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majesté, nous a remis vos lettres, et nous demande avec beaucoup d'instance que nous accordions pendant trois mois la présence de notre aimé fils le chevalier Bernin. Quoique nous ayons besoin de ses soins pour la construction actuelle des portiques du Vatican, et que sa personne nous soit très-né- · cessaire pour les autres travaux de la fabrique de Saint-Pierre, cependant nous l'accordons très-volontiers, par la grandeur de notre charité envers vous. Elle triomphe de tous les obstacles. Nous accordons aussi à votre majesté notre bénédiction apostolique, essentiellement prise dans toute l'affection de notre cœur paternel.

Donné à Rome, à Sainte-Marie-Majeure, sous l'anneau du pécheur, le 23 avril 1665, l'an 11 de notre pontificat.

A M. LAURENT MAGALOTTI, à Florence.

Bergame, 30 septembre 1665.

J'AI appris avec plaisir les grands honneurs et les présens que le chevalier Bernin a reçus du roi de France. Vous m'avez si bien décrit les détails du palais que fait élever ce souverain, et cela avec les termes les plus convenables à l'architecture, qu'un architecte ne le ferait pas mieux. Mais je n'en suis point étonné, parce que V. S. illustrissime a des connaissances très-étendues sur les arts. Je suis de votre sentiment pour ce qui regarde l'ouvrage en sculpture du Bernin. La statue du roi de France ressemblera à un poussin qui sort de l'œuf,

et je ne puis m'imaginer pourquoi il n'a pas fait la statue tout entière.

Que le Tacca (1) ait dit des mensonges sans fin, je le crois, parce que Bernin, qui est un plaisant, l'aura fait chanter et lui en aura fait compter par milliers.

Je vous prie de me savoir à dire en confidence si la tête de Jean-Baptiste Morone a plu au prince Léopold, et s'il veut la garder ou non, parce que, s'il ne la voulait pas, je vous prierais de la mettre avec mes autres effets. Dites-moi aussi, je vous prie, ce que le Bernin pense de mes tableaux. Ne vous fiez pas pour cela à un seul, mais à quelques personnes qui se trouvaient dans les appartemens lorsqu'il y a été. C'est tout ce que je désire.

J'ai souvent réfléchi à la description que V. S. m'a faite de la fabrique du Louvre, et je trouve que, faire de grands pilastres qui, partant d'enbas, aillent jusqu'au haut de la fabrique, et faire une arcade d'un pilastre à un autre, c'est-à-dire, un dessous et l'autre dessus, c'est faire ce qu'avait fait Pietro di Cortona. Le Bernin n'a fait qu'y ajouter seulement les petites fenêtres dans la corniche. D'après cela, je crois qu'il y a mis peu du sien. Je finis, etc.

(Cette lettre est anonyme.)

(1) Ferdinand Tacca, sculpteur et architecte.

:

Au même.

Rome, 26 janvier 1666.

LORSQUE je croyais que la diabolique saison actuelle allait finir, elle a recommencé de plus belle depuis quatre jours. Le froid de cette année a dépassé sa vilaine coutume, et plus d'une fois il m'a fait appréhender la mort. Ma tête se détend à la chaleur et se tempère; tandis qu'au froid elle est réduite à craindre une chute imprévue, et elle dit à la vie Bonne nuit ; à nous revoir aux bords de l'Acheron. J'ai souffert pendant deux mois des douleurs dans la tête, malgré le soin de ne manger que de la volaille, et mes pieds sont toujours comme deux morceaux de glace, magré le bienfait des caleçons qui me sont venus de Venise. Le feu ne s'éteint jamais dans mon appartement. Plus soigneux que ne l'était le chevalier Cigoli, il n'y a pas le plus petit trou, la plus petite fente dans ma maison, qui ne soient bouchés tous les jours. Avec tout cela, je ne puis pas me réchauffer: ni les flambeaux du Cupidon, ni les embrassemens des Phrynés ne pourraient le faire. Je parle de tout autre chose que de pinceaux; les toiles sont tournées du côté du mur; mes couleurs sont séchées et sont devenues comme de la pierre. L'on ne voit autre chose chez moi que des cheminées, des brasiers, des chauffe-pieds, des gants fourrés, des chaussons de laine, des bonnets doublés de poil, et autres choses semblables. Dans le fait, mon ami, j'ai perdu assez

de ma chaleur. Vous ne le croirez pas, j'ai été réduit à passer des jours entiers sans parler; et cette ardeur, si vive autrefois, je la regarde comme tout-à-fait éteinte. Malheur à moi, mon ami, si je me trouvais dans la nécessité de peindre par besoin, je serais forcé de mourir à ce jeu-là, ou de gåter le métier. Si vous me demandez à quoi je m'occupe pendant les mois d'hiver, je vous dirai que, pendant les jours sereins, je me promène seul, comme un fou; je vais revoir toutes les solitudes de ce pays; et, lorsqu'il fait mauvais temps, je demeure fermé chez moi; je marche comme un forcené, ou bien je lis un livre, ou bien je pense plus que je ne parle. Il ne se passe pas de semaine qu'on ne me demande des tableaux. Voyant que je n'en ai pas, ou que je ne travaille pas, quelques-uns se permettent de me gronder d'une manière extraordinaire; je les laisse dire.

Mais parlons de choses moins tristes. J'ai été passer, ce matin, deux heures avec notre Francesco qui demeure dans mon quartier. Il terminait un paysage, et je l'ai aidé en plusieurs choses, comme je l'avais fait dans une autre ces jours derniers. Je lui rappelle toujours qu'il peut se prévaloir de moi en tout ce qui peut lui être utile, puisque vous me l'avez recommandé. Son caractère ne me déplaît pas; sa vocation est certaine, pourvu toutefois qu'il veuille s'appliquer assidûment, et ne pas se contenter de ce qu'il sait.

Le chevalier Fabroni est venu me voir la semaine

passée. Nous parlons souvent de vous, et surtout de cette journée si divine que nous passàmes, il y a bien des années, sur les bords de l'Arno.

Donnez-moi quelques nouvelles de votre santé ; je ne parle pas de votre fortune, qui est toujours la même; dites-moi si vous ne faites point de comédies.

Préparez-vous à me revoir dans la belle saison; je ne puis plus différer davantage. Si vous aviez besoin d'argent, j'en ai toujours pour vous, et je vous embrasse de tout mon cœur.

Votre vrai ami, S. ROSA.

Au docteur JEAN-BAPTISTE RICCIARDI, à Florence. Rome, 15 décembre 1666.

V. S. a été servie comme elle le désirait par le P. Cavalli; il ne me reste plus qu'à la satisfaire sur ses demandes très-curieuses.

Premièrement, la mesure du tableau d'Attilius est de quatre brasses de longueur et quelques doigts de plus, et de deux brasses et demie et un peu plus de hauteur. J'en ai eu cent piastres sous la forme d'un fromage de Parmesan, mis dans une corbeille. J'ai trouvé plusieurs fois cent doubles de ce tableau; et si j'avais à le peindre à présent, je ne le ferais pas à moins de quatre cents écus.

Je n'ai pas encore peint l'OEdipe ni les Géans; mais j'ai peint tout le reste. Il est vrai que j'ai envie de peindre ces derniers.

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