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les lieux que mon ami naguère avait habités. J'allai le redemander à tous ceux qui l'avaient aimé. Je le cherchais sur les bords du beau golfe de la Spezzia, retraite inspiratrice dont il m'avait vanté les charmes. De là je fus à Carara, d'où j'emportai ses traits sculptés par une main savante. Ravi de posséder ce don précieux, je vole à Massa, dont les environs pittoresques, peu distans de la mer, s'annoncent par des montagnes sur lesquelles l'olivier se mêle aux châtaigniers antiques; je pénètre dans cette ville avec une émotion qu'on ne peut décrire; je n'y cherchais pas le luxe de ses palais ni celui des beaux-arts...... c'était la dernière demeure de mon ami.... Un curé, pasteur vénérable qui avait été le sien, m'y accompagne, me la montre, et me dit : « Voilà son der nier séjour sur la terre! Voilà des vases de fleurs maintenant abandonnées, dont sa main..... » A ces mots, je me précipite dans ses bras, et nos larmes coulèrent, comme les miennes coulent encore en traçant ce faible monument de mes regrets et d'une perte irréparable......

Les Odes de Jean Fantoni, mort à quarante-trois ans, ont été imprimées plusieurs fois en Italie : il avait été professeur de belles-lettres à l'Université de Pise.

Lettre ou Bref adressé à JÉRÔME MAFFEI, citoyen romain, par le cardinal ARMELLINO DE' MEDICI.

Rome, dans la chambre apostolique, le 18 décembre 1521.

Le pape Jules II, d'heureuse mémoire, ayant LE reçu de vous une certaine statue ou image de Cléopâtre, sculptée en marbre avec un art admirable, sa sainteté la fit placer parmi les autres statues qui sont dans le palais appelé Belvedere. Peu de temps avant sa mort, elle avait promis de vous donner une récompense convenable, ainsi que nous le voyons écrit dans les livres de compte de Julien Leni et de maître Bramante, alors surintendant de la fabrique dudit palais. Le pape Léon X, d'heureuse mémoire, avait aussi, de son vivant, promis plusieurs fois de

faire observer et exécuter la promesse qui vous avait été faite par le même Jules. Cependant, ni avant ni après la mort des susdits Jules et Léon, vous n'avez pu rien toucher de cette promesse : vous nous faites supplier humblement, afin que nous daignions pourvoir à votre indemnité. Nous, ayant égard à votre demande, avec l'autorité de notre office de camerlingue, nous vous accordons et abandonnons la gabelle, ou douane des brebis et des chèvres qui paissent et paîtront, dans leur temps, sur votre domaine appelé de Castro arvory, situé dans le district de Rome; laquelle gabelle due avait coutume d'être payée tous les ans à la chambre apostolique : nous vous l'abandonnons, dis-je, pendant quatre années, pour la somme de quatre cents écus d'or, afin que vous, vos héritiers et successeurs en jouissent à titre de satisfaction ou de récompense de ladite statue. En exécution de la présente, nous commandons à tous les douaniers de la chambre apostolique maintenant en exercice, et devant l'être à l'avenir, que, sous aucun prétexte, ils n'aient à vous troubler dans ladite concession permise.

NOTE DU TRADUCTEUR. L'auteur inconnu de la belle Cléopâtre eût-il jamais pu se douter que son ouvrage serait un jour échangé contre un droit de pâturage établi par les papes dans la campagne de Rome, et qu'une statue colossale en marbre serait cédée pour un prix aussi vil que celui de deux mille quatre cents francs! O vicissitudes humaines! combien vous êtes fréquentes et bizarres!

Au cardinal JULES DE MÉDICIS.

Rome, le 7 mai 1522.

QUOIQUE les temps présens soient tels que ma demande puisse paraître importune, cependant l'attachement que j'ai pour tous mes amis m'oblige de supplier V. S. Rme, de m'accorder une chose qui, je le pense, ne doit vous causer aucun embarras. II s'agirait de rendre un très-grand service à l'un des serviteurs de V. S., pour lequel j'ai beaucoup d'attachement. Il reste dû à Jules Romain, élève de Raphaël, d'Urbin, une certaine somme qu'il ne veut ni ne demande pas en ce moment, pour le tableau que son maître a fait pour V. S. Rme.; il la demanderait pour sa sœur, à laquelle il trouverait un mari, s'il avait le moyen de lui assurer une dot. Jules Romain désirerait que V. S. voulût, dans sa clémence, faire connaître à quelle époque elle voudrait lui donner cet argent, parce qu'encore qu'il ne l'eût pas à présent, mais d'ici à six, huit ou dix mois, le jeune homme qui est disposé à épouser la sœur de Jules n'en serait pas empêché, s'il avait la certitude d'avoir cette somme dans le temps qui serait convenu. Si V. S. Rme. daigne accorder cette grâce à Jules, qui d'ailleurs vous est si dévoué, outre l'obligation qu'il en conservera, la mienne serait éternelle. J'ai pris aussi la liberté d'adresser ma recommandation à V. S. Rme., pour satisfaire à la bonne mémoire de Raphaël, que j'aime autant à présent que je le faisais quand il était vivant. Je sais

qu'il désirait que cette sœur de Jules fùt mariée. Je me tairai, pour baiser humblement les mains de V. S. Rme.

BALTHASAR CASTIGLIONI.

NOTE DU TRADUCTEUR. Si la tendre amitié du comte Castiglione pour Raphaël était moins connue, cette lettre en serait un bien sensible témoignage. Quelles expressions simples et touchantes! Il ne survit à son ami que pour continuer de rendre à ses élèves, à leurs parens, ces mêmes soins, cette même sollicitude paternelle que le divin Raphaël ne pouvait plus avoir pour eux..... Quelle devait être sa douleur lorsqu'il fixait ses regards attendris sur les productions admirables de son pinceau! Que de souvenirs déchirans! Raphaël meurt à trente-sept ans, victime d'un ignorant médecin! Le nom de cet homicide inconnu aujourd'hui tranche sans pitié le fil des plus beaux jours, des plus brillantes destinées, que les Parques inexorables eussent épargnés ; il prive en un instant le monde de son plus bel ornement, de mille chefsd'œuvre, demeurés ensevelis à jamais avec lui! C'en est fait; son fer destructeur a détruit l'un des ouvrages les plus parfaits de la Divinité!...

Lorsque le comte Castiglione écrivait cette lettre, il y avait une année et demie que le grand Raphaël avait terminé sa carrière prématurée. La blessure dont son cœur était atteint, était récente; et sans doute elle ne se ferma que lorsqu'il alla se réunir à son ami, pour partager avec les Léon X, avec les Bembo et les Jules Romain son immortalité.

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A M. ANDRÉ PIPERARIO, secrétaire apostolique, à Rome.

Mantoue, le 22 janvier 1523.

Je vous rends grâces, etc. . . .

Je joins à la lettre que je vous écris celle que j'adresse à Jules Romain, en le priant de faire en sorte de me faire avoir un tableau de la main de Raphaël, qui appartenait à maître Antoine de S. Marino: cela ne me vint jamais à l'esprit tandis que j'étais à Rome.

Je vous prie d'en parler aussi vous-même à Jules; et, s'il était nécessaire de débourser quelque somme, ne manquez pas de le faire pour moi : donnez-m'en avis et je vous la remettrai de suite. J'éprouve une douleur extrême d'apprendre que la peste continue ses ravages, comme elle le fait; tant qu'elle existera, mon intention n'est pas de venir à Rome. Je n'ai rien autre chose à vous dire, sinon que je me recommande toujours à vous.

BALTHASAR CASTIGLIONI (1).

min

A JULES, peintre', à Rome.

Mantoue, le 12 février 1523.

MON très-cher Jules, je n'ai en, jusqu'à ce moment, aucune occasion commode pour t'envoyer les deux petites coiffes. Je te les fais passer avec les meilleurs moyens que j'ai pu trouver, et selon ce que tu m'avais écrit. Vois si tu veux avoir quelque autre chose de ces contrées. Je n'ai rien autre chose à te dire, sinon que je me porte bien, grâces à Dieu! et que je désire te voir. Je ne répéterai pas que j'ai donné l'ordre à M. André Piperario de te remettre de l'argent pour acheter quelque chose pour moi, puisque je l'ai déjà écrit. Je ne te parlerai pas non plus du désir que j'ai d'avoir le tableau qui appartint à

(1) Balthasar, comte Castiglione, fut auteur du livre fameux intitulé le Courtisan, et ambassadeur du duc de Mantoue, à la cour de Rome.

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