commander qu'avait contractée le général dans sa longue et brillante carrière militaire, l'exemple donné par un saint prélat, firent ce que n'avait pû faire un équipage éperdu sous un capitaine découragé. Le général ordonna avec fermeté d'assujétir le gouvernail, livré jusque là aux caprices des vagues soulevées, d'abattre ce qui restait de toile sur les vergues, et de travailler aux pompes. L'autorité de sa parole, et de son regard, l'exemple donné par Monseigneur de Forbin-Jansson qui courut aux pompes et les fit mettre en mouvement, rendirent le courage à l'équipage: la lutte fut encore longue et pénible, mais le navire fut sauvé.

marin, de se séparer du navire sur lequel il a passé de longues années. 1)

§ 44.

Du radoub des navires dans les ports étrangers.

Les traités publics font quelquefois de la faculté de pourvoir au radoub des navires dans les ports étrangers, une stipulation spéciale; cette stipulation, ou doit le reconnaître, est entièrement superflue: la faculté de faire radouber un navire là où l'on a reconnu l'urgence des réparations, est devenue de droit commun. Quel est d'ailleurs le gouvernement qui se refuserait à laisser les bâtiments étrangers procéder dans ses ports aux réparations que réclame leur état, par suite de la tempête qui les a contraints à y entrer en relâche forcée, ou de l'échouement qu'ils ont subi sur la côte? Il y aurait inhumanité à s'opposer à la réparation des avaries; injustice à mettre de cette sorte le capitaine étranger dans la nécessité d'abandonner son bâtiment, faute de pouvoir lui faire reprendre la mer sans lui avoir fait les réparations indispensables, et préjudice porté aux intérêts des ouvriers charpentiers du port, des fournisseurs du bois de construction, des marchands chargés de livrer les vivres frais nécessaires aux équipages pendant le séjour plus ou moins prolongé, dans les bassins, du bâtiment abattu en carène.

Le frèt est dû pour les marchandises que le capitaine a été dans le cas de vendre pour subvenir au radoub, à charge, par lui, de tenir compte de leur valeur au prix qui aura été obtenu pour les marchandises de méme qualité et de même valeur, au lieu de destination (§ 3); mais plus généralement quand il s'agit de réparer des avaries et que le capitaine ne possède pas les fonds nécessaires à cet effet, il contracte un emprunt à la grosse (§ 45); s'il existe un consul de sa nation dans le port où le capitaine se trouve dans la nécessité de recourir à ce moyen pour se procurer des fonds, ce fonctionnaire autorise l'emprunt sur la demande écrite qui lui a été remise par le capitaine, après avoir fait constater par des experts l'état du bâtiment.

1) On a vu même des matelots refuser le salut par attachement pour leur bâtiment. A bord de la trop célèbre Méduse, dit l'écrivain que nous avons nommé plus haut, trois matelots se cachérent dans le navire et durent peut-être la vie à leur « entêtement, car n'étant pas descendus sur le fatal radeau, ils eurent des vivres « en abondance jusqu'au moment où le brig l'Argus les recueillit. » 8

CUSSY. 1.

§ 45.

De l'emprunt, ou contrat à la grosse.

L'emprunt ou contrat à la grosse est un prèt fait sur les objets exposés aux risques de la mer, avec convention que si ces objets arrivent heureusement, le prêteur sera payé de son capital et des intérêts promis; mais que si par accident maritime ils périssent en tout ou en partie, ou s'ils sont détériorés, ses droits sont limités au prix que pourront produire les dits objets (§ 48).

Les emprunts à la grosse peuvent être effectués sur le corps et quille du navire; sur les agrès et apparaux (la chaloupe, le canot, les ancres, mâts, câbles, voiles, poulies vergues); sur les armements et les victuailles; sur le chargement ou facultés; enfin, sur la totalité de ces objets conjointement, ou sur une partie déterminée de chacun d'eux.

Les événements dont le prêteur court les risques, dit le savant professeur Pardessus dans son Cours de droit commercial, doivent être tels que la prudence humaine n'a pû ni les prévoir, ni y résister c'est ce qu'on nomme cas fortuits et de force majeure. On désigne génériquement les événements dont se charge le prêteur, par le nom de fortune de mer ou sinistre de mer, et l'on distingue entre le sinistre majeur, dont l'effet est de causer la perte totale des choses exposées aux risques, et le sinistre mineur, dont l'effet est de diminuer la quantité, la qualité ou la valeur de ces choses, sans en causer la perte absolue.

Les cas de force majeure qu'on doit considérer comme fortunes de mer sont la tempête, le naufrage, l'échouement, le jet (§§ 43 et 47), l'abordage (§ 46), dont l'auteur est inconnu; le feu, la prise (titre III, §§ 26 à 28), les suites d'une déclaration de guerre (titre III, § 3), les représailles (titre II, § 51), le changement forcé de navire, l'engagement des marchandises ou la mise en commun des vivres pour le besoin de la navigation (§ 36), la contribution aux pertes éprouvées (§ 47), etc.

Le contrat à la grosse est passé à l'étranger soit par devant un notaire, soit par devant le chancelier du consulat de la nation à laquelle appartient le capitaine (§ 44), soit sous seing-privé.

Au nombre des détails que doit renfermer le contrat à la grosse (savoir notamment les noms du capitaine, du navire, du prêteur et de l'emprunteur, les chiffres du prèt et du profit maritime, etc.); on doit énoncer si le bâtiment voyagera sous escorte, c'est-à-dire sous le convoi d'un bâtiment de guerre (titre III, § 19), ou de

conserve, c'est-à-dire en société de plusieurs bâtiments dont les capitaines se sont engagés à ne pas s'abandonner pendant le voyage et se sont placés sous le commandement, en quelque sorte, de l'un d'eux, lequel prend le titre de capitaine directeur : son bâtiment reçoit en ce cas le nom de bâtiment directeur.

Il est de l'essence du contrat à la grosse qu'il ne produise les effets qui lui sont propres qu'autant que les choses effectées au prêt auront été exposées réellement à des risques maritimes, ou qu'elles ont la valeur indiquée: si ces conditions qui sont nécessairement sous-entendues, n'ont pas été accomplies, il y a lieu à une diminution proportionnelle, qu'on nomme Ristourne, tant sur le capital que sur les profits maritimes.

§ 46.

De l'abordage.

L'abordage, c'est-à-dire le choc de deux navires l'un contre l'autre, est de trois natures: il a lieu par force majeure, quand il est occasionné par la violence des vents ou l'agitation extrême des flots; en pareille circonstance, personne ne devant répondre de semblables événements, chacun supporte le dommage qu'il a éprouvé; l'abordage est fortuit quand la cause reste inconnue : il doit être à peu près considéré, dans les résultats et dans ses conséquences, comme l'abordage par force majeure; l'abordage quasi-délit par faute d'un auteur connu, donne droit à une indemnité à celui qui a éprouvé le dommage.

Les réglements particuliers et les usages ont fixé sur l'abordage quelques principes que M. Pardessus, dans son Cours de droit commercial, résume comme il suit, et qui peuvent servir à déterminer dans le doute si l'abordage doit être considéré comme fortuit, ou s'il peut être imputé à la faute d'un des capitaines :

[ocr errors]

« L'usage a introduit quelques règles qui peuvent servir à dé<< terminer dans le doute si l'abordage doit être considéré comme « fortuit, ou peut être imputé à la faute d'un des capitaines : << 4° Lorsque deux navires se présentent pour entrer dans le « même port, le plus éloigné doit attendre que le plus proche soit « entré; s'ils s'abordent, le dommage est imputé au dernier venu, << tant qu'il ne prouve pas qu'il n'y a aucune faute de sa part; « 2o En cas de concours de deux navires, le plus petit doit « céder au plus gros;

« 3o Le navire qui sort du port doit faire place à celui qui entre;

« IndietroContinua »