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gues anciennes, et lisait chaque année dans l'original les livres de Salomon et ceux d'Hyppocrate : c'étaient, selon lui, les meilleurs ouvrages qu'il y eût pour guérir les maladies de l'esprit et du corps. Le nom de Brotier est immortalisé par les grands et précieux ouvrages dont il a enrichi la littérature. C'est dans la retraite qu'il s'était choisie au sein de l'étude et de l'amitié, qu'il publia ses différentes éditions des auteurs anciens. La mémoire de l'abbé Brotier mérite d'être associée à celle de ces savants laborieux, des Pétau, des Hersan, des Cossart, qui ont fait tant d'honneur à leur patrie. On a de cet écrivain une édition de Tacite, avec des notes, des dissertations savantes et des suppléments. Il en existe deux éditions différentes, l'une de 1771, 4 vol. in-4°, et l'autre de 1776, 7 vol. in-12, Paris. Il fit pour Tacite ce que Freinshémius avait fait pour Quinte-Curce. Cette entreprise était téméraire; mais, grace au talent de l'auteur, elle fut couronnée d'un heureux succès. Il a publié une édition de Pline le Naturaliste, qui n'est qu'un abrégé de celle qu'il avait préparée pour augmenter et corriger celle d'Hardouin. Il voulait y ajouter une suite qui eût renfermé l'histoire des nouvelles découvertes faites jusqu'au XVIIIe siècle. Son édition de Pline se fait remarquer par beaucoup de correction et de pureté; les notes en sont à la fois savantes et curieuses, et satisfont toujours les recherches du lecteur. On doit encore à Brotier une jolie édition des Fables de Phèdre, Paris, Barbou, 1783, in-12, et une autre des Jardins, de Rapin, 1780, in-12, auxquels il a

joint une Histoire des Jardins, écrite avec une élégance exquise. Il travailla aussi à la nouvelle édition des Lettres édifiantes, et à celle de Plutarque d'Amyot, 1783, 22 vol. in-8°, qu'il commença avec Vauvilliers, et que son neveu acheva. Cet ouvrage, réimprimé depuis, a été revu et corrigé par Clavier, Paris, 1801,25 vol. in-8°. On a aussi de lui: Examen de l'Apologie de l'abbé de Prades; Conclusiones ex universa theologia; Mémoires du Levant, 1780; Vita clarissimi viri de La Caille; et un Traité des monnaies romaines, grecques et hébraïques, comparées avec les monnaies de France, 1760, in-4o, ouvrage nécessaire pour lire la Bible et les auteurs

anciens.

JUGEMENT.

Ce que le président de Brosse avait fait sur Salluste, avec des recherches infinies, l'abbé Brotier l'a exécuté plus heureusement encore sur Tacite; il en a rempli les lacunes, de manière que les yeux les plus exercés auraient peine à remarquer quelque différence entre son style et celui de l'historien romain. En rendant cette justice à son travail, nous savons combien il est difficile à un moderne, quel qu'il soit, de porter un jugement certain sur le mérite d'un auteur qui écrit dans ce qu'on appelle une langue morte. Nous nous bornons à dire ce qui nous semble vrai; c'est que, parmi les écrivains qui se sont livrés à ce genre d'écrire, nous ne connaissons pas de latinité qui nous ait paru plus pure que celle de l'abbé Brotier. Les lettres lui sont redevables de plusieurs éditions précieuses qui lui ont coûté

beaucoup de recherches, et dont il a éclairci le texte par des notes pleines d'érudition et de goût. Peu de personnes ont porté plus loin la connaissance des médailles, et il en a fait souvent l'emploi le plus heureux pour remplir les vides de Tacite.

PALISSOT, Mémoires sur la Littérature.

BRUEYS (DAVID-AUGUSTIN DE) naquit à Aix en 1640. Issu d'une famille anoblie par des lettres patentes de Louis XI, il fut élevé dans le calvinisme, religion de ses pères, étudia la théologie, acquit une vaste érudition dans la littérature et se fit recevoir avocat. Vers ce temps, aveuglé par son amour pour une jeune personne, il l'épousa malgré l'opposition de ses parents; et forcé de quitter la ville témoin de son imprudence, il se retira à Montpellier. En sa qualité de membre du consistoire, il répondit à l'Exposition de la foi, de Bossuet. Ce prélat, pour toute réplique, désabusa son adversaire et lui fit abjurer ses erreurs. Le nouveau converti prit l'engagement de combattre les opinions dont il venait de reconnaître la fausseté, et publia successivement, l'Examen des raisons qui ont donné lieu à la séparation des protestants, 1682; la Réponse aux plaintes des protestants contre les moyens employés pour leur réunion, et contre le livre intitulé: la Politique du clergé de France, 1686; le Traité de l'Église, Paris 1687, 1700, et le Traité de la Sainte Messe, Paris 1682, 1700. Le roi voulut répandre ses graces sur le nouvel apôtre des vérités évangéliques; mais celui-ci pria Bossuet de tout re

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fuser, afin, disait-il, qu'on ne le soupçonnât pasde s'être réconcilié avec l'Église romaine par un motif d'intérêt et d'ambition. Aussi eut-il toujours l'estime des calvinistes, même de ceux qui le combattirent, tels que Jurieu, L'Enfant et La Roque. En 1683, il perdit sa femme; son isolement, ses chagrins lui inspirèrent la résolution de prendre l'état ecclésiastique. En 1685, il reçut l'ordination des mains de l'évêque de Meaux dans le séminaire de cette ville. Son esprit enjoué, son goût pour la littérature, son enthousiasme pour Molière, le déterminèrent à abandonner la controverse pour s'adonner au théâtre. Dans un siècle où l'on observait les convenances, il fallait trouver un prête-nom car il ne pouvait avouer des ouvrages faits pour compromettre sa réputation et son état. Palaprat, Toulousain plein de présomption, s'offrit pour le tirer d'embarras; et, sans avoir la meilleure part à ses œuvres, travailla pourtant avec lui; il les défigura quelquefois. On dit que, pendant un voyage, Brueys lui avait laissé le Grondeur, comédie en 5 actes; sur la demande des acteurs, afin d'obtenir la représentation, il la réduisit en trois. A son retour, Brueys dans un moment de colère dit : « Le premier << acte du Grondeur est de moi, il est excellent. Le « second a été gâté par quelques scènes de farces de Palaprat, il est médiocre. Le troisième est entiè« rement de lui, il est détestable. » Le Muet, imitation de l'Eunuque de Térence, l'Important, les Empiriques, l'Opiniátre, Gabinie, Asba, sortirent de sa plume: il rajeunit et embellit l'ancienne co

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médie de l'Avocat Patelin, jouée dans le temps de Charles VII, et dont Pierre Blanchet, passe pour être le premier auteur. Il composa plusieurs autres pièces avec son collaborateur toulousain: ils vivaient en très bonne intelligence quand des évènements d'intérêt politique vinrent dissoudre leur association littéraire. Palaprat suivit à la guerre d'Italie le grand prieur de Vendôme, et son ami se retira à Montpellier, où il mourut le 25 novembre 1723, à l'âge de quatre-vingt-trois ans.

On a encore de Brueys l'Histoire du fanatisme de notre temps, Paris, 1737, 3 vol. in-12. Son Théâtre a été imprimé en 1735, 3 vol. in-8°.

JUGEMENTS.

I.

Dix volumes de controverse que Brueys a faits auraient laissé son nom dans l'oubli; mais la petite comédie du Grondeur, supérieure à toutes les farces de Molière, et celle de l'Avocat Patelin, ancien monument de la naïveté gauloise qu'il rajeunit, le feront connaître tant qu'il y aura en France un théâtre. Palaprat l'aida dans ces deux jolies pièces. Ce sont les seuls ouvrages de génie que deux auteurs aient composés ensemble *.

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VOLTAIRE, Siècle de Louis XIV.

* On croit devoir relever ici un fait très singulier qui se trouve dans un Recueil d'Anecdotes littéraires, 1750, chez Durand, t. II, p. 369. Voici

les paroles de l'auteur: «Les Amours de Louis XIV ayant été jouées en An

gleterre, Louis XIV voulut faire jouer aussi celles du roi Guillaume.

a Par l'abbé Raynal.

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