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édition de Cicéron. Si j'ai pu le mériter, il n'a consulté que son amitié pour moi; mais ce sentiment que je partage ne demandait pas une si grande preuve de son estime. Je me réserve de lui en rendre gràce moi-même lorsque j'aurai vu ses écrits, puisque vous me faites espérer qu'ils paraîtront bientôt. En attendant, dites-lui, je vous prie, que je lui suis dévoué sans réserve. Je ne puis rien vous dire des brefs latins que je fais imprimer, et moins encore des lettres vulgaires, parce que, depuis que je ne vous ai vu, j'ai eu d'autres travaux; mais si vous venez ici, vous pourrez jeter un coup d'œil sur ces deux ouvrages; je ne pourrai que savoir mieux ce que j'aurai à faire lorsque j'aurai reçu vos conseils. Saluez pour moi M. Jean Taddei, et portez-vous bien.. J'ai prié M. Lorenzo Lenzi, gentilhomme de Florence, de me laisser voir votre sonnet sur le bruit de la mort de M. Benvenuto; il me l'a promis, mais il ne me l'a pas encore donné. Je vous le répète encore une fois et mille autres encore, portez-vous bien.

PIERRE BEMBO.

NOTE DU TRADUCTEUR. Littérateur et poëte, passionné pour les beaux. arts et les artistes célèbres, chéri des gens de lettres, estimé des grands, élevé au cardinalat, et enfin ami intime de Raphaël, rien ne manquait, é Bembo! à votre félicité. Mais la vie la plus heureuse doit connaître tôt ou tard l'adversité ou le malheur.....

Vos traits avaient la majesté de ceux de Mentor, et le jeune Raphaël, semblable à Télémaque, reçut aussi de vous les conseils les plus salutaires. Pourquoi ne sûtes-vous pas l'arracher à la violence de sa passion pour une autre Calipso? Ne craignez-vous pas que la postérité n'accuse les amis du grand Raphaël d'une indulgence fatale au monde, à luimême ? Mais qui aurait eu le courage ou plutôt la barbarie de lui faire

éprouver une séparation si cruelle? N'était-ce pas éteindre la flamme de son génie? De la plus tendre amitié voilà le langage lorsque la prudence de Minerve l'abandonne!., Raphaël succombe sous les traits de l'amour... l'erreur se montre alors suivie du cruel repentir... Que de prodiges, s'écrie-t-on, n'a pas ensevelis avec elle une mort aussi prématurée ! Tous lui donnent des larmes, et l'éloquente Transfiguration sert au divin Raphaël d'éloge funèbre......

Pour vous, illustre Bembo! cherchant la solitude pour y exhaler votre douleur profonde, vous laissâtes à votre plume le soin de la peindre dans les deux vers sublimes que redira la postérité......

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A don ANTOINE VASARI.

Florence, le 7 janvier 1536.

VOILA done, mon respectable oncle, les espérances du monde, les faveurs de la fortune, l'appui qu'on se promettait dans les princes, et les récompenses de tous mes travaux, évanouis comme un songe! Voilà le duc Alexandre, mon souverain enseveli, après avoir été égorgé, comme une bête sauvage, par la cruauté et l'envie de Laurent-Pierre Francesco, son cousin! Je pleure, avec tous ses serviteurs fidèles, sa fatale destinée, que tant d'armes, tant de soldats, tant de gardes, tant de citadelles n'ont pu défendre contre une seule épée et contre deux traîtres aussi scélérats. Je ne pleure pas, comme tant d'autres, leur propre malheur, parce que la cour étant le séjour continuel de l'adulation, des fripons et des gens sans pudeur, elle a non-seulementcausé la mort de ce prince,mais de tous ceux qui, ne regardant que le monde et se moquant de Dieu, restent dans cet état misérable où fut trouvée son

excellence la nuit dernière, et maintenant tous ses serviteurs.

J'avoue franchement que mon orgueil s'était tellement accru par la faveur que j'avais d'abord obtenue du cardinal Hyppolite de Médicis, et ensuite du pape Clément VII, son oncle, que, l'un et l'autre étant morts, je perdis toutes les espérances de vous obtenir des bénéfices ecclésiastiques, afin d'honorer vos vertus, de soutenir notre famille, et de me glorifier un jour d'avoir pu la secourir.

Je ne me plains pas d'être réduit à exercer mon art honorablement; mais je plains tous ceux qui, faisant partie de la cour, soit par la noblesse de leur origine, soit par les services des hommes qui ont suivi cette faction pendant bien des années, ont perdu les emplois qu'ils tenaient du gouvernement. Je crois que la même Providence qui a soin de l'entretien de tous les êtres fera que je ne manquerai pas de travaux pour soutenir, par mes sueurs, mon cher oncle et toute ma famille. Si je veux d'ailleurs offrir de nouveau mes services à son excellence le duc Cosme de Médicis, créé prince à la place de l'infortuné Alexandre, je pourrais avoir le même traitement dont je jouissais. Prenez donc courage, mon cher oncle, et priez Dieu qu'il me ramène sain et sauf à Arezzo; car je vous jure que tous les partisans de cette maison courent à Florence de très-grands dangers. Je me suis retiré dans une chambre, après avoir fait porter dans la maison de quelques amis tous mes effets, que je ferai par

tir aussitôt que les portes de la ville seront ou

vertes.

Je termine promptement le tableau de la Fraction du pain par Jésus-Christ au milieu de ses apòtres, afin de laisser, en partant, au magnifique Ottaviano cette preuve de mon attachement, avant de me séparer de la cour, pour reprendre une meilleure vie. Faites arranger la maison; j'y arriverai bientôt, afin d'y jouir tous les deux d'une heureuse tranquillité.

GEORGE VASARI.

A M. JEAN POLASTRA.

1536.

Si tous les maux étaient connus des Médecins, comme votre sollicitude vous a fait connaître les

miens, je crois que la mort ferait peu de ravages parmi l'espèce humaine. Me voilà à Arezzo, dans le dernier abattement, et désespéré des chagrins que me cause la mort du duc Alexandre; ayant en horreur le commerce des hommes, et me déplaisant au milieu de mes parens et de leurs soins, je m'étais enfermé dans une chambre, accablé de mélancolie; ne faisant que travailler, je me consumais le corps et l'esprit, frappé, comme je l'étais, de tous ces souvenirs affreux. Si j'eus persévéré dans cette manière de vivre, mes jours auraient bientôt été terminés. C'est vous, que Dieu bénisse mille fois! qui m'en avez retiré, en me conduisant au désert

qu'habitent les camaldules. Je ne pouvais demeu rer dans un lieu plus convenable pour arriver à la connaissance de moi-même, puisque, outre que le voyage m'est utile, j'y passe mon temps avec ces saints religieux, lesquels, en deux jours, ont tellement rendu le calme à mon âme, que je commence déjà à reconnaître où me conduisaient ma folie et mon égarement. Je découvre d'ici, sur le sommet le plus élevé des Apennins, à travers ces antiques forêts, la perfection que l'on trouve dans le repos de l'âme. Ces pieux solitaires ne s'occupent point des tentations ennemies et des vanités du monde : semblables aux arbres majestueux qui environnent leur demeure, ils se rient des vents et des tempêtes qui battent et ébranlent continuellement leurs têtes élevées.

J'ai vu et parlé à cinq vieillards de quatre-vingts ans, jouissant d'une santé et d'une joie parfaites: j'ai cru converser avec cinq anges qui auraient apparu sur la terre. Le silence habite en ces solitudes avec sa muette éloquence ; chaque cellule a un promenoir de douze pas on y trouve une écritoire, une petite table et un lit, avec une petite chapelle. Ces saints religieux veulent que je fasse le tableau de leur grand autel, avec beaucoup d'autres ornemens de leur église. Je commencerai à faire quelque chose pour montrer au révérend père supérieur ce que je sais faire, parce que je lui ai paru trop jeune; mais j'espère, avec l'aide de Dieu, peindre comme comme si j'étais un vieillard expérimenté. Il en a

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