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l'empire libéral du 21 mai 1870, parce que ces deux actes ont eu pour conséquence de modifier complètement les constitutions antérieures de l'empire, en y introduisant le régime parlementaire ; ils forment, à proprement parler, des constitutions en ce sens qu'ils établissent des lois fonmentales distinctes de celles qui existaient auparavant.

Disons tout d'abord, avant d'entrer dans les détails, que toutes ces constitutions, à part les Chartes de 1814 et de 1830, ont formellement reconnu l'existence de la fonction constituante, et admis la clause de revision constitutionnelle. De plus, elles ont réglementé et organisé le pouvoir constituant en tenant compte des principes auxquels elles-mêmes devaient leur existence. Nous nous occuperons exclusivement du pouvoir constituant, nous bornant à quelques rares digressions historiques pour rendre plus compréhensibles les explications se rapportant à notre étude.

Nous diviserons cette deuxième partie en deux chapitres: dans le premier nous étudierons le pouvoir constituant dans les constitutions antérieures à 1875; le deuxième chapitre sera consacré à l'art. 8 de la loi du 28 février 1875 et aux revisions partielles de 1879 et de 1884.

CHAPITRE PREMIER

CONSTITUTIONS ANTÉRIEURES AU 15 FÉVRIER 1875

SECTION PREMIÈRE

CONSTITUTION DU 14 SEPTEMBRE 1791

La première en date de nos constitutions est celle du 14 septembre 1791. OEuvre de l'Assemblée nationale constituante, elle reconnaît d'une façon formelle la théorie du pouvoir constituant. Le titre VII est entièrement consacré à l'exercice de ce pouvoir et à la revision constitutionnelle. Durant les travaux préparatoires et les débats auxquels donna lieu le titre VII, la question relative au pouvoir constituant et à la revision constitutionnelle fut vivement discutée. Bon nombre de représentants, croyant de bonne foi à la perfection de l'œuvre qu'ils allaient accomplir, voulaient décréter la perpétuité de la constitution nouvelle. D'autres voulaient seulement rendre toute revision, même partielle, impossible avant un certain temps fixé par l'Assemblée. En fait, c'est ce qui eut lieu.

Un député de la noblesse de Provence, Dandré, demandait que toute revision fût prohibée avant trente années à partir de la promulgation de la présente constitution. Le Chapelier, député du tiers état de Rennes, voulait que toute revision fût défendue avant l'année 1800. La commission de huit membres chargée d'élaborer le projet de

constitution avait émis le vou, sur la proposition de Tronchet, que toute revision devait être retardée pendant trente années. Thouret, député de Rouen, fit supprimer ce vou. Un moyen terme fut imaginé pour concilier les différentes parties de l'Assemblée. Celle-ci accepta en principe l'idée de la revision, mais en la réglementant de façon à la rendre impossible au moins pendant un certain nombre d'années. Il fut décidé que, durant les deux législatures qui devaient succéder à l'Assemblée constituante, toute demande de revision serait formellement interdite (art. 2, titre VII). A côté de cette première entrave, on en imagina une autre. Pour que le projet de revision fût présenté à l'Assemblée chargée de le discuter, il fallait que ce projet lui fût soumis par le vœu uniforme des trois législatures précédentes, et encore le législateur de 1791 détermina le temps pendant lequel les assemblées futures pourraient s'occuper de la revision. « Des trois législatures qui pourront par la suite proposer quelques changements à la constitution, dit l'art. 4, les deux premières ne s'occuperont de cet objet que dans les deux derniers mois de leur dernière session, et la troisième à la fin de sa première session annuelle ou au commencement de la seconde » (art. 4). La durée de chaque législature étant de deux ans, il fallait au moins un délai de dix ans pour que la constitution pût être revisée. En temps ordinaire, si la constitution eût vécu, un délai minimum de quatre ans à partir du premier vœu de revision eût été nécessaire avant que l'assemblée de revision eût pu se prononcer d'une façon définitive. Ces divers délais ne furent pas acceptés sans une vive discussion. Un grand inconvénient de ces formalités, qui font durer la revision pendant plusieurs annés, disaient les ad

versaires du projet, est de jeter un grand discrédit sur l'ins titution, ou sur le principe discuté. « Supposez, disait le comte de Clermont-Tonnerre, que l'Assemblée émette le vœu que le gouvernement cesse d'être monarchique, quelle sera la situation du roi pendant les quatre années qui devront s'écouler entre ce vou, lequel devra être renouvelé deux fois par les législatures suivantes, et la convocation de l'Assemblée de revision (1) ? » Néanmoins, l'Assemblée finit par accepter le principe de ces interminables formalités, et, malgré les entraves qu'elle apportait à l'exercice de la revision, elle consacrait formellement le droit pour un peuple de réformer sa constitution.

Une autre difficulté se présentait: fallait-il laisser à l'assemblée législative ordinaire le soin de se prononcer sur la revision; ou au contraire fallait-il établir une chambre distincte chargée de cette mission? La question fut à diverses reprises portée à la tribune.

Au mois d'août 1791, Le Chapelier proposait la création d'une chambre spéciale investie de l'exercice du pouvoir constituant. Siéyès défendit cette proposition. Lafayette, imbu des idées américaines sur la séparation absolue des pouvoirs y adhéra chaleureusement, mais tous leurs efforts échouèrent contre le parti pris de l'Assemblée, qui ne pouvait se faire à l'idée qu'un jour, peut-être prochain, une autre assemblée constituante pourrait vouloir détruire une œuvre si laborieusement préparée. Les adversaires de la chambre unique constituante avaient agité le spectre de la révolution permanente, et cela avait suffi pour faire rejeter toute idée d'assemblée constitutante distincte de l'Assemblée législative. « Instituer une assemblée de ce (1) Clermont-Tonnerre, Lois constitutionnelles, page 290.

genre, disait Malouet, député de Riom, ce serait organiser des révolutions périodiques, des commotions incessantes, puisque, entre deux constituantes, le pays n'aurait aucun moyen d'échapper aux vices et aux discordes d'une loi constitutionnelle. » Le principe de la séparation entre le pouvoir constituant et les pouvoirs constitués fut écarté.

Comme solution, l'Assemblée s'arrêta à un moyen terme qui devait, dans la pensée de ses auteurs, mettre tout le monde d'accord. On eut recours à un système mixte. Le soin de reviser la constitution fut confié à une assemblée unique, composée de deux éléments bien distincts. Le premier élément, la Chambre législative composée, d'après la constitution, de 745 membres; à côté de la Chambre législative, et se confondant avec elle, viennent se grouper 249 délégués, nommés en vue de la revision, et élus en la forme ordinaire à raison de trois par département, après que la nomination des représentants au Corps législatif aura été terminée (art. 5). Pour la nomination de ces délégués, le système électoral est à deux degrés, comme pour les élections ordinaires. Tout citoyen âgé de 25 ans, payant une contribution directe égale à trois journées de travail, inscrit sur les registres de la garde nationale, fait partie des assemblées primaires qui nomment les électeurs; ceux-ci doivent avoir un revenu qui varie, suivant la population de la commune, de 150 à 200 francs; ces électeurs forment ce qu'on appelle les assemblées électorales, qui choisissent les représentants parmi tous les citoyens indistinctement. Cependant, aux termes de l'article 6, les membres de la troisième législature qui aura demandé le changement ne pourront être élus à l'assemblée de revision. C'est là un nouvel obstacle à toute de

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