Immagini della pagina
PDF
ePub

memes, tous ces musulmans, Turcs, Egyptiens, Arabes, n'auraient rien fait de ce qu'on essayait sur eux, et pour quiconque n'était pas enclin ou obligé à se payer d'apparences, tout ce qu'on essayait était superficiel et vain (1).

Il en est toujours ainsi. Les réformes prescrites par le Hattehuma youn qui suivit la guerre de Crimée et le traité de Paris n'ont pas eu plus d'influence que les réformes de 1839 et toutes les autres (2). Les puissances européennes n'étaient pas sans s'en apercevoir; mais il semble qu'après tout elles voulaient se contenter d'apparence (3). M. Guizot essaya de justifier cette politique. Cependant l'amour de l'équilibre européen et la crainte des ambitions européennes » ne lui ont point complètement caché la vérité. Il l'a entrevue et il a eu le courage de la dire, dussent les gens de la vieille école, les équilibristes en pâlir. Qu'on lise encore cette page; la sentence s'y trouve; quoi qu'il arrive, elle ne sera pas réformée.

«Tant que cet empire ne se détruit pas de lui-même et par ses propres vices, l'Europe a raison de pratiquer envers lui cette politique de conservation patiente; les principes du droit des gens et les intérêts de l'équilibre européen le lui conseillent également, il y a là des problèmes que la force ambitieuse et prématurée ne saurait résoudre, et une Pologne musulmane serait, pour le monde chrétien, la source de désordres immenses en même temps qu'une brutale agression. Mais si l'Europe ne doit pas, de propos délibéré et pour se délivrer d'un voisin moribond, mettre ou laisser mettre en pièces la Turquie, elle ne doit pas non plus être dupe de fausses apparences et de fausses espérances; ELLE NE RÉFORMERA PAS L'EMPIRE OTTOMAN, elle N'EN FERA PAS UN ÉLÉMENT RÉGULIER ET VIVANT DE L'ORDRE EUROPÉEN; elle ne délivrera pas de leur lamentable condition six millions de chrétiens opprimés par trois millions de

(1) Mém. t. VII. p. 247-248.

(2) Cf. notamment à ce sujet de la vanité des réformes un curieux ouvrage publié en 1868, la Turquie sous Abdul-Aziz par Osman-Seffy Bey (Frédéric Millingen.)

(3) C'est à la suite de la guerre de Crimée, en 1860, qu'eurent lieu les massacres de Syrie. La responsabilité en incombe aux autorités turques. Cela n'a pas empêché néanmoins l'Europe de consentir à ce que le Liban fût privé de son indépendance de simple tributaire pour être réduit à l'état de province ottomane. Nous en avons rapporté les preuves dans un article: Joseph Karam et la question d'Orient en Syrie: Revue moderne 1868. Cette connivence des autorités turques dans les massacres est une habitude. M. Guizot la constate dans les affaires de 1860. cf. Mémoires t. VI. ch XXXVII.

[ocr errors]

Turcs (1) qui, non seulement leur font subir un joug odieux, mais qui leur ferment l'avenir auquel ils aspirent et pour lequel ils sont faits. Et quand telle ou telle portion de ces chrétiens tente courageusement de s'affranchir et de redevenir un peuple, c'est, pour l'Europe civilisée, la seule politique sensée et efficace de leur venir sérieusement en aide, et d'accomplir par des mouvements naturels et partiels, la délivrance de ces belles contrées, l'une des deux sources de la civilisation européenne (2). »

La question, celle qui tient aujourd'hui le monde politique en éveil, est nettement posée par ces dernières paroles. C'est le minimum du devoir. « L'Europe est entrée dans cette politique quand elle accepta la résurrection de la Grèce. » Il faudrait, néanmoins, rechercher jusqu'à quel point cette politique fut fidèlement suivie, si, à cause des diverses ambitions européennes, » elle n'a pas été faussée par des compromis. Mais il importe de constater d'abord pourquoi cette puissance, que M. Guizot appelait le « voisin moribond, voisin moribond, et lord Palmerston, d'un nom plus adouci, « le malade, ne sera jamais un élément régulier et vivant de l'ordre européen, pourquoi l'Europene réformera pas l'empire Ottoman, » — pourquoi nous ne devons pas être << dupe de fausses apparences et de fausses espérances.

(A suivre.)

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

"

FRÉDÉRIC FORT.

(1) Actuellement, ce ne sont pas 6 millions de chrétiens opprimés par 3 millions de Turcs, mais 8 millions. (Voir plus loin.)

(1) Mémoires: t. Vll, 245-546.

LA SCIENCE MODERNE

SOMMAIRE. Ignorance des savants relativement au monde moral. tentions de la science moderne. - Légèreté de cette science. monde sous la domination de la science.

IV

[blocks in formation]

La terre, sa formation, les mondes célestes, les lois de l'unice sont de trop grands objets; on comprend que les savants les ignorent. Mais sont-ils plus instruits dans les sciences spéciales, qui se bornent à l'étude d'un petit nombre de faits? Pas davantage. En médecine, que de parties leur échappent! Connaissent-ils même le corps humain?« A peine, dit un praticien, si nous savons l'appétence de la rate, du foie, de la vessie; la science ne sait rien de la rate. » Savent-ils seulement ce qu'est le sang? Le sang, élément principal de notre organisation, n'est encore qu'imparfaitement connu. » (D' F. Bricheteau). Il semble, pourtant, que rien n'est plus important à connaître. — Vous injectez une poison dans nos veines; il suffit même de l'insérer sous l'épiderme pour que la plus petite dose vous tue. » Mais ce même poison, vous pouvez l'avaler, « l'introduire dans votre estomac sans danger. » C'est qu'il n'est pas absorbé, disent les physiologistes, « à cause d'une disposition spéciale de la muqueuse des voies digestives. » Et quelle est cette disposition spéciale? « On ne l'explique pas. » (D' Magnan).

"

Il y a quatre à cinq remèdes spécifiques, qui guérissent, disait Maupertuis: n'y a-t-il donc que quatre à cinq maladies? Tout le monde peut répondre, et c'est précisément les plus effroyables maladies que la médecine ne guérit pas. Quelle est sa force contre le Cancer, dont on a dit : « Nous ne savons comment on le guérit, ni quelle en est la cause, ni ce que c'est. » A-t-elle un remède contre la rage qui, seulement en France, dévore par

an près de deux cent victimes, la rage, horrible mal où un pauvre être humain, plein de vie, se sent entraîné par la main invisible de la mort, comme ces machines qui saisissent un imprudent, l'enlèvent et le broient entre les dents de leurs engrenages? Contre la morve, qui ne tue pas que des chevaux, qui pénètre sournoisement dans les veines d'un homme, y sommeille des années entières, le laissant dans une parfaite sécurité, puis, ainsi que l'araignée, quand elle a étendu sa toile dans tout l'organisme, tout à coup elle se montre, immédiatement mortelle, attaquant les membres, l'intérieur, avec une violence qui déconcerte le médecin; tout de suite il s'avoue vaincu, c'est la morve!« Une guérison, a écrit un médecin, est considérée dans la science comme un événement. » Et l'infection par les cadavres? Les médecins savent-ils comment on guérit les piqûres faites en disséquant, ou ouvrant un corps? Un de leurs malheureux confrères meurt de cet accident fatal et prévu: ils demeurent devant lui, inertes et impuissants (1). Et que d'autres maladies inconnues et incurables! Plus un médecin est instruit, plus il devrait s'abîmer dans l'humilité, et se prosterner devant Dieu qui a gardé tant de secrets Les idées d'admiration, disait Réaumur, dont sont nécessairement remplis ceux qui étudient les merveilles que Dieu a prodiguées dans ses ouvrages, ne sauraient permettre que celui qui se livre à ces études ait une volonté formelle d'offenser l'Etre Souverain. Tels étaient les sentiments qu'inspiraient jadis aux plus grands observateurs la vraie intelligence de la nature et de l'homme. Mais aujourd'hui les docteurs de ce siècle de fer, d'anarchie et d'ignorance, se haussent sur le petit monticule de leurs creusets et de leurs cornues, pour montrer le poing à Dieu !

Les savants ne savent pas conserver le feu de la vie, ils ne savent pas davantage l'allumer : « La chimie ne le pourra jamais; la théorie des générations spontanées est à jamais ruinée, (Alf. Maury) et personne n'a encore répondu à la question de Buffon: Comment un être produit- il son semblable? Mais

(1) C'est ce qu'on a vu en 1865 où le docteur Bauchet, médecin des Hôpitaux de Paris, mourut d'une de ces piqûres.

[ocr errors]

"

"

savent-ils, du moins, ce qu'est la vie? La vie! apprenez, d'abord, qu'on est encore dans l'incertitude sur le sens qu'il faut attacher à ce mot; les hommes les plus éminents ont émis les opinions les plus diversement et souvent les plus diametralement opposés. » (Lacaze-Duthières). On a inventé successivement cinq systèmes, et chacun de ces systèmes a produit plusieurs définitions. Il y a les définitions vagues, où le docteur se garde de se compromettre : « La vie est la manière d'être des corps organisés qui les distingue des corps bruts. (Nysten). Cela ne dit rien ; ou la vie est une force qui pousse la matière à des formes et à des combinaisons nouvelles différentes de ses propriétés ordinaires. « (Bouchut). Qu'est-ce que cette force, ces combinaisons, ces propriétés? On ne vous l'explique pas; ou << la vie est un ensemble de phénomènes qui se succèdent pendant un temps limité dans les corps organisés. » (Richerand). Mais le sommeil aussi est un ensemble de phénomènes qui se succédent, etc.! Il y a les définitions naïves: « La vie est le ressort qui meut les éléments du corps et les transporte sans cesse. (Cuvier.) Un ressort de quelle espèce? Les machines. ont des ressorts, et elles ne vivent pas. Il y a les définitions gasconnes, qui promettent de vous mener à bonne fin et vous laissent à moitié route : « La vie est un ordre ou état de choses qui permettent dans un corps les mouvements organiques et les mouvements résultant de l'action d'une cause stimulante qui les excite. (Lamarck). Oui, mais cette cause? Ici, apparaît la définition qu'on peut appeler à raquettes. On se met deux, vis-à-vis, comme au volant: Qu'est-ce que la vie? « La vie est l'effet de la force vitale » dit l'un (Chaussier). Et qu'est-ce que la force vitale?« La force vitale est la cause qui produit les phénomènes de la vie, » répond l'autre. (Barthez). On peut longtemps regarder voler en l'air ces deux définitions d'une raquette à l'autre la vie est l'effet de la force; la force est la cause de la vie!

"

:

"

"

Il y a les prétendues définitions, que le professeur donne à ses jeunes élèves qu'elles intriguent: « La vie est une force dont une fonction spéciale dans les êtres organisés garde le dépôt.» (Alf. Maury). Cherchez, jeunes gens! Celles-ci sont, pourtant, commodes en comparaison des définitions trans

[ocr errors]
« IndietroContinua »