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cupe une place distinguée à la Chambre des députés et à l'Académie des Inscriptions, M. Eusèbe Salverte, a publié une traduction séparée de ces deux épîtres. Venus après lui, Dureau Delamalle et le Brun ne l'ont point surpassé pour « l'intelligence du sens, si difficile à saisir dans ces écrits où Salluste supprime presque toutes les idées intermédiaires, en sorte qu'il faut ne le perdre pas un instant de vue pour saisir le fil des idées principales. Mais aussi Salluste écrivait à César : le plus profond des écrivains au plus pénétrant des hommes3. »

Une judicieuse préface et des notes trop courtes ajoutent à l'intérêt du travail de M. Salverte. Ai-je pu mieux faire que de mettre quelquefois son travail à contribution? J'ai profité aussi de l'excellent commentaire de M. Burnouf. Il m'est doux de rendre ici hommage à ces deux savans illustres : l'un et l'autre ont à l'envi cueilli des palmes inoffensives dans le champ paisible de l'érudition; et si les lauriers civiques que mérite chaque jour l'honorable M. Salverte ne se moissonnent qu'aux dépens de la santé et du repos, il est une conscience d'homme de bien qui fait qu'un tel sacrifice n'est point sans compensation. Aujourd'hui M. Salverte défend encore les mêmes principes qu'il professait dans sa traduction publiée en l'an v, sous la république, c'est-à-dire il y a près de trente-quatre ans. A cet égard combien n'est-il pas supérieur à Salluste, qui fut à Rome le type du protée politique!

La première lettre a été écrite environ un an avant la rupture de Pompée et de César, dans le temps où celui-ci se bornait à demander un second consulat (an de Rome 705). Nous ne partageons pas l'opinion de M. Salverte, qui veut qu'elle soit postérieure au passage du Rubicon, et antérieure à l'arrivée de César à Rome.

La seconde lettre fut évidemment écrite après la bataille de Pharsale, peut-être même après l'entier achèvement de la guerre civile.

Préface de la Traduction de M. Salverte.

EPISTOLÆ

C. C. SALLUSTII AD C. CAESAREM.

SCIO

EPISTOLA PRIMA.

cio ego, quam difficile, atque asperum factu sit, consilium dare regi aut imperatori, postremo cuiquam mortali, cujus opes in excelso sunt: quippe quum et illis consultorum copiæ adsint; neque de futuro quisquam satis callidus, satisque prudens sit. Quin etiam sæpe prava magis, quam bona consilia prospere eveniunt: quia plerasque res fortuna ex lubidine sua agitat. Sed mihi studium fuit adolescentulo rempublicam capessere atque in ea cognoscenda multam, magnamque curam habui: non ita, uti magistratum modo caperem, quem multi malis artibus adepti erant ; sed etiam uti rempublicam domi, militiæque, quantumque armis, viris, opulentia posset, cognitam haberem.

:

Itaque mihi multa cum animo agitanti consilium fuit, famam, modestiamque meam post tuam dignitatem habere, et cujus rei lubet periculum facere, dum quid tibi ex eo gloriæ accederit. Idque non temere, aut ex fortuna tua decrevi; sed quia in te, præter cæteras,

LETTRES

DE C. C. SALLUSTE A C. CÉSAR.

LETTRE PREMIÈRE.

I. Je sais combien il est difficile et délicat de donner des conseils à un roi, à un général, à tout mortel enfin qui se voit au faîte du pouvoir; car, autour des hommes puissans, la foule des conseillers abonde; quoique personne ne possède assez de sagacité ni de prudence pour prononcer sur l'avenir. Souvent même, les mauvais conseils plutôt que les bons tournent à bien, parce que la fortune fait mouvoir au gré de son caprice presque toutes les choses humaines.

Pour moi, dans ma première jeunesse, porté par goût à prendre part aux affaires publiques, j'en ai fait l'objet d'une étude longue et sérieuse, non dans la seule intention d'arriver à des dignités que plusieurs avaient obtenues par de coupables moyens, mais aussi pour connaître à fond l'état de la république sous le rapport civil et militaire, la force de ses armées, de sa population, et l'étendue de ses ressources.

Préoccupé donc des idées que j'ai puisées dans cette étude, j'ai cru devoir faire au dévoûment que vous m'inspirez le sacrifice de ma réputation et de mon amourpropre, et tout risquer, si je puis ainsi contribuer en quelque chose à votre gloire. Et ce n'est point légèrement,

artem unam egregie mirabilem comperi, semper tibi majorem in advorsis, quam in secundis rebus animum esse. Sed per deos immortales illa res clarior est, quod et prius defessi sint homines laudando atque admirando munificentiam tuam, quam tu faciendo quæ gloria digna

essent.

II. Equidem mihi decretum est, nihil tam ex alto reperiri posse, quod non cogitandi tibi in promtu sit : neque ego, quæ visa sunt, de republica tibi scripsi, quia mihi consilium atque ingenium meum amplius æquo probaretur; sed inter labores militiæ, interque prælia, victorias, imperium, statui admonendum te de negotiis urbanis. Namque tibi si id modo in pectore consilii est, uti te ab inimicorum impetu vindices, quoque modo contra advorsum consulem beneficia populi retineas; indigna virtute tua cogites. Sin in te ille animus est, qui jam a principio nobilitatis factionem disturbavit, plebem romanam ex gravi servitute in libertatem restituit, in prætura inimicorum arma inermis disjecit, domi militiæque tanta et tam præclara facinora fecit, uti ne inimici quidem queri quidquam audeant, nisi de magnitudine tua; quin accipe tu ea, quæ dicam de summa republica, quæ profecto aut tu vera invenies, aut certe haud procul a vero.

ni séduit par l'éclat de votre fortune, que j'ai conçu ce dessein; c'est qu'entre toutes les qualités qui sont en vous j'en ai reconnu une vraiment admirable: cette grandeur d'âme qui, dans l'adversité, brille toujours chez vous avec plus d'éclat qu'au sein de la prospérité. Mais, au nom des dieux, votre magnanimité est assez connue, et les hommes seront plutôt las de vous payer un tribut de louanges et d'admiration, que vous de faire des actions glorieuses.

II. J'ai reconnu en effet qu'il n'est point de pensée, si profonde, que chez vous un instant de réflexion ne fasse aussitôt jaillir; et, si je vous expose mes idées en politique, ce n'est pas avec une confiance présomptueuse dans ma sagesse ou dans mes lumières; mais j'ai pensé que, au milieu des travaux de la guerre, au milieu des combats, des victoires et des soins du commandement, il serait utile d'appeler votre attention sur l'administration intérieure de Rome. Car, si tous les projets que vous méditez se bornaient à vous garantir des attaques de vos ennemis et à défendre contre un consul malveillant les bienfaits du peuple, ce serait une pensée trop au dessous de votre grande âme. Mais, si l'on voit toujours en vous ce courage qui, dès votre début, abattit la faction de la noblesse; qui, délivrant le peuple romain d'un dur esclavage, le rendit à la liberté; qui, durant votre préture, a su, sans le secours des armes, disperser vos ennemis armés; et qui, soit dans la paix, soit dans la guerre, accomplit tant de hauts faits que vos ennemis n'osent se plaindre que de vous voir si grand, vous accueillerez les vues que je vais vous exposer sur la haute administration de l'état; j'espère qu'elles vous sembleront vraies, ou du moins bien peu éloignées de la vérité.

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