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Du même au roi d'Angleterre.

MAJESTÉ sacrée! mon génie, accompagné du tableau de Vénus et d'Adonis, lequel, je l'espère, sera vu par votre grandeur avec la même satisfaction qu'elle avait coutume de témoigner à son serviteur Titien, vient se réjouir avec votre majesté du nouveau royaume que Dieu lui a accordé. J'ai mis les figures de manière qu'elles soient opposées à celle de la Danaë, afin que l'appartement dans lequel elles seront placées en soit plus agréable.

J'aurai bientôt l'honneur d'envoyer à votre majesté la poésie de Persée et d'Andromède, qui aura une manière d'être vue différente des deux autres. Il en sera ainsi de Médée et de Jason, que j'espère faire partir avec l'aide de Dieu. J'y joindrai un tableau de dévotion auquel je travaille depuis dix ans, dans lequel j'espère que votre sérénité verra toute la force de l'art dont est capable votre serviteur Titien. Cependant il prie le nouveau grand roi d'Angleterre de daigner se rappeler que son peintre indigne vit dans l'espoir d'être le serviteur d'un si grand et si bon maître; espérant avoir acquis de la même manière les bonnes grâces de la reine trèschrétienne, son auguste épouse. Que Dieu conserve la reine avec votre majesté pendant plusieurs siècles, afin que les peuples, gouvernés et régis par vos saintes et pieuses volontés, se conservent heureux!

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A M. MARC MANTOVA.

Vicence, 7 janvier 1553.

Je ne puis m'offrir moi-même comme un gage de mon éternelle reconnaissance, pour les louanges que vous donnez à mes faibles talens. Je vous envoie deux médailles : l'une est la première que vous désirez, et l'autre est celle que j'avais dans les mains lorsque je vous la montrai avec beaucoup d'autres, afin de ne pas me tromper. J'ai fait vos recommandations à C. M. Antonio, qui vous aime et vous estime autant que le mérite une personne aussi rare que vous l'êtes. Je n'oubliai pas de saluer de votre part l'Arétin, comme vous m'en aviez chargé; il en fait autant pour moi; en vous réitérant mes offres de service, je vous baise la main.

ALEXANDRE VITTORIA, statuaire.

NOTE DU TRADUCTEUR. Marc Mantova était un médecin célèbre qui fit sculpter à l'Ammanato la statue colossale que l'on voit à Padoue' sa patrie. Nous n'avons inséré cette lettre, d'ailleurs peu intéressante, qu'afin de saisir l'occasion de parler de Vittoria, très-habile statuaire, dont on voit de beaux ouvrages à Venise, à Vérone et ailleurs.

A M. ANTOINE GALLO, à Urbin.

Rome, 20 août 1553.

Je ne répondis pas, samedi, à la lettre de V. S., parce que j'attendais de voir paraître la vie de Michel-Ange faite par Ascanio Condivi, l'un de ses élèves, dans laquelle on parle spécialement de l'affaire du tombeau de Jules II, dont je vous ai

le

entretenu, et des justifications qu'emploie Buondroti. V. S. verra ce que dit cet auteur, et s'il lui paraît qu'elles soient suffisantes pour soutenir sa cause, avec ce que vous croirez devoir y ajouter en conservant le respect que l'on doit à un prince, tel que duc d'Urbin. Veuillez bien en faire la proposition à son excellence; quant à moi, je ne fonderai pas cette cause seulement sur la justice, par ce qu'à la rigueur on pourrait alléguer beaucoup de choses contre le duc d'Urbin. Les plaintes que son excellence vous a faites contre Michel-Ange sont fort justes et en partie sans réplique. J'avouerais, comme il l'avoue d'une certaine manière, ses torts d'avoir entrepris d'autres travaux, étant obligé à faire celui du duc, malgré l'empêchement qu'y ont mis les papes. Je demanderais d'une certaine manière le pardon de cette erreur, et une grâce que les grands font ordinairement aux hommes d'un aussi grand mérite que Michel-Ange, afin de le gagner, puisqu'il veut absolument s'en tenir à son état, en le ménageant le plus qu'il sera possible pour l'avantage de notre siècle. Je puis vous assurer qu'il éprouve tant de peine d'avoir encouru la disgrâce de son excellence, que cela seul pourrait abréger ses jours. Maintenant, outre les raisons qu'on peut alléguer en sa faveur, voyez encore à lui obtenir son pardon de son excellence, qui se montrera en cela un seigneur généreux, comme il l'a été dans toutes ses actions. En le faisant, non-seulement il prolongera les jours de cet homme extraordinaire, mais ce

procédé noble le consolera beaucoup, et l'attachera pour jamais à son excellence: cela ne me paraîtrait pas être une petite acquisition, puisque jouissant d'une si belle vieillesse, l'on pourrait encore en obtenir quelque ouvrage digne d'une éternelle mémoire. C'est la compassion qui me fait parler ainsi pour ce vieillard respectable, avec le désir que j'ai que son excellence veuille acquérir cette louange.

Je m'en remets au reste à la générosité ainsi qu'à la prudence de V. S., dont je la remercie, autant qu'il m'est possible, comme des bons offices et de la bonne volonté qu'elle a bien voulu mettre à cette négociation, et dans toute autre circonstance. Je la prie de compter aussi sur les faibles moyens que j'ai de la servir en toute occasion. Il n'y a que Dieu qui puisse savoir le chagrin que m'a causé la mort du pauvre duc Orazio; il ne peut être égal que par la tristesse et la compassion que j'éprouve pour votre si digne et si excellente duchesse, dans un aussi facheux événement. Si vous croyez qu'après un coup aussi affreux, V. S. puisse lui offrir mes condoléances, je vous prie de les lui offrir en mon nom, et de vous en affliger amèrement avec elle. Dieu veuille consoler son excellence, et nous tous qui sommes ses serviteurs. Prenez, je vous en conjure, tous les soins de votre conservation.

ANNIBAL CARO.

A M. ANTOINE GALLO, à Urbin.

Rome, 17 septembre 1553.

QUE V. S. ne pense pas que, si je lui réponds aussi tard, ce soit pour l'imiter; car cela ne vient que d'empêchemens très - légitimes. Mais ne parlons point d'excuses, puisqu'en ce point nous ne nous devons rien. Maintenant, je puis vous répondre que Michel-Ange vous est très-obligé des bons offices que vous avez daigné lui rendre auprès de son excellence; mais, comme son habitude est de ne jamais écrite, je vous remercie tant de sa part que de la mienne, en vous priant de continuer à le disculper, et de lui acquérir la grâce qu'il désire, autant pour la consolation de ce bon vieillard que pour la louange qui en rejaillira sur votre prince, lequel en sera certainement comblé de louanges et célébré par tout le monde.

V.S. a examiné ses justifications; et, de mon côté, je vous ai de plus ajouté les raisons qui m'ont paru les plus convenables. Je sais bien qu'elles peuvent être débattues; mais je ne puis croire qu'un seigneur, aussi sage et aussi magnanime que le vôtre, ne les ait pas trouvées bonnes, ou que du moins il n'ait pas voulu les absoudre du défaut dont on les accuse; et cela, avec d'autant plus de raison, que l'on ne peut accuser (selon ce qu'il me paraît) Michel-Ange d'aucune chose dont ne soient plus coupables, en effet, les deux cardinaux chargés de l'exécution de ce tombeau. Les agens de ce temps-là consentirent à le

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