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Est-il besoin d'ajouter, dirons nous avec M. Ortolan, qu'il est des cas où les bâtiments de guerre doivent s'abstenir rigoureusement de prendre part aux fêtes nationales de l'État dans les eaux duquel ils se trouvent, de même qu'à celles des navires étrangers qui sont dans le même lieu ?

Si ces solennités, dans leur principe, dans leur forme, dans leur but, renferment quelque chose de douloureux ou de blessant pour le pays auquel le bâtiment appartient, pour ses institutions, pour ses croyances; ou quelque chose d'inconciliable avec l'impartialité qui est due à toute Puissance amie, les commandants doivent rester spectateurs silencieux de pareilles solennités, ou même s'en éloigner, selon le cas : si les réjouissances publiques sont ordonnées à l'occasion d'une victoire remportée sur une nation en paix avec la leur, les commandants de forces navales ne sauraient en effet s'associer à ces réjouissances; à plus forte raison (et bien qu'il soit superflu de le dire), si elles ont lieu par suite d'une victoire remportée sur les armées de leur pays, ou même d'un allié de leur pays.

Le bon sens, le point d'honneur militaire, le sentiment de la dignité nationale feront toujours discerner, aux commandants des forces navales mouillées sur une rade étrangère, les cas où ils doivent prendre part aux réjouissances et solennités maritimes, et ceux à l'occasion desquels ils doivent s'abstenir, ou même s'éloigner.

Le tact, le sentiment des convenances que possèdent, en général, à un haut degré les officiers de marine que leur noble carrière met en contact avec les nations diverses du globe; le respect pour leur pavillon; enfin, l'amour de la patrie régleront leur conduite.

$ 64.

De la traite des noirs. 1)

Le principe de la suppression ou abolition de la traite des noirs a été adopté par la généralité des Puissances et États divers, au moyen de lois spéciales et par des traités publics.

Ce fut le Danemarck qui, dès l'année 1792, prit l'initiative et donna l'exemple.

La traite a été déclarée acte de piraterie par divers gouver

1) Voir au chap. II, § 3 du second livre, des colonies,- les détails relatifs au trafic des nègres par les Portugais, les Espagnols et les Anglais; et au chap. XXXI les faits et les circonstances diverses qui concernent l'abolition de la traite.

nements sans y être assimilée, toutefois, d'une manière stricte, absolue et complète. (Voir titre III, § 35.)

La surveillance que devait exercer les croisières établies sur la côte d'Afrique par les divers gouvernements abolitionistes, pour s'opposer à la traite des noirs, entrainait la nécessité de la visite des bâtiments de la marine commerciale par les bâtiments armés, dans une certaine zône limitée par les traités; c'est du moins ce qu'ont pensé un certain nombre de Puissances.

Mais cette visite des bâtiments de commerce, au sein de la paix, par des bâtiments de guerre étrangers, était une innovation fâcheuse, un principe nouveau déplorable, introduit dans le droit maritime des nations, et dont l'application devait, après un certain temps d'épreuve, faire reconnaître les inconvénients.

Ce principe souleva bientôt, en effet, des différends entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, et des difficultés de la part de la France et du Brésil. (Voir Livre II, chap. XXXI.)

L'introduction du principe de la visite en temps de paix est un fait que l'on doit vivement regretter d'avoir vu se produire.

La visite des bâtiments de commerce en temps de guerre par les vaisseaux armés des Puissances belligérantes peut se comprendre et être admise comme une nécessité à laquelle les neutres doivent se soumettre (voir titre III, § 45); la visite en temps de paix, en vue d'un résultat tout de philantropie et de civilisation (que devaient atteindre avec le temps, peut être en peu de temps, les lois promulguées par les divers gouvernements et la surveillance que la marine militaire de chaque État, seule et sans le concours des bâtiments de guerre des autres pays, aurait exercée sur les bâtiments de commerce de sa nation); cette visite en temps de paix, disons-nous, est un mal, un déplorable précédent qui est apparu dans le droit maritime des nations, et dont la raison et le principe d'indépendance et de dignité des nations, nous l'espérons, feront justice en le répudiant.

Un grand nombre de traités pour l'abolition de la traite des noirs, ont été conclus, depuis l'année 1814, entre les grands États maritimes; les États maritimes moins importants y ont adhéré.

Les traités dont les clauses interessent au plus haut degré le droit maritime des nations, sont ceux que la Grande-Bretagne (devenue depuis 1814 la protectrice déclarée de la cause des noirs), a conclus les 23 septembre 1817 et 28 juin 1835 avec l'Espagne ; le 4 mai 1818, avec les Pays-Bas ; le 6 novembre 1824, avec la Suède; les 30 novembre 1831, 22 mars 1833 et 20 mai 1845, avec la France; le 20 décembre 1844, avec l'Autriche, la Prusse

et la Russie; le 3 juillet 1842, avec le Portugal, et le 9 août de la même année, avec les États-Unis de l'Amérique septentrionale.

Plusieurs de ces traités établissent des cours mixtes (c'est-àdire des tribunaux composés par moitié de magistrats désignés par les deux Puissances contractantes), afin de juger les bâtiments arrêtés pour fait de traite; et ces mêmes traités ne se bornant pas à consacrer le déplorable droit de visite des navires marchant isolément, autorisent également la visite des bâtiments voyageant sous convoi ! 1)

La France qui par ses traités de 1831 et de 1833 avait consenti à la visite réciproque, qu'elle a refusée définitivement d'ailleurs par son traité de 1845 (ainsi que l'ont fait également les États-Unis par leur traité du 9 août 1842 avec la Grande-Bretagne); la France n'avait point accordé la visite des bâtiments voyageant sous convoi, et n'a jamais consenti à soumettre des bâtiments de commerce arrêtés, pour fait de traite, par la croisière anglaise, à une autre juridiction qu'à celle de ses propres tribunaux.

En ce qui concerne les bâtiments voyageant sous convoi, l'article III du traité du 22 mars 1833, porte:

<< Il demeure expressément entendu que si le commandant d'un croiseur d'une des deux nations a lieu de croire qu'un navire marchand, naviguant sous convoi ou en compagnie d'un bâtiment de guerre de l'autre nation, s'est livré à la traite ou a été armé pour ce trafic, il devra communiquer ses soupçons au commandant du convoi ou du bâtiment de guerre, lequel procédera seul à la visite du navire suspect; et dans le cas où celui-ci reconnaîtrait que les soupçons sont fondés, il fera conduire le navire, ainsi que le capitaine et l'équipage, la cargaison et les esclaves qui pourront se trouver à bord, dans un port de sa nation, à l'effet d'être procédé à leur égard, conformément aux lois respectives. >>

Le traité du 13 juillet 1844, entre la Grande-Bretagne, l'Autriche, la Russie et la Prusse, renferme les mêmes dispositions, en ce qui concerne le convoi et les tribunaux.

Le traité du 3 juillet 1842, entre la Grande-Bretagne et le Portugal, a consacré le même principe, quant aux bâtiments voyageant sous convoi; mais il adopte l'établissement des tribunaux mixtes.

1) Ainsi, l'Angleterre qui s'est opposée si fréquemment au privilège des convois en temps de guerre, a continué pour le temps de paix l'opposition qu'elle a faite à ce principe de dignité et d'indépendance des nations, et a réussi, auprès de quelques Etats, à faire prévaloir ses doctrines !! ..... (Voir titre III, § 19 et Livre II, chap. XXV.)

La visite des bâtiments de guerre par les croiseurs de la côte d'Afrique a d'ailleurs été interdite d'une manière positive par ces divers traités quel commandant n'eût pas, en effet, préféré renoncer à son épaulette, plutôt que d'avoir à se soumettre à cette odieuse investigation!

La visite des bâtiments de commerce des nations qui ont consenti à ratifier les traités où se trouvent déposé ce déplorable principe de droit maritime, applicable au temps de paix, ne peut être exercée que par un officier du rang de capitaine ou de lieutenant de vaisseau.

Elle ne peut avoir lieu, selon l'article II du traité du 20 décembre 1841 (qui a reçu, le 19 février 1842, la ratification de la Grande-Bretagne, de l'Autriche, de la Prusse et de la Russie, mais que la France n'a pas voulu ratifier), que dans les limites qui y sont indiquées :

« Art. 11. Pour remplir d'une manière plus complète le but du présent traité, les hautes parties contractantes conviennent, d'un commun accord, que ceux de leurs vaisseaux de guerre qui auront des ordres et des mandats spéciaux, pourront visiter tout navire marchand appartenant à l'une ou à l'autre des parties contractantes, qui serait sur des motifs raisonnables soupçonnés de faire la traite ou d'avoir armé à cet effet............. »

« Le droit de visite réciproque ne pourra pas être exercé dans la Méditerranée. En outre, l'espace dans lequel l'exercice de ce droit se trouvera restreint, sera limité, au Nord, par le 32o degré de latitude nord; à l'Ouest, par la côte orientale d'Amérique, en partant du point où le 32e degré de latitude nord atteint cette côte, jusqu'au 45° degré de latitude sud; au Sud, par le 45 degré de latitude sud, à partir du point où ce degré atteint la côte orientale de l'Amérique jusqu'au 80 degré de longitude Est du méridien de Greenwich, et, à l'Est, par le même degré de longitude, en partant du point où ce degré est coupé par le 45 degré de latitude sud jusqu'à la côte de l'Inde. 1)

L'article 9 du traité de 1841 indique quels sont les objets qui, trouvés à bord d'un bâtiment visité seront considérés comme une preuve de prime abord, que le navire a fait ou veut faire la traite

1) Il est fâcheux qu'en fixant des limites aussi étendues, les plénipotentiaires aient employé l'expression « la côte orientale» sans faire réserve expresse de l'espace de la mer dite mer territoriale; il est évident que la poursuite des bâtiments soupçonnés de se livrer à la traite ne saurait, en principe, avoir lieu sans violer le droit des gens, au delà de la limite de la mer territoriale, sur la côte orientale de l'Amérique; mais les plénipotentiaires auraient dû le dire positivement, et à cette occasion fixer à jamais l'étendue de la mer territoriale sur laquelle l'État riverain exerce sa souveraineté et sa juridiction.

des noirs. La série en est beaucoup trop étendue et peut devenir l'origine de nombreuses difficultés, ainsi que de vexations fréquentes pour les bâtiments de commerce qui ont à traverser la vaste zóne dans laquelle le droit de visite est exercé, et qui d'ailleurs sont fort étrangers en général au trafic condamné par les lois et par les traités publics.

§ 65.

De l'Empire Ottoman.

Les nations musulmanes de l'Asie et de l'Afrique n'ont pas encore renoncé d'une manière absolue à tous leurs usages particuliers; cependant, il résulte des traités publics, conclus avec les États chrétiens, que ces nations abandonnent peu à peu quelques pratiques anciennes, et adoptent diverses doctrines du droit public international des nations chrétiennes. C'est ainsi que plusieurs États mahométans ont introduit sur leur territoire l'usage des mesures sanitaires contre l'invasion de la peste; qu'ils ont renoncé à la course en temps de paix et en temps de guerre (voir titre II, § 58 et Livre II, chap. XXXIII); qu'au lieu de signer des capitulations qui, à leurs yeux, n'étaient que des Armistices, des trèves, en quelque sorte, avec les nations chrétiennes, la Porte Ottomane et divers autres États musulmans signent actuellement des traités de paix, ainsi que des traités de commerce et de navigation; que la Porte entretient, dans plusieurs capitales de l'Europe, et dans les ports principaux de commerce, des légations permanentes, et des consuls.

Aussi l'on peut dire, de l'Empire Ottoman, qu'il reconnait le droit public de l'Europe et qu'il s'est placé sous sa sauvegarde en cherchant à se l'assimiler.

Depuis la paix générale de 1814, la Porte Ottomane a signé de nombreux traités de commerce et de navigation avec les Puissances chrétiennes :

En 1823, avec la Sardaigne;

>>> 1827, >> la Suède, les Deux-Siciles, l'Espagne ;

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les États-Unis d'Amérique ;

>> 1833, >> la Toscane;

4838, >> la Grande-Bretagne, la France: le traité avec cette dernière Puissance (qui est un appendice

aux capitulations antérieures), a été suivi, en 1839, de dispositions réglementaires ;

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