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est au presbytère, le soir il serait comble. Refusait-on même avant la révolution de vous payer la dîme? Non. On demandait seulement qu'en raison des dommages que la manière de la percevoir causait à l'agriculture, de la payer en grain ou en argent. On demandait plus encore. On demandait que tout le monde, sans distinction de rangs, fût astreint à payer les impôts. Par conséquent, il eût été possible, il était même certain que, dans un arrangement de ce genre, les seigneurs eussent été astreints à payer la dîme au clergé, et que celui-ci eût reçu par ce fait plus qu'il n'eût donné1.

Enfin, si nous en revenons à notre temps, nous l'avons dit: le clergé plébéien n'a rien à gagner au retour de l'ancien ordre de choses, qui par lui-même n'a pas même chance de retour. Ce sont donc des désirs qui ne peuvent se réaliser. Premier déboire. D'ailleurs, que pourrait faire le clergé avec une monarchie qui, comme l'a dit Capefigue, tombait en poussière? Lors même que cette monarchie vermoulue serait replâtrée et récrépie, que pourrait-on en espérer? Une excellente personne, appartenant par sa naissance à une grande famille, nous a dit franchement un jour à nous-même que lors même que le comte de Chambord reviendrait, ce serait pour s'en retourner au bout de trois mois; cependant elle ne cachait pas ses sympathies pour lui. Nous déclarons sur notre honneur que nous n'inventons rien, mais qu'au contraire nous disons l'exacte vérité.

Lors même que ce replâtrage se ferait, ce ne pourrait

1. Si le haut clergé recevait beaucoup, par contre le bas clergé était souvent dans une situation précaire; il y avait des curés à portion congrue (non décimateurs) qui n'avaient que trois cents francs d'honoraires et leurs vicaires cent cinquante seulement. Voir aussi les doléances de la commune de Grandhoux (prononcez Gran-houe).

être qu'au détriment du clergé plébéien, au détriment de celui qui fait dire au clergé de haute naissance que l'épiscopat perd beaucoup depuis l'introduction de la roture.

Voyons d'ailleurs si ces raisons sont bien fondées. Cette question vaut aussi la peine d'être examinée; car, bien que nous ne soyons pas ecclésiastique, comme elle attaque la roture dont nous avons l'honneur de faire partie, elle nous tient à cœur. On dit communément, sous forme proverbiale :

Au temps passé du siècle d'or,
Crosse de bois, évêque d'or.
Maintenant ont changé les lois :

Crosse d'or, évêque de bois.

Que signifient ces quatre vers? Au temps passé du siècle d'or, c'est-à-dire aux temps primitifs du christianisme, d'où sortait le clergé, si ce n'est des rangs du peuple et du peuple seulement? Dans ce temps-là, la crosse était de bois, mais l'évêque était d'or. Depuis, lorsque les grandes familles se sont substituées à la roture, ont usurpė les fonctions jusqu'alors remplies par les gens du peuple, la crosse a été d'or, mais l'évêque, quel était-il? Lisez le proverbe, il vous répondra; par conséquent, le clergé de haute naissance est donc mal fondé en disant que l'épiscopat perd beaucoup depuis l'introduction de la roture; puisque comme on veut bien nous le dire, l'épiscopat se retrempe dans le peuple comme aux premiers temps du christianisme, nous osons espérer que nous allons revenir au temps passé du siècle d'or; et lors même qu'on n'en reviendrait pas à la crosse de bois, pourvu que l'évêque soit d'or, cela nous suffit; voilà tout ce que nous demandons : il ne nous en faut pas davantage.

Nous aimons ceux qui s'élèvent par leur propre mérite. C'est une faiblesse dont nous ne pouvons nous défendre ;

c'était aussi l'opinion de Fléchier, si nous devons en croire l'anecdote suivante :

Page 170 de l'Encyclopédiana, Paris, Paulin, 1843, on lit ce qui suit: « L'élégant Fléchier 1 était fils d'un fabricant. de chandelles. Un prélat de cour, tout fier de sa naissance, fit sentir à l'évêque de Nîmes qu'il était bien surpris qu'on l'eût tiré de la boutique de ses parents pour le placer sur le siège épiscopal. Fléchier, sortant à regret de sa simplicité ordinaire, dit à son confrère : « Avec cette manière de penser, je crois en effet que, si vous étiez né fils d'un chandelier (marchand de chandelles), vous auriez fait toute votre vie des chandelles. >>

Voici une preuve de modestie d'un autre genre.

On lit dans l'ouvrage intitulé Petit vocabulaire philosophique, 1 vol. in-18, Paris, 1822 :

« L'évêque de Noyon, C*** 2, dont l'orgueil était si ridicule, disait la messe à la campagne dans une chapelle particulière, et, entendant les assistants causer, se tourne et dit : « En vérité, Messieurs, il semble que ce soit un laquais qui vous dise la messe. »

Comme on le voit ce n'était pas Dieu qui était offensé du silence troublé par les auditeurs: c'était monseigneur de C***.

Nous demandons si, quoique ayant occupé le même siége épiscopal, saint Médard, bien que de famille noble et auquel sa vertu, sa piété exemplaire donnèrent de son vivant même une réputation de sainteté, et qui vit, vers l'an 543, le roi Clotaire Ier venir s'humilier à ses pieds et lui demander sa bénédiction, eût fait une pareille observation 3.

1. On entend ici, par élégant, l'élégance du style.

2. François de C......., évêque de Noyon, de 1661 à 1701.

3. Saint Médard était évêque de Noyon du 8 juin 530 à l'an 545.

Après cela monseigneur de C*** voulait-il dire encore que ses prières devaient être plus agréables à Dieu que que celles d'un roturier. On cite bien un M. de Brissac qui appelait l'Éternel le Gentilhomme d'en haut.

N'oublions pas en effet que l'ancienne dynastie travaillait de manière à faire croire à ces messieurs qu'ils étaient réellement des êtres supérieurs, autrement organisés que les autres. Écoutons ce que rapporte à ce sujet Eugène Pelletan, qui dit':

<«< Louis XIV, gentilhomme de naissance, gentilhomme par principe, portait au fond du cœur un mépris tellement forcené pour la roture que, dans un édit contre le duel signé de sa main, il appelait officiellement le bourgeois, ignoble, et punissait l'ignoble de la potence, non pour avoir provoqué un noble, quel noble aurait accepté ce cartel?mais seulement pour avoir chargé un gentilhomme de soutenir sa querelle; cause indigne, cause abjecte, disait l'édit. »

Voilà comment les pères de M. le comte de Chambord et les nôtres ont traversé les siècles, travaillant de concert selon les mœurs et les besoins du temps au développement de notre belle patrie, et pour quelle bienveillante dynastie le clergé s'est fait martyriser pendant la révolution. Nous devons dire du reste que ce n'était pas le clergé plébéien, roturier, qui était coupable; mais celui qui le dirigeait et dont il recevait les ordres. C'est encore en partie cela aujourd'hui. Mais comme le clergé de haute naissance n'augmente pas, nous ne désespérons pas de voir le clergé plébéien se réconcilier avec le peuple. Il est impossible que des hommes instruits veuillent, par esprit d'opposition, continuer de se montrer partisans d'une dynastie qui ne

1. Décadence de la monarchie française, par Eugène Pelletan. 1 vol. in-18. 50 c.

peut que, comme sous la Restauration, faire des grands vicaires de ceux qui sont dignes de l'épiscopat. Sait-on que ce brillant Louis XIV n'a jamais demandé le chapeau de cardinal pour Bossuet parce que celui-ci n'était pas noble? Faites donc encore quelque chose pour une dynastie comme celle-ci. Illustrez donc encore un règne comme celui-là pour en être aussi dignement récompensé.

Mais, par exemple, pendant les saturnales de la régence, le régent a bien demandé le chapeau de cardinal pour un homme, que depuis on a appelé le cardinal Dubois.

Ainsi ce qu'il n'était pas réservé à Bossuet, à Fléchier, à Massillon d'avoir, Dubois l'a obtenu; ne croyez pas du reste que ce soit la faute de la papauté : c'est grâce à la débauche du régent, compagnon de Dubois. Ce dernier menaçait la papauté d'un schisme si on ne lui donnait pas le cardinalat. Pour prévenir le danger, on lui a accordé ce qu'il demandait, non de bon gré, bien entendu, mais ici il a fallu composer.

Quant à Bossuet, l'aigle de Meaux, l'aigle de la France, ou mieux, l'aigle de la catholicité, il n'était pas noble; par conséquent, les grâces du monarque ne devaient pas l'atteindre. C'est même un miracle qu'il soit parvenu à l'épiscopat, ainsi que Fléchier, Massillon et Mascaron, les quatre plus grands orateurs chrétiens qui, avec Bourdaloue, aient illustré le siècle de Louis XIV. Cependant, non-seulement aucun n'a été fait cardinal, mais aucun même n'est parvenu à l'archiépiscopat, quoique le mérite de chacun d'eux fût bien connu, comme on le verra par les lignes qui vont suivre.

On lit ce qui suit dans la biographie du général Beauvais, au sujet de Mascaron :

« Il débuta en 1663 à Angers dans celle (la carrière) de la prédication et parut l'année suivante à Saumur avec tant d'éclat qu'il fallut dresser des échafauds dans l'église

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