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LIVRE PREMIER.

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES.

L'histoire de la législation maritime commerciale, au point de vue des droits et de l'indépendance des nations, peut se partager, selon nous, en six époques.

La première s'arrète à la paix de Westphalie en 1648.

Elle embrasse d'une part, les usages maritimes établis par les lois Rhodiennes, la législation Romaine et les lois plus récentes d'Amalfi, qui toutes intéressent au plus haut degré le législateur, le publiciste et l'historien du Droit maritime des nations; les Roles d'Oleron, et le célèbre Consulat de la mer, que toutes les villes maritimes de la Méditerranée avaient adopté; d'autre part, les lois de Wisby, de Damme ou de Westcapelle, de la Hanse teutonique ou ligue anséatique, etc. qui ont réglé les rapports commerciaux maritimes des états de l'Europe septentrionale.

La seconde époque embrasse le temps écoulé depuis la paix de Westphalie (que l'on peut considérer comme le point de départ du Droit des gens moderne), jusqu'à la paix d'Utrecht, en 1713, laquelle raffermit l'équilibre politique de l'Europe en lui donnant plus de fixité; aussi, les traités signés à Utrecht (malgré les nombreuses violations du droit des gens de la part de l'Angleterre à l'égard de l'Espagne, fort peu d'années après leur conclusion), ontils toujours été rappelés et renouvelés en principe dans les traités qui ont été signés pendant toute la durée du 18e siècle. Cette seconde époque est celle de Puffendorff, de Grotius, de Selden,

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de Leibnitz, de Wiquefort, de Jenkins, de Samuel Rachel, etc. etc., elle vit également paraître les célèbres ordonnances de Louis XIV, sur la marine, de 1681, 1692 et 1704.

La troisième époque s'arrète à la paix de Paris et de Hubertsbourg, qui mit fin, en 1763, à la guerre de Sept ans. A cette époque appartient l'illustre pléiade des jurisconsultes et des publicistes dont les écrits ont si puissamment contribué aux progrès du Droit moderne des gens: nous nommerons Wolf, le disciple de Leibnitz; Bynkershoek, qui s'occupa beaucoup du droit maritime; Vattel, qui mourut en 1767; Montesquieu qui a dit en parlant du principe sur lequel est fondé le droit des gens, «— que les di<«< verses nations doivent se faire, dans la paix, le plus de bien, et. <«< dans la guerre, le moins de mal qu'il est possible sans nuire à leurs véritables intérèts »; Barbeyrac, auquel la France doit la traduction des écrits de Grotius, de Puffendorff, et de Bynkershoek; Burlamaqui, ami de Barheyrac dont il adopta les principes; Réal; l'abbé Mably; Valin, qui a commenté la célèbre ordonnance de la marine de 1681; l'espagnol Don Carlos Abreu, qui a publié, en 1746, un traité sur les prises maritimes; Hubner, diplomate danois, auteur d'un traité sur la saisie des bâtiments neutres. (Voir Livre I, titre III, § 39.)

La quatrième époque, la plus importante, peut-être, pour le droit maritime des nations, est celle qui s'étend de 1763 à 1789. et qui embrasse la grande guerre de l'Indépendance des ÉtatsUnis de l'Amérique septentrionale, ainsi que la première neutralité maritime armée des Puissances du Nord, en 1780, aux principes de laquelle accédèrent la France, l'Espagne, l'Autriche, les Deux-Siciles, etc. etc. (Voir Livre II, chap. VII.)

La cinquième époque de l'histoire du droit maritime des nations est celle qui comprend la guerre de la Révolution française; qui vit tous les principes de 1780 abandonnés en haine de la France; puis, renouvelés en 1800, pour être abandonnés encore en 1804! (Voir Livre I, titre III, § 9; Livre II, chap. XXI, XXIII, XXV.)

Enfin, la sixième époque, à partir de la rupture de la paix de l'année 1802 jusqu'à nos jours, est remerquable par la lutte de l'Angleterre et de la France; par le système, connu sous le nom de continental, adopté par l'Empereur Napoléon en représailles des mesures qu'avait prises le cabinet de St.-James (Livre II, chap. XXVI); par le retour aux principes de justice et d'équité à l'égard des neutres, et que reproduisent tous les traités, à peu près, qui ont été conclus entre les diverses puissances maritimes du globe, depuis l'année 1815. (Voir Livre I, titre III, § 10.)

La sixième époque, ou époque contemporaine, a également vu la libre fréquentation de la mer Noire accordée à la navigation commerciale de toutes les nations; l'ouverture de plusieurs ports de l'Empire chinois au commerce maritime étranger; l'abolition de la piraterie des Régences barbaresques dans la Méditerranée; enfin, l'abolition de la traite des noirs qui a soulevé la question de la visite des bâtiments en temps de paix. (Voir Livre I, titre II, §§ 54 et 56; Livre II, chap. XXXI.) 1)

Au titre III, nous dirons les clauses des traités conclus depuis deux cents ans, desquelles dérive le Droit maritime international conventionnel, en ce qui concerne les grands principes admis généralement sur le commerce des neutres : l'immunité du pavillon, le blocus, la contrebande de guerre, la visite, le convoi, la mer territoriale, etc. etc. Mais nous indiquerons ici les publicistes les plus remarquables qui appartiennent à la 4o, à la 5o et à la 6 époque, ainsi que les écrivains, auxquels leurs ouvrages sur le droit des gens, la diplomatie et les institutions consulaires ont assigné un rang distingué dans la science aussi bien que dans l'opinion publique.

Ce sont, notamment, l'abbé Galliani; Lampredi, dont l'ouvrage Sur le commerce des neutres en temps de guerre, a été traduit en français par Peuchet; Moser, qui fonda à Hanau, en 1749, une académie pour l'instruction des jeunes gentilshommes qui se destinaient à la carrière diplomatique; Georges Frédéric de Martens, dont l'ouvrage publié sous le titre de Précis du Droit des gens moderne de l'Europe, a eu, en 1824, une troisième édition paru sous la surveillance de ce publiciste éminent; Gérard de Rayneval, dont les Institutions de la Nature et des Gens, ont reçu, en 1832, une nouvelle édition, publiée par les soins de l'habite diplomate, comte de Rayneval, fils de l'écrivain publiciste; Azuni dont le Droit maritime des nations a été traduit en français par Digeon; Kluber, mort il y a peu d'années; Heffter; Schæffer; Wachter; Fœlix qui a publié, en 1843, un traité du droit international privé; le commandeur PinheiroFerreira; le comte de Garden; Henry Wheaton; le baron Charles de Martens; M. L.-B. Hautefeuille, avocat à la cour de cassation, qui a fait paraître, à Paris, en 1850, un ouvrage fort remarquable

1) Nous ne devons pas omettre d'indiquer, également, le retour momentané de l'Angleterre au principe salutaire de l'immunité du pavillon, pendant la durée de la guerre de 1854, et la restitution des marchandises des amis et des neutres trouvées sous pavillon ennemi. Voir déclaration collective de la France et de la GrandeBretagne, Livre I, titre III, § 10, section deuxième.

sur les Droits et Devoirs des Neutres; MM. les professeurs Emile Vincens, Royer - Collard, Pardessus, Mignot, etc.

Parmi les écrivains qui ont publié des ouvrages sur les institutions consulaires, depuis la fin du siècle dernier, nous citerons Steck, de Berlin; Borel; Warden dont le livre a été traduit de l'anglais par Barrère; Laget de Podio; Miltitz, ancien ministre de Prusse à Constantinople; Bursotti, de Naples; Pichon; Mensch; le commandeur Ribeiro dos Santos et son collaborateur, le docteur de Castilho - Barreto, etc. etc.

Pendant le cours des six époques, ou périodes de l'histoire du Droit maritime des nations, nous aurons à signaler de nombreuses variations, avant de pouvoir établir l'état actuel de la législation dérivant des traités publics. (Voir titre III, et notamment les §§ 8, 9, 40, 14, 14, 19, 24, 32, 36, 37 et 38.)

Tantôt les conventions diplomatiques ont étendu les principes, tantôt elles ont entravé leur développement en les restreignant au gré des intérêts qu'il s'agissait de faire prédominer dans le moment

Là, des sentiments libéraux et élevés ont animé les négociateurs; ici, la jalousie et l'abus de la force ont arrêté les progrès.

Mais au milieu de ces oscillations trop fréquentes, de ces atteintes déplorables portées à l'application des principes, à la raison, à la justice, à l'indépendance des nations, ainsi qu'au principe de réciprocité qui doit exister entre elles, il sera facile de reconnaître d'une part, que la France, plus que toute autre puissance, s'est montrée la protectrice réelie et constante des droits des neutres et des faibles (Voir titre III, § 10, section 2); que si, contrainte de recourir à des mesures de représailles, elle a renoncé quelquefois à l'application des principes généreux et libéraux qu'elle avait tracés dans ses traités publics et dans ses réglements, elle s'est toujours empressée, après fort peu de temps, d'y revenir et de les proclamer encore; d'autre part, que l'Angleterre, toujours personnelle, toujours préoccupée uniquement de ses intérèts particuliers et dominée par la pensée de l'accroissement incessant de sa puissance maritime, s'est, au contraire, montrée, en toutes circonstances, à bien peu d'exceptions près que nous signalerons (titre III, §§ 40, 14, 49), restrictive des droits des autres nations, injuste souvent à leur égard, inquiète toujours tant du développement que semblaient prendre leur prospérité industrielle et commerciale, et leur navigation, que des alliances contractées par ces nations, alliances que l'Angleterre s'empressait d'affaiblir et de rompre par des négociations, par des ménaces ou par des at

teintes directes au droit des gens. (Voir Livre II, chap. VII, XXI, XXV, XXVI, XXXVII.)

C'est à regrèt que nous adressons ce reproche à une nation que nous admirons sous tant d'autres rapports et à tant de titres divers; nation religieuse, calme, disciplinée, intelligente, qui possède le sens du vrai patriotisme, le sentiment profond de la nationalité, qui professe le culte des traditions conservatrices et le respect des institutions qui ont fait la gloire et la prospérité

du pays.

Nous partagerons en trois grandes sections distinctes ou titres l'exposé que nous avons à faire des principes et des usages reçus, sur lesquels est basé le Droit maritime des nations à notre époque. Au titre le nous parlerons du commerce maritime, de l'usage de la mer, des lois et des traités; enfin, des consulats. Les titres I et IIIe seront consacrés à l'exposé des principes, les uns applicables aux relations internationales en temps de paix; principes généreux, certains, sacrés, auxquels les réglements particuliers des divers gouvernements n'apportent que des modifications de détail sans importance; les autres qui appartiennent aux temps exceptionnels de guerre maritime, dont l'application est plus rare; pour lesquels, toutefois, les nations doivent professer un respect égal, mais auxquels les événements publics, les intérèts personnels, la politique du moment, entrainent, trop fréquemment, les gouvernements à porter atteinte, ébranlant, quand ils agissent ainsi, la stabilité que ces principes de justice et d'équité qu'ils devraient conserver au sein de tous les peuples, et qu'ils acquerraient indubitablement si tous les gouvernements forts, donnant l'exemple du bien, et obéissant à la conscience publique universelle, consentaient à les faire passer, inviolables, dans leur droit public international.

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