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LES SOURCES DU LOIR.

Au sud de Champrond, sur le territoire de la commune du Thieulin, près du chemin d'un village nommé les Corvées était autrefois situé un monastère dont il ne reste plus que des ruines, mais qui existait encore au temps où Sully vivait dans la retraite au château de Villebon, situé à une lieue et demie environ de cet endroit.

La chaussée d'un étang connu sous le nom d'Étang des Abbayes, et dépendant de ce monastère, ayant été détruite par un orage, tous les poissons qui s'y trouvaient s'enfuirent dans celui de la Gatine, situé à la suite de celui des Abbayes (prononcez abbées).

L'étang de la Gatine appartenait à Sully; les moines furent le trouver pour lui demander leur poisson; Sully leur répondit qu'il était en effet disposé à faire droit à leur demande, et que tous ceux qui auraient un capuchon sur la tête seraient pour eux. Les moines, voyant qu'ils n'en pouvaient obtenir d'autre réponse, s'en vengèrent en bouchant avec des matelas les sources qui étaient situées sur leur propriété et qui alimentaient l'étang de la Gatine; depuis lors ces sources ont dû prendre un autre cours, car elles n'ont plus donné d'eau. Comme on sait, dit-on dans le pays, dans quel endroit elles étaient situées, dans un moment de sécheresse, les paysans de la commune de Champrond avaient fait leurs préparatifs et pris toutes leurs dispositions pour les aller déboucher, mais, dans la nuit même qui précéda le jour où ce travail devait être entrepris, la pluie étant venue en abondance, on renonça au moins pour un certain temps à l'entreprendre 1.

1. Au moment de mettre sous presse, l'auteur apprend de son père que des fouilles pour les retrouver ont été entreprises, il y a environ deux ans, au sud du hameau de Beaurepaire, dépendant de la commune de Champrond, et qu'il n'en a été retrouvé qu'une petite.

Près du monastère dont nous venons de parler est située une ferme nommée la ferme de Saint-Laurent, qui en était, nous le supposons, autrefois dépendante et dans laquelle tous les ans se tient, à la Saint-Laurent, qui en est le patron, une assemblée comme il ne s'en tient ordinairement que dans les villages ou les villes.

Il existe dans la cour de cette ferme un puits qui présente un phénomène assez singulier, lorsqu'il doit pleuvoir, tout le tour de l'orifice devient humide, et l'eau suinte de tous côtés.

LE PUITS DE SAINT-DENIS-DES-PUITS.

Il y a dans le cimetière attenant à l'église de SaintDenis-des-Puits, village situé près du château de Villebon un puits dont l'eau préserve de la rage les chiens et certains autres animaux mordus par des chiens enragés, si l'on peut, dans les quarante-huit heures qui ont suivi la morsure, leur verser de l'eau de ce puits sur le corps. Il faut ensuite tremper également du pain dans cette eau et en faire manger pendant neuf jours à jeun aux animaux mordus; ce préservatif est efficace, et il n'y a pas d'exemple que des animaux mordus et auxquels ce préservatif appliqué à temps aient jamais été atteints de rage; quelquefois ils ont ce que, dans le pays, on nomme la rage mue dont ils sont incommodés pendant quelques jours après lesquels ils reviennent à la santé.

Nous maintenons pour vraic cette assertion, bien que maintes fois elle ait rencontré de nombreuses incrédulités.

Il est toutefois utile de remarquer que nous disons que l'eau de ce puits a le don, lorsqu'on s'y prend à temps, de préserver les animaux de la rage, mais non de guérir ceux qui en sont atteints. Si même on laisse écouler plus de quarante-huit heures entre la morsure et le traitement, le préservatif devient impuissant et de nul effet. On traite égale

ment ainsi des troupeaux entiers de moutons, des volailles, des lapins; on place ordinairement ces derniers dans des paniers que l'on descend dans le puits où les animaux sont baignés.

JEAN-BAPTISTE THIERS.

Jean-Baptiste Thiers, curé de Champrond, au diocèse de Chartres, avait composé un petit ouvrage critique ayant pour titre la Sauce Robert (1676) ou Avis salutaire à messire Jean Robert, grand-archidiacre de Chartres. Il s'agissait de quelque superstition que Thiers attaquait avec avantage. L'official décréta l'auteur de prise de corps. Un huissier vint avec une brigade de maréchaussée, pour exécuter le décret; il trouva Thiers fort tranquille dans sa cure. Le pasteur le reçut très-bien, lui et sa brigade, les retint à dîner et leur promit de les suivre ensuite de bonne grâce: il leur tint parole. Le dîner fini, il monta à cheval et partit gaiement avec ses convives. On était en hiver, et, la glace portant, on passe le long d'un étang qui était entièrement pris d'un bout à l'autre, et les cavaliers de maréchaussée furent fort étonnés de voir leur prisonnier tournant au plus court, prendre sa course, leur échapper en traversant l'étang glacé. Il avait eu soin de faire ferrer son cheval à glace pendant le repas.

Il se retira dans le diocèse du Mans, appela comme d'abus de la procédure criminelle de l'officialité, et fut déchargé de l'accusation. L'évêque du Mans (Lavergne de Tressan) l'accueillit comme un savant distingué, et lui donna la cure de Vibraye; et, par un jeu de mots qui faisait allusion au nom de son protégé, il écrivit à l'évêque de Chartres, pour le remercier de lui avoir envoyé le tiers de son diocèse.

LETTRE

De M. Fontaine, curé de Saint-Pierre de Belême, à M. le comte de Buffon, en date du 28 janvier 1778, insérée dans les œuvres de Buffon.

On m'apporta, dit M. Fontaine, en 1763, une buse prise au piége elle était d'abord extrêmement farouche et même cruelle; j'entrepris de l'apprivoiser, et j'en vins à bout en la laissant jeûner et la contraignant de venir prendre sa nourriture dans ma main. Je parvins par ce moyen à la rendre très-familière; et, après l'avoir tenue enfermée pendant environ six semaines, je commençai à lui laisser un peu de liberté, avec la précaution de lui lier ensemble les deux fouets de l'aile. Dans cet état, elle se promenait dans mon jardin, et revenait, quand je l'appelais pour prendre sa nourriture. Au bout de quelque temps, lorsque je me crus assuré de sa fidélité, je lui ôtai ses liens, et je lui attachai un grelot d'un pouce et demi de diamètre audessus de la serre, et je lui appliquai une plaque de cuivre sur le jabot, où était gravé mon nom; avec cette précaution, je lui donnai toute liberté. Elle ne fut pas longtemps sans en abuser, car elle prit son essor et son vol jusque dans la forêt de Belême. Je la crus perdue; mais quatre heures après, je la vis fondre dans ma salle qui était ouverte, poursuivie par cinq autres buses qui lui avaient donné la chasse, et qui l'avaient contrainte à venir chercher son asile..., Depuis ce temps, elle m'a toujours gardé fidélité, venant tous les soirs coucher sur ma fenêtre. Elle devint si familière avec moi qu'elle paraissait avoir un singulier plaisir dans ma compagnie. Elle assistait à tous mes dîners sans y manquer, se mettait sur un coin de la table, et me caressait très-souvent avec sa tête et son bec, en jetant un petit cri aigu qu'elle savait pourtant quelquefois

adoucir; il est vrai que j'avais seul ce privilége. Elle me suivit un jour, étant à cheval, à plus de deux lieues de chemin en planant... Elle n'aimait ni les chiens ni les chats; elle ne les redoutait aucunement. Elle a eu souvent vis-àvis de ceux-ci de rudes combats à soutenir; elle en sortait toujours victorieuse. J'avais quatre chats très-forts que je faisais assembler dans mon jardin en présence de ma buse; je leur jetais un morceau de chair crue; le chat qui était le plus prompt s'en saisissait, les autres couraient après. Mais l'oiseau fondait sur le corps du chat qui avait le morceau, et avec son bec lui pinçait les oreilles, et avec ses serres lui pétrissait les reins de telle force que le chat était forcé de lâcher sa proie. Souvent un autre chat s'en emparait dans le même instant; mais il éprouvait aussitôt le même sort, jusqu'à ce qu'enfin la buse, qui avait toujours l'avantage, s'en saisît pour ne pas la céder. Elle savait si bien se défendre, que, quand elle se voyait assaillie par les quatre chats à la fois, elle prenait son vol avec sa proie dans ses serres, et annonçait par son cri le gain de sa victoire. Enfin les chats, dégoûtés d'être dupes, ont refusé de se prêter au combat.

Cette buse avait une aversion singulière; elle n'a jamais voulu souffrir de bonnet rouge sur la tête d'aucun paysan; elle avait l'art de le leur enlever și adroitement, qu'ils se trouvaient tête nue sans savoir qui leur avait enlevé leur bonnet. Elle enlevait aussi les perruques sans faire aucun mal, et portait ces bonnets et ces perruques sur l'arbre le plus élevé d'un parc voisin, qui était le dépôt ordinaire de tous ses larcins... Elle ne souffrait aucun autre oiseau de proie dans le canton; elle les attaquait avec beaucoup de hardiesse et les mettait en fuite. Elle ne faisait aucun mal dans ma basse-cour. Les volailles, qui, dans le commencement, la redoutaient, s'accoutumaient insensiblement avec elle. Les poulets et les petits canards n'ont jamais éprouvé

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