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<< n'y a rien qui soit divisible ou figuré; car Dieu est tout << être parce qu'il est infini et qu'il comprend tout; mais il <«< n'est aucun être en particulier. Cependant, ce que nous « voyons n'est qu'un ou plusieurs êtres en particulier, et << nous ne comprenons point cette simplicité parfaite de Dieu << qui renferme tous les êtres. Outre qu'on peut dire qu'on << ne voit pas tant les idées des choses que les choses mêmes « que les idées représentent; car, lorsqu'on voit un carré, << par exemple, on ne dit pas que l'on voit l'idée de ce carré <<< qui est unie à l'esprit, mais seulement le carré qui est au << dehors. >>

Réflexion de M. Arnauld sur ce passage. - «S'il pouvait y avoir quelque vraisemblance dans une opinion mal fondée, c'est tout ce qu'on pourrait dire de mieux pour ne rien attribuer à Dieu qui soit indigne de lui, supposé qu'il ait voulu se servir de ces étres représentatifs. Mais c'est mal connaître notre esprit que de s'imaginer qu'une idée qui serait en Dieu, et que notre esprit ne verrait pas, lui pût servir à connaître ce que cette idée représente. C'est comme qui dirait que le portrait d'un homme que je ne connaîtrais que de réputation, étant mis si proche ou si loin de mes yeux que je ne le pourrais voir, ne laisserait pas de me pouvoir servir à connaître le visage de cet homme.

« C'est peut-être aussi ce qui lui a fait abandonner cette voie pour en prendre une autre, qui lui fait éviter cet inconvénient, mais qui le fait tomber en plusieurs infiniment plus grands, comme nous le verrons plus bas. >>

RÉPONSE. VII. Si vous avez, par estime pour M. Arnauld, quelque peine sur cette objection qu'on verrait Dieu face à face si on voyait en lui que deux fois deux font quatre, ou que les trois angles de tout triangle en valent deux droits, ou toute autre vérité, je vous prie de lire les preuves que j'ai tirées de saint Augustin (chap. 7) contre les modalités essentiellement représentatives. L'autorité de ce saint docteur vous rassurera.

VIII. M. Arnauld m'impose, dans le passage que je viens de citer, un sentiment ridicule que sa passion lui a fait voir dans la Recherche de la Vérité, sans qu'il y fût. « C'est que j'avais assez fait entendre que ma manière d'expliquer comment on voit en Dieu ses ouvrages, consistait en ce que Dieu nous découvrait chacune de ses idées. De quoi, dit-il, je ne veux plus demeurer d'accord. » De là il tire une conséquence, que je ne veux donc point qu'il y ait en Dieu d'idées particulières qui lui représentent tous ses ouvrages; et il emploie le reste du chapitre à prouver qu'il y a en Dieu de ces idées, ce qui, comme vous voyez, ne peut pas lui être bien difficile.

IX. J'ai dit, Monsieur, que nous voyons en Dieu ses ouvrages par ce qu'il y a en lui qui les représente; mais ce qu'il ya en lui qui les représente, c'est l'étendue intelligible ou l'idée de l'étendue. Le soleil me paraît plus petit que la terre, et il paraît plus grand à Dieu qui voit les choses telles qu'elles sont; je n'en ai donc pas la mème idée particulière ; ce n'est donc pas par chacune de ses idées que Dieu me fait voir ces ouvrages: mais ce mot de chacune est aussi de la façon de M. Arnauld. J'ai parlé plus généralement, en disant toujours que nous voyons les ouvrages de Dieu par ce qu'il y a en lui qui les représente et jamais par chacune de leurs idées. Ainsi j'ai eu raison de dire: « Il ne faut pas << s'imaginer que le monde intelligible ait un tel rapport avec <<< le monde matériel et sensible, qu'il y ait, par exemple, un <«< soleil, un cheval, un arbre intelligible destiné à nous re<< présenter le soleil, un cheval et un arbre. » Et M. Arnauld a tort de m'imposer d'avoir soutenu que Dieu nous découvre ses ouvrages par chacune de ses idées, afin d'en conclure que j'ai changé de sentiment, et le redire à tous moments. Il a tort de me répondre encore par ces paroles : « Et moi je dis qu'en ôtant le mot de nous, ce n'est pas une imagination,›, mais une certitude que le monde intelligible a un tel rapport avec le monde matériel et sensible, qu'il y a un soleil, etc.,

et il est impossible que cela ne soit pas. » Mais il a encore plus de tort d'avoir employé huit pages de discours, et les autorités de saint Augustin et de saint Thomas pour le prouver; car, qui doute de cette vérité? Certainement je n'en ai jamais douté; mais ce que dit M. Arnauld fera croire que j'en doute, et peut-être que cela lui suffit. Plût à Dieu que je me trompe dans la pensée que sa critique fait naître dans mon esprit !

CHAPITRE XVI. Réponse au quatorzième chapitre.

I. Ce chapitre 14 de M. Arnauld contient plus de vingt pages, et il en faudrait du moins une centaine pour éclaircir toutes ses brouilleries. Il semble, à l'entendre parler, qu'il n'ait vu que le blanc et le noir dans ce qu'il critique : tantôt il m'attribue des impertinences, que dis-je, des impertinences? des hérésies et des impiétés, et tantôt il expose mes sentiments véritables et il les combat par des discours qui ne les regardent nullement; en un mot, il confond si bien toutes choses, qu'il est beaucoup plus facile d'éclaircir le fond de la question que de donner de la suite et du sens à ses paroles.

II. Ce qu'il attaque principalement, c'est qu'on voit les objets matériels par l'étendue intelligible. D'abord il fait semblant d'être effrayé de cette pensée; et ensuite il dit, qu'il ne peut comprendre ce que j'entends par cette étendue intelligible. Et ainsi, par le trouble et l'embarras qu'il fait paraître, il trouble et embarrasse l'esprit de son lecteur, qui souvent entre naturellement et machinalement dans les dispositions des auteurs qui ont de la réputation.

III. « Je ne sais, dit-il page 129, que vous dire d'un tel discours; j'en suis effrayé. Car je trouve qu'il renferme tant de brouilleries et de contradictions, que toute ma peine sera d'en démêler les équivoques, et d'en découvrir les paralogismes. (Il devait plutôt dire, que toute sa peine sera de le remplir d'équivoques, et d'y trouver des paralogismes. ) Et plus bas, page 135. « De bonne foi, je ne saurais deviner

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ce qu'il a voulu que nous entendissions par cette étendue intelligible infinie, dans laquelle il prétend maintenant ( je l'ai toujours prétendu ) que nous voyons toutes choses ( oui, toutes les choses matérielles ); car, continue-t-il, il en dit des choses si contradictoires, qu'il me serait aussi difficile de m'en former une notion distincte sur ce qu'il en dit, 'que de comprendre une montagne sans vallée. C'est une créature, et ce n'est pas une créature : elle est en Dieu et elle n'est pas en Dieu elle est divisible, et elle n'est pas divisible: elle n'est pas seulement éminemment en Dieu, mais elle y est formellement; et elle n'y est qu'éminemment, et non pas formellement. C'est une créature, puisque c'est l'étendue que Dieu a faite et c'est l'étendue que Dieu a faite, puisqu'il prouve par là que Dieu la connaît. » Dieu, dit-il, reuferme en lui-même une étendue intelligible infinie. Car Dieu connaît l'étendue, puisqu'il l'a faite; et il ne peut la connaître qu'en lui-même. « Et ce n'est pas une créature, puisque si cela était, en voyant les choses dans cette étendue intelligible infinie, nous ne les verrions que dans une créature, et son dessein est que nous les voyons en Dieu. Et par là il faut qu'elle soit Dieu, etc. »

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RÉPONSE. IV. Y a-t-il, Monsieur, du sens dans ces paroles de M. Arnauld? Entend-il mon sentiment? ou s'il l'entend, est-il sincère? Mais pour le tirer de son embarras, et dissiper le trouble qu'il jette daus l'esprit de son lecteur, je lui demande :

Dieu ne connaît-il pas l'étendue qu'il a faite, avant que de l'avoir faite? Ce serait une impiété que de le nier. Dieu a donc en lui-même l'idée de l'étendue; or, c'est cette idée de l'étendue, c'est ce qu'il y a en Dieu qui représente l'étendue, ainsi que je me suis expliqué dans la Recherche de la Vérité: c'est cela que j'appelle ici et dans les Éclaircissements qu'il cite, étendue intelligible. M. Arnauld me rend-il justice, de prétendre qu'ayant dit dans un premier volume, qu'on voyait les corps dans ce qu'il y a en Dieu qui les représente, j'ai

changé de sentiment, à cause que je parle autrement dans le troisième, qui contient les Éclaircissements, et que je dis dans le passage qu'il cite, qu'on les voit dans l'étendue intelligible? N'est-il pas visible que c'est la même pensée? Mais est-ce une chose aussi difficile « de se former une notion distincte de cette étendue intelligible, que de comprendre une montagne sans vallée ? »>

V. « Cette étendue intelligible, dit M. Arnauld, est une créature, et n'est pas une créature. C'est une créature, puisque c'est l'étendue que Dieu a faite. »>

RÉPONSE. Qui est l'impie qui a dit cette impiété? je lui dis anathème. Mais cet impie c'est moi-même; « puisque, dit M. Arnauld, je prouve par là que Dieu connaît les créatures. >> Oui, Dieu connaît dans son Verbe les créatures: mais son Verbe lui est consubstantiel. Dieu voit les corps dans l'étendue intelligible: mais les corps ne sont point l'idée dans laquelle Dieu les voit. Leur être est bien différent de la nature immuable, ou de l'archétype sur lequel Dieu les a formés. M. Arnauld ne sait-il pas que l'essence de Dieu, en tant qu'elle est participable par les créatures, est l'idée éternelle dans laquelle Dieu les voit? Mais c'est peut-être qu'il suppose, que Dieu voit les créatures en elles-mêmes, et autrement que par ses divines idées, et par la connaissance qu'il a de ses volontés qui leur donnent l'ètre ? ce qui est une impiété, comme le dit saint Augustin dans le passage mème qu'il rapporte, hoc opinari sacrilegium est. Au reste, afin que l'embarras de M. Arnauld ne soit point une feinte, il faut bien qu'il ait sur cela un autre sentiment que moi. Qu'on tâche donc de s'en éclaircir, en lisant son livre depuis la page 129 jusqu'à 135.

VI. Mais Dieu est-il cette étendue intelligible? oui certainement: car tout ce qui est en Dieu, est Dieu même. Cette étendue intelligible est sagesse, est puissance, est infiniment parfaite non selon qu'elle est représentative des corps, non solon que nous la voyons, non en tant qu'idée éternelle des

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