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quantité, et que presque chacun retire de ses fouilles des marbres de toute espèce, soit dans la ville ou dans les environs, pour bâtir ou pour toute autre cause ; je veux, d'après ces considérations, que vous présidiez à toutes les excavations, puisque je vous ai donné la direction de cet édifice, afin que vous achetiez dès ce moment, jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, tous les marbres et toutes les pierres que vous jugerez convenir à la fabrique de ce temple, dans Rome ou hors de cette ville, jusqu'à la distance de dix milles. En conséquence, j'ordonne à tous, de quelque état ou condition qu'ils soient, nobles, ou élevés en grandes, moyennes ou petites dignités, et de la plus petite profession, qu'ils aient aussitôt à vous donner connaissance, comme ayant la surintendance de tous ces objets, de tous les marbres ou pierres de tous genres qui seront excavés dans l'espace de terrain que j'ai fixé. Celui qui ne le ferait pas au bout de trois jours sera condamné, d'après votre jugement, a payer une

amende de cent à trois cents écus d'or.

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J'ordonne en outre, d'après ce qui m'a été porté, que les marbriers se servent et taillent inconsidérément des marbres antiques, sur lesquels sont gravées des inscriptions qui contiennent le plus souvent quelque illustre souvenir méritant d'être conservé, soit pour la culture des lettres, soit pour l'élégance de la langue latine ; j'ordonne, dis-je, à tous ceux qui exercent à Rome l'art de marbrier, qu'ils ne puissent, sans votre ordre ou

sans votre permission, avoir la hardiesse de mettre en pièces ou de tailler aucune pierre portant une inscription, sous la même peine lorsqu'ils ne se conformeront pas à ce que je commande.

NOTE DU TRADUCTEUR. Si l'ordonnance sage de Léon X eût toujours été maintenue en vigueur, on n'aurait pas à regretter tant de monumens disparus depuis son pontificat. On n'aurait pas détruit l'arc de triomphe de Marc-Aurèle, parce que, est-il dit dans une inscription que nous avons lue, il gênait un peu la voie publique. On demande s'il ne fallait pas plutôt abattre les maisons voisines que de ruiner l'un des plus beaux monumens de l'antiquité. Il en est ainsi du plan de l'ancienne Rome, gravé sur des tables de marbre servant autrefois de pavé au temple de Rémus et de Romulus, que l'on plaça ensuite contre l'un des escaliers du Capitole, sans pouvoir conserver l'ordre des quartiers et des monumens qui y étaient. On a détruit le Colysée pour bâtir le palais Barberini: ce qui a fait dire avec raison : Quod non fecerunt barbari, fecerunt Barberini. On a abattu des temples antiques pour faire des églises..... Il faudrait citer mille antres exemples peu honorables pour les destructeurs modernes de l'ancienne Rome.

Au comte BALTHASAR CASTIGLIONI.

De Rome......

M. LE COMTE, j'ai fait des dessins de plusieurs manières sur l'invention de V. S., et je satisfais à tous si tous ne sont pas mes adulateurs ; mais je ne satisfais pas mon jugement, parce que je crains de ne pas satisfaire le vôtre. Je vous les envoie : que V. S. fasse choix de quelqu'un d'entre eux, s'il y en a qui soit digne de votre estime. Le pape, en me faisant beaucoup d'honneur, vient de me mettre un grand poids sur les épaules; il me charge du soin de la fabrique de Saint-Pierre : j'espère bien cependant ne pas y succomber; et cela, d'autant plus que

le modèle que j'en ai fait plaît à sa sainteté, et reçoit les louanges d'une quantité de beaux-esprits. Mais, moins facile, moins indulgent envers moimême, je m'élève plus haut par la pensée. Je voudrais trouver les belles formes des édifices antiques; je ne sais si mon vol sera celui d'Icare. Vitruve me donne de grandes lumières, mais non pas autant que je le désirerais.

Quant à ma Galathée, je me croirais un grand maître, s'il y avait dans cette fresque la moitié de toutes les choses que V. S. m'écrit. Mais je reconnais dans ses expressions l'affection qu'elle a pour moi; et je le dis avec cette condition, parce que, si V. S. se fût trouvée avec moi, elle m'aurait aidé à faire un meilleur choix. Mais, manquant de bons juges et de belles femmes, je me sers d'une certaine idée qui me vient dans l'esprit : je ne sais si celle-ci a en elle quelque excellence d'art; mais je sais bien que je me fatigue beaucoup pour l'avoir. Je suis aux ordres de V. S.

RAPHAEL SANZIO.

NOTE DU TRADUCTEUR. Toujours épris d'admiration pour le divin Raphaël, nous ne pouvons assez nous plaindre du destin cruel qui l'enleva subitement à la gloire, à l'amour du monde, lorsque, après avoir surpassé plutôt qu'égalé tout ce qui exista jamais de peintres célèbres, il venait de prouver qu'il savait se servir du pinceau et du compas avec une égale supériorité. Le modèle de la coupole de Saint-Pierre n'était pas son coup d'essai. Déjà Florence et Rome avaient vu s'élever des palais, des jardins, des fontaines et d'autres embellissemens d'après ses dessins : tous portent la même empreinte des lignes et des compositions les plus nobles et les plus gracieuses. Ses grands talens dans la peinture ont fait cublier ce qui aurait suffi à la réputation d'un grand architecte. D'ailleurs, les grands artistes d'alors possédaient presque toujours la pein

ture, la sculpture et l'architecture. On ne doit pas ignorer que Raphaël fut aussi sculpteur. Il fit le modèle et termina la belle figure de Jonas, placée dans une chapelle de l'église de la Madona du peuple, à Rome. C'est dire que c'est l'une des plus parfaites sculptures modernes. On verra, dans ce Recueil, une lettre du comte Castiglione, adressée de Mantoue à Perrin del Vaga, afin qu'il cherche à faire pour lui l'acquisition d'un enfant en marbre, sculpté par Raphaël.

Quoi qu'il en soit, Raphaël ne songea à prendre le titre d'architecte que lorsque Léon X lui eut donné, par un bref, la direction générale des travaux de Saint-Pierre. Il s'occupa plus particulièrement alors de l'architecture, et exposa publiquement le modèle du dôme et des autres dépendances de ce temple. On voit que ce modèle plut à Leon X, ainsi qu'à un très-grand nombre de connaisseurs distingués. Tout autre que Raphaël, content d'avoir obtenu de pareils suffrages, se serait reposé sur un tel succès. Le seul Raphaël n'était pas satisfait de son ouvrage. Je cherche, écrivait-il à son ami, à m'élever plus haut par la pensée.............. Et c'est au moment où son génie allait ceindre une double couronne que la mort vint tout à coup lui ravir un triomphe de plus, et glacer sa pensée et sa main divine pour jamais!.....

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Michel-Ange n'était pas homme à marcher sur les traces du talent d'autrui. Plus d'une fois il avait manifesté sa jalousie...... Il n'imita pas le procédé généreux du chevalier Bernin envers Perrault..... Le modèle admiré de Raphaël, qui, mécontent de son invention, cherchait de plus hautes conceptions dans son génie, dont on pouvait tout se promettre, fut oublié. Léon X eut des successeurs, pendant le règne desquels Michel-Ange éleva à sa gloire un monument qui devait appartenir à celle de Raphaël.

Si l'architecture peut se passer de grâces dans sa composition, et appuyer ses bases sur la force seule, Michel-Ange ne laisse rien à désirer; mais si, comme la peinture et la sculpture, l'architecture a besoin de réunir la force à la grâce ( ainsi que les Grecs nous en ont toujours donné l'exemple), pour atteindre à toute la perfection de cet art, nous regrettons que Raphaël n'ait pu suivre ses projets et les exécuter. Nous admirons Michel-Ange lorsque nous aurions voulu admirer Raphaël ; parce que l'un de nos articles de foi fondamentaux en matière de beauxarts, est: Hors de la gráce, point de salut.

Au cardinal DE SAINTE-MARIE IN PORTICO, à Rubera.

Le 19 avril 1516, à Rome. J'APPRENDS avec beaucoup de chagrin que V. S. a la fièvre à Rubera, etc......

Raphaël, qui vous offre ses respects et se recommande à vous, a fait le portrait de notre poëte Tebaldeo si ressemblant, qu'il n'est pas aussi semblable à lui-même qu'il l'est dans ce tableau. Pour moi, je conviens que je ne vis jamais une pareille chose. V. S. peut s'imaginer ce qu'en dit et ce qu'en pense Tebaldeo: en vérité, il a grandement raison.

Le portrait de M. Balthasar Castiglione, ou celui de notre duc d'Urbin, de bonne et glorieuse mémoire, paraîtraient être de la main d'un élève de Raphaël, pour ce qui appartient à la ressemblance, en comparaison de celui-ci. Je lui porte une si grande envie, que je pense aussi à faire peindre le mien. Tandis que j'étais à vous écrire, est arrivé Raphaël, devinant, je crois, que je parlais de lui: il me dit d'ajouter que vous lui envoiez les autres histoires qu'on doit peindre dans v .tre petit palais, c'est-àdire, les sujets par écrit, parce que ceux que vous lui avez mandés seront achevés cette semaine. Ma foi! ce n'est pas une plaisanterie ; voilà que M. Balthasararrive aussi en ce moment: il me dit de vous écrire qu'il a résolu de demeurer cet été à Rome, afin de conserver cette bonne habitude; cela vient aussi de ce que M. Antonio Tebaldeo le veut absolument.

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