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dans le pacte et reconnus par deux diètes successives, au mepris des convictions bien ou mal éclairées de sa conscience, une corporation réligieuse établie en Suisse depuis plus de trente ans et contre laquelle on n'articu lait aucun grief quelconque; . . . uniquement parceque le nom de cette corporation réligieuse lui déplaisait... Nous avons reclamé, nous avons protesté; la protestation de la France est contenue dans une depêche du 2 Juillet 1847 remise par notre ambassadeur en Suisse au président de la diète*). Je dis remise au président, je ne dis pas communiquée à la diète; car si je suis bien informé le président de la diète l'a gardée pour lui, traitant ainsi la majorité comme la majorité traitait la minorité. . . Cet avertissement n'ayant pas été entendu, ce langage ayant été accueilli avec l'arrogance que certains gouvernements prennent pour de la fierté, il ne restait plus, aux gouvernements interessés au maintien du pacte fédéral qu'à se consulter, qu'à prendre conseil de leurs intérêts et des circonstances. Le cabinet de Vienne avait déjà pris les devants; dès le 15 Juillet il avait proposé au gouvernement français et à ses alliés en général d'adresser en commun à la diète helvétique une declaration, de lui signifier qu'elle eût à s'abstenir de toute violence, de toute contrainte, de toute voie de fait à l'égard de la minorité des cantons.... Si le gouvernement français avait été fort empressé d'intervenir à main armée dans les affaires de la Suisse, si même, ne voulant pas se compromettre, il en eut simplement nourri au fond de son âme le désir, la pensée, à coup sûr, l'occasion était belle et son rôle était bien facile. Il n'avait pas besoin d'accepter la proposition qui lui était faite, il lui suffisait de n'y pas mettre trop sérieusement obstacle; il lui suffisait en s'abstenant sous un prétexte quelconque de laisser le champ libre aux autres puisMais le gouvernement français est un gouvernement libre et constitutionnel; à ce titre il pousse jusqu'au scrupule le respect de l'indépendance des peuples; à ce titre toute intervention lui repugne et lui est suspecte; c'est à ses yeux une mesure extraordinaire qui ne peut être justifiée que par des circonstances extraordinaires; c'est un remède extrême qui doit être reservé pour des cas extrêmes. Or ici il ne trouvait aucune raison qui justifiât suffisamment l'emploi de ce remède

sances

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*) Voir Nouveau Recueil général etc. par F. Murhard. T. XI, p.9.

liorations qui paraitraient compatibles avec les bases fondamentales. Mais ce que nous avons toujours maintenu, ce que toute l'Europe n'a jamais cessé de maintenir avec nous, c'est que tout changement de fait ou de droit; c'est que toute tentative, toute entreprise dont le but serait, non pas de reformer le pacte fédéral, mais de le transformer, mais de dénaturer la confédération helvétique, mais de supprimer ou d'opprimer la souveraineté cantonale, mais de subordonner les cantons les uns aux autres en débors et au-delà des limites du pacte actuel, mais de créer au dessus d'eux un pouvoir central en état de les dominer, de les contraindre, ce que nous avons toujours maintenu, c'est qu'une telle tendance ouvrirait sur le champ aux puissances signataires des traités de 1815 un droit de reclamation, un droit de protestation, et, dans le cas ou ces protestations ne seraient pas écoutées, ce serait à ces puissances à se consulter et à prendre conseil de leurs intérêts et des cirArrivons à l'applica

constances

tion. Quel spectacle offrait à l'Europe vers le commencement de l'été dernier, la conféderation helvétique? ... Deux camps, deux armées, deux conféderations en présence; deux groupes de cantons s'imputant mutuellement le dessein de porter la hache dans le pacte fédéral et de le ruiner de fond en comble; là une majorité, la majorité plus un des Cantons, sommant la minorité de se rendre à discrétion et d'en passer par les conditions qu'elle entendait lui imposer; ici la minorité, une minorité considérable, le tiers des cantons, accusant ouvertement la majorité d'usurpation et de tyrannie; deux ou trois cantons détachés ou isolés prenant parti en principe et dans la diète pour la minorité, en fait et sur le champ de bataille désirant plutôt rester neutres... A l'aspect d'un pareil état des choses les gouvernements gardiens des conditions fondamentales du pacte fédéral pouvaient-ils rester aveugles ou muets? Pouvaient-ils sans abdiquer leurs droits, sans trahir les intérêts qui leur sont confiés, pouvaient-ils affecter de ne rien voir et de ne rien entendre? Les douze cantons et demi, dont se composait alors la majorité, demandaient que la minorité se soumît, pieds et poings liés, à la plus étrange, à la plus extraordinaire, à la plus capricieuse de toutes les exigences; ils demandaient que la minorité expulsât de son sein, au mépris des droits écrits

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dans le pacte et reconnus par deux diètes successives, au mepris des convictions bien ou mal éclairées de sa conscience, une corporation réligieuse établie en Suisse depuis plus de trente ans et contre laquelle on n'articu lait aucun grief quelconque; . . . uniquement parceque le nom de cette corporation réligieuse lui déplaisait.. Nous avons reclamé, nous avons protesté; la protestation de la France est contenue dans une depêche du 2 Juillet 1847 remise par notre ambassadeur en Suisse au président de la diète*). Je dis remise au président, je ne dis pas communiquée à la diète; car si je suis bien informé le président de la diète l'a gardée pour lui, traitant ainsi la majorité comme la majorité traitait la minorité Cet avertissement n'ayant pas été entendu, ce langage ayant été accueilli avec l'arrogance que certains gouvernements prennent pour de la fierté, il ne restait plus aux gouvernements interessés au maintien du pacte fédéral qu'à se consulter, qu'à prendre conseil de leurs intérêts et des circonstances. Le cabinet de Vienne avait déjà pris les devants; dès le 15 Juillet il avait proposé au gouvernement français et à ses alliés en général d'adresser en commun à la diète helvétique une declaration, de lui signifier qu'elle eût à s'abstenir de toute violence, de toute contrainte, de toute voie de fait à l'égard de la minorité des cantons.... Si le gouvernement français avait été fort empressé d'intervenir à main armée dans les affaires de la Suisse, si même, voulant pas se compromettre, il en eut simplement nourri au fond de son âme le désir, la pensée, à coup sûr, l'occasion était belle et son rôle était bien facile. Il n'avait pas besoin d'accepter la proposition qui lui était faite, il lui suffisait de n'y pas mettre trop sérieusement obstacle; il lui suffisait en s'abstenant sous un prétexte quelconque de laisser le champ libre aux autres puissances . . . . . Mais le gouvernement français est un gouvernement libre et constitutionnel; à ce titre il pousse jusqu'au scrupule le respect de l'indépendance des peuples; à ce titre toute intervention lui repugne et lui est suspecte; c'est à ses yeux une mesure extraordinaire qui ne peut être justifiée que par des circonstances extraordinaires; c'est un remède extrême qui doit être reservé pour des cas extrêmes. Or ici il ne trouvait aucune raison qui justifiât suffisamment l'emploi de ce remède

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*) Voir Nouveau Recueil général etc. par F. Murhard. T. XI, p.9.

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extrême, de cette mesure extraordinaire. Pas de traités antérieurs, qui eussent stipulé l'intervention dans certains cas determinés, comme l'a fait le traité de la quadruple alliance entre la France et l'Angleterre d'une part, l'Espagne et le Portugal de l'autre. Point d'intérêt pressant, urgent, immédiat, pareil à l'intérêt qui fit entrer subitement en Belgique en 1831 l'armée française pour préserver le royaume naissant de l'invasion des Hollandais. L'intérêt du maintien du pacte helvétique n'est après tout qu'un intérêt lointain, d'avenir et d'équilibre Le gouvernemet français n'a pas trouvé là un motif suffisant pour se prêter à la proposition qui lui était faite. Il s'y est refusé et il en a dissuadé les autres gouvernements ... De là, messieurs, l'idée d'une médiation européenne, l'idée, si la guerre civile devenait inévitable, de péser sur les deux parties belligérantes du poids de l'Europe entière. . . . C'était une tâche laborieuse et délicate, une beuvre hérissée de difficultés nombreuses et considérables. Il ne s'agissait de rien moins que d'entreprendre simultanément des négociations sur tous les points'de l'Europe: à Vienne, à Berlin, à St. Petersbourg et à Londres; il ne s'agissait de rien moins que de réunir dans une action commune et un langage commun des puissances placées dans des positions trés-diverses et dont les sentiments n'étaient pas absolument les mêmes. En effet, le différend qu'il s'agissait de concilier était d'origine et de nature purement religieuses; il fallait le faire envisager du même oeil par deux puissances catholiques, par deux puissances protestantes et par le chef de la religion grecque. Ce différend était politique dans son caractère, dans sa portée; il mettait en présence les deux principes qui divisent l'Europe depuis soixante ans. Il fallait le faire envisager du même oeil par deux gouvernements constitutionnels, par deux monarchies absolues, je me sers de ce mot pour abréger et sans y attacher aucun sens qui puisse offenser personne, et par une puissance qui n'est entrée jusqu'à présent qu'à moitié dans le régime constitutionel. Les gouvernements limitrophes de la Suisse, menacés dans leur sécurité intérieure par l'explosion de la guerre civile, pouvaient bien renoncer actuellement à toute intervention armée, mais ils ne pouvaient pas y renoncer définitivement; ils ne pouvaient pas se priver de ce moyen éventuel de défense; ils

étaient obligés de faire leurs réserves; et naturellement ces réserves devaient inspirer beaucoup de jalousie, beaucoup de méfiance aux puissances éloignées du théatre de la guerre et qui dans aucun cas ne pouvaient participer à une pareille intervention. ... Le gouvernement français ... a poursuivi ces négociations avec beaucoup d'ac tivité; il s'est proposé dans le cours de ces négociations deux régles de conduite dont il ne s'est jamais départi : point de transactions, point de concessions sur le fond même des principes qui devaient servir de base à la médiation, à savoir, le respect actuel et le maintien à venir de la souveraineté cantonale, l'égalité parfaite entre les cantons, l'égalité entre les deux parties belligérantes, entre la diète et le Sonderbund: point d'obstination, en revanche, sur tout le reste; la plus grande facilité sur toutes les questions accessoires, sur toutes les questions de détail, sur toutes les questions de forme et de langage; les plus grands ménagemens pour toutes les susceptibilités, pour tous les préjugés naturels, pour toutes les méfiances bien ou mal fondées; point d'amour - propre d'auteur, qui mît obstacle à quoique ce soit. . . . moins de cinq semaines, le Gouvernement français avoit réussi à amener à un même langage et à une action commune les cinq puissances dont je viens de parler, à obtenir l'assentiment de ces cinq cabinets.l

En

Que lui a-t-il manqué, messieurs, pour achever son ouvrage, pour atteindre son but? Il lui a manqué ce qui ne dépend de personne, ce dont aucun homme, ce dont aucun gouvernement ne dispose; quelques jours, quelques heures. Le tems ne tombe sous la prise d'aucune prévoyance; il n'y a que Dieu qui en dispose; c'est lui qui au denoument des grandes affaires, dans les moments suprêmes, précipite ou retarde de quelques jours, de quelques heures, le cours des événements. Dieu n'a pas voulu que l'oeuvre de conservation que nour avons en treprise fût consommée.... Que sortira-t-il de ce chaos? Quelle est la Suisse nouvelle que de nouveau pacte nous prépare? Quels seront les rapports que les gouvernements réguliers, civilisés pourront entretenir avec elle? Quelles sont les précautions, que les gouvernements limitrophes doivent prendre pour contenir dans son lit ce torrent de radicalisme, de communisme, de socialisme, qui ménace de déborder de toute part? Je l'ignore; personne ne peut le savoir. Mais quel que soit l'aveNouv. Recueil gén. Tome XII.

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